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La Société archéologique dont je fais partie, publie dans le recueil de ses travaux la biographie de tous ses membres effectifs après leur décès. Dans une de ses dernières séances, M. Schotter, son secrétaire, a signalé la difficulté que présente la réunion des renseignements nécessaires pour que cette publication puisse avoir lieu, et il a exprimé le désir que chacun de ses collègues lui fournit ceux qui le concernent Je me propose de répondre par les pages qui suivent au désir de

M. Schotter.

J'ai l'intention d'être bref. Je ne sais pas cependant si je le serai autant que je le voudrais. J'ai été mêlé aux évènements qui, pendant plus de quarante ans, ont exercé de l'influence sur le sort du GrandDuché; j'ai été, pendant onze ans, membre de son Gouvernement, et pendant sept ans président de celui-ci au milieu de circonstances critiques pour le pays; j'ai participé ainsi à des actes qui ont engagé ma responsabilité de la manière la plus sérieuse. On conçoit que je veuille quelquefois entrer dans des détails et des explications. Je serai amené

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aussi à parler de faits qui ne me concernent pas, à cause de leur connexité avec ceux que je rapporte. Je ne garantis même pas que je ne me laisse entraîner à rappeler des souvenirs qui ne présentent pas pour autrui le même intérêt que pour moi, comme cela arrive facilement à ceux qui parlent d'eux-mêmes. Le mal ne sera pas grand cependant ; l'aimable membre de la Société archéologique qui se chargera de m'honorer d'un article nécrologique, réduira, comme il lui plaira, le contenu de cet écrit, qui est destiné à lui faciliter sa tâche. Je désire cependant qu'il reste déposé dans les archives de la Société archéologique et soit toujours à la disposition de mes fils et de leurs descendants qui peuvent le publier, s'ils le trouvent convenable.

AOBK

Je suis né à Mersch le 11 avril 1811. Je n'ai pas reçu de mes parents l'éducation molle que l'on donne généralement aujourd'hui aux enfants. Je m'en félicite. C'est à cette cause que je dois, j'en suis persuadé, de n'avoir jamais éprouvé de grands besoins et d'avoir été à l'abri des tentations auxquelles succombent tant d'hommes de nos jours. J'ai fait mes humanités à l'Athénée de Luxembourg que j'ai quitté en 1829, après y avoir terminé le cours supérieur. Cet établissement passait alors pour un des meilleurs du royaume des Pays-Bas. J'ai pu m'assurer, pendant le temps où j'ai fait partie de la commission des curateurs, qu'il laissait moins à désirer et que les élèves qui le fréquentaient étaient plus instruits que lorsque j'en ai suivi les cours. Si beaucoup de jeunes gens qui en sont sortis avant 1830 ou à la suite de la Révolution belge, se sont distingués dans les carrières qu'ils ont parcourues en Belgique, Si quelques-uns ont fait le plus grand honneur au nom Luxembourgeois, leur succès s'explique par le travail opiniâtre auquel ils se sont livrés, après avoir achevé leurs études gymnasiales. Que la jeunesse d'aujourd'hui imite l'exemple qu'ils lui ont donné: elle parviendra aussi à procurer à ses concitoyens les satisfactions patriotiques que la génération à laquelle j'appartiens a quelquefois éprouvées à donner du relief à notre petit pays, à lui gagner des sympathies qui peuvent contribuer à le faire respecter.

J'ai étudié le droit de 1829 à 1830 à l'université de Gand dont peu de Luxembourgeois suivaient les cours. J'ai continué et terminé ces études

à Paris, parce que l'enseignement était désorganisé aux universités belges depuis la Révolution de 1830. Je suis arrivé dans la capitale de la France en décembre 1830, au moment où le procès des ministres de Charles X venait d'être terminé à la Cour des Pairs. Leur condamnation à la peine du bannissement, parce qu'elle n'aurait pas été assez sévère, fournit aux partisans de l'état révolutionnaire en permanence un moyen d'exciter les masses populaires. Je fus très curieux d'assister au spectacle des troubles qui éclatèrent et je ne manquai pas de satisfaire ma curiosité. Les émeutes furent nombreuses pendant mon séjour à Paris. Je n'ai pas négligé de chercher à voir comment elles s'opéraient. J'ai été présent au désarmement de plus d'un poste militaire, à la construction de barricades, au pillage, en février 1831, de l'archevêché, qui fut exécuté avec une prestesse qu'on était tenté d'admirer.

