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14. Antigonus, roi d'une partie de l'Asie, et Eumène, roi de Cappadoce, se faisoient une guerre sanglante depuis la mort d'Alexandre-le-Grand, dont ils avoient été tous deux capitaines. Après plusieurs défaites, le dernier se renferma dans le château de Nora; et Antigonus vint l'y assiéger. Avant de commencer ses travaux, ce prince envoya proposer une entrevue à Eumène; mais celui-ci répondit que son rival avoit avec lui plusieurs de ses amis qui pourroient prendre sa place, s'il venoit à manquer, et commander son armée; au lieu qu'il n'en avoit pas un seul qui pût le remplacer, parmi ceux dont il avoit entrepris la défense; qu'ainsi, il n'avoit qu'à lui envoyer des otages, s'il vouloit entrer en conférence. Antigonus insista, et lui fit voir que c'étoit au plus foible à venir parler au plus fort. « Jamais je ne reconnoîtrai << d'homme plus fort que moi, répondit Eumène, << tant que je serai maître de mon épée. »

15. Quand Alexandre se fut emparé de tous les états possédés par les rois de Perse, les Macédoniens, devenus insolens, l'importunoient sans cesse par leurs demandes insensées, et vouloient tout emporter de force. La patience du prince ne pouvant plus y tenir, il les fit ranger d'un côté ; puis, ayant fait mettre les Perses de l'autre : « Macédoniens, dit-il, choi<< sissez entre vous qui vous voudrez pour vous com«mander; je vais me mettre à la tête des Perses: << combattons. Si vous êtes vainqueurs, je vous obéirai; << si vous êtes, vaincus, vous saurez par expérience « que sans moi vous ne pouvez rien, et vous me se<< rez soumis. » Les Macédoniens, étonnés de cette fermeté vraiment royale, rentrèrent dans le devoir, et ne pensèrent plus à leurs prétentions aveugles.

16. Valentinien ayant été proclamé auguste, ses soldats voulurent le forcer de se nommer un collégue. Mais le nouvel empereur, le plus intrépide de tous les hommes, sentit que céder, dès le premier pas, à la volonté des légions, c'étoit leur laisser reprendre l'autorité qu'elles venoient de lui conférer. Montrant donc un air assuré, après avoir imposé silence aux plus

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turbulens, en les traitant de séditieux, il parla en ces termes : « Braves défenseurs de nos provinces, vous « venez de m'honorer du diadême. Je connois tout le << prix de cette préférence à laquelle je n'ai jamais << aspiré. Toute mon ambition s'étoit bornée à me pro«curer la satisfaction intérieure, quiconronne la vertu. << Il dépendoit de vous tout à l'heure de me choisir << pour votre souverain; c'est à moi maintenant à dé« cider des mesures qu'il faut prendre pour votre su<< reté et votre gloire. Ce n'est pas que je refuse de « partager ma puissance, je şens tout le fardeau du << pouvoir : je reconnois qu'en m'élevant sur le trône << vous n'avez pu me placer au-dessus de l'humanité. Mais votre élection ne se soutiendra qu'autant que « vous me laisserez jouir des droits dont vous m'avez « revêtu. J'espère que la providence secondant mes «< bonnes intentions, m'éclairera sur le choix d'un col<< légue digne de vous et de moi. Vous savez que dans « la vie privée c'est une maxime de prudence de << n'adopter pour associé que celui dont on a fait une « sérieuse épreuve. Combien cette précaution est-elle << plus nécessaire pour le partage de l'autorité souve« raine, où les dangers sont si fréquens, et les fautes « irréparables ! Reposez-vous de tout sur ma vigilance. En me donnant l'empire, vous ne vous êtes réservé << que l'honneur d'une fidelle obéissance. Songez seu<«<lement à profiter du repos de l'hiver pour rétablir vos << forces, et vous préparer à de nouvelles victoires. » La noble fermeté de ce discours arrêta les murmures. Valentinien acquit dès-lors toute la confiance qu'auroit pu procurer un long règne soutenu avec dignité; et ces fières cohortes, qui, un moment auparavant, prétendoient lui commander, frappées d'une impression de respect qui dura autant que sa vie, le conduisirent au palais, au milieu de leurs aigles et de leurs enseignes, avec toutes les marques d'une entière soumission.

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17. Léontius et Mégaléas, officiers macédoniens, abusoient étrangement des bontés que Philippe, leur maître, avoit pour eux. En vain Aratus, général des Achéens, vouloit détromper ce monarque sur le compte

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de ces deux perfides ministres. Il les avoit eus pour conseillers dans sa première jeunesse sa prévention pour eux étoit une habitude. Ils hâtèrent eux-mêmes leur perte. Un jour, au sortir d'un grand repas, ils poursuivirent Aratus, à coups de pierres, jusques dans sa tente. Tout le camp fit en émeute. Le bruit vint jusqu'aux oreilles du roi, qui, s'étant fait informer exactement de tout ce qui étoit arrivé, condamna Mégaléas à une amende de vingt mille écus, et le fit mettre en prison. Cette nouvelle fut un coup de foudre pour Léontius. Cependant il crut devoir s'armer de résolution; et, suivi de plusieurs soldats, il vint à la tente de Philippe, persuadé que ce prince intimidé par ce cortége, changeroit bientôt de sentiment. «Qui a été assez hardi, demanda d'un ton « insolent l'audacieux capitaine, pour porter les « mains sur Mégaléas, et pour le mettre en prison? << - C'est moi; c'est votre maître et le sien, répondit « fiérement le roi. » Cette noble fermeté effraya Léontius. Il jeta quelques soupirs, et se retira consterné. Quelques jours après, il se rendit caution de l'amende imposée à Mégaléas, qui par là recouvra sa liberté.

