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afin d'ajouter un poids de plus à son exemple et à son invitation. Un autre se souvient de l'indemnité payée aux émigrés, et demande qu'on la restitue au peuple, capital et intérêts. Celui-ci veut que le riche soit frappé dans sa vanité; celui-là qu'il rende compte jour par jour de sa fortune, et qu'au delà d'une certaine somme on lui appliquc le procédé sommaire inventé par un malfaiteur de l'antiquité. D'autres dressent des listes d'opulents qui ressemblent à des listes de proscrits, et désignent des noms comme points de mire aux plus mauvais instincts. Chez tous se retrouve le désir d'arriver aux coffres les mieux pourvus, et d'y exécuter de fréquentes et profondes saignées.

Atteindre la richesse! frapper la richesse! mais quel est le régime qui ne l'a point essayé? quel est celui qui, dans les heures de détresse, n'a pas franchi la limite qui sépare les moyens arbitraires des moyens réguliers? En toute occasion semblable, voici ce qui est arrivé : A mesure qu'on exerçait sur elle une pression plus forte, la richesse disparaissait comme un morceau de glace disparaît sous les doigts qui l'étreignent. On croyait la tenir encore, que déjà elle s'était évanouie. Il faut à la richesse, pour naître et se développer, des conditions de

longue et constante sécurité. Elle ne supporte ni les essais ni les violences. En fait de prélèvements et de dîmes, elle n'accepte que ce qui lui convient, et trouve d'ingénieux moyens pour se dérober à ce qui lui répugne. Lorsqu'on l'épouvante et qu'on la froisse, elle quitte sa forme ostensible pour recourir à mille déguisements. Elle échappe ainsi aux poursuites et trompe la main qui croyait la saisir. Trop vivement pressée, elle va chercher dans un pays moins hostile des lois meilleures et un régime plus hospitalier. Ainsi l'arme dont on la frappe se retourne contre qui s'en sert, et le pays qui lui déclare la guerre est voué à l'appauvrissement. Tout s'y éteint la vie de luxe d'abord, puis l'activité même. C'est une déchéance qui se prolonge jusqu'au retour d'un sentiment moins ombrageux et d'une politique plus tolérante.

Qu'on ne s'y trompe point: toute forme de progression dans l'impôt nous conduirait là. Dès que les fortunes arriveraient à cette limite où la part de l'État serait égale ou supérieure à celle de l'individu, l'ardeur d'acquérir s'éteindrait dans les âmes, et il n'y resterait que le désir de se soustraire par la fraude aux violences de la loi. De là une distribution anticipée des fortunes sur plusieurs têtes; de là des fideicommis sans

nombre; de là un fractionnement nouveau dans la propriété; de là mille ruses qu'il est facile de prévoir. L'effet en serait doublement fatal: d'un côté, il élèverait outre mesure les valeurs insaisissables à l'impôt; de l'autre, il frapperait de discrédit les valeurs qui ne peuvent s'y dérober, le sol et les constructions, c'est-à-dire la véritable et solide richesse. Et non-seulement le fonds serait déprécié, mais toute amélioration s'arrêterait à l'instant même. En aucun temps l'homme ne mit son intelligence et ses bras à la merci de l'exaction. Quand il ne protesta point par la révolte, il protesta par l'inertie. C'est ce qui arriverait. Élever le revenu quand le fisc doit s'en arroger la meilleure part, quel rôle de dupe ! et personne n'est dupe volontiers. D'où il suit que les grands efforts du génie humain tendraient à cesser ou à décroître, et qu'on verrait peser sur le pays, comme niveau, une médiocrité voisine de la misère.

Ainsi on plaçait la France entre deux vertiges: l'un qui lui conseillait de se démettre de son activité entre les mains du gouvernement; l'autre qui entendait porter dans les entrailles du pays le fer de la fiscalité, afin d'en extraire en bloc tout l'or qu'elles pouvaient contenir. Double dommage, double cause de ruine. Sous le mono

pole officiel, l'activité ne pouvait que dépérir, et la fortune publique succomber dans les étreintes de l'exaction. L'heure était donc mal choisie pour imposer à la communauté de nouvelles charges, de nouveaux sacrifices; cependant on y songeait, et sur l'échelle la plus étendue. Telle était, par exemple, l'obligation désormais imposée à l'État de se substituer au capitaliste volontaire, et de fournir des instruments de travail à quiconque en demanderait. Tel était encore le devoir impérieux d'assurer aux enfants de la grande famille, sans catégories ni distinction, les avantages de l'éducation gratuite et de l'instruction à tous les degrés.

Quoi de plus simple? et que de bienfaits en un trait de plume! Assurer à l'homme l'emploi de ses facultés et la culture de son esprit, est-il rien de plus juste et de plus naturel? Qui ne signerait volontiers un tel programme? Oui, le programme est beau, il est digne du cœur; mais ce serait s'exposer à de cruels mécomptes que de le regarder comme sérieux. Pourquoi promettre ce qu'on ne peut tenir, et placer sur le berceau de la révolution des enseignes mensongères? Fournir des instruments de travail à qui en demande, les trésors du globe n'y suffiraient pas! La France compte dix millions d'hommes et autant de

femmes qui vivent du salaire. En supposant qu'un capital de mille francs fût nécessaire à chacun d'eux pour s'en affranchir, ce n'est pas moins de deux milliards qu'il faudra trouver pour réaliser cette émancipation. Où seraient ensuite les garanties du créancier vis-à-vis de cette masse innombrable de débiteurs? Qui assure que ce capital destiné à l'affranchissement du travail n'irait pas s'engloutir dans les tâtonnements de l'inexpérience et les désordres de la vie privée? Est-il possible d'imaginer une surveillance efficace en présence de tant d'intérêts épars? Et si, au lieu de prêts individuels, l'État vient à organiser un système de prêts collectifs et solidaires, qui lui fait augurer, de la part des associations, plus de sagesse, plus d'entente, plus d'habileté que de la part des individus? Si l'une de ces associations succombe, le vide est plus grand et le mal plus considérable. Après avoir pourvu aux premières nécessités, l'État se portera-t-il comme réparateur de toutes les fautes, de toutes les incuries, de toutes les malversations? Ce serait une prime offerte au péculat et à la négligence.

par

Mais, dira-t-on, c'est seulement par des essais partiels que l'État procédera. Il n'entend pas appliquer à tous indistinctement cette commandite

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