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» d'un miférable acheté à prix d'argent. » Non, non, je mourrai libre, & j'em» porterai ma gloire aux Enfers. Allons, • Ulyffe, conduifez-moi, immolez-moi, » je ne vois plus d'autre bonheur ici bas » pour Polyxène! Et vous Madame,

n'employez ni paroles, ni efforts pour » rompre ce deffein. Laiffez-moi mou»rir plutôt que de m'expofer à des outrages indignes de mon rang. Un cœur » qui n'eft pas fait aux calamités peut bien les fupporter; mais il lui en coute trop pour s'y faire, & la mort lui eft "plus avantageufe qu'une vie qu'il traîneroit dans le déshonneur,,.

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Le Chœur admire la nobleffe des fentimens que fait éclater Polyxène. Hélas, répond Hécube, que de dou » leur va fuivre de fi nobles fentimens,,! Puis fe tournant vers Ulyffe. » Prince, » fi vous voulez faire un don agréable » au fils de Pélée, fans vous couvrir d'opprobre, c'eft moi & non ma fille » qu'il faut immoler. Menez Hécube à » fon tombeau Percez mon fein de » mille coups. C'eft moi qui ai donné » le jour à Pâris, à celui qui a fait mourir » Achille,,.

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ULYSSE. C'eft Polyxène & non pas Yous que demandent fes Mânes.

HECUBE. Hé bien, joignez-moi à ma fille. Ce feront deux victimes pour

une.

ULY'S SE. Ceft déja trop de Polyxène, fans y joindre Hécube. Que ne pouvons-nous épargner l'une & l'autre ! HECUBE. Non, vous dis-je, il le faut. Vous ferez forcé de nous réunir.

ULYSSE. Hé, qui m'y forcera ? Je ne connois point de maître en ces lieux.

HECUBE. Ce fera moi. Plus attachée à Polyxène que le lierre à l'arbre; je ne la quitte point.

ULYSSE. Madame, prenez des confeils plus falutaires.

HECUBE. Je n'écoute plus rien. Je ne livrerai point ma fille,

ULYSSE. Et moi, je ne puis la laisser dans vos bras.

POLYXENE. Ecoutez-moi l'une & l'autre. Ulyffe n'aigriffez point une mere défefpérée. Vous, ô ma mere, cedez à des Vainqueurs. Epargnez-vous l'affront de me voir traîner avec violence. (Le Grec dit plus) Permettez que votre fille vous embraffe pour la derniere fois & que pour la derniere fois, elle vous appelle du doux nom de mere; ô ma mere je m'en vais au tombeau.

HECUBE. Et je vivrai pour l'efclavage!

POLYXENE. Je ne verrai point cet hymen fi juftement attendu !

"

HECUBE. O fille malheureuse! ô -plus malheureuse mere!

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2

POLYXENE. Je vais donc être féparée de vous, & réleguée dans les Enfers. HECUBE. Que ferai-je, hélas, pour terminer cette cruelle vie?

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POLYXENE. Fille de Roi je vais mourir efclave!

HECUBE. Et moi après avoir vû périr ma nombreuse postérité *! POLYXENE. Que dirai-je en votre nom à votre fils Hector & à Priam votre Epoux?

HECUBE. Dites-leur que je fuis arrivée au comble des maux.

Polyxène & Hécube continuent ainfi un moment l'expreffion de leur douleur telle que la dicte la nature. La premiere -fait les derniers adieux à fa mere, à -Caffandre fa foeur, & à fon frere Polydore l'un & l'autre abfens. A l'égard de Polydore, Hécube par un preffentiment naturel dit qu'elle ignore s'il vit encore; & Polyxène la raffure. Il ne faut pas être furpris qu'Hécube quoi.

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* Grec, cinquante enfans.

Fr

qu'arrivée depuis trois jours dans la Cherfonnèfe de Thrace ignore le fort de Polydore. Le Roi Polymeftor eft fuppofé abfent & à l'extrémité de fon Royaume, comme nous le verrons dans la fuite. Ainfi Hécube croit avec apparence que fon fils eft avec lui. Enfin, Polyxène dit à Ulyffe. Enlevez-moi », & me voilez la tête (comme aux victi»mes) car je fens que les pleurs d'une » mere m'attendriffent, & que ma vûe » la confume de douleur. O lumiere: » je puis du moins prononcer ce nom, » car je ne jouis plus de la chofe, finon », dans l'intervalle où je me trouve en» tre le glaive & le tombeau d'Achille, », adieu». Hécube fent qu'elle fe pâme. Elle appelle fa fille, lui tend les bras, fait d'inutiles efforts, & tombe évanouie entre les mains des femmes, tandis qu'Ulyffe emméne Polyxène. Si l'on trouve de la cruauté dans ces facrifices, il faut fe placer du moins dans la fitua tion où étoient les Grecs à qui la fuperftition & la politique les rendoient comme néceffaires. Sans cela on ne peut juftifier le perfonnage d'Ulysse.

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Le Choir chante es Strophes ordinaires pour exprimer fes regrets. Elles roulent fur la triste fervitude que les

Dames Troyennes envifagent avec plus d'horreur depuis l'enlevement de Polyxène. Ces Strophes font des plaintes trèséloquentes excitées par un retour que la nature fait faire aux malheureux fur eux-mêmes à la vûë des malheurs d'autrui. Hecube refte toujous livrée à fa douleur & couchée par terre.

A TE III

Talthybius Officier d'Agamemnon vient la trouver de la part de ce Roi. Il demande au Choeur où elle peut-être, & on la lui montre dans l'état où fa profonde douleur l'a reduite, prefque fans mouvement, & enveloppée dans fes voiles. Frappé à la vûë d'un fpectacle fi touchant il s'écrie: » Jupiter, » que penfer des Dieux! s'intéreffent. "ils en effet aux mortels? Eft-on mal fondé à croire que fatisfaits d'être ,, heureux ils abandonnent le reste au » hazard? Quoi, c'eft-'à cette Reine des » riches Phrygiens! cette époufe de l'heureux Priam & fon Royaume » eft renversé ! & je la vois elle-même reduite à l'esclavage, accablée d'en» nuis & d'années, privée d'enfans, & couchée dans la pouffiere»! Sentimens

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