noms: en general il eft vrai de dire que tout Poëte Tragique étoit en même tems Poëte fatyrique, puifque la petite piece accompagnoit presque toûjours les Trilogies tragiques, pour en faire des Tetralogies complettes. De tous ces Poëmes nous n'avons d'entier que le Cyclope, qui eft constamment d'Euripide. Ses fréquentes fentences, je ne fçai quel air de Philofophe répandu dans quelques endroits, fon tour d'expreffion semblable à celui qui regne dans les autres pieces, ne laisseroient pas lieu d'en douter, quand on n'auroit pas le concert unanime des manufcrits, & le témoignage d'Athenée. La Scene eft conforme à celle des Spectacles de cette nature. Un rocher, un antre, des pâturages, des troupeaux. Les Satyres Les Satyres fe couvrent de peaux de chèvres. L'action elle-même eft moitié férieufe, moitié burlesque. L'iffue en eft heureuse pour Ulyffe. Le fujet en est historique, comme ceux des Tragedies. En un mot tout annonce ici un Spectacle fatyrique, tel que je l'ai peint. Car, pour dire quelque chofe de la Scene,dont je n'ai encore rien dit, Il y en avoit de trois fortes, (dit Vitruve a) » la Scene Tragique étoit décorée de colonnes, de frontons élevés, de ftatues, & de tout ce qui →orne les Palais des Rois. La Comique faifoit voir des maifons particulieres avec leurs balcons & leurs croisées en perspective, comme les rues ordinaires. La fatyrique enfin étoit parée de " " دو Vitrav. 1. s. c. 8. دو પ bocages, de grottes, de montagnes, & d'orne» mens champêtres qu'on voit dans les païfages. « Les Satyres vieux & jeunes, les Silénes plus ou moins âgés étoient diftingués par des mafques grotefques, vrayes têtes poftiches ayant l'air de celles des chèvres. Ces efpeces de cafques les diftinguoient par la barbe, la chevelure, & quelquefois par la coeffure à longs poils. Une peau de bête couvroit négligemment les Satyres. Les Silénes étoient ornés de fleurs artiftement tiffues. Les uns & les autres étoient quelquefois représentés par des Pantomimes grimpés fur des échasses afin de mieux imiter leurs jambes grefles comme celles des boucs. Le fonds du fpectacle consistoit, (ainfi que les autres) dans les vers, le chant, & la danfe. Mais tout cela étoit plus gai dans le fatyrique, fur tout la danfe, qui avoit été de tout tems affectée aux Satyres. Leur danfe particuliere se nommoit Sicianis, à cause ou d'un Sicinnus fon inventeur, ou d'un mot a qui fignifie mouvement. Auffi étoit-elle très-vive (fans doute comme la Mufique) un peu païfanne, & nullement affectueuse, comme l'étoit celle des Tragedies. Voilà en peu de mots ce qu'on peut dire du Spectacle fatyrique. Pour orner la piece qu'on va voir, on a crû pouvoir emprunter de Cafaubon une gravûre antique qu'il a publiée le premier. On lui a seulement donné une grandeur quadruple de sa veritable grandeur. C'eft une pierre gravée & fort ancienne ο κίνησης ancienne qui represente une Bacchanale. La pierre eft un jafpe de couleur verte tirant fur le noir avec des tâches rouges. Il y a huit perfonnages. Bacchus eft le principal. Il est foutenu en l'air, par un Siléne d'un côté, & par un Satyre de l'autre. Un enfant qui a le pied fur un mafque ancien, lui foutient une jambe. Un autre marche devant avec une corne d'abondance, & paroît tirer un bouc. Un arbre fert de dais à Bacchus. Il eft couronné de Pampre; & il tient d'une main des fleurs liées en forme de couronne, fuivant l'usage des buveurs de l'antiquité. Sa coupe est renversée aux pieds du Satyre. Trois Bacchantes l'environnent; l'une avec le petit tambour qu'elle frappe, une autre jouant de la double flûte. La troifiéme fuit : de la main gauche elle semble cueillir un fruit de l'arbre, ou agiter quelque inftrument pour divertir Bacchus. Sa main droite eft occupée à tenir une baguette ornée de lierre & de pampre, mais un peu différente du Thyrse, qui étoit plus long, & armé par une extrêmité, en forme de pique, ou même par les deux bouts. Quoique ce fujet ne foit pas celui du Cyclope, il y a affés de rapport pour le placer ici, puisque c'est une Bacchanale, & une Bacchanale de Theatre; ce que montre affés le masque renverfé. Tome III. Hhh |