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» même votre cœur». L'Officier finit en confeillant la fuite à Médée. Il ajoute une fentence ou refléxion fur l'instabilité des chofes humaines. Le Chœur plaint la fille du Roi d'avoir porté la peine due à l'infidélité de Jafon.

C'eft ici que Médée après le départ de l'Officier s'apprête tout de bon à exécuter fa derniere vengeance dont le projet a tant couté à fon cœur. » Elle »fe voit, dit-elle, dans l'impoffibilité » de dérober fes enfans à la fureur des » vengeurs de Créon. Il faut donc qu'ils » meurent, C'est à une mere à leur per»çer le fein. Ses coups feront plus doux

» que ceux d'une main ennemie ». C'eft la même pensée & les mêmes vers que ci-deffus. » Hé-bien, mon cœur, » arme-toi de barbarie. Pourquoi fré>> mir? Ne differe plus un crime horrible, ,, mais néceffaire. Main infortunée, prens » le poignard; prens: va trancher des » jours malheureux: ceffe de trembler, « & oublie que tu vas te baigner dans "mon fang. O mes fils, fouvenir cher », & cruel! Faut-il donc que je fois mere! » Mais, non: oublions-le au moins pour » ce jour-ci. La douleur & les larmes au»ront leur tour. Ils ne m'en feront pas » moins chers: je n'en ferai que plus malP vj

» heureuse,.

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Elle rentre pour accomplir ce projet. Le Chœur épouventé jette des cris, s'adreffe au Soleil auteur de la naiffance de Médée, & le prie d'arrêter cette mere inhumaine devenue la Furie de fes enfans. Il s'adresse enfuite à Médée elle-même, & il employe les menaces. Mais inutilement: on entend les cris de fes fils, comme ceux des victimes frappées, qui tâchent d'éviter de nouveaux coups. Les Dames Corinthiennes veulent entrer: mais elles ne peuvent forcer les obftacles. Elles ont recours aux larmes & aux cris pour réveiller la pitié dans le cœur de cette nouvelle Ino. C'est le nom qu'elles lui donnent, parce que Ino* fe jetta dans la mer avec fon fils Mélicerte. Cette hiftoriette, toute courte qu'elle eft, paroît languir dans une Scène auffi vive que celle qui fe paffe derrierre le Théâtre.

Sur ces entrefaites Jafon arrive pour punir la cruauté de Médée, & plus

*Ino étoit fille de Cadmus & d'Harmonie. Le dépit qu'elle conçut contre Athamas fon époux, qui avoit tué fon fils Léarque, lui infpira, difent les Poëtes, une fureur divine, de forte qu'elle fe précipita dans la mer avec fon autre fils Mélicerte. Médée ne l'imita qu'en partie.

encore pour fouftraire fes fils à la vengeance de la Maison Royale & des Corinthiens. Il apprend que fes enfans font maffacrés par les mains de leur mere. Furieux il veut brifer les portes. Mais Médée s'éleve dans les airs, fur un char que lui avoit donné le Soleil fon ayeul. Horace & Séneque ** difent que ce char étoit traîné par des Dragons aîlés. Euripide ne dit rien de cette circonftance qui eft peu importante.

Quoique ce dénoument foit magique auffi-bien que la mort de Glauca & de Créon, il produit une fituation bien intéreffante, je veux dire, les adieux de Jafon & de Médée. Elle lui dit d'abord, pour arrêter ses efforts inutiles, le fens à peu près de ces vers de Corneille.

* Que fert de t'emporter à ces vaines Furies? Epargne, cher époux, les efforts que tu perds: Voi les chemins de l'air qui me font tous ou

verts;

C'eft par-là que je fuis, & que je t'abandonne

Hac delibutis ulta donis pellicem
Serpente fugit alíte. H o R. Epod. 3.

**Squamofa gemini colla ferpentis jugo
Summiffa prabent. SENEC. Med. v. 1021.

*** P. CORNEILLE, Medée, Scène derniere,

* Barbare mere, s'écrie Jafon;

monftre exécrable aux Dieux & à » l'Univers, comment as-tu ofé plonger », un poignard dans le fein de tes propres enfans pour me frapper dans eux ,& par eux? Comment vois-tu encore la lumiere après cet attentat »? Enfuite de ces emportemens, il reproche à Médée tous fes crimes, infenfé, dit-il, d'avoir traîné avec lui dans la Gréce une pareille Furie. Médée répond qu'elle auroit trop de quoi confondre son infidéle, quand même Jupiter ne feroit pas témoin de leur conduite réciproque.

Quoi, dit-elle, j'aurois fouffert le » triomphe & le bonheur d'un ingrat? » Non; appelle moi barbare: charge» moi de noms encore plus déteftés. » Il me fuffit d'être vengée, & de jouir » de ta peine. Voilà au moins le tour & le fens de fa réponse.

JASON. Et c'eft à vos dépens, cruelle, que vous vous êtes vengée.

* Un Commentateur (GASPAR. STIBLIN) fait la liste de dix injures qu'il a trouvées dans cette Scène. La chofe n'étoit pas affez curieufe pour en tenir regiftre. Au refte, ces injures répondent à celles que le Théâtre fouffre encore de nos jours fans fe dégrader: & l'on ne fçauroit fans injuftice en faire un crime à EURIPIDE.

ME'DE'E. Que m'importe à quel prix, pourvû qu'un perfide ne fe rie pas de Médée.

JASON. Chers enfans, quelle mere vous a donné le jour ! ( il faut remarquer qu'il voit leurs corps enfanglantés dans le char de leur mere.)

ME' DE' E. Chers enfans, c'eft un pere infidéle qui vous a perdus.

JASON. Ma main du moins ne s'eft pas trempée dans leur fang.

ME'DE'E. Elle a fait plus. Elle m'a trahie.

JASON. Ce leger mal devoit-il être fi cruellement puni?

ME'DE' E. Perfide, ofes-tu nommer leger un pareil outrage? Connois-tu le

cœur d'une femme ?

Jafon demande du moins les corps de fes fils pour les enfevelir. Médée les lui refuse. Elle va, dit-elle, les cacher dans un Temple de Junon pour enlever ces triftes reftes à la fureur de fes ennemis. Elle établira mêmes des fêtes & des expiations folemnelles à Corinthe pour appaiser leurs mânes. Ce font apparemment ces fêtes & ces expiations qui ont pû faire croire que les Carinthiens avoient égorgé ces enfans fur l'autel où Médée les avoit laiffés en fuyant de

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