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Mme de Beauvilliers, à la prière de Catherine d'Orléans et de Marguerite d'Estouteville, forma une colonie de huit de ses religieuses qui, sous la conduite de Marguerite d'Arbouze, allèrent fonder le prieuré de Notre-Dame des Grâces de la Villel'Evêque, le 12 avril 1613. Ces deux maisons furent d'abord unies, quoique la vie fut plus sévère dans le prieuré. La séparation fut prononcée amiablement, le 10 mai 1647, par un concordat souscrit par l'abbesse et la prieure, Louise Le Tellier; le prieuré versa à cette occasion 36,000 livres entre les mains. de la trésorière de Montmartre et devint complètement indépendant.

IV

Ce fut encore une abbesse de Saint-Pierre de Reims qui succéda à Mme de Beauvilliers. FrançoiseRenée de Lorraine, fille du duc de Guise, avait été remarquée par l'abbesse qui savait avec quel ordre. parfait était dirigé le monastère rémois. Elle demanda. à Mme de Lorraine de venir auprès d'elle comme coadjutrice et elle fut assez heureuse pour vœu exaucé (1644) elle n'eût qu'à se louer du choix qu'elle avait fait. Le 24 mai, Mme de Guise prit possession de la dignité abbatiale et cette même année elle reçut Louis XIV qui vint accomplir à Saint

voir son

Denis le vœu fait par sa mère quand il fut si subitement et si gravement malade pendant le siège de Dunkerque; à cette occasion il fit les frais de la restauration de l'église souterraine'.

Mmo de Guise dirigea l'abbaye pendant vingt-cinq ans. Douée d'une haute intelligence, elle était en relation avec les beaux esprits et les femmes élégantes du temps le docteur Valant, le médecin de Mme de Sablé et de toute la société précieuse en même temps que de l'abbaye, nous a conservé plusieurs billets d'elle fort galamment tournés. Elle revint visiter son ancienne abbaye de Reims au mois d'octobre 1680 avec une suite nombreuse. Elle mourut à Montmartre le 4 décembre 1682, âgée de soixante-deux ans et fut enterrée dans la cour du prieuré. Son administration avait été très-favorable au monastère; ce fut elle qui décida la réunion de toutes les religieuses dans le prieuré au lieu de les laisser, partie dans la maison conventuelle, résidence de l'abbesse, en haut de la colline, et partie au prieuré, à mi-côte, organisation qui facilitait les abus et rendait la surveillance très-difficile. Le roi seconda vivement Mme de Guise qui obtint une ordonnance archi-épiscopale en ce sens

1. Mme de Guise donna à l'abbaye un splendide soleil en or enrichi de diamants et des vases sacrés d'un grand prix. Le duc son frère lui offrit une crosse en vermeil pesant 35 marcs et du plus riche travail, et un anneau précieux. L'abbesse consacra toute sa fortune aux besoins de l'abbaye, soutint les procès à ses frais, recouvrit ainsi un grand nombre de biens, entr'autre le fief du Bel-Air, sis à mi-côte, vers le passage actuel des Beaux-Arts, prés du boulevard extérieur, tous ceux du Gâtinois et ceux du Bourg-la-Reine. On assure qu'elle dépensa en outre près de 200,000 livres qu'elle obtint de sa famille.

me

le 12 août 1681. Le changement matériel ne fut effectué qu'après sa mort, sous l'abbatiat de sa cousine, Marie-Anne de Lorraine, fille du comte d'Harcourt, qu'elle avait élevée et qui se trouva investie de la crosse à l'âge de vingt-cinq ans. Les anciens bâtiments furent abattus, notamment le cloitre et l'hôtel abbatial; le reste fut mis en location, converti en granges pour le service du monastère qui y installa aussi ses domestiques et une infirmerie pour le cas d'une épidémie. La chapelle fut réunie à l'église paroissiale en y conservant une grille de clôture. Mm de Lorraine mourut le 29 octobre 1699'; elle laissait l'abbaye dans un état relativement prospère avec soixante religieuses et douze converses; les revenus de la maison s'élevaient alors à 28,000 livres auxquelles il convient d'ajouter une pension royale de 6,000 livres. Marie-Eléonore Gigault de Bellefonds, fille du maréchal de Bellefonds, lui succéda et suivit dignement ses exemples, habituée d'ailleurs au gouvernement d'un abbaye, car depuis seize ans, elle était abbesse de Bellefond, près de Rouen. Elle voulut compléter l'oeuvre de sa devancière et libérer Montmartre des dettes qui grevaient la maison depuis les dépenses considérables causées par la réunion de toutes les religieuses dans une même maison en 1621 et l'agrandissement des bâtiments. Elle dut vendre les biens de l'abbaye à Bourg-la-Reine et la seigneurie

