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Corinthe, fuivant une autre tradition. Pour elle c'eft Athènes qui va la revoir en qualité d'épouse d'Egée. Enfin, elle prédit à Jafon qu'après avoir affez vêcu pour fentir tout le poids de fon infortune, il périra accablé fous les débris du vaiffeau des Argonautes, ce qui arriva en effet. Un jour qu'il dormoit à l'abri de ce vaiffeau, une poutre détachée lui fracaffa la tête.

JASON. Puiffent les Euménides & la Vengeance te réferver le fupplice dû aux parricides!

ME'DE'E. Hé quel Dieu prêteroit l'oreille aux vœux d'un parjure & d'un impie!

Les adieux du côté de Médée se terminent par cette amere dérifion. » Va rendre les derniers devoirs à ta » nouvelle époufe. Tu ne fens pas en» core tous tes maux. Le tems & la ,, vieilleffe me vengeront de plus en » plus »; & choses semblables. Il y a encore quelques fentimens très-fins comme

ceux-ci.

JASON. O enfans chéris!

ME' DE' E. Oui, chéris d'une mere, mais non pas de toi.

JASON. Cruelle ! Et c'est vous qui les avez égorgés.

ME' DE' E. C'étoit pour ton fupplice. JASON. Hélas ne pourrai-je au moins les embraffer!

ME' DE' E. Careffes tardives! Hé ne les as-tu pas bannis?

JASON. Au nom des Dieux, accordez-moi cette trifte confolation.

تان

ME'DE' E. Non: tes efforts font vains.

Jafon en proye à fon défespoir prend les Dieux à témoins d'un refus fi barbare. En effet, l'on ne fçauroit trop remarquer combien un pareil refus devoit être douloureux à Jafon dans l'idée des Anciens eû égard à leur maniere de penser sur les morts & les funérailles. Nous avons vû l'exemple d'un refus femblable dans les Phæniciennes. C'étoit-là le dernier trait que Médée réfervoit à Jafon, & le plus haut comble de l'action Tragique. Médée après avoir ainfi fait languir fon époux par une lente vengeance, fe fait enlever fur fon char volant *.

* Telle eft la Tragédie d'EURIPIDE fondée fur l'hiftoire Grecque de fon tems, ou plutôt fur des traditions fabuleufes. Cr, au rapport d'HERODOTE, (Clio ou l. 1.) les Hiftoriens de Perfe rapportoient bien différemment des Grecs l'enlevement de Médée par Jason, & gé néralement tous les rapts des femmes qui cau

ferent une haine irréconciliable entre les Grecs & les Afiatiques. Le premier enlevement (difent les Perfes) fut celui d'Io fille d'Inachus Roi d'Argos par des Marchands Phoniciens, qui la conduifirent en Egypte. Le fecond eft celui d'Europe fille du Roi de Tyr, que des Cretois enleverent, pour rendre la pareille aux Phoeni ciens. Médée fut la troifiéme enlevée à Colchos par Jafon, & vainement redemandée par le Roi fon pere, à qui les Grecs alléguerent le rapt d'Io, dont ils n'avoient point reçû de réparation. Au fiécle fuivant, Paris fils de Priam s'avisa de fon côté d'enlever Héléne aux Grecs, qui les premiers crurent devoir s'en venger, ce que ne faifoient pas les Afiatiques. De là les haines mutuelles qui mirent l'Europe & l'Affe en combuftion dans la fuite des fiécles,

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MEDE' E,

TRAGEDIE

DE

SE'NEQUE.

ACTE PREMIER.

.

Scenes, à fçavoir un monologue E premier Acte confifte en deux de Médée, & un autre du Chœur. Médée explique le fujet en s'adreffant aux Dieux vengeurs de la foy conjugale violée par un ingrat époux. P. Čorneille a traduit prefque mot pour mot cette Scène, & toutes celles de Séneque qui font un peu intéreffantes. Voici la premiere de Sénéque travaillée par les mains de ce grand homme.

* Souverains protecteurs des loix de l'hyménée, Dieux, garans de la foi que Jafon m'a donncé,

*P. CORNEILLE, Médée, Act. I. Sc. VI.

Yous qu'il prit à témoin d'une immortelle

ardeur

Quand par un faux ferment il vainquit ma pudeur. &c.

Sénéque nomme tous ces Dieux; ce que fon habile imitateur ne fait pas.

Et vous troupe fçavante en noires barbaries, Filles de l'Achéron, peftes, Larves, Furies, Fieres fœurs, fi jamais notre commerce étroit Sur vous & vos ferpens me donna quelque droit,

Sortez de vos cachots avec les mêmes flam

mes

Et les mêmes tourmens dont vous gênez les

ames.

Sénéque dit: Sortez telles que vous » parûtes à mon hymen «. Cela eft plus fort.

Apportez-moi du fond des antres de Mégére
La mort de ma rivale & celle de fon pere,
Et fi vous
ne voulez mal fervir mon cour

roux,

Quelque chofe de pis pour mon perfide é

poux.

Qu'il coure vagabond de province en rpovin

ce;

Qu'il faffe lâchement la Cour à chaque Prince
Banni de tous côtés, fans bien & fans appui,
Accablé de frayeur, de mifere, d'ennui, &c.

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