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L'un ou l'autre Prince peut demeurer vainqueur, & dans ce cas Créon eft bien foin de compte. Mais c'eft ici un Tyran qui s'aveugle, qui foule aux pieds jufqu'aux remords, & qui fait gloire de paroître fcélérat aux yeux de fon Confident, pourvû qu'il entrevoye quelque jour à monter fur le Trône.

ACTE IV.

Dans l'entretien de Créon avec Etéo cle le premier fe déguise au yeux du fecond, & lui dit artificieusement au fujet de Polynice,

Mais il vous cede enfin la grandeur fouverai

ne

Vous devez ce me femble, appaifer votre haine.

Le Roi qui n'apperçoit pas le but de cette infinuation, parce que perfonne n'a la charité de lui dévoiler le myftere, jure une haine éternelle pour Polynice, & peint avec de grands traits l'invincible antipathie qui les fépare. Ils fe font hais avant que de naître, & peutêtre fe haïront-ils encore dans le tom beau,

C

J'aurois même regret qu'il me quittât l'em

pire . . .

Je veux qu'il me détefte afin de le hair, &c.

Ce morceau eft digne de l'Auteur de Phédre & d'Andromaque. Créon voyant Etéocle à fon point confent de facrifier s'il le faut, l'inclination qu'il dit avoir pour la paix.

On annonce Polynice, & il vient en effet accompagné de Jocafte, d'Antigone, & de toute la Cour Cette Scéne n'eft autre chose que Sénéque ou Rotrou embellis. La Reine pleure, & preffe

en vain.

Tous deux pour s'attendrir ils ont l'ame trop dure.

Ils ne connoiffent plus la voix de la nature.

Elle ajoute quelques reproches en parlant à Polynice.

Et vous que je croïois plus doux & plus fou inis, &c.

Elle a grand tort. Car ce n'eft pas avec ces traits qu'on nous a peint Polynice dans le cours de ce Poëme. Il garde même parfaitement le caractere de dureté qu'on lui a donné. Car c'est lui

qui propofe le combat fingulier. Etéocle l'accepte. Jocafte fait parler jusqu'à fon défelpoir. Mais après ces mouvemens qui devoient être refervés pour la fin de la Scéne, le Poëte en fait naître de plus foibles qui auroient dû précéder. Par exemple, Jocafte propofe à Polynice de conquérir d'autres Sceptres; puis elle fe retire comme dans Sénéque & Rotrou.

ANTIG

Et moi je vais, cruels, vous apprendre

à mourir.

Madame... O Ciel ! que vois-je ? hélas rien ne les touche !

Antigone n'en dit pas d'avantage; & fes freres lui échappent pour voler au combat. Le Poëte a bien fait de tenir cette Princeffe dans le filence. C'étoit affez de trois interlocuteurs pour une Scéne où la fituation étoit violente. Tout ce que peut faire Antigone eft d'envoyer Hémon après fes freres pour les féparer.

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Jocafte s'elt tuée. Antigone fait connoître cette mort par fes larmes & fes Stances, Elle balance fi elle ne fuivra

pas fa mere. Mais l'intérêt de fon amour T'emporte fur la gloire de mourir après

une mere,

Dois-je vivre dois-je mourir?

Un amant me retient, une mere m'appelle.
Dans la nuit du tombeau je la vois qui m'at
tend.;

Ce que veut la raison, l'amour me le défend,
Et m'en ôte l'envie.

Que je vois des fujets d'abandonner le jour!!
Mais, hélas, qu'on tient à la vie

Quand on tient fi fort à l'amour?

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Hémon vois le pouvoir que l'amour a für moi.
Je ne vivrois pas pour moi-même,
Et je veux bien vivre pour toi..

C'eft un refte comique du vieux goût des Stances qui n'infecta pas long-tems. Racine.

Olympe qui court éternellement depuis la Piéce commencée jusqu'à la fin, tantôt du Palais au camp, tantôt du camp au Palais, vient dire à Antigone que Polynice eft vainqueur C'eft qu'elle n'a vû que la moitié du combat. Racine a pris cet heureux artifice de l'Horace de Corneille, où Julie dit au vieill Horace, qu'elle a vû fuir son fils..

Horage Aft. LIL SG. VI.

Créon fe préfente enfuite à Antigone. Elle croit la politique de ce Prince ambitieux bien punie par la victoire de Polynice. Mais Créon la défabufe en lui. apprenant la véritable iffuë du combat. Etéocle mourant a tué fon frere, Hémon même en tâchant de les féparer eft mort victime de fa complaifance pour Antigone qui l'avoit chargé de ne pas abandonner fes freres. Cette mort fait renaître l'efpérance dans le cœur de Créon. Il pleure un fils; mais il perd un rival. I ofe même propofer le Trône & fa main à Antigone. Elle lui répond:

Je le refuferois de la main des Dieux.

même,

Et vous. ofez, Créon, m'offrir le Dia

dême !

CRE' ON. Je fçai que ce haut rang n'a rien de

glorieux,

Qui ne cede à l'honneur de l'offrir à

vos yeux.

D'un fi noble deftin me croyez-vous indigne ?

Peut-on confidérer ce difcours de fang froid, & ne pas convenir qu'il eft plus digne de Tartuffe que d'un pere qui vient de perdre fes deux fils, & qui a

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