صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

<< Ne croyez pas que, pour reconnoissance, je pré«< tende exiger de vous aucun service injuste ou désho<<norant. Ce que je vous demande ne peut que vous faire honneur, et augmenter votre pouvoir dans votre << patrie. Je vous conjure d'abord de m'aider de tout << votre crédit à gagner le sénat des Romains, qui jus« qu'ici s'est rendu trop difficile, qui n'a jamais voulu donner les mains à un accommodement, et qui n'a <«< consulté en aucune manière les règles de la modération. Faites-lui bien comprendre, je vous prie, que » j'ai donné ma parole de secourir les Tarentins et les « autres Grecs qui habitent cette côte de l'Italie, et <«< qu'à la tête d'une armée puissante et victorieuse, je <«< ne puis en honneur les abandonner. Cependant il «< m'est survenu quelques affaires pressantes qui me << rappellent dans mes états; et c'est ce qui me fait << désirer encore plus ardemment la paix. Au reste, si « ma qualité de roi me rend suspect au sénat, devenez << vous-même mon garant; et joignez-vous à moi pour << m'aider de vos conseils dans toutes mes entreprises, <«<et pour commander mes armées sous moi. J'ai << besoin d'un homme vertueux et d'un ami fidelle : « vous, de votre côté, vous avez besoin d'un prince « qui, par ses libéralités, vous mette en état de << faire plus de bien. Ne refusons point de nous aider << l'un et l'autre, et de nous prêter un mutuel secours.»

Pyrrhus ayant parlé de la sorte, Fabricius, après un moment de silence, lui répondit en ces termes : « Sei<< gneur, il est inutile que je dise rien de l'expérience << que je puis avoir dans le gouvernement des affaires << publiques et particulières, puisque vous en êtes in«formé d'ailleurs. A l'égard de ma pauvreté, vous << me paroissez aussi la connoître assez, pour que je <«< ne sois point obligé de vous dire que je n'ai ni ar«< gent que je fasse profiter, ni esclaves qui me produi<< sent des revenus; que tout mon bien consiste dans << une maison de peu d'apparence et dans un petit champ << qui fournit à mon entretien. Si vous croyez néan<< moins que la pauvreté rende ma condition inférieure « à celle de tout autre Romain, et que, remplissant

[ocr errors]

«

[ocr errors]

« les devoirs d'un honnête homme, je sois moins consi❤ « déré parce que je ne suis pas du nombre des riches, << permettez-moi de vous dire que l'idée que vous avez << de moi n'est pas juste et vous trompe, soit qu'on vous << ait inspiré ces sentimens, soit que vous en jugiez par « vous-même. Si je ne possède pas de grands biens, « je n'ai jamais cru, et ne crois point encore que mon <«< indigence m'ait jamais fait aucun tort, soit que je me <«< considère comme peronne publique, ou comme sim«ple particulier. Ma patrie, à cause de ma pauvreté, « m'a t-elle jamais éloigné de ces glorieux emplois qui << sont le plus noble objet de l'émulation de tous les << grands cœurs? Je suis revêtu des plus hautes digni«tés.Onme met à la tête des plus illustres ambassadeurs. << J'assiste aux plus augustes cérémonies. On me confie «<les plus saintes fonctions du culte divin. Quand il << s'agit de délibérer sur les affaires les plus importan<< tes, je tiens mon rang dans les conseils, et j'y donne << mon avis. Je vais de pair avec les plus riches et les plus puissans; et si j'ai à me plaindre, c'est d'être trop << loué et trop honoré par mes concitoyens. Pour rem<< plir tous ces emplois, je ne dépense rien du mien, << non plus que les autres Romains. Rome ne ruine << point ses citoyens en les élevant à la magistrature. « C'est elle qui donne tous les secours nécessaires à << ceux qui sont dans les charges, et qui les leur four<< nit avec libéralité et magnificence: car, il n'en est << pas de notre ville comme de beaucoup d'autres, où « le public est très-pauvre, tandis que les particuliers « possèdent de grandes richesses. Nous sommes tous « riches, dès que la république l'est, parce qu'elle l'est << pour nous. En admettant également aux emplois pu«blics le riche et le pauvre, selon qu'elle les en juge dignes, elle égale tous ses citoyens, et ne reconnoît <<< entre eux d'autre différence et d'autre distinction que << celle du mérite et de la vertu. Pour ce qui regarde << mes affaires particulières, loin de plaindre mon sort, << je m'estime le plus heureux de tous les hommes, lors« que je me compare aux riches ; et je sens en moi« même, dans cet état, une sorte de complaisance et Tome II. F

« même de fierté. Mon petit champ, quoique très-me<< diocre me fournit tout ce qui m'est nécessaire << pourvu que j'aie soin de le bien cultiver, et d'en << conserver les fruits. M'en faut-il davantage? Tout << aliment m'est agréable, quand il est assaisonné par la « faim je bois avec les délices quand j'ai grande soif; je << goûte les douceurs du sommeil quand j'ai bien fatigue. « Je me contente d'un habit qui me metà couvert des ri<< gueurs de l'hiver; et entre tous les meubles qui peu<< vent servir à un même usage, le plus simple est celui « qui m'accommode le mieux. Je serois déraisonnable. <«<et injuste si j'accusois la fortune: elle me fournit << tout ce que demande la nature. Quant au superflu, <<< elle ne me l'a point donné; mais en même temps ellene m'en a pas inspiré le désir. De quoi puis-je donc me « plaindre? Il est vrai que, faute de cette abondance, je me vois hors d'état de soulager ceux qui sont dans le besoin avantage unique qu'on pourroit envier aux riches. Mais, du moment que je fais part à la répu~ «blique et à mes amis du peu que je possède, que je rends à mes concitoyens tous les services dont je suis <«< capable, et qu'enfin je fais tout ce qui dépend de «< moi, que dois-je me reprocher? Jamais la pensée de

