victime des Monftres qu'il a domtés, & d'être réfervé à mourir par les mains d'une femme; eft-il poffible, ajoûte» t'il, que j'aye perdu tant de fois une ≫ belle mort»? Tories boneftam! Perdidi mortem, hei mihi, Le magnifique endroit de Sophocle traduit par Ciceron ou Attilius, eft en partie bien imité. En voici une ébauche de Rotrou tirée du Poëte Latin. Eft-ce donc là ce bras dont les faits font fi rares, Ce fléau de révolte, & de rébellions, Ce meurtrier de ferpens, ce domteur de lions? &c. Ce bel endroit eft toutefois défiguré par de faux brillans dont il y en a un remarquable, Hercule ne fçachant quelle eft la cause du mal qui le dévore dit, en fe déchirant les entrailles: » Que le » mal a trouvé un afyle au-delà. O mal » femblable à Hercule ! C'eft pour faire entendre que ce mal eft invinci ble comme lui. La penfée qui fuit feroit belle, fi elle ne dégénéroit pas en impiété. Ibid Ibid, D'un regard de pitié daigne percer la nuë, mort; Et donne du secours ou des pleurs à mon fort. Quand les têtes de l'Hydre ont fait entre bras, Cent replis tortueux, je ne te priois pas. mes Quand j'ai dans les Enfers affronté la mort même; Mon bras fut mon recours; & jamais le ton- N'a, quand j'ai combattu, grondé contre la terre : Et je commence helas, cette lâche action! Et pour toute faveur j'implore un coup de fou- Le Latin eft plus ferré & plus éner gique. Tot feras vici horridas, Reges, Tyrannos; non tamen vultus meos Cette derniere pensée eft fublime, * Mon bras m'a tenu lieu de vœux, Nulla propter me Micuere cælo fulmina. Hic aliquid dies. facro Optare juffit. Primus audierit preces Certes files Sçavans qui fur la fimple critique du ftyle, ôtent cette Piece à l'Auteur de Medée, n'avoient égard qu'à ce morceau & à quelques autres, ils devroient la lui rendre fans balancer, Il paroît que Racine a imité le tour dont je viens de parler, dans la feconde Scene de l'Acte IV. de Phedre, où Thefée parle ainfi au Dieu de la mer en le priant de le venger d'Hippolyte. Et toi Neptune, & toi, fi jadis mon courage Souviens-toi que pour prix de mes efforts heu reux Tu promis d'exaucer le premier de mes vœux. Je t'implore aujourd'hui. Venge un malheureux pere: J'abandonne ce traitre à toute ta colere, Etouffe dans son fang fes défirs effrontés : Ce parallele fait voir combien une main habile & délicate fçait employer d'art dans une heureufe imitation. C'eftlà non feulement tirer des pierreries du fumier d'Ennius. Enni de fercore gemmas : Mais encore fçavoir les tailler & les embellir ce que Rotrou n'a fait qu'imparfaitement. Hercule après avoir prié Jupiter de le foudroyer, s'adreffe à Junon. » Que » demandez-vous de plus, fiere Déeffe? ➜ vous voyez Alcide fuppliant ». Il implore les Peuples, les Villes, & l'Univers entier, pour obtenir la mort, comme une récompense dûë à ses travaux. Cela eft moins ampoullé que le refte. Rotrou dit noblement : Pour prix de tant d'exploits je ne veux que la mort. Alcméne furvient avec Philoctéte, 'd'où & comment, on ne le dit pas. Ce qui a donné lieu à Seneque d'introduire Alcméne, c'eft que Sophocle fait dire à Hercule prêt à accomplir fa deftinée, qu'on lui faffe venir fa mere & toute fa Maison. Mais Hyllus le rappelle de fon égarement, & lui fait fouvenir qu'Alcméne & tous fes freres font ailleurs. Hercule chez Seneque raconte en peu de mots fes tourmens: & Alcméne en eft au défefpoir. Pour Philoctéte, c'est un perfonnage muet: de forte que toute cette Scéne n'eft qu'une continuation des plaintes d'Alcide. Il y dit entr'autres choses extraordinaires: » Qu'il " faut le jetter dans la mer, afin d'é» teindre le feu qui le dévore. Car les » fleuves ne fuffiroient pas. Ils feroient » defféchés ». Et même il craint que l'Océan ne puiffe fuffire à étouffer ces flammes. Rotrou ajoûte à cela qu'Alcide plongé dans le Pence * a fait bouillir les ondes, que ce fen vehement convertirait en, foi le liquide element. Et il avoit dit plus baut: O cruelle douleur ! ô tourment! ô martyre! Le feu de Seneque eft encore plus actif & plus contagieux, que celui qui brûle * Penée, fleuve de Theffalie, dont la fource eft au Pinde, & qui coule entre les monts Offa & Olympe, & arrofe la vallée de Tempe. |