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fon gendre. Mais Polynice auroit honte de devoir le Sceptre à l'amour d'une époufe, & à la tendreffe d'un beau-pere. C'eft à fon épée qu'il veut le devoir: & d'ailleurs, c'eft moins une Couronne enlevée qui le pique, que la foi violée, & la haine implacable d'un frere. 11 embraffe Argie, & la recommande à Adrafte, auffi-bien que le foin de l'enfevelir s'il vient à périr dans le combat. Puis il fe dérobe à leurs vœux; & l'Acte finit.

ACTE II.

En paffant à l'Acte fecond le Specta teur fe trouve fitué au pied des tours de Thébes, où Polynice l'épée à la main après avoir jetté dans la place fon défi, appelle fon frere à grands cris en le traitant de lâche, parce qu'il différe trop à paroître. Vainement un des Capitaines Argiens veut arrêter Polynice. If répond :

Laiffez juger les Dieux; ne foyez que té

moins.

Rotrou, comme il eft aifé de le voir, fait le contraire d'Euripide qui dans le

contrafte des deux freres donne plus d'orgueïl & de haine à Etéocle, & plus de modération & de douceur à Polynice. Ici c'eft Polynice qui eft fier, inflexible, inexorable. Etéocle eft moins odieux. En quoi le Poëte François paroît n'avoir pas réuffi, non plus que Racine fon imitateur. Ils font même pis. Car felon eux Etéocle eft aimé du peuple, & régne en quelque façon malgré lui, au moins a-t'il cette excufe plausible de ne pas rendre la Couronne: au lieu que Polynice eft regardé & craint comme un Tyran. Préjugé, qui n'attire fur lui aucune compaffion. On le plaint en lifant Euripide, & on le haït dans les deux Tragédies Françoises.

Cette différence eft d'autant plus digne de confidération, qu'en effet la fituation où Euripide met ce Prince, le rend plus malheureux que coupable. On lui a ravi le Sceptre, il fait des avances pour le ravoir par la douceur, il n'a recours à la force qu'à la derniere extrémité; on l'outrage, on l'entraîne, pour ainfi dire, au précipice malgré Îui; & cependant il porte toute la peine de fes malheurs comme d'un crime, puifqu'il meurt, & qu'il eft traité en ennemi & en criminel, même après la

mort. C'eft un Héros tel qu'il le faur pour la Tragédie. Mais vous lui ôtez cet avantage. Vous en faites un Tyran, un barbare, un ennemi de fon frere & de fa patrie. Les Spectateurs n'ont plus de larmes pour lui. Il mérite fon fort. D'ailleurs, quel Héros lui fubftituezvous pour prendre le premier rôle ! Etéocle, Prince à la vérité un peu moins haïffable, mais ufurpateur, & par ce feul endroit, plus capable d'irriter & d'aigrir le Spectateur que de le toucher. C'eft Séneque qui le premier nous à défiguré Polynice ; & les François l'ont malheureusement plus fuivi qu'Euripide.

Revenons. Antigone paroît fur les murs de Thébes, & revoyant Polynice pour la premiere fois depuis fon exil, elle lui fait un difcours très touchant pour le diffuader de fon funeste deffein

Polynice, avancez; portez ici la vûë,

Souffrez qu'après un an votre four vous faluë. Malheureufe? hé pourquoi ne le puis-je autre

ment ?

Quel Deftin entre nous met cet éloignement ? Après un fi long-tems la foeur revoit fon frere,

Et ne lui peut donner le falut ordinaire :

Un feul embraffement ne nous eft pas permis;
Noas parlons féparés comme deux ennemi.
Hé, mon frere, à quoi bon cet appareil de guerre?
A quoi ces pavillons fur votre propre terre?
Contre quel ennemi vous êtes vous armé?
Ne trembleriez-vous pas, fi je l'avois nom-
mé? &c.

Encore à la nature Etéocle défere;

Il fe laiffe gagner aux plaintes d'une mere:
Il n'a pas dépouillé tous fentimens humains,
Et le fer eft tout prêt à tomber de fes mains:
Et vous plus inhumain & plus inacceffible,
Confervez contre moi le titre d'invincible,
Moi, dont, &c.

Le refte eft de la même force. Mais Polynice a pris fon parti. Il ne fçauroit être défarmé par une fœur qu'il aime tendrement, à moins qu'elle ne lui plonge elle-même l'épée dans le fein. Il y confentira; mais il ne confentira jamais à vivre & à ne pas fe venger de fon frere.

Etéocle à l'inftant fe montre, & accepte le défi. Confus d'avoir paru trop tard, il brûle de hâter le combat, & il dit:

Que le champ du combat en soit auffi le prix.

Après cette courte & vive Scène, Jocafte furvient & fe met entre fes deux fils. Créon en conçoit de l'ombrage & fait fentir d'un feul mot la cruelle

ambition qui lui fait fouhaiter que les deux freres s'entre-tuent pour lui laisser le Trône. Racine a donné le même caractere à Créon. Chez Rotrou, Jocafte fait le même rôle que dans Séneque. Elle ordonne à fes fils de s'embrasfer. Ils fe regardent mutuellement avec des yeux qui refpirent la rage. Polynice brave Jocafte par la défiance qu'il conçoit d'elle. C'eft un défaut où Séneque a fait tomber Rotrou, qui du reste a embelli Séneque. Voici entr'autres quatre beaux vers.

Car quelle eft cette guerre & quels font fes objets ?

Vos parens, vos amis, vos pays, vos fujets. C'est ce qu'on peut nommer votre parti contraire :

De ce funefte hymen nous fommes le doüai

rc.

C'eft que Polynice avoit époufé la fille d'un ennemi de Thébes. Les deux freres s'emportent, & fe piquent de paroles aigres & menaçantes. Jocafte pour les calmer propofe à Polynice des conquêtes plus dignes de lui que n'eft Thèbes. Elle lui dit en parlant d'Etéocle,

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