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» que le vaiffeau des Argonautes n'eût » jamais abordé à Colchos; que les Pins » du mont Pélion n'euffent point été » coupés pour compofer ce fatal vaiffeau,

& que la Toifon n'eût pas éte enlévée »,? elle en apporte la raifon; Médée ne feroit pas criminelle & malheureufe; criminelle, fables deux chofes affez importantes pour les remarquer. 1. Que cette ouverture de Scéne étoit fort eftimée de fon tems, puisqu'il la cite comme un des plus beaux morceaux, pour tâcher de dérider les cenfeurs de fes fables. 2. Que ce même morceau étoit critiqué par les délicats, parce que Minos avoit vogué fur la mer Egée long-tems avant qu'Argus eût fabriqué le vaiffeau qui porta fon nom. Ce vaiffeau n'étoit donc pas le premier. EURIPIDE a donc eu tort de le fuppofer tel. Que répond à cela PHEDRE? » Que voulez-vous donc qu'on vous faffe, lec»teur plus cenfeur que Caton, fi les fables ni » petites ni grandes ne peuvent vous contenter? » Croyez moi, n'allez point chicaner avec les » lettres, de peur qu'elles n'ayent leur tour à » vos dépens. Ceci regarde ceux qui font pro» feffion de tout dédaigner, & qui veulent s'at» tirer la réputation d'efprits fupérieurs à force » de blâmer les belles chofes, qui font auffi » éloignées d'eux que le Ciel l'eft de la terre ».

LA FONTAINE a imité cette fable dans celle qu'il a fait contre ceux qui ont le goût difficile. C'eft la 23e. qui commence par ces

vers.

Quand j'aurois en naissane reçû de Calliope, Gri

poun

le, pour avoir fait mourir Pélias à Iolcos par les mains de fes propres filles, fous prétexte de le rajeunir; malheureuse, à caufe de la perfidie de fon époux qui l'a traînée à Corinthe pour l'y facrifier à de nouvelles amours » Médée au défefpoir, » ( continue-t-elle,) attefte la foi violée, » & les Dieux témoins de fon hymen. » Elle féche de douleur, & s'en laiffe confumer. Semblable à un marbre, elle ne » paroît avoir de vie que lorfqu'elle pleu» re fon pere, fa patrie, & fa maison

qu'elle a trahis, pour fuivre un étranger, qui la trahit & la méprife à fon tour. » Elle apprend trop tard à fes dépens ,, combien il eft doux de vivre dans fa » terre natale. Elle haït même ses enfans, », & ne peut plus fupporter leur vûe ». En un mot là confidente appréhende quelque funefte effet d'une douleur fi profonde. Elle m'eft connue, dit-elle; » un cœur auffi fier que le fien ne peut » effsuyer un outrage, fans en venir à de » cruelles extrêmités ».

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Comme elle apperçoit alors les enfans de Médée qui reviennent avec leur*Gouverneur, elle ajoûte: »les voici, Hélas,

* Gr. Pépa logue, comme dans l'Electre de SOPHOCLE & les Phoeniciennes d'E U RI

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2 ils ne fongent pas à la douleur où leur » mere eft plongée! Heureux âge qui » ignore les cruels chagrins! Le Gouverneur lui demande pourquoi elle a laiffé Médée feule.Elle répond que la violence de fon chagrin l'a contrainte de fortir & de raconter fes plaintes au Ciel & à la terre. Coutume Grecque, qui montre que ce Prologue détaché & les autres femblables ne laiffent pas d'avoir leur fondement dans les manieres anciennes. Par-là ils devoient moins choquer les Grecs qu'ils ne nous choquent. Ils fe plaignoient au Soleil, on fe plaint aux Echos en poëfie. Tout cela ne fignifie autre chofe,finon qu'on veut exhaler fa douleur en liberté. Et voilà l'unique fondement vraisemblable des monologues des Grecs, furtout d'Euripide.

Le Gouverneur dit que Médée ignore encore les nouveaux affronts qu'on lui prépare, & qu'en effet on fonge à l'éxiler de Corinthe avec fes enfans. La Confidente fait remarquer à fes jeunes Princes que leur pere eft prêt de les abandonner. Puis elle dit au Gouverneur de les emmener, & furtout de ne les pas laiffer approcher de leur mere, dont la fureur lui paroît pronostiquer quelqu'attentat funefte. Cette Scéne entre deux perfonnes

attachées aux intérêts de Médée a toute la naïve douceur de celles de Térence.

Au moment que les petits Princes font prêts d'entrer dans le Palais, on entend les cris de Médée qui eft dans fon appartement. Elle fe dit la plus malheureufe des femmes. Elle fait des imprécations contre fes enfans, fon époux, toute fa maifon, & contre elle-même. Ces plaintes, & d'autres femblables font entrecoupées par les réflexions de la Confidente, qni fait promptement retirer les enfans de Médée. Sur quoi elle débite une trèsbelle morale fur les foucis cuifans qui dévorent les têtes couronnées.

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Quelques Dames Corinthiennes deftinées à composer le Chœur accourent aux cris de Médée pour prendre part à ses chagrins. Médée redouble fes plaintes, & toujours fans paroître. Autre fujet de réflexions & de tendre pitié pour des perfonnes amies, telles qu'on fuppofe celles du Chœur. Elles engagent la Confidente à preffer Médée de fe montrer, afin de la confoler par leurs entrétiens. » J'y vole, répond celle-ci; mais je dou» te fi je pourrai gagner fur elle de paroî»tre. Je vais l'en preffer en votre faveur, » quoique femblable à une Lionne farouche elle nous effraye de fes regards,

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» quand nous ofons lui parler. Que les » hommes ont été peu fages! Ils ont in» venté le chant pour animer les feftins. >> Que ne trouvoient-ils plutôt l'art » de calmer les dépits cruels & les tranf»ports affreux qui produifent fi fouvent le renversement des maisons. C'est à » guérir ces maux qu'il falloit employer » l'harmonie. Car à quoi bon chercher » dans le chant, l'allégreffe que les festins ,, réveillent affez d'eux-mêmes»,? Cette pensée a paru belle à Euripide. Ariftophane en a pourtant jugé autrement. Huges Grotius s'eft donné la peine de la traduire en vers latins fort délicats, auffibien que Buchanan dans fa Médée. Mais

*

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