[ocr errors]

les

m'enrichir ne m'est venu dans l'esprit. Employé de<< puis long-temps dans l'administration de la républi« que, j'ai eu mille occasions d'amasser de grandes som«mes d'argent sans aucun reproche. En peut-on désirer « une plus favorable que celle qui se présenta il y a <«< quelques années? Revêtu de la dignité consulaire, je «< fus envoyé contre les Samnites, les Lucaniens, << Brutiens, à la tête d'une nombreuse armée. Je ravageai une grande étendue de pays; je vainquis l'en<< nemidans plusieurs batailles; j'emportai d'assaut plu<< sieurs villes pleines de butin et d'opulence; j'enrichis << toute l'armée de leurs dépouilles : je dédommageai << chaque citoyen de ce qu'il avoit fourni pour les frais <«< de la guerre ; et ayant recu les honneurs du triom« phe, je mis encore quatre cent mille écus dans le << trésor public. Après avoir négligé un butin si consi« dérable, dont je pouvois prendre tout ce que j'aurois

voulu; après avoir méprisé des richesses si juste<< ment acquises, et sacrifié à l'amour de la gloire les << dépouilles de l'ennemi, me conviendroit-il d'ac<< cepter l'or et l'argent que vous m'offrez ? Quelle « idée auroit-on de moi ? quel exemple donnerois-je « à mes concitoyens? De retour à Rome, comment << soutiendrois-je leurs reproches, et leurs regards << mille fois plus terribles encore? Nos censeurs, ces << magistrats préposés à veiller sur la discipline et sur les mœurs, ne m'obligeroient-ils pas de rendre << compte devant tout le monde des présens que vous « voulez me faire accepter? Non, prince; vous gar« derez, s'il vous plaît, vos richesses; et moi, ma « pauvreté et ma réputation. »

[ocr errors]

Le lendemain, le roi d'Epire voulut surprendre l'ambassadeur romain et l'étonner. Jamais il n'avoit vu d'éléphant armé et prêt à combattre. Le prince commanda au capitaine qui conduisoit les exercices de ces animaux guerriers, de placer le plus grand derrière une tapisserie, dans le lieu où il seroit en conversation avec Fabricius, et de le faire paroître tout-à-coup quand il l'ordonneroit. L'officier obéit. On donne le signal; la tapisserie tombe; l'énorme animal se prosterne, se retourne, levant sa trompe sur la tête du Romain, et jetant un cri horrible et épouvantable. Fabricius, tranquillement et sans témoigner ni surprise ni crainte, dit à Pyrrhus en souriant: «Ni votre or ne m'é<< muthier, ni votre éléphantne m'étonne aujourd'hui. » Le monarque admirant la grandeur d'ame de ce héros; et charmé de sa prudence et de sa sagesse, désira encore avec plus de passion de faire alliance et amitié avec sa ville, au lieu de lui faire la guerre ; il le prit en particulier, il le conjura encore une fois de vouloir bien, après qu'il auroit moyenné un accommodemententre les deux états, s'attacher à lui et vivre dans sa cour, où il auroit la première place parmi tous ses amis et tous ses capitaines. « Je ne vous le conseille<< rois pas, repartit Fabricius en lui parlant à l'oreille et << en souriant, et vous entendez peu vos intérêts; car << ceux qui vous honorent et qui vous admirent présen

emplois civils. Valentinien fut flatté d'apprendre que les magistrats qu'il choisissoit fussent jugés dignes de l'épiscopat; et, dans le transport de sa joie : «< Sei<< gneur,» s'écria-t-il, « graces vous soient rendues de «< ce que vous voulez bien commettre le salut des ames <«< à celui à qui je n'avois confié que le soin des corps! » L'autorité du prince, jointe aux instances des prélats et à la persévérance du peuple, força enfin la modestie d'Ambroise. Il fut baptisé; car il n'étoit encore que catéchumène, quoique âgé d'environ trente-cinq ans. Il reçut l'onction épiscopale; et, par le crédit que lui procura auprès des empereurs l'élévation de son ame, soutenue d'une éminente sainteté, son élection fut un événement aussi avantageux pour l'état que pour l'Eglise. Dès les premiers jours de son épiscopat, on vit un heureux présage de la généreuse liberté dont il feroit usage avec les princes, et des égards que les princes auroient pour ses avis. Il se plaignit à l'empereur de quelques abus qui s'étoient glissés dans la magistrature. Valentinien lui répondit : «Je connoissois votre << franchise; elle ne m'a pas empêché de vous donner << mon suffrage. Continuez, comme la loi divine vous << l'ordonne, de nous avertir de nos erreurs. »

3. Le sophiste Antiochus s'emportoit facilement ; mais la philosophie lui avoit appris à connoître son défaut. Comme il n'étoit pas assez maître de luimême pour parler tranquillement sur les abus de son siècle, il s'abstenoit de monter à la tribune aux harangues, et de se mêler du gouvernement. Quelqu'un se moquoit de cette sage défiance, et l'accusoit d'être. à cet égard d'une timidité condamnable : « Ce n'est « pas le peuple,» répondit-il, « c'est Antiochus que << je crains. >>

4. La défiance, dans un gouverneur de place, est Peffet d'une prudence active et éclairée. Le grand-duc de Toscane, François, avoit fait dire à César Cavaniglia, castellan de Livourne, de rendre les plus grands honneurs à un vice-roi de Naples, qui eut la curiosité de voir la citadelle où il commandoit. Dom César le prie d'y venir avec peu de suite; et, avant de le

« السابقةمتابعة »