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Lydie durant un an entier : qu'enfin Alcide arrivé au Promontoire de + Cénée, s'y occupe à faire des facrifices à Jupiter pour le remercier de fa victoire : & que bien-tôt, quitte de ce devoir envers les Dieux, il reviendra vers fon époufe, qu'il prie de recevoir par avance les fruits de fes conquêtes. Tel eft le récit de Lichas, récit qu'on verra dans la fuite être peu fidele.

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Déjanire malgré la joye que lui donne un fuccès fi inefperé, fent une frayeur fecrette qu'elle ne peut démêler, & qui répand l'amertume dans fon coeur à la vue des captives que le fort a remifes entre fes mains, loin de leur patrie défolée. » O Jupiter, », s'écrie-t'elle, écartés ce trifte préfage, & »ne livrés pas mes enfans à l'infortune ou 2 je vois ces captives déplorables". Une d'entr'elles fur tout lui femble le plus à plaindre. Sa jeuneffe, fa beauté, & fa dou leur modefte touchent le cœur de la Reine. Elle s'intereffe au fort de cette aimable captive, & lui demande à plufieurs reprises qui elle eft. Mais celle-ci s'obstine à gar Yeyes le der un profond filence. Ainfi en ufe Cas Tom. I. fandre à l'égard de Clytemnestre dans PAL

gamemnon d'Efchyle. Si l'on veut lire avec quelque fruit les Anciens, on n'a qu'à les comparer les uns aux autres; on trouvera la clef

Lydie, contrée de l'Afie mineure, auffi-bien que la Phrygie. Les Grecs méprifoient les Lydiens & lee Phrygiens

t Cénée, Promontoire de l'Ile d'Eubée, à prefent Cap de Litar, vis-à-vis le Détroit del Mallie. De là, Jupiter Cenéen, Temple érigé par Hercule

clef de leurs moeurs, & l'efprit de leurs fié cles. Lichas interrogé à fon tour feint d'ig norer ce qu'on lui demande. Ainfi Déjanire prend le parti de la faire entrer dans le Palais avec la fuite pour y prendre un peu de repos.

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Comme la Reine fe met en devoir de se retirer auffi après avoir renvoyé Lichas, un homme furvient, & la prie de s'arrêter un moment pour entendre un fecret qui eft de' la derniere conféquence pour elle. Tous s'écartent, horfmis le Choeur, que cet hom me veut bien admettre dans la confidence.

Scachés, dit-il, Princeffe, que Lichas , vous trompe, ou qu'il nous a trompés avant vous. Je lui ai oui dire en préfen, ce de plufieurs témoins: Qu'Hercule n'a fait cette expédition contre Eurytus qu'en » faveur de fa chere captive. Oui, l'amour,

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& non le prétendu efclavage chés Omphale, ni cette feinte mort d'Iphitus pré»cipité: l'amour, dis-je, eft l'unique au

theur de fa bravoure & de fes triomphes. ,, Hercule a défefperé d'obtenir cette Princeffe de fon pere Eurytus; & il a pris le parti de lui fufciter une guerre cruelle für un prétexte léger. Il s'eft vengé des re, fús du Roi par fa mort & par le ravage de fes Etats. Vous voyés que fa captive » prévient fon retour: ce n'eft pas fans desfein. Ne croyés pas qu'il la traite en captive. L'amour devenu le tyran de fon » cœur ne le permettroit pas. Voilà, Ma dame, ce que j'ai entendu de Lichas, Sauli-bien que plufieurs autres Citoyens, qui font en état de le confondre. C'eft A 6

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», un avis douloureux pour vous; j'en gé ,, mis: mais il n'eft que trop fondé; & je ,, me fuis crû obligé de vous en faire part". La Reine frappée comme d'un coup de foudre, s'écrie: Malheureuse, où fuis-je, & que dois-je faire? quel ferpent ai-je reçû dans mon fein"? Outrée de la perfidie de Lichas, elle demande confeil au Choeur, qui eft d'avis, qu'elle preffe Li chas de parler. Comme elle s'en retourne pour le furprendre: il revient de lui-même à fa rencontre, prêt à fe mettre en voyage pour aller retrouver Hercule. » Madame, » que voulés-vous, dit-il, que je dife à votre époux en votre nom"?

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La Reine profite de cette conjoncture pour fonder ce Courrier avec toute la fubtilité d'une femme, & toute la dignité d'une grande Princeffe. Elle ménage adroitement fes interrogations, & ne veut d'abord, ce femble, que fe faire répéter ce que Lichas lui a déja dit d'Hercule, chofe affés intereffante pour fe la faire redire. Mais tout-à-coup elle retombe fur la jeune captive, & demande encore une fois qui elle eft. Lichas répond comme auparavant, qu'il l'ignore. Déjanire alors l'intimide. A qui, dit-elle, penfés-vous parler"? LI CHAS. Hé, Madame, d'où vient une pareille demande?

DE JANIRE. Réponds-moi. LICHAS. C'eft à Déjanire. C'est ma Souveraine que je vois.

DE JAN. Voilà ce que je voulois fça-
Tu conviens que je fuis ta Souve

VOIT.

raine.

LI

LICHAS. Sans doute.

DEJAN. Et de quel fupplice crois-tu qu'on doive punir un esclave infidele? LICHAS. Comment infidele? quel piége veut-on me dreffer?

DEJAN. C'est toi, miférable, qui me tends des piéges.

LICHAS, Madame, fouffrés que je me retire, tant je comprends peu ce difcours. DEJAN. Non, je ne te relache pas que tu ne m'ayes répondu.

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LICHAS. Sur quoi?

DEJAