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jourd'hui fur le pied de flatter, quand on leur addresse la parole.

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Après ce début Xanthias déclare que fon maître Philo cleon (c'est-à-dire, le partifan de Cleon ) a une maladie fort finguliere, & que fon fils a chargé les valets de le gar der nuit & jour. » Mais on ne devinera jamais ( dit - il ) quelle eft fa maladie, fi nous ne la déclarons. Amynias a » le joueur, fils de Pronapus, dit que c'eft la maladie du jeu; il fe trompe. Un autre dira que c'est le vin; autre er » reur. « Les deux efclaves poursuivent cette énumération, toujours aux dépens de quelque Athenien. Cela fufpend la curiofité du parterre en le réjoüiffant. Xanthias annonce enfin nettement quel eft le mal incurable de fon vieux maî tre : c'eft qu'il veut toujours juger, qu'il a jour & nuit l'oreille au guet & l'œil fur l'horloge b, comme s'il étoit au tribunal; que fes doigts font tournés à force de s'imaginer qu'il manie les petites pierres qui fervent de fuffrages comme s'il rouloit un grain d'encens pour le mettre au feu ; qu'il fe plaint que fon coq a été corrompu par argent pour l'éveiller trop tard; ou comme dit Racine:

Qu'il fit couper la tête à fon coq de colere,

Pour l'avoir éveillé plus tard qu'à l'ordinaire.

Plufieurs traits pareils de folie enracinée font caufe que fon fils Bdelycleon ( c'est-à-dire ennemi de Cleon ) le fait garder à vûë, de peur qu'il ne s'échappe, jusqu'à faire exactement fermer portes, fenêtres & foupiraux, tant le juge infenfé eft adroit à s'évader.

En effet, le fils vient promptement avertir les deux efclaves que fon pere eft apparemment entré dans la cheminée, par où il pourroit fortir. On badine fur cette nouvelle espece de fumée, & on l'empêche d'aller plus loin. Toutes les précautions qu'on emploie pour garder ce vieillard font un jeu de Théatre fort vif. » Laiffés-moi, dit-il,

4 Ou Amunias, c'en eft un autre que l'Archonte Aminias: & il fe pourroit faire que l'Amynias dont parle fouvent Arif tophane, fut toujours le fils de Pronapus,

& jamais l'Archonte Aminias.

Il y avoit une Clepfydre ou horloge d'eau,afin de mefurer le tems accordé aux Avocats, pour haranguer.

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laiffés-moi aller juger, ou bien le fcelerat Dracontides a fe tirera d'affaire. « Bdelycleon a beau alléguer un oracle de Delphes, ufer de rufe & de force, Philocleon peste, crie, jure, & fait cent efforts pour fe procurer la liberté. Il dit qu'il veut aller vendre son âne, parce que c'eft jour de marché. Le fils répond qu'il le fera lui-même, & il ordonne qu'on amene cet animal. Mais craignant que ce ne foit un pretexte à fon pere pour s'évader, il va lui-même délier l'âne & l'amene. Il eft fort furpris en fortant d'apprendre que Philocleon s'eft attaché au ventre de la bête, comme Ulyffe au belier du Cyclope b, grand fujet de bouffonnerie & de fpectacle digne de la Foire. Il y a feulement un proverbe digne d'être obfervé, à fçavoir, difputer de l'ombre d'un âne (c), On croit que Demofthene donna lieu le premier à ce proverbe car comme il haranguoit en faveur d'un homme qu'il vouloit dérober au fupplice, ne pouvant venir à bout de fe faire écouter du peuple, il s'avifa de conter cette hiftoriette. J'allois, dit-il, à Megare fur un âne que j'avois loüé. Au milieu du chemin la chaleur étant extrême, & n'y ayant point d'arbres ni d'ombre aux environs, je voulus me mettre un moment à couvert du Soleil fous le ventre de ma monture. Mais le conducteur m'arrêta en me difant froidement qu'il ne m'avoit pas loué l'ombre de l'âne. La difpute s'échauffa .... A ces mots les Atheniens aïant prêté filence pour entendre la fuite de l'aventure, Demofthene, dit-on, releva éloquemment la puérilité de fes auditeurs, en leur reprochant leur attention pour une bagatelle, à une histoire d'âne, tandis qu'ils la refufoient lorfqu'il s'agiffoit de la vie d'un homme.

