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croyés-moi. Cela n'eft-il pas impatientant? Envoyer un Intendant à une ville avant que la dedicace en soit faite!

(Cela regarde quelque anecdote fur l'avidité des Atheniens.)

Un crieur d'Edits & de Loix publie qu'il vient en vendre argent comptant à la ville naiffante. Il n'eft pas mieux reçû que le Magiftrat. Ce dernier declare à Piftheterus, qu'il ait à comparoître en juftice pour l'avoir maltraité. Piftheterus fe voyant obfedé de l'un & de l'autre côté (car ils parlent tous prefque enfemble) va tantôt à l'un, tantôt à l'autre en les menaçant, Ils s'enfuyent à la fin, & le Sacrificateur ennuyé de voir le facrifice fi long-tems fufpendu, fort du Theatre pour aller ailleurs immoler le bouc aux Oiseaux.

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Ceux-ci demeurent pour l'intermede. Ils fe réjouiffent d'abord de fe voir honorés comme Dieux. (C'étoit l'ambition des Lacedemoniens de commander à toute la Grece.). Puis ils font une espece d'Edit curieux dont voici la fubftance, L'on ne parle aujourd'hui dans les compagnies de l'Edit fur Diagoras. Si quelqu'un tuë Diagoras ale Melien il aura un talent. On en donnera autant à qui tue»ra un des Tyrans morts b. Voici notre Edit à nous, un talent à qui ôtera la vie à notre ennemi Philocrate, & le quadruple à qui l'amenera vif.« Tout le refte n'eft qu'une plaifanterie fur ce Philocrate qui étoit un fameux traiteur, & que les Oifeaux accufent de les enfiler dans des cordons, de les larder, & de leur donner cent figures differentes pour les vendre mieux. Il n'y a peut-être pas grande finesse là-deffous; peut-être auffi y a-t-il quelque allegorie aux captifs de Pyle qui furent très-maltraités; affaire que les Lacedemoniens avoient toujours fur le cœur. A l'égard de Diagoras de Melos, après la prife & le fac de cette Ifle, il fe

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On en parle encore ailleurs. Voyés les Nuées.

Mot bouffon au fujet d'un Edit réel.

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retira à Athenes, y parla contre les myfteres de Cerés, & y fut condamné à mort comme athée, la dix-feptiéme année de la guerre du Peloponnefe. Il s'enfuit, & évita le fupplice par le naufrage.

Le Chœur vante derechef le bonheur de fon deftin par des vers lyriques; puis fe retournant du côté du parterre il promet aux Juges (s'ils font favorables à la nouvelle Comedie) nombre de chouettes a d'or, qui nicheront dans leurs bourfes, des griffes crochues pour bien dérober quand ils feront Thréforiers, & des becs ouverts avec beaucoup d'appetit pour les feftins. Mais s'ils refusent le prix à Ariftophane, les Juges, dit le Chœur, n'ont qu'à fe pourvoir de larges lunules fur la tête, comme les ftatues que l'on coëffoit ainfi pour les garantir des crottes des Oiseaux. Il ne paroît pas que les Juges fe foient fort embarraffés de cette menace comique. Car ils ne mirent cette Comedie qu'au fecond rang après les convives d'Amipfias.

Cet Acte fort un peu de l'objet principal qui eft Lacedemone, Alcibiade, & Décélie. Il ne femble fait que pour railler Athenes & fes mœurs. Mais outre qu'Aristophane en use toujours ainfi, il avoit interêt de s'écarter de fon fujet, & de cacher fon jeu. Ce qu'il a dit dans plus de cent traits lui fuffifoit pour fe faire entendre, fans choquer la déli catesse Athenienne fur une affaire extrêmement chatouilleufe.

ACTE I V.

» Meffieurs les Oifeaux, (dit Piftheterus) le facrifice a été » heureux: mais je ne vois point encore de courier fur l'état » où eft notre ville. « A peine a-t-il parlé b qu'il en arrive un tout effoufflé. Il annonce que Nephelococcygie eft la plus belle chofe du monde; que le mur eft fi large que deux

Marque de la monnoye Athenienne.

b Ces arrivées fubites d'Acteurs dont on a befoin font apparemment l'objet de la raillerie du Poëte. Pour lui il n'y fait point de façon, parce qu'il fe fauve de tout par une plaifanterie.

chars de front, l'un de Théagéne, l'autre de Proxenide as fuffent-ils traînés par des chevaux de la grandeur de celui de Troye ou du cheval de bronze de la citadelle d'Athenes, y pafferoient fans difficulté. Pour augmenter le merveilleux, le courier dit que les Oiseaux feuls ont construit tout l'ouvrage, chacun employant fon talent, les grues avec les pierres qu'elles avoient avallées, les Oifeaux Aquatiques en portant de l'eau, &c.

Un autre courier veut jetter l'allarme au fujet d'une Divinité aîlée qui a paffé dans la ville, & s'eft fubtilement envolée à l'infçû de la fentinelle des Geais. (N'eft-ce point Alcibiade qu'on indique? ) L'on a mis quantité d'Oiseaux à fes trouffes. Le Choeur s'ameute, & fe prépare à une guerre avec les Dieux Olympiens. Iris defcend. Les Archers-Oifeaux l'entourent & Piftheterus contrefaifant l'empreffé l'arrête. » Qui va là? Où vas tu ? D'où viens-tu? Demeure. Quel eft ton nom? Galere, ou Barque? «

Je suis la legere Iris.

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IRIS.

PISTHETERUS vivement fans l'écouter.

Galere Salaminienne, ou Parale?

L'allufion à la Galere Salaminienne qui alla chercher Alcibiade en Sicile eft trop palpable pour ne la pas fentir. Les Galeres ordinaires des côtes d'Attique s'appelloient Parales. L'entretien d'Iris & de Pistheterus eft vif & comique; mais toujours par allégorie à l'affaire d'Alcibiade. Piftheterus fait le courroucé de ce que la Déeffe a paffé dans une ville étrangere fans dire comment, fans paffeport, & fans aveu. Elle le traite de fou. Le nouveau Gouverneur lui dit qu'elle mériteroit la mort, tout immortelle qu'elle fe croit; & il lui déclare que c'est à elle, &

a Fameux Atheniens dont les équipages faifoient apparemment beaucoup de bruit.

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aux Dieux d'obéir aux Oifeaux. (C'eft Lacedemone qui parle à Athenes.) Iris expose fa commiffion qui eft de paffer de l'Olympe fur la terre pour engager les hommes à facrifier aux Dieux. » A quels Dieux! (demande Pistheterus.) » Belle question! (dit-elle) à nous autres habitans du Ciel, » Vous des Dieux! (reprend le premier) En eft-il d'autres ? (» replique Iris.) Scachés, (lui répond-on) que les Oifeaux font aujourd'hui les Dieux des mortels. C'est à eux qu'il faut facrifier, non à Jupiter.

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Ces traits de raillerie tombent beaucoup plus fur les Lacedemoniens & fur Socrate avec fes fectateurs que fur les Dieux. Je dis, fur les Lacedemoniens, dont Ariftophane fiffle ici l'ambition déméfurée pour la primauté; ambition augmentée par la retraite d'Alcibiade, & par le deffein de fortifier Décélie. J'ajoute, fur Socrate & fes partifans,qui introduifoient, difoit-on, d'autres Dieux que ceux du païs, & à qui le Poëte impute fouvent a dans fes Comedies de n'admettre pour leurs Dieux que les nuages, l'air, & ce qu'il contient.

Iris fort fcandalisée de l'impieté de Piftheterus qui doit lui paroître bien nouvelle, le menace du tonnerre. Mais Piftheterus parodiant un morceau d'Euripide dans l'Alcefte b, demande comme Pherès à fon fils, » Si elle le prend pour quelque Lydien, ou quelque efclave de Phrygie. « Il menace à son tour Jupiter de l'infefter d'Oifeaux le tout par des parodies d'Eschyle pour répondre fur le ton de hauteur qu'a pris la Déeffe. La Scene finit par la chaffer honnêtement: Voilà pour les Dieux.

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Il reste à voir le Député qui étoit allé vers les hommes, Il revient en vrai narrateur de theatre tragique, difant beaucoup de chofes d'un air empreffé, fans venir au fait. Et il ajoute brufquement, faites-moi donc taire. Ce font-là

a A tort. Car Socrate reconnoifloit un Dieu. Mais il alloit plus loin que les Atheniens qui diftinguoient la fable & la pluralité des Dieux, rejettant l'une, & admettant l'autre.

b Voyés l'Alcefte 2. vol. Act. 3. Sc. 5. p. 115.

de ces traits de parodie qui ne fe peuvent payer. Ariftophane triomphe quand il raille les Poëtes de fon tems, & il le fait prefque par tout avec une affectation qui montre bien que la parodie a été l'ame de la Comedie ancienne.

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Le Député reprend fon difcours, & protefte à Piftheterus que les hommes ont pour lui la plus profonde vénération. Pourquoi ? par l'interêt qu'ils prennent tous à la nouvelle ville, à la ville Aërienne. » Avant la fondation de Nephelococcygie on étoit fou, dit-il, de Lacedemone » & de fes manieres. Nourrir fa barbe, jeûner, être mauf» fade, vivre focratiquement, porter le bâton à la main; telle étoit la folie publique.« (Remarquons qu'Alcibiade depuis fa retraite à Sparte vivoit ainfi a, & qu'en fe con, formant à la maniere des Lacedemoniens il les avoit entierement gagnés.) » Mais on en eft bien revenu. On eft » fou des Ŏifeaux. On goûte leurs modes jufqu'à s'en faire, » les finges. Premierement on déniche à la pointe du jour » pour voler au Barreau, comme nous aux champs. Enfuite on picore les paperaffes de chicane, & l'on fait des feftins de procedure. La manie va jusqu'à fe donner des noms d'Oifeau. Connoiffés-vous ce boiteux de cabaretier ? c'est » la perdrix : & Menippe? c'est l'hirondelle : & le borgne » d'Opuntien ? c'est le corbeau : & Philoclès ? c'eft l'alouet, "te & Theagene c'eft l'oifon : & Lycurgue? c'eft le Coucou : & Chairéphon be c'est la chauve-fouris : & le Syracufien? c'est la pie: & Midias? c'est la caille battue de l'oifeau. Ce n'eft pas tout, la paffion où l'on eft des Oifeaux eft marquée jufques dans les chanfons. L'on n'y » trouve qu'hirondelles, que roffignols, qu'oifons, que co» lombes : du moins toujours des aîles, ou un peu de plumage dans les vers. Tel eft le goût. Au refte je vous donne avis que plus de dix mille mortels vont venir vous deman

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a Voyés Plutarque que j'ai cité à ce fujet, & Cornelius Nepos L'ami de Socrate, connu par les Nuées, & ailleurs.

» der

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