صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني
[ocr errors]

peu moins dur en cecy qu'Efchyle ni Euripide. Le Chaur termine cet Acte par une efpéce de triomphe fur cette vengeance, opérée, dit-il, pat la Justice même, fille de Jupiter.

[ocr errors]

ACTE V.

Orefte fort du Palais, & fait ouvrir les portes. Il montre de loin au peuple les corps d'Egifthe & de Clytemnestre. D'un autre côté il leur fait voir le voile dont l'un & l'autre couvrit Agamemnon pour le maffacrer, & les chaînes dont ils le liérent. » Qu'on l'étende, dit-il, ce voile abominable, » non pour être vû de mon pere; mais afin que le foleil, té» moin de tant de fang répandu, me foit garant que garant que c'eft avec justice que j'ay ofé tuer une mere. Car pour Egifthe je n'en parle pas. Il porte la jufte & trop douce peine de fon adul>> tere. « Le Chœur à ce fpectacle fent reveiller fa douleur & fon indignation: mais Oreste a beau fe raffurer à cette vûë le fruit de fa victoire, c'eft d'être obligé de fuir à Delphes, fuivant les ordres d'Apollon. Il fent même déja fa raison se troubler. Mais avant que les Furies viennent l'agiter, il prend les Argiens à témoin de fon innocence, & les laiffe jouir de la liberté qu'il vient de leur procurer, pour s'éxiler lui-même loin de fa Patric. A l'inftant il croit voir les Eu-menides avec les ferpens qui fifflent fur leurs têtes, & des. yeux qui diftillent de fang. Ce n'eft-là qu'une fureur commencée. Auffi Efchyle ne l'a fait qu'ébaucher en grand maî tre. En effet, Orefte ne perd pas entierement l'ufage de la raifon. Il fe retire avec Pylade, & le Choeur finit en plai-gnant la deftinée de cette maifon, où fe font commis tant d'attentats, & même le fort d'Orefte obligé de les venger fur une mere, & d'être coupable malgré lui.

Je ne dois pas oublier que les Furies dont Orefte eft agité, & que Clytemneftre appelloit les chiens irrités d'une mere, font une peinture très ancienne & très noble des remords quis éguillonnent la confcience d'un coupable; remords que la nature rend plus vifs & plus fenfibles,quand il s'agit d'un crime qui l'offenfe auffi violemment que le parricide. Ciceron dit admirablement à ce fujet. » Ne vous imaginés pas, que

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

comme vous le voïés fouvent aux fpectacles, un homme foit réellement coupable d'impiété ou de quelque attentat, agité & faifi d'effroi par les torches ardentes des Furics. Le fcelerat eft tourmenté par fes propres fraudes, poursuivi » par fes fraïeurs, agité par fes fureurs, bourrelé par fes » noirs projets, déchiré par fes remords. Voilà les Furies domestiques qui s'attachent pour toujours aux impies. Ce font elles qui jour & nuit vengent par de cruels, mais juf»tes fupplices, le fang des peres fur des fils parricides. Nolite enim putare, quemadmodum in fabulis fæpenumerò videtis, eos qui aliquid impiè fceleratèque commiferint, agitari & perterreri Furiarum tedis ardentibus. Sua quemque fraus,& fuus terror maximè vexat : fuum quemque fcelus agitat, amentiaque afficit: fue mala cogitationes confcientiæque animi terrent. Hæ funt impiis affidue domefticaque Furia que dies noctefque parentum panas à confceleratissimis filiis repetunt.

[blocks in formation]
[ocr errors]
[ocr errors]

ELECTRE D'EURIPIDE.

Ln'eft pas néceffaire après ce qu'on a vû, de développer ce fujet. Quoique différemment envisagé par les trois rivaux, le fonds est toujours l'hiftoire d'Egifthe. C'eft tout dire : & d'ailleurs Euripide va nous l'expliquer affés par fon Prologue auffi poftiche que la plupart des autres de ce Poëte.

ACTE PREMIER..

Un Mycenien qui vit à la campagne peu loin d'Argos pa roît d'abord, & adreffant la parole à fa Patrie, il repasse dans son esprit l'entreprise d'Agamemnon, fon expédition de Troye, fon retour à Argos, fa mort que lui procura son époufe de concert avec Egifthe, & les fuites de ce crime. Egifthe épouse Clytemneftre & s'empare du Sceptre : il veut tuer Orefte fils d'Agamemnon. Mais un vieillard l'enleve,&le confie à Strophius Roy de la Phocide.LeTyran laisse d'abord vivre Electre fille de fon prédeceffeur; mais la voïant nubile, & recherchée de tous les Princes de la Grece, il craignit qu'elle ne fût un jour en état de venger fon pere, & il réfolut de s'en défaire. Toutefois Clytemneftre la fauva par politique plûtôt que par pitié. La mort de fa fille auroit rendu legouvernement de la mere trop odieux, & n'auroit fait qu'aigrir Orefte, qui avoit déja mis à prix la tête de l'ufurpateur. » C'est ce qui a déterminé le Roy (dit cet homme) à » me donner Elcare en mariage. Noble, à la vérité, mais >pauvre, je vois ma nobleffe éclipfée par l'indigence. J'étois tel qu'Egifthe fouhaitoit. Il a cru que ma foibleffe le mettoit » hors d'état de rien craindre de moi, au lieu qu'un époux plus puiffant auroit pû reveiller le meurtre d'Agamemnon, » & n'en pas laiffer impunis les autheurs. «

2

[ocr errors]

Euripide donne icy à ce Mycenien le vrai caractere d'un homme de bien, qui a confervé dans l'adverfité des fentimens Voids les dignes de fa naiffance. Le Poëte en fait un Philémon a, un homme femblable à ce vertueux époux de Baucis, Prince par

Met. d'Ovid.

