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souvroient qu'il y eût de l'intelligence ils auroient droit de la redemander à main armée. Médée promet tout: mais elle veut s'affûrer de ce Prince, & tirer de lui un ferment de ne pas l'abandonner; & cela fous prétexte que ce ferment mettra Egée à couvert de tout reproche, files alliés viennent à lui demander rai fon de fa conduite. Le ferment le fait à la manière des Grees, ainfi qu'on l'a pû déja voir dans l'Iphigénie en Tauride: & le Chœur touché de la générofité d'Egée, lui fouhaite un heureux retour dans fes Etats, & toutes les prof pérités qu'il mérite.

Par ce fecours inopiné, Médée voit un obftacle de moins à fa vengeance. Elle a un afyle affuré. C'est à présent, dit

elle, ô Déeffe de la vengeance, que » je puis en fûreté triompher de mes » ennemis. Le chemin de la victoire » m'eft ouvert, & l'efpérance renaît dans » mon cœur. Sur cet efpoir, elle développe au Chœur tout le plan de fon intrigue. C'eft de rappeller Jafon, de recourir à la feinte pour le regagner, & de faire préfenter par fes enfans un don funeste à fa rivale. Voilà une partie de fa vengeance. A la feule pensée du refte qu'elle ne dit pas, elle s'effraye elle

même. » Je frémis, dit-elle, quand je > fonge à l'attentat horrible qui me refte » à concerter. Car enfin le deffein en eft » pris, je maffacrerai moi-même mes en"fans". Médée frémit & foupire en difant ceci: ce foupir & ce retour fur elle font bien exprimés à la Françoife dans l'Opéra de Théfée.

Ah faut-il me venger

En perdant ce que j'aime !

Que fais-tu ma fureur? Où vas-tu m'engager ? Punir ce cœur ingrat, c'eft me punir moimême :

J'en mourrai de douleur: je tremble d'y fon

ger.

Ah faut-il me venger

En perdant ce que j'aime !

Ma rivale triomphe & me voit outrager.
Quoi, laiffer fon amour fans peine, & fans
danger!

Voir le fpectacle affreux de fon bonheur extrê

me!

Non, il faut me venger
En perdant ce que j'aime.

Le Choeur effrayé a beau vouloir ar rêter une mere furieufe, & lui repréfenter combien elle eft dénaturée de s'armer contre fes propres enfans. Médée

*Thésée Opéra Att. V. Sc. I,

replique qu'il n'eft plus tems, qu'elle a pris fon parti, & que pourvû que Ja fon foit puni, il lui importe peu quel prix.

à

LE CHOEUR. Quoi, vous ferez tuer vos enfans, & vous êtes mere! ME'DE'E. C'eft pour frapper Jafon par l'endroit fenfible.

LE CHOEUR. Et ce coup ne retombera-t'il pas fur vous?

ME'DE'E. Il n'importe. Le fort en eft jetté; n'en parlons plus.

Ce mouvement de pitié que Médée apperçoit dans les Dames Corinthiennes, fait qu'elle leur demande encore une fois le fecret pour cet attentat. Auffitôt elle envoye une de fes femmes chercher Jafon. Va, dit-elle; ta foi m'est >> connue. Amene moi ma victime: confidente & femme, tu dois fervir dou»blement mes fureurs ».

Le Choeur perfifte à détourner Médée d'un fi exécrable deffein. Ceci paroît chanté. Il y a deux ftrophes employées en l'honneur d'Athènes, dont voici le fens. Athènes, région chérie des » Dieux, féjour de la fageffe, où l'on » dit que les Mufes ont fixé la divine » Harmonie, où Vénus, dit-on, fur les bords du Céphize répandit un fouffle

auffi doux que celui des Zéphires, » où enfin Cypris, en couronnant de fleurs fa belle chevelure, a laiffé les

tendres Amours & les Génies qui pré"fident aux beaux arts.... » Le Choeur s'interrompt tout à coup, & fe tournant vers Médée, de quel œil, dit-il, cette » Athènes, cette ville fi polie verra-t'elle une mere encore teinte du fang de fes enfans"? Là il redouble fes priéres pour la fléchir : mais en vain.

ACTE IV.

Jafon averti vient trouver Médée. Elle fait tout ce qu'elle a promis dans la Scéne précédente, qui pour le dire en paffant prévient un peu trop celle-ci: c'eft-à-dire, que Médée fait excufe à Jafon de fon emportement. Elle avouë qu'à tort elle a blâmé un hymen politique & avantageux pour les enfans & pour elle-même. Elle va jufqu'à dire qu'elle auroit dû favorifer cet hymen, & couronner de fes mains la nouvelle épouse. ,, Paroiffez, dit-elle, chers ga"ges de mon hymen, paroiffez fans crainte; embraffez un pere: étouffons nos haines anciennes. Mon courroux ceffe; & je me réconcilie. Baifez la

» main paternelle. Helas, enfans mal,, heureux, le ferez-vous longtems? » Ciel, quel fouvenir affreux vais-je me ›› rappeller! Attendrie & faifie de crainte, je ne puis retenir mes larmes ». Cela eft ambigu; & Jafon attribue cette tendreffe à un retour fincere de la part de Médée, tant elle a fçû faire fervir la nature même à l'artifice. Il la loue d'ayoir enfin ouvert les yeux fur fes véritables intérêts. Il affûre fes enfans qu'il les chérit toujours d'un amour de pere; il les flate de l'efpoir d'être dans la fuite Rois de Corinthe; & il fouhaite enfin de les revoir dignes de lui dans un âge plus avancé. Mais d'où vient, » dit-il >> à Medée, detournez-vous vos regards

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& vous baignez-vous de pleurs? Ah, » répond-elle, c'eft le fouvenir de mes fils qui m'arrache ces larmes. Je fuis >> mere; & ce fouhait paternel qui vient » de vous échapper en leur faveur à reveillé dans moi une crainte fecrette qu'il » ne s'accompliffe pas.

Médée voile ainfi la véritable cause de fa douleur, & amene peu à peu Jason au point d'écoutér la demande qu'elle lui fait d'empêcher l'éxil de fes enfans par l'entremise de la fille du Roy. Jafon promet de le tenter, & fe flate d'y réuffir

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