1. Voir la lettre circulaire adressée par la prieure à tous les couvents de l'ordre à ce sujet, le 23 décembre 1699 (Bib. Nat.).

de Clignancourt; elle obtint 25,000 livres de secours du gouvernement et consacra à son entreprise toutes ses ressources personnelles, ce qui ne l'empêcha point de faire exécuter des travaux importants.

Marguerite de Rochechouart-Montpipeau qui lui succéda ne se montra pas moins prévoyante. Prieure de Fontevrault, elle était douée d'une érudition exceptionnelle et d'une rare entente des affaires. Elle sut obtenir encore des dons considérables et se montra très-habile à poursuivre les nombreux procès intentés à Montmartre par plusieurs curés et établissements religieux de Paris. C'est elle qui ordonna le classement et l'inventaire des archives de la maison, précisément pour faciliter les recherches des avocats, faisant copier les pièces altérées, ou existant dans d'autres dépôts. En même temps elle s'occupa de la décoration des bâtiments, de l'assainissement des logements, planta des allées et créa un vaste potager. L'affaire de Law lui fut d'abord avantageuse. La duchesse d'Orléans lui procura dix actions qu'elle vendit à temps et qui lui rapportèrent 39,000 livres, avec lesquelles elle annulla toutes les dettes antérieures à son arrivée; mais bientôt le remboursement des rentes et les réductions jetèrent Montmartre dans des embarras pénibles (1727). Mme de Rochechouart eût cependant la consolation avant de mourir d'obtenir du roi une nouvelle pension de douze mille livres sur les loteries. Elle fut emportée presque subitement le 22 octobre 1727. Les abbesses qui lui succédèrent n'eurent qu'à suivre la voię tracée par elle et toutes

se montrèrent également sages et prévoyantes : toutes trois d'ailleurs avaient fait leurs preuves avant d'arriver à Montmartre. Mmo de la Tour d'Auvergne avait été pendant vingt ans abbesse de Villers-Cotterets; Mmo de la Rochefoucauld-Cousage avait dirigé l'abbaye de Saint-Jean, près d'Aurillac; Mme la duchesse de Montmorency-Laval, depuis bien des années avait pris le voile à Montmartre et avait pu s'inspirer de ces pieux exemples. Elle tenait la crosse quand la Révolution éclata et le 14 août 1791, elle dut, avec ses religieuses, quitter le monastère. Mme de Montmorency se retira à Saint-Denis, d'où elle dût bientôt s'éloigner pour se réfugier à Bondy, chez la marquise de Crussol. C'est là que les agents de la commune vinrent la saisir pour l'emmener, malgré son grand âge et ses infirmités, dans les prisons de Saint-Lazare, puis du Luxembourg, d'où elle ne sortit que pour monter, le 5 thermidor an II (20 juillet 1794), sur l'échafaud révolutionnaire.

A la veille de la Révolution, l'abbaye était redevenue réellement prospère : les bâtiments étaient vastes, bien entretenus, les jardins dans le meilleur état, les revenus étaient régulièrement perçus, les dettes avaient été éteintes '.

1. Le journal des recettes de 1770 au 20 février 1789, conservé aux Archives nationales, constate que le pensionnat de l'abbaye jouissait alors d'une faveur exceptionnelle; pendant cette période on y trouve les noms de la fille du duc de Penthièvre qui donna, en 1770, 8,000 livres pour les boiseries et les tableaux du choeur; de Miles de Beaumont, de Bouillé, de Breteuil, de Choiseul, de Cossé, de Maupcou, de Montferrand, de Montault, de Saint-Simon, de la Grange, d'Osmond, de Rochechouart, de Saulx-Tavanes, de Montmorency.

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