صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

paille étant en deux parties. La suite du récit nous apprend que le poète et son cœur, de nouveau bons amis, s'allèrent de nouveau promener; voilà qui est inventif! et qu'ayant avisé, dans un bosquet, un coquardeau de France, c'est à dire un galantin, un muguet, un conteur de fleurettes, tout vestu de vert, qui faisoit le joyeux, ils se tapirent derrière un buisson pour apprendre le sujet de cette joie. Or, ce qui faisait la joie du coquardeau, c'étaient les grants biens d'amours qu'il ne se lassait de vanter. L'acteur, ou le renonceur d'amours, réfute cet hymne assez plat en vers satiriques tout aussi plats, et puis survient un autre galant, vêtu de jaune doublé de noir, dont le cueur est plein de dueil, du malheur d'amer. Le renonceur d'amours ne contredit pas cette fois; loin de là, il s'évertue à médire des femmes et des galans. Une dame intervient alors qui plaide pour l'amour, très pertinemment à ce qu'ilsemble, et qui donne aux amoureux la recette suivante pour n'avoir point à s'en plaindre :

[ocr errors]

< Servez-moi soir et matinée,

Et je ferai que vostre peine

« Sera si bien reguerdonnée

Que joye vous sera prochaine, etc., etc. »

Le renonceur réfute la dame aussi bien qu'il a fait le coquardeau; mais celui-ci, mal-content, prend de nouveau la parole, et cette fois plus vivement. Il se cite pour exemple; il n'a aimé qu'une seule femme au moins d'une amour ferme et pure, et s'en étant bien trouvé, il met les maux de la galanterie sur le compte de ces amoureux si bestes

« Qui amusent et rompent leurs testes

» Pour aymer ce qui d'eux n'a cure, etc., etc., etc.>>

Le galant jaune ramasse la balle du coquardeau ou galant vert, et la lui renvoie au visage, en lui prédisant que son cueur ne tardera pas à estre noirci de deuil, en despit de ses discours amoureux, aspre comme moutarde; la dispute s'échauffant, le renonceur d'amours est pris pour juge. Autre plaidoyer contradictoire devant le renonceur. Le galant jaune devient très impertinent pour l'amo l'amour.

« Je scay bien ce que peut en estre, dit-il,

>> Car je l'ai servi longuement

>> Et congnois tout au long son estre

»Sa fin et son commencement.

» Mais, pour en parler pleinement,

D

Qui plus le sert, plus hait sa vie.....»

Là dessus il étale avec complaisance les suites funestes de la

galanterie, les trahisons, les soucis, le temps perdu, la ruine, etc. Ce tableau rend le coquardeau tout écumant de fureur; mais sa fureur le fait raisonner si mal que le jaune en est tout esjoui. Pourquoi, s'est écrié le pauvre coquardeau, pourquoi exagérer les faiblesses des femmes ?

« Et encore il est tout commun

>> Se disent les docteurs des femmes
>> Que quant elles ont aimé ung

» Tout seul, on les tient pour bigames
>> Et que la droitte loy des dames

» Est d'en aymer après ung cent, etc., etc. >>

Il faut enfin mettre un terme à la kyrielle de lieux commuus et d'invectives dont se compose le débat, et s'en référer au jugement du renonceur, lequel a renié l'amour définitivement, et pour toujours icelui désavoué, sous peine d'être maudit de Dieu; le vert et le jaune souscrivent à ce bel arrêt, et la partie est faite de ne plus aimer; d'où le livre prendra son titre de Renoncement d'Amours. Le poète finit par dire qu'il ne se nomme pas de peur d'être assommé; allusion qu'il fait sans doute au danger que courut Jehan de Meung à la cour de Philippe le Bel, d'être à nu flagellé par les dames de la reine et en sa présence, pour un crime pareil. A défaut du nom de l'auteur, nous avons son anagramme, qu'il dit renfermée dans ces mots : Plus que toutes. Devine qui voudra et qui pourra; quant à moi, je livre le Renoncement d'Amours, quel qu'il soit, à Martin Franc, qui a si longuement vengé les femmes des attaques du Roman de la Rose, dans son Champion des Dames, poème aussi édifiant qu'ennuyeux, dont l'abbé Goujet nous a laissé une docte et complète analyse. Du reste, ce savant philologue ni aucun autre, que je sache, n'ont parlé du Renoncement d'Amours; c'est une bonne fortune pour nous, si ce n'en est pas une pour l'ouvrage.

Analectabiblion. 1.

9

DE

NRE BENOIT SAUUEUR IHESUS CRIST.

Cy commence une moult bele et moult notable deuote matière qui est moult proffitable a toute creature humayne. Cest la Vie de nre benoit Sauueur Ihesus Crist ordonnée en brief langaige ou parolles pour ce que le peuple daiordui ayme et requiert avoir choses briefves comme cellui qui est de courte durée et de petite deuotion, et fut translatée a Paris de latin en françois a la requste de treshault et puissant prince Jehan duc de Berry, duc d'Auuergne, comte de Poytou et d'Etampes, lan de grace mil ccc lxxx. (Un vol. pet. in fol., gothique, à deux col., contenant 63 feuillets non chiffrés, avec des signat. de A. M.

Nous trouvons ici un specimen fort beau des premiers essais de l'art typographique en France. Il offre, dans la forme de ses caractères en grosses lettres, un rapport si frappant avec l'impression du roman de Pierre de Provence et de la belle Maguelonne, sorti, vers l'an 1476, des presses de Barthélemy (1) Buyer, imprimeur de Lyon, qu'on peut assurer qu'il est un produit des mêmes presses, vers la même époque. Il nous est venu de la vente de la bibliothèque de M. Langs, de Londres, en 1829. D'après ce qui précède, nous croyons inutile d'ajouter rien sur l'extrême rareté du volume.

(1380-1476.)

Cette vie de Jésus-Christ, prise en partie des Écritures, en partie des livres apocryphes, est écrite d'un style plus que naïf, et chargée de circonstances qui peignent la simplicité crédule des esprits au moyen-âge. Nous avons peu d'ouvrages français. en prose, imprimés de cette date ou d'une date antérieure. Des réflexions analogues au récit, ainsi que des prières, le coupent fréquemment et ajoutent encore à son caractère gothique par leur singulière candeur; tout en est sérieux, et aujourd'hui on ne s'en doute guère. Nous citerons, en témoignage, les passages suivans, dont nous ne reproduirons pas rigoureusement l'ortho graphe, pour en faciliter la lecture.

Nature humaine par l'espace de cinq mille ans de moura en

(1) Une remarque, insérée dans le No 4 du Bulletin du Bibliophile, 2o série, enseigne que c'est par erreur que Barthélemy Buyer a été qualifié d'imprimeur, tandis qu'il était simplement un riche protecteur de l'imprimerie à Lyon, où il faisait imprimer à ses frais. Nous croyons devoir mentionner ici cette remarque, en ajoutant que notre erreur, si c'en est une, a été partagée par bien d'autres personnes que nous.

[ocr errors]
[ocr errors]

grand misère, tant que, pour le péché d'Adam, nul ne povoit monter en paradis, dont les benoits anges en eurent grand pitié et li furent desirans de veoir nature humaine enprès eulx ez sieges de paradis; et lors à grands coraiges, leurs faces enclinées, tous ensemble supplierent Dieu le Père, disant ainsi : << Hélas! Sire, pourquoy furent-ils oncques crées!... Vous plaise >> d'en avoir miséricorde... il est temps d'en avoir pitié. Regar>> dez comme ils crient..., etc. » Quant les gens eurent proposé leurs supplications devant Dieu le Père, deux advocats se leverent; l'ung estait Justice, l'austre Misericorde, etc., etc., adoncques plaiderent, etc., etc. Les avocats ayant plaide pour et contre, Dieu se détermine pour Miséricorde, et dit : « Mon >> beau filz Jesus-Christ, il vous convient descendre en terre » pour racheter nature humaine, dont je me repens que j'ay >> homme faict, pour la peine qu'il en fault sonffrir selon Jus»tice, etc., etc.» « Je veulx faire vostre plaisir, mon très >> cher Père, très excellent, dit Jesus-Christ, etc., etc. » <«< Hélas! dit Dieu le Père, ils te feront bien souffrir...; ils te >> cracheront aux yeux...; ils t'estendront sur l'arbre de la >> croix...; ils te cloueront le corps avec des clous sans poincte; » car si les clous fussent bien poinctus, ils ne fissent mie la moi>> tié du mal comme ils te feront... Mon beau Fils, pense quelle » doleur te sera. La poras-tu souffrir? » — « Oy bien, mon » doulx Père. » « Ils te donneront à boire vinaigre et fiel... >> Le porras-tu souffrir? » Oy bien, mon doux Père, etc. >> L'annonciation et l'incarnation suivent sur ce ton, puis vient le mariage de la Vierge avec Joseph. « Nostre Seigneur voloit >> que Nostre Dame fut mariée, affi qu'il fust cellé au diable, » et que, par son engroisse, elle ne fust diffamée... » Et comme la doulce Vierge demouroit avecques son bon mari Joseph, le doulx enfant Jésus croissoit au ventre de sa mère. Joseph s'aperçeut que elle estoit grosse, et sovent la regardoit d'ung mauvais œil... En quelle tribulacion estoit le preudomme Joseph, comme on peut prouver par ceulx qui ont esté gélos (jaloux), car je crois que, au monde, n'a pire doleur fors la mort, etc. Les anges ne tardent point à calmer la jalousie de Joseph par la révélation du Saint Mystère, et le récit reprend; mais nous ne le suivrons pas plus loin: c'est assez, et peut-être même trop. L'ouvrage finit par ce précepte évangélique, dans lequel tout le christianisme est renfermé: Charité est aymer Dieu et son prochain. Deo gratias.

[ocr errors]

HISTOIRE CRITIQUE

DE NICOLAS FLAMEL,

ET DE

PERNELLE SA FEMME,

Recueillie d'actes anciens qui justifient l'origine et la médiocrité de leur fortune cotre les imputations des alchimistes. On y a joint le Testament de Pernelle et plusieurs autres pièces intéressantes, par M. L. V. (l'abbé Villain). Paris, Desprez, 1 vol. in-12, portr. et fig.

(1418-1761.)

Beaucoup de gens raisonnent ainsi : voilà un pauvre écrivain juré de Paris, qui, au temps de Charles VI, du fond de son échoppe, parvint à acheter ou se bâtir cinq maisons, à édifier le petit portail de Saint-Jacques-de-la-Boucherie, plus un portail à Sainte-Geneviève-des-Ardens, où l'on voyait sa figure agenouillée; plus la chapelle de l'hôpital Sainte-Geneviève; il dota, en outre, quatorze hôpitaux et quatorze églises; il fit, en mourant, une énorme quantité de legs, et l'on publie vaguement qu'il était seigneur de sept paroisses en Parisis; donc son opulence effaçait celle des princes et des rois de son siècle; donc cela est merveilleux; donc il avait trouvé de lui-même, ou acheté d'un Juif, le secret de la transmutation des métaux en or, par le moyen de la poudre de projection. Le merveilleux plaît au peuple; aussi le peuple contemporain ne manque-t-il pas de saisir avidement cette conclusion merveilleuse; puis des écrivains gothiques la répandent, elle plaît alors à des érudits comme Borel, dom Pernety, l'abbé Lebeuf et Lenglet-Dufresnoy; elle prend du corps entre leurs mains, et pour peu que des critiques tranchans et paradoxaux, tels qu'étaient MM. Desfontaines et Fréron, de l'Année littéraire, la défendent avec amertume contre les observateurs de sang-froid, il devient fort difficile à ces derniers de rétablir la vérité des choses, en dissipant les illusions mystérieuses de l'ignorance et de l'érudition. Ceci est, en deux mots, toute l'histoire du célèbre Nicolas Flamel et de Pernelle, sa femme, dont plusieurs auteurs procla

« السابقةمتابعة »