1. 18. v. 632.

le cœur, laboureur par la néceffité de fa fortune, craignant les Dieux, digne de les avoir pour hôtes, aimant la justice, & haïffant la Tyrannic. Contraint d'époufer Electre, devenuë la victime d'une politique injufte & cruelle, il est fon protecteur plûtôt que fon mari, & il protefte publiquement que le refpect pour le fang de fes légitimes Rois l'emportant en fon cœur fur l'ambition d'époufer une Princeffe, il ne l'a jamais regardée que comme un dépôt facré que les Dieux lui ont confié. Euripide prend bien des précautions pour juftifier ce dernier article. Mais outre que cette ouverture ne vaut pas à beaucoup près celle de Sophocle, qui eft un modele achevé, l'imagination fe trouve un peu bleffée de çe mariage fans mariage.

A la feconde Scene on voit une jeune femme fimplement vêtuë, & portant fur fa tête une urne qu'elle va remplir d'eau à la fontaine voisine. C'est Electre qui fe fait connoître en adreffant fes plaintes aux Aftres fur la cruauté d'une mere qui l'a réduite à un fi trifte état. Son mari la rencontre & fe plaint tendrement que malgré fes priéres & fes ordres elle s'abaiffe toujours à des emplois vils & indignes de fa naissance.»Je vous mers au rang des Dieux (répond Electre) » vous dont la tendresse vertueuse a refpecté ma mifére. Qu'y-a-t'il de plus heureux dans l'excès de mon malheur que d'avoir trouvé un ami tel que vous ? c'est à cette amitié fi pure que je rends hommage par mes foins. Hé, n'est-ik » pas jufte que par reconnoiffance du moins je prenne part » à vos travaux, & que je foulage vos peines?« Le mari fe rend à tout ce qu'elle veut, & il fe difpofe lui-même à aller enfemencer fon champ dès que le jour paroîtra ; ce qui montre l'extrême humiliation où Egifthe avoit réduit Electre puifqu'il l'a contrainte d'être la femme d'un fimple païfan, obligé de vivre du pénible travail de fes mains.

[ocr errors]
[ocr errors]

رو

Tandis que l'un & l'autre fe retire, Oreste arrive avec Pylade; (ils font inféparables chés nos Poëtes) ces deux amis fe font d'abord connoître au fpectateur par leur amitié mutuelle. Le premier déclare qu'il vient venger la mort de fon pere par l'ordre d'Apollon, qu'il a profité de la faveur de la nuit pour faire les facrifices des morts fur le tombeau d'A

[ocr errors]

gamemnon, & que durant le jour qui commence à luire, il eft bien aife de fe tenir fur la frontiere de l'Argolide, pour être à portée de fe retirer en cas qu'il foit découvert, & pour tacher de trouver fa fœur, dont il croit la maifon peu éloignée. Ils apperçoivent Electre proche de la fontaine où elle puife de l'eau, & la prenant pour une Efclave ou pour une païfanne, ils s'écartent un peu en attendant qu'elle passe, afin de tirer d'elle les éclairciffemens qui leur font néceffaires. Pour cela ils vont s'affeoir proche de la maison d'Electre fans la connoître. C'est un jeu de Théatre.

Electre fe croiant feule, renouvelle fes plaintes en rempliffant fon urne. Ce qu'elle dit eft exprimé par une espéce d'Ode, que les anciens appelloient Monodie ou Monologue en chant. C'eft l'Intermede du premier Acte, auffi bien que la fuite. En effet Electre apercevant le Chœur, l'invite à pleurer avec elle, & pour l'y engager elle peint la mort de fon pere, l'abfence ou peut être l'esclavage de fon frere, & fes propres malheurs, avec ces traits vifs & ces exclamations fréquentes qui font l'ame des Chœurs d'Euripide. C'est le même caractere d'Ele&re, & le même goût que dans le Monologue de Sophocle. Lumiére pure, Ciel qui environnés la terre, &c. Mais celui d'Euripide paroîtroit moins ferré & moins brillant dans notre langue.

Elle a mis bas fon urne avant que de commencer cette trifte cérémonie, c'est-à-dire, avant que de païer à Agamemnon le tribut de fes larmes & de fes cris lugubres. Le Chœur, qui n'eft autre qu'une troupe de bergeres & de païfannes attachées à la fortune d'Electre par pure compaffion, veut en vain détourner cette Princeffe de fonger à fes maux, en lui parlant d'une fête qu'on doit célébrer. » Il n'eft plus de fêtes, ni de danfes, ni de joie pour elle. Les lar» mes font devenuës l'unique aliment, & la feule douceur qu'il lui foit permis de goûter. « Elle montre fes habits, fi peu dignes d'une Princeffe de fon rang, mais fi conformes à fes malheurs. Surquoi le Choeur avec la fimplicité, qui fait fon caractere, lui offre des vêtemens plus riches & plus décens pour l'engager à paroître dans les fêtes publiques, & à honorer les Dieux par fa présence, afin de se les rendre

[ocr errors]
« السابقةمتابعة »