18. Legrand-duc de Toscane, François de Lorraine, vint former, en 1741, le siége de Lintz, qu'il pressa avec fureur. Les Francais défendent la place avec le courage le plus intrépide, et tandis qu'ils se retirent dans une partie de la ville, les troupes impériales entrent dans l'autre, le flambeau à la main. M. Duchâtel, lieutenant-général, est détaché pour proposer les articles d'une capitulation honorable. « Je veux, dit le << grand-duc, avoir la garnison prisonnière de guerre. Eh bien! répondit M. Duchátel, recommencez « donc à brûler; et nous allons recommencer à tirer. » Cette ferme repartie adoucit le prince, qui accorda tous les honneurs de la guerre à cette hrave garnison.

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19. Le philosophe Anaxagore, le premier qui donna lui-même ses ouvrages au public, exilé d'Athènes parce qu'il avoit enseigné que le soleil est une masse de feu ardent, avoit choisi pour retraite la ville de Lampsaque. Il y parloit en public sur quelque matière philo

Tome II.

sophique, lorsqu'on vint lui annoncer la mort de ses deux fils. Il interrompit son discours, garda quelque temps le silence; puis, reprenant tout-à-coup la parole, il dit d'un air ferme : « Né mortel, je savois << que je les avois engendrés mortels. » Il continua avec la même tranquillité, renfermant sa douleur au dedans de lui-même. Voyez AssURANCE, CONSTANCE, EGALITÉ, INTRÉPIDITÉ.

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FIDÉLITÉ.

1. THÉODORIC, quoique arien, avoit un ministre catholique qu'il aimoit beaucoup, et auquel il accordoit toute sa confiance. Ce ministre crut pouvoir s'assurer de plus en plus les bonnes graces de son maître, en renoncant à sa religion: il embrassa l'arianisme. Théodoric l'ayant appris, lui fit trancher la tête. « Si cet << homme, dit-il, est infidelle à Dieu, me sera-t-il « fidelle, à moi qui ne suis qu'un homme ? »

2. Sous la minorité de Louis XIV, deux gentilshommes français, l'un de Picardie, nommé d'Esclainvilliers, et l'autre de Champagne, appelé de Renneville, tous deux morts lieutenans - généraux, mangeoient un jour ensemble avec plusieurs autres officiers. D'Esclainvilliers dit à la compagnie : « Buvons « à la santé du roi ; » puis, s'adressant à Renneville : << Mon ami, ajouta-t-il, je te la porte; car, vive Dieu! <«< si tous les gentilshommes nous ressembloient, il n'y << auroit point de traîtres en France. » Aussitôt tous les convives, mettant la main sur leur épée, prièrent Dieu de changer en poison le vin qu'ils alloient boire à la santé du roi, s'ils avoient d'autre pensée dans l'ame, que de verser leur sang pour le service de leur prince et de leur patrie.

3. L'archiduc d'Autriche étant entré dans Madrid en 1710, fit dire au marquis de Mansera, vieillard de près de cent ans, président du conseil de Castille, de venir lui baiser la main : « Je n'ai qu'une foi, répondit

« ce généreux centenaire; je n'ai qu'un roi, qui est « Philippe V, auquel j'ai prêté serment de fidélité. Je << reconnois l'archiduc pour un grand prince, mais « non pas pour mon souverain. J'ai vécu cent ans sans « avoir rien fait contre mes devoirs; et, pour le peu << de jours qui me restent à vivre, je ne veux pas me « déshonorer. >>

4. Du temps de la Ligue, Nicolas Potier de Novion de Blancménil, président à mortier, fut sur le point d'être condamné à être pendu par les Seize. Comme on alloit le juger, le duc de Mayenne revint à Paris. Ce prince avoit toujours eu pour Blancménil une vénération qu'on ne pouvoit refuser à la vertu. Il alla luimême le tirer de prison. Le président se jeta aux pieds du prince, et lui dit : « Monseigneur, je vous ai obli<< gation de la vie; mais j'ose vous demander une plus < grande grace: c'est de me permettre de me retirer << auprès de Henri IV, mon légitime souverain. Je « vous reconnoîtrai toute ma vie pour mon bienfai<«<teur, mais je ne puis vous servir comme mon maî<< tre. » Le duc de Mayenne, touché de ce discours, le releva, l'embrassa, et le renvoya à Henri IV.

5. Le duc de Guise, ayant soulevé le peuple de Paris, le roi Henri III fut obligé de se retirer à Chartres, et le duc resta seul maître de la capitale. Après avoir appaisé le tumulte, il alla rendre visite au premier président, Achilles de Harlai. Il le trouva qui se promenoit dans son jardin. Le magistrat s'étonna si peu de sa venue, qu'il ne daigna pas seulement tourner la tête, ni discontinuer sa promenade commencée, laquelle achevée qu'elle fut, et étant au bout de son allée, il retourna, et, en retournant, il vit le duc de Guise qui venoit à lui. Alors il lui dit : « C'est grand'pitié que le << valet chasse le maître! Au reste, mon ame est à Dieu, « mon cœur est à mon roi, et mon corps est entre les << mains des méchans : qu'on en fasse ce qu'on voudra. » 6. L'orateur Marc-Antoine étant cité en justice pour un crime capital dont on le chargeoit, ses accusateurs demandèrent qu'il livrât, pour être appliqué à la tion, un jeune esclave qu'ils prétendoient être complice

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