Bdelycleon fait rentrer fon pere. Celui-ci appelle Cleon & les Juges à fon fecours. On a beau barrer portes & fenêtres, il grimpe comme un rat jufqu'au plancher. Quant au fils il défend à fes valets de s'endormir: car quoique l'aurore ne foit pas encore levée, il craint que les Juges qui vont paffer en foule, ne viennent appeller fon pere à grands

Fameux fcelerat.

Dans l'Odyflée, Ulyffe fe mit fous

un belier pour éviter le cyclope aveuglé. • Suidas.

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cris, fuivant leur coutume. Les efclaves propofent de les écarter à coup des pierres. » Gardés-vous-en bien ( dit le jeune maître ) cette engeance eft colere & de la nature des Guefpes. Il décrit ici figurément l'humeur acariâtre, dure & inflexible des vieillards qui vont paroître fur la scene. Leur déguisement indique leur caractere; car ils rempliffent incontinent le Théatre fous la figure bizarre de Guefpes, mascarade horrible, mais du goût de l'ancienne Comédie,. qui cherchoit autant à faire rire par le fpectacle que par les bons mots. Après tout, cela devoit rendre extrêmement ridicules les principaux Juges d'Athenes; car quel fpectacle que des Guefpes monftrueufes avec des manteaux, des bâ-tons & tout l'attirail de la magiftrature? Ce chœur, ou plûtôt le Coriphée anime fes fuivans, dont il nomme quelquesuns, à vaincre les glaces de l'âge, & à fe preffer pour aller au barreau juger le procès intenté par Cleon au riche Lachés. Il ajoute que Cleon fouhaite qu'on faffe provision de mauvaise humeur pour ne pas épargner le coupable. Il' les fait fouvenir du tems de leur jeuneffe, où ils couroient avant le jour pour voler les vendeufes de pain. Comme le jour ne paroît pas encore, leurs petits enfans portent des lanternes pour les éclairer, & les avertiffent des bourbiersqu'il faut éviter. Les reprimandes comiques que leur font leurs peres en y joignant les coups, peignent au naturel la méchante humeur, la rudeffe & l'avarice fordide de ces vieillards. Ils s'apperçoivent que Philocleon leur manque; & comme ils font devant fa porte, & qu'il aime leur mufique, à ce qu'ils difent, ils fe déterminent à lui donner une aubade pour le reveiller. Elle exprime leur furprise de ne point voir ce Juge rigide qui étoit toujours à leur tête, loin d'arriver le dernier. Ils conjecturent que ce doit être goutte ou gravelle, ou faute de pantouffles b qui l'arrête, ou plûtôt l'évafion de quelque malheureux qu'il auroit vou lu condamner, mais qui pour fe fauver aura découvert à la

General Athenien qui avoit commandé en Sicile.

¿Allufion à quelque accident comique.

Republique les fecrettes trames des Samiens 4. Mais on le confole par l'efperance d'avoir bien-tôt à juger un autre criminel qui a trahi la Thrace. Il entend apparemment Eleon qui y étoit alors à la tête des troupes Atheniennes; & qui fut tué l'année fuivante vers Amphipolis.

On voit que dans ce premier acte l'on retrouve celui de Racine: même folie dans le Juge, mêmes précautions pour le garder. Mais Ariftophane a plus donné dans la farce. Les traits perfonnels qui faifoient le grand ragoût des fpectateurs Grecs, n'en étant plus un pour nous, il eft difficile de comparer ces deux pieces. Quoiqu'elles foient les mêmes pour le fonds, elles font auffi différentes pour la maniere & le tour, qu'Athenes & Paris.

ACTE II.

Philocleon répond au chœur par les fentes de fa porte, que depuis long-tems il entend l'agréable concert de fes confreres, mais qu'il a le malheur de ne pouvoir y joindre fa voix, ni aller faire avec eux quelque miférable au Confeil. Il prie Mercure de le changer en fumée ou en cendre, afin d'échapper par les airs, ou encore mieux de le metamorphofer en petite pierre noire pour fervir à la con

Vsai-femblablement Caryfton éluda quelque jugement, en découvrant aux Atheniens les intelligences de ceux de Samos avec la Perfe du tems de Periclès. Samos & Milet étoient en guerre pour la ville de Priéne, & les Samiens étoient fuperieurs. Mais les Atheniens fe firent d'authorité les arbitres de la querelle. & citerent les uns & les antres à leur tribunal. Les Samiens refufent d'obéir. Periclés va les châtier, abolit le gouvernement des nobles, & prend cinquante ôtages des principaux, avec autant d'enfans. Les Samiens recouvrent leurs ôtages & fe revoltent. Periclès revient à eux. On combat vivement près de l'Ile Tragia. Periclès ferre la ville & commet une faute en fejretiránt. Son Lieutenant eft attaqué. Les Samiens ga

gnent la bataille,font plufieurs Atheniens prifonniers, & pour leur rendre les outrages qu'ils en avoient reçus dans une autre occafion où les Atheniens avoient gravé fur le front des prifonniets Samiens la figure d'une barque Samienne, ceuxci marquent le front de leurs captifs d'une figure de hibou, marque ordinaire de la monnoïe Athenienne. C'est par allufion aux Samiens ainfi maltraités qu'Ariftopane dit :

Les Samiens font hommes fort lettrés.

Plutarq. trad. d'Amyot.

Plutarque ajoute qu'on accufoit Periclès d'avoir fait décerner la guerre contre les Samiens en faveur de ceux de Milet, à la tequête d'Afpafie qui étoit Milefienne. Il prit à la fin Samos & en détruifis les fortifications,

damnation des plaideurs. Il apprend au chœur que c'eft fon fils qui le retient dans cette triste captivité : il prie les vieillards de parler bas, de peur de reveiller ce redoutable geolier, qui pourtant ne lui veut d'autre mal, que de l'abliger à vivre heureux & fans procès, comme fi l'on pouvoit vivre heureux fans juger. Il y a ici un trait décoché en paffant contre Cleon; car le Juge infenfé dit que fon fils eft d'intelligence avec Cleon pour renverser le gouvernement populaire. Le chour cherche dans fon efprit quelque artifi.ce pour tirer fon ami de captivité : mais toutes les iffuës font fermées, & Philocleon ne fçauroit fortir de fa prison, fût-il un autre Ulyffe. A ce mot on le fait fouvenir qu'il a affés bien imité dans fa jeuneffe les rufes du Roi d'Ithaque, en volant finement des pains, & en fautant adroitement les murs. C'est la deuxième fois qu'il eft parlé de ces fubtilités nocturnes attribuées à la jeuneffe d'Athenes. Auffi Philocleon répond-il qu'il étoit jeune alors,& en état d'efcalader les murs, mais que cet heureux tems n'eft plus s que d'ailleurs il a une fentinelle importune qui veille toujours. Réduit à ronger le treillis de fes fenêtres, & à defcendre enfuite par le moïen d'une corde, il fait un jeu de farce tant par le fpectacle que par les bons mots, dont on peut excepter celui-ci, que le prifonnier addresse au chœur ; Au moins, mes amis, fi je me romps le cou, enterrés - moi » au barreau- «

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Bdelycleon fe réveille en furfaut, & accourant au bruit il trouve fon pere fufpendu à la corde. Aidé de fes valets il veut le rentraîner dans le logis. Le pere appelle à grands cris ses confreres. Le Choeur de Guefpes prend fait & caufe, s'arme de tous fes aiguillons, envoye chercher Cleon, fait tant de bruit par fes menaces réiterées, que Bdelycleon eft contraint de fortir avec fes gens pour tâcher de leur faire entendre raifon. Mais il ne gagne rien avec des Guefpes qui le poursuivent à grands coups d'aiguillon luy & fes gens; autre jeu comique accompagné de beaucoup de plaifanteries contre les Magiftrats & les Juges. Car il fe fait un combat risible entre les Efclaves & les Guefpes pour enlever de part & d'autre Philocleon, non fans un affés bon

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