صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

osophe, par forme d'avis : « Solon, il faut, ou n'ap<< procher point du tout des rois, ou ne leur dire que << des choses agréables. – Dites plutôt, répondit So« lon, qu'il faut ou ne les point approcher, ou leur <<< dire des choses qui leur soient utiles. »

-

8. Xerxès, roi de Perse, étant sur le point d'entreprendre sa grande expédition contre la Grèce, voulut prendre l'avis de son conseil. Par son ordre, tous les grands du royaume s'assemblèrent, et le monarque leur proposa son'dessein. Ses motifs étoient le désir d'imiter ses prédécesseurs, qui tous avoient illustré leur nom et leur règne par de nobles entreprises; l'obligation où il étoit de punir l'insolence des Athéniens, qui avoient osé attaquer Sardes, et l'avoient réduite en cendres; l'espérance des grands avantages qu'on pourroit retirer de cette guerre, qui entraîneroit après elle la conquête de l'Europe, le plus riche et le plus fertile pays qui fût dans l'univers. Il ajoutoit que cette guerre avoit déjà été résolue par son père Darius, dont il ne faisoit que suivre et exécuter les intentions; et il finit en promettant de grandes récompenses à ceux qui s'y distingueroient par leur bravoure.

Mardonius, seigneur ambitieux, et qui désiroit extrêmement d'avoir le commandement des troupes, parla le premier. Il commença par élever Xerxès au-dessus de tous les rois qui l'avoient précédé, et de tous ceux qui devoient le suivre. Il montra l'indispensable nécessité de venger l'injure faite au nom persan. Il décria les Grecs, comme des peuples lâches et timides, sans courage, sans force, sans expérience dans la guerre. Il en apporta pour preuve la conquête que lui-même avoit faite de la Macédoine, qu'il exagéra avec des termes pleins de fastes et de vanité, montrant qu'il n'avoit trouvé aucune résistance. Il ne craignoit pas d'assurer qu'aucun peuple de la Grèce n'oseroit venir à la rencontre de Xerxès, qui marchoit avec toutes les forces de l'Asie, et que, s'ils avoient la témérité de se présenter devant lui, ils apprendroient à leurs dépens que les Perses étoient le peuple de la terre le plus guerrier et le plus courageux.

«

Ce discours flatteur, bien capable d'aveugler le monarque, parce qu'il étoit conforme à son goût, ferma la bouche à tous ceux qui composoient le conseil. Dans ce silence général, Artabane, oncle de Xerxès, prince recommandable par son åge et par sa prudence, eut le courage de prendre la parole. « Grand roi, dit-il, en << s'adressant au souverain, souffrez que je vous dise ici << mon sentiment avec la liberté qui convient à mon âge ́« et à vos intérêts, Quand Darius, votre père et mon « frère (Voyez ZELE), Songea à porter la guerre contre <«<les Scythes, je fis tout mon possible pour l'en détour<< ner. Vous savez ce quei coûta cette entreprise, et << quel en fut le succès. Les peuples que vous allez atta<< quer sont infiniment plus à craindre que les Scythes. Les Grecs passent pour être ; et sur terre et sur mer, « les meilleurs guerriers du monde. Si les Athéniens << seuls on pu défaire l'armée nombreuse commandée << par Datis et par Artapherne, que faut-il attendre de << tous les peuples de la Grèce réunis ensemble? Vous << songez à passer d'Asie en Europe, en jetant un pont << sur la mer. Eh! que deviendrons-nous, si les Athé<< niens vainqueurs font avancer leur flotte vers ce pont, << et le rompent? Je tremble encore ; quand je pense << que, dans l'expédition de Scythie, on fit dépendre la << vie du roi votre père, et le salut de toute l'armée, << de la bonne foi d'un seul homme, et que, si Hystiée «< le Milésien, eût, comme on l'y exhorta fortement, << rompu le pont qu'on avoit jeté sus le Danube, c'en « étoit fait de l'empire persan. Ne vous exposez point, << seigneur, à un pareil danger, d'autant plus que rien << ne vous y oblige. Prenez du temps pour y réfléchir. « Quand on a délibéré mûrement sur un affaire, quel << qu'en soit le succès, on n'a rien à se reprocher. La pré«< cipitation, outre qu'elle est imprudente, est presque << toujours malheureuse, et suivie de funestes effets. << Sur-tout, grand prince, ne vous laissez point éblouir « ni par le vain éclat d'une gloire imaginaire, ni par le << pompeux appareil de vos troupes. Ce sont les arbres « les plus élevés qui ont le plus à craindre de la foudre. << Comme Dieu seul est grand, il est ennemi de l'or

<< gueil;

gueil; il se plaît à abaisser tout ce qui s'élève ; et <«< souvent les plus nombreuses armées fuient devant << une poignée d'hommes, parce qu'il remplit ceux-ci « de courage, et jette la terreur parmi les autres. >> Après qu'Artabane eut ainsi parlé au roi,il se retourna vers Mardonius, et lui reprocha le peu de sincérité ou de jugement qu'il avoit fait paroître, en donnant au monarque une idée des Grecs entiérement contraire à la vérité, et le tort extrême qu'il avoit de vouloir engager témérairement les Perses dans une guerre, qu'il ne souhaitoit que par des vues d'intérêt et d'ambition. «<Au reste, ajouta-t-il, si l'on conclut pour la << guerre, que le roi, dont la vie nous est chère, de<< meure en Perse; et, pour vous puisque vous le « désirez si fortement, marchez à la tête des armées <«<les plus nombreuses que vous aurez pu amasser. « Cependant, qu'on mette quelque part en dépôt vos << enfans et les miens, pour répondre du succès de la guerre. S'il est favorable, je consens que mes en<< fans soient mis à mort; mais, s'il est tel que je le « prévois, je demande que vos enfans, et vous-même, << à votre retour, soyez traités comme le mérite le << téméraire conseil que vous donnez à votre maître. »