Par suite des circonstances du temps, je fus gradué à trois universités différentes. Je fus reçu candidat en droit à celle de Gand, bachelier à celle de Paris et docteur à celle de Liège.

Pendant mes études, j'ai toujours mené une vie sobre; j'ai résisté à tous les entraînements, notamment à Paris, où d'autres de mes condisciples luxembourgeois s'abandonnaient un peu trop à leur goût pour la dissipation. Ils sont presque tous morts dans un âge peu avancé, même ceux dont la constitution paraissait très robuste. Je me suis toujours livré à un travail très régulier, jamais excessif, même dans le moment où je me préparais à passer un examen. Le temps ne m'a jamais manqué pour lire des ouvrages qui ne concernaient pas le droit. Je me mis en tête un jour d'étudier la philosophie; mais je reconnus bien vite que j'étais incapable de rien comprendre à cette science, et j'ai été assez raisonnable pour renoncer à son étude. La lumière ne s'est pas encore faite aujourd'hui. La philosophie reste pour mon esprit pleine d'obscurités. J'ai une grande admiration pour ceux qui comprennent ses doctrines multiples.

Très jeune, je me suis vivement intéressé aux évènements politiques. J'ai commencé à lire les journaux à l'âge de dix ans, au moment où ils s'occupaient beaucoup de Napoléon Ier, qui était mourant à Ste-Hélène. J'ai ensuite continué à les lire avec avidité; c'était le temps où la Grèce, par sa lutte énergique contre la Turquie, excitait un enthousiasme général parmi la jeunesse moins réaliste que celle d'aujourd'hui. Je n'ai

pas eu d'opinions politiques trop avancées. J'ai fait partie, cependant, à Paris, de la société des Droits de l'homme, section Brutus. Je n'y suis entré que par curiosité et je m'en suis retiré, dès que j'ai vu où l'on voulait en venir.

Je n'ai pas été indifférent à ce qui se passait dans notre pays. Je me rappelle fort bien la triste situation dans laquelle il s'est trouvé. Depuis sa séparation de la France, il était sans commerce et sans industrie; ses produits trouvaient difficilement des débouchés, soit dans les pays voisins où des droits élevés, sinon prohibitifs les grevaient, soit dans les autres parties du royaume dont il était séparé par de grandes distances, et avec lesquelles il n'était relié que par des voies de communication en mauvais état. Les impôts étaient en outre onéreux, eu égard aux ressources des contribuables, et ils étaient perçus avec une rigueur qui les aggravait. La fraude était devenue le métier le plus lucratif et était organisée dans toutes les communes. La situation de la population était affligeante. Les habitants de villages entiers étaient réduits à la mendicité; des bandes de misérables en haillons et pieds-nus parcouraient incessamment toutes les parties du territoire, demandant l'aumône d'un morceau de pain. Des huttes à moitié ruinées servaient fréquemment d'habitation. Il faut dire cependant que ce n'est pas la réunion aux Pays-Bas qui seule a produit le mal. Je me rappelle parfaitement que la situation des contrées voisines de l'Allemagne était peut-être plus triste que celle du Grand-Duché. L'agriculture notamment y souffrait plus que chez nous; ses produits faisaient concurrence aux nôtres sur nos marchés, malgré les droits de douane qu'ils avaient à supporter.

On ne manquait pas de s'intéresser dans les hautes régions au sort des Luxembourgeois, sur lequel la députation permanente des États provinciaux ne manquait pas d'attirer l'attention avec beaucoup de franchise dans ses exposés sur la situation administrative. On en voit la preuve dans l'initiative que prit, pour la construction du canal de Meuse et Moselle, le roi Guillaume Ier, dans le concours financier qu'il apporta à la réalisation de cette entreprise, une des plus considérables dont il a été question dans ces temps, et une des plus propres à relever une grande partie de notre pays dans sa détresse. Ce fut avec une satisfaction inexprimable que nous vîmes commencer et pousser avec vigueur

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