nobles; & celles de l'enfant plus naïves. La mere le fait approcher de fon fein pour ne s'en point féparer en mourant. Mais fa tendreffe l'emportant enfin fur lá fiereté, elle engage ce fils fi cher à tomber aux génoux de Ménélas qui eft: préfent, Celui-ci demeure infléxible comme un rocher. C'eft ainfi qu'il fe qualifie.. A CTE III La chofe amenée à ce point il fe fait une révolution de Théâtre par l'ar rivée de Pélée, que le Choeur voit s'ap-procher. C'eft un Vieillard plein de fermeté, & époux d'une Déeffe, pere: d'Achille, ayeul de Pyrrhus, & que tant" de titres rendent refpectable à Ménélas qu'il fe voit contraint de céder, non toutes fois fans démêlé. Car cette fitua tion eft une de ces Scènes contentieufes où les Tragiques Grecs prenoient plaifir à déveloper tout l'art d'un dialogue éloquent en faveur des Républicains naturellement libres & difputeurs. Pour tout dire enfin, c'eft une de ces Scènes qui malgré cet art n'ont pas le don dé nous plaire, parce qu'elles choquent toutes nos manieres, & qu'elles ne conviennent nullement ni au rang, ni à la majefté de nos Souverains d'aujour d'hui. Les deux Grecs en effet ne s'épargnent pas plus les raifonnemens; préjujures que les terrible pour nous contre les Anciens, Voici la Tubftance de cet entretien. Pélée fort furpris de voir Andromaque liée & traînée au fupplice avec fon fils, fe montre à leurs yeux, comme une Divinité qui vient les délivrer de ce danger preffant. La Princeffe Troyenne lui raconte en peu de mots le fait, &: les motifs d'Hermione. Tout cela eft naturel & tendre: car Andromaque en tombant aux génoux de Pélée, ajoûte à la fin ces paroles fi belles, (parce qu'elles font peu récherchées), ils ont "profité de l'absence de mon époux, ,& de l'abandon où je me trouve,. » pour me perdre & pour égorger un enfant qui ne leur a fait aucun mal. » J'ofe donc me jetter à vos génoux, Sei»gneur: car, hélas, ces liens que vous » voyez, m'empêchent de les embraffer. C'eft la même naïveté que dans ces vers de Virgile,. ★ Ecoe trahebatur passis, Priameïa virge Crinibus à Templo Cassandra, adynfque MinervaE Ad cœlum tendens ardentia lumine fruftrà Lumina; nam, tener as arcebant: vincula palmas... *Eneid, I. 2. U. 403 On tiroit avec violence du fonds du » Temple, & du fanctuaire de Minerve, », la malheureufe Caffandre; & tandis ›› qu'on la traînoit, les cheveux épars elle: levoit vainement au Ciel fes » yeux encore pleins d'un feu prophé >tique: d'indignes liens Fempêchoient >> d'élever les mains ".. Seigneur, continue Andromaque's » fauvez-nous, au nom des Dieux, d'un »trépas affreux pour une mere, mais› ,, dont la honte retomberoit fur vous Pélée ordonne à l'inftant qu'on délie An dromaque: Ménélas d'un ton fier défend qu'on le faffe: & voilà où commence la conteftation. Le premier demande au fecond, de quel droit il tranche du Souve rain dans une Cour étrangere. Ménélas allégue le droit d'allié & d'ami qui rend l'autorité commune ainfi que les biens & les maux. Les repliques piquantes & redoublées amenent les menaces. Le Roit de Sparte déclare qu'il ne relâchera point fa victime; & le Roi de Theffalie le mena ce de lui donner du Sceptre fur la têtesNous avons déja vû quelque part* cettemenace, qui eft bien du ftyle d'Homere; C'eft dans l'Iphigénie en Aalider Ménéfas menace un efclave du même traitement, A&te IT Scène I. Vol. II. Enfin, Pélée commence un discours fuivi où il reproche à fon adversaire comme une lâcheté infigne, d'avoir fouffert qu'un indigne Phrygien vînt lui enlever fa femme dans fes Etats, & d'avoir crû Héléne affez fage pour être laiffée feule à fa bonne foi. » Et com>> ment Héléne eût-elle été chafte dans >> une ville, c'eft Sparte) où l'ufage autorife les jeunes filles à entrer‹ dans des tournois vêtues en Ama>> zones? Le Grec peint l'habillement des Lacédémoniennes précisément comme Virgile l'a fait au premier Livre de l'Eneïde, vers 314. où il nous repréfente Vénus qui s'apparoît à son fils Enée : dans la Forêt de la nouvelle Carthage : Virginis os habitumque ferens & virginis arma Et plus bas, vers 336. Virginibus Tyriis mos eft geftare pharetram * J'ai exprimé ainfi les jeux de la courfe & de la lutte & par le terme (vétuës en Ama¬ Zones) l'habillement dont il s'agit, : * Vénus fa mere vint à fa rencontre.. On l'auroit prise à fon habit & à fon >> air pour une fille de Lacédémone, ou » pour une Reine des Amazones; (une Harpalyce; c'étoit une Reine de Thrace,) >> dans le tems qu'elles s'éxercent à domp>>ter des chevaux, & que fur le bord >> de l'Hebrus, elles s'efforcent de devancer à la Courfe les ondes de ce: fleuve. La Déeffe traveftie en chasseuse >portoit fur l'épaule un joli carquois. Sa chevelure négligemment éparfe » étoit le jouet des vents; & fa robe >> retrouffée par une ceinture lui laiffoit > un génou découvert..... les filles de: » Tyr, où j'ai pris naiffance, font vê- tues & chauffées, comme vous voyez que je le fuis. La mode de leur païs »eft de porter le carquois, & de chauffer >> le brodequin ››. C'étoit la même mode chez les filles : Lacédémoniennes. Une des loix de Licurgue. étoit de les élever dans les plus pénibles exercices du corps. Mais le refte: de la Gréce ne goûtoit point cet ufage, comme peu conforme à la bienséance, du fexe; & c'eft ce que. Pélée reproche à Ménélas. Il fait tout de fuite une peinture d'Héléne, très peu avantageuse * Trad. du P. F. CAT ROU, nouv. édit. 1729. |