Xerxès, qui n'étoit pas accoutumé à se voir contredire de la sorte, entra en fureur. « Remerciez les « dieux, dit-il à Artabane, de se que vous êtes le « frère de mon père, sans quoi vous porteriez dans le « moment même la juste peine de votre audace. Mais << je vous en punirai autrement en vous laissant ici << parmi les femmes, à qui vous ressemblez par votre << lâche timidité, tandis qu'à la tête de mes troupes, << je marcherai où mon devoir et la gloire m'appellent.»>

[ocr errors]

Le discours d'Artabane étoit très-mesuré et trèsrespectueux : cependant Xerxès en fut extrêmement choqué. C'est le malheur des princes gâtés par la flatterie, de trouver sec et austère tout ce qui est sincère et ingénu, et de traiter de hardiesse séditieuse tout conseil libre et généreux. Ils ne font pas réflexion qu'un homme de bien même n'ose jamais leur dire tout ce qu'il pense, ni leur découvrir la vérité Tome II.

B

,

toute entière, sur-tout dans les choses qui peuvent leur être désagréables: ils oublient que leur plus pressant besoin est de trouver un ami sincère et fidelle qui ne leur cache rien. Un prince doit se croire trop heureux, quand il naît un seul homme, sous son règne, avec cette générosité, qui est le plus précieux trésor de l'état, et, s'il est permis de s'exprimer ainsi, l'instrument de la royauté le plus nécessaire et le plus rare.

[ocr errors]

Xerxès le reconnut dans l'occasion dont il s'agit. Quand son premier emportement de colère fut passé et que la nuit lui eut laissé le loisir de faire réflexion sur les deux différens avis qu'on lui avoit donnés, il reconnut qu'il avoit eu tort de maltraiter de paroles son oncle; et il ne rougit pas de réparer sa faute le lendemain en plein conseil, avouant nettement que le feu de la jeunesse et son peu d'expérience, l'avoient fait manquer à ce qu'il devoit à un prince aussi respectable qu'Artabane, et par son âge, et par sa sagesse ; qu'il lui en demandoit pardon, et qu'il le supplioit de lui continuer ses bonnes graces. Tous ceux qui composoient le conseil furent ravis d'entendre ce discours; ils témoignèrent leur joie en se prosternant tous devant le monarque, et relevant à l'envi la gloire de cette démarche. Cet aveu si sincère, loin de leur paroître une foiblesse dans Xerxès, fut regardé comme l'effort d'ene grande ame, qui s'élève audessus de ses propres fautes, en les avouant avec courage, pour les réparer.

Artabane récompensa cette action de son neveu, en lui donnant en particulier une nouvelle preuve de sa sincérité. « Prince, lui dit-il, la première qualité << d'un roi est de bien penser par soi-même, et de se << rendre docile aux bons avis d'un autre. Vous la « possédez, Xerxès; et si vous suiviez votre heureux << naturel, vous ne vous porteriez qu'à des actes de sa<< gesse et de modération. Il n'y a que les discours << empoisonnés des flatteurs qui vous poussent à des <<< partis violens; comme la mer, tranquille par elle<< même n'est troublée que par une impression << étrangère. Au reste, ce qui m'a affligé dans ce que

,

vous m'avez dit, n'a pas été mon injure personnelle, «< mais le tort que vous vous faisiez à vous-même, par << votre mauvais choix entre les deux conseils qu'on <«< vous donnoit, rejetant celui qui vous portoit à des <«< sentimens de modération et d'équité, et embrassant « l'autre, qui ne tendoit, an contraire, qu'à nourrir l'orgueil, et à irriter l'ambition.

9. Henri IV, avant que d'être élevé sur le trône de la France, vouloit épouser la comtesse de Guiche samaîtresse. Il demanda à Théodore-Agrippa d'Aubigné son avis sur ce mariage. Il le prévint, en lui marquant la grande envie qu'il avoit de prendre ce parti. Il lui allégua l'exemple de plusieurs princes qui avoient fait leur bonheur en épousant des femmes qu'ils aimoient, quoique au-dessous d'eux par leur condition : il nomma au contraire, plusieurs souverains qui, s'étant mariés par politique, avoient fait des alliances ruineuses à leurs états; enfin il en dit assez pour déterminer d'Aubigné à lui donner un conseil conforme à son inclination. Mais d'Aubigné prit hardiment le contre-pied. «Rien, dit-il à ce prince, n'est si mépri<< sable que ces courtisans qui s'appuient des histoi« res que votre majesté a rapportées, afin d'autoriser << la passion condamnable de leur maître. Ces exem<< ples ne peuvent point vous convenir, sire. Ces << princes jouissoient tranquillement de leurs états : <«< ils n'avoient point d'ennemis sur les bras ; ils n'é

toient point, sire, errans comme vous, qui ne con« servez votre vie et ne soutenez votre fortune que « par votre vertu et votre renommée. Vous devez aux « Français de grandes actions, de beaux exemples. « Je ne vous impute point la lecture de ceux que « vous avez cités : ils vous ont été fournis par des << conseillers infidelles, qui ont voulu nourrir votre << passion. Je ne prétends point que vous y renonciez <tout-à-coup. Je sais, par mon expérience, combien «< coûtent de pareils sacrifices. Mais enfin conduisez« vous en roi : soyez roi, ou rien. Rendez-vous assidu << dans votre conseil, que vous abhorrez; consacrez « plus de temps aux affaires nécessaires, et préférez

« السابقةمتابعة »