صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

Heinfius a trouvé dans la Thébaïde de Sénéque. Ces fortes de titres tirés du nom des païs, font trop généraux; & les Anciens, furtout les Grecs, étoient trop délicats pour les admettre, eux qui tiroient plufieurs Tragédies d'une même hiftoire, partagée en divers évenemens, afin d'en faire leur trilogie, à laquelle ils donnoient un nom commun, par exemple celui d'Oreftée aux trois piéces qui rouloient fur Orefte. C'est le nom qu'on donnoit à l'Agamemnon, aux Coëphores, & aux Euménides, toutes trois d'Efchyle; & en y joignant le Protée, piéce fatyrique, ces quatres Poëmes s'appeltoient une tetralogie. De plus, nul titre tiré des trois Poëtes Grecs ne justifie celui de Sénéque; d'où il eft néceffaire de conclure qu'on appelloit & qu'on devoit appeller fa Tragédie, les Troyennes (Troades) du nom du Chœur, comme celle d'Euripide, dont elle est une copie. Tel eft le fentiment raisonnable de Jof. Scaliger, & de Dan. Heinfius: & c'eft en partie ce qui a déterminé ce dernier à rejetter la Thébaide de Sénéque, & à la dégrader du rang que luž donnoit Jufte Lipfe parmi les bons ouvrages Romains, jufqu'à la condition * Voyez la Thébaïd. vol. IV.

[ocr errors]

*

t

d'une miférable Poefie de quelque dé clamateur. Ce qui eft véritablement une pure chicane, ainfi que nous l'avons dit, d'autant plus que Heinfius avoit affez d'autres bonnes raifons qu'il n'a pas alleguées toutes, fans avoir recours à celle-ci..

[ocr errors]

*

Mais ce qu'il y a de furprenant, c'est que pour faire paroli à Jufte Lipfe,. Dan. Heinfius foudroye la Thébaïde & met la Troade au rang de Médée; c'eft-à-dire de la Tragédie, qu'on ne balance point d'attribuer au grand Sénéque le Philofophe, fur l'autorité de Quintilien, qui cite un vers de Médée: en l'attribuant à Sénéque, fans dire lequel: ce qu'il eût fait, dit-on, fi c'eût été d'un autre que le Philofophe. Ecoutons encore une fois Jufte Lipfe & D. Heinfius: car Jof. Scaliger mérite qu'on oublie qu'il a préferé les Tragédies La tines aux Grecques ; & à l'égard des autres critiques, ils ont fuivi les trois dont je parle, ou n'ont point dit leurs fenti mens particuliers.

Les Tragédies Latines, dit** Tufte

*Voyez les fentimens de ces deux stadans fur In Thebaïde, p. 252. de et volume

**JUSTILI ÉSTE Animadverf in Tragadt. qua. L. ANNAQ SINICA tribaunturs. «

[ocr errors]

Lipfe, font de différentes mains, & il ne faut point écouter nos Critiques. » qui penfent autrement. Quiconque. "examine férieufement le ftyle & l'élo»cution, penfe comme moi. Si l'on ne

fent pas cette différence, on ne fent » rien. Elle eft trop manifefte. Qui peut » dire qu'Octavie & Médée partent » du même génie & du même pinceau ? "Que la Thébaïde & la Troade foient 5 du même auteur? Nul connoiffeur fans doute, pour peu qu'il ait d'o» reille,.

*Heinfius crie à fon tour que les Troyennes font une Tragédie divine & divinement Latine. Troades divina, nec Latina minus. H'fe perd dans l'éloge qu'il continuë d'en faire, tant il y voit de rapport avec les Grecs & furtout Homere. Il la met à la feconde place des trois qu'il donne à Sénéque le Philofophe, entre Hippolyte & Médée. Enfin il en fait une critique fi douce, qu'il n'y reprend que de prétendus défauts ou d'Euripide, ou puifés d'une trop fidelle imitation de la maniere d'Euripide.

Sans avoir égard à des jugemens fi contradictoires de perfonnes, d'ailleurs

DAN. HEINS II in L. M. ANN. SBNECA, &c. Tragad. animad. & nota.

firefpectables par leur érudition, je vais examiner ou plutôt expofer ce poëme, ainfi que les autres, à la critique des lecteurs qui font au fait du Théâtre, & fuivant les regles de la nature & du bon fens, avec les égards dûs aux caracteres ingénieux qui regnent dans les piéces de Sénéque.

Ce Poëte, ou Philofophe, ou autre introduit pour Acteurs Andromaque, Aftyanax, Hécube, Talthybius, Hé lène, & un Chœur de Troyennes, comme Euripide. Il y a ajouté Calchas, Pyrrhus, Ulyffe, un vieillard & un Envoyé. Enfin il fait paroître Agamemnon au lieu de Ménélas. Le lieu de la Scène qu'il ne détermine point d'abord, comme le font fi fagement les Grecs, eft Troye en cendres.

ACTE PREMIER.

» croit

"

Hécube paroît la premiere, & commence par cette fentence: » Quiconque que le Trône eft un appui iné» branlable, & livre fon chœur à l'y»vreffe de la profpérité comme fi elle » devoit durer toujours, qu'il jette fes » regards fur moi & für Troye ». Elle décrit avec beaucoup d'éloquence, &

plus d'efprit que n'en fouffre la douleur, le renversement de ce Royaume n'a gueres fi floriffant. » Le vainqueur mê"me refpecte encore fes dêbris, & il »eft étonné de fa conquête ».

Horret affli&tam quoque,

Vi&tamque quamvis videat; haud credit fibi
Potuiffe vinci.

Elle s'impute à elle-même (c'eft-àdire, à Pâris qu'elle a mis au monde) toutes les horreurs qu'elle éprouve. Elle les avoit prédites avant Caffandre, » C'est » moi, dit-elle, ô ma patrie, qui ai porté des torches allumées dans ton » fein. Pourquoi s'en prendre à Ulysse », & à Sinon » 2

[ocr errors]

Prior Hecuba vidi gravida, nec tatui“ metus,
Et vana vares ante Cassandram fui.

Non caurus ignes Ithacus, aut Ithaci comes
Nocturnus in vos fparfit, aut fallax Sinon.
Meus ignis ifte eft; facibus arderis meis.

Mais pourquoi pleurer Troye »?

·Troja jam vetus eft malum.

» C'eft un mal que d'autres maux ont dû faire oublier ›

« السابقةمتابعة »