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plaintes, quoique l'autorité leur ait été MNEMON. confiée principalement pour la défenfe des pauvres, qui n'ont point d'autres protecteurs. Mais fi ces plaintes viennent de la part d'un Grand, d'un puiffant, d'un riche, de qui l'on peut avoir à craindre ou à espérer, cette même autorité qui étoit lente & endormie, devient tout-à-coup vive & agiffante; preuve certaine que ce n'est pas l'amour de la juftice qui la met en mouvement. C'eft ce qui paroit ici dans la conduite des Magistrats de Lacédémone. Pharnabaze, las d'effuier les injuftices de Lyfandre qui pilloit & ravageoit les provinces où il commandoit, aiant envoié à Sparte des ambaffadeurs pour fe plaindre des torts qu'il avoit reçus, les Ephores le rappellérent. Lyfandre étoit alors dans l'Hellefpont. La lettre des Ephores le jetta dans une grande confternation. Comme il craignoit fur tout les plaintes & les accufations de Pharnabaze, il fe hâta de s'expliquer avec lui, dans l'efpérance qu'il l'adouciroit, & feroit fa paix. Il alla donc le trouver, & le pria d'écrire aux Ephores une autre lettre, où il marqueroit qu'il étoit content de lui. Mais Ly

ART A-fandre, dit Plutarque, en s'adressant X ER X E ainfi à Pharnabaze, ignoroit ce* proverbe, A fourbe fourbe & demi. Le Satrape lui promit tout ce qu'il voulut. En effet il écrivit devant Lyfandre une lettre telle qu'il la pouvoit défirer, mais il en avoit préparé une autre toute contraire. Et quand il falut la cacheter, comme ces deux lettres étoient de même grandeur & de même figure, il mit adroitement à la place de la premiére celle qu'il avoit écrite en fecret qu'il cacheta, & qu'il lui donna.

Lyfandre partit bien content, & étant arrivé à Lacédémone, il alla defcendre au palais où le Sénat étoit affemblé, & rendit aux Ephores la lettre de Pharnabaze. Mais il fut étrangement furpris, quand il en entendit le contenu, & fe retira fort troublé. Peu de jours après il revint au Sénat, & dit aux Ephores qu'il étoit obligé d'aller au temple d'Ammon pour s'acquitter des facrifices qu'il avoit voués à ce dieu avant fes combats. Ce pélerinage n'étoit qu'un prétexte, qui

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Le proverbe grec eft Cré- foient pour les plus grands tois contre Crétois : fondé fourbes & les plus grands fur ce que les Crétois paf-menteurs du monde.

couvroit la peine qu'il avoit de vivre MNEMON. en fimple particulier à Sparte, & d'y fubir le joug de l'obéiffance, lui qui jufques-lá avoit toujours commandé. Accoutumé depuis lontems au commandement des armées, & aux dif tinctions flateuses d'une efpéce de fouveraineté qu'il avoit exercée dans l'Afie, il ne pouvoit fouffrir cette égalité humiliante qui le confondoit dans la multitude, ni se réduire à la fimplicité d'une vie privée. Aiant obtenu fon congé après beaucoup de difficultés, il s'embarqua.

Dès qu'il fut parti, les Rois aiant fait réflexion qu'il tenoit dans fa dépendance toutes les villes par le moien des Gouverneurs & des Magiftrats qu'il y avoit établis, & aufquels il avoit donné toute autorité, & que parlà il étoit véritablement feigneur & maître de toute la Gréce, travaillérent à y rétablir le gouvernement du peuple, & à en chaffer toutes fes créatures & tous fes amis. Ce changement excita d'abord un grand tumulte. C'est dans ce tems que Lyfandre, averti que Thrafybule fongeoit à rétablir la liberté dans fa patrie, revint en toute diligence à Sparte, & perfuada aux

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ARTA- Lacédémoniens de foutenir dans AXER X E thénes le parti des Nobles. Nous avons marqué ci-devant comment Paufanias rempli d'un efprit plus équitable & plus généreux, rendit la paix aux Athéniens, & coupa par ce moien, dit Plutarque, les ailes à l'ambition de Lyfandre.

CHAPITRE SECOND. Le jeune Cyrus, foutenu des troupes Grecques, entreprend de détrôner fon frere Artaxerxe. Il eft tué dans le combat. Fameufe retraite des Dixmille.

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'ANTIQUITÉ ne présente guéres d'événemens plus mémorables que ceux dont j'entreprends ici de faire le récit. On voit d'une part un jeune Prince, rempli d'ailleurs d'excellentes qualités, mais dévoré d'ambition, porter au loin la guerre contre fon frere & fon fouverain, & l'aller attaquer prefque dans fon propre palais, pour lui arracher en même tems le fceptre & la vie : on le voit, disje, tomber mort dans le combat aux piés de ce même frere, & terminer

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par une fin fi funefte une entreprise MNEMON. également éclatante & criminelle. De l'autre côté, a les Grecs qui l'ont fuivi, deftitués de tout fecours après la perte de leurs chefs, fans alliés, fans vivres, fans argent, fans cavalerie ni gens de trait, réduits à moins de dix mille hommes, ne trouvant de reffource qu'en eux-mêmes & dans leur courage, foutenus uniquement par le vif defir de conferver leur liberté & de revoir leur patrie: ces Grecs avec une fiére & intrépide affurance, font leur retraite devant une armée d'un million d'hommes, & victorieuse; traversent cinq ou fix cens lieues, malgré les plus groffes riviéres & des défilés fans nombre; & arrivent enfin dans leur pays à travers mille nations féroces & barbares, vainqueurs de tous les obftacles qu'ils ont rencontrés fur leur route, & de tous les périls que la perfidie cachée ou la force ouverte leur ont fait effuier.

a Poft mortem Cyri, tiones & barbaras gentes, neque armis à tanto exer- per tanta itineris fpatia citu, neque dolo capi po- virtute fe ufque termituerunt; revertentefque nos patriæ defenderunt. inter tot indomitas na- Juftin. lib. 5. cap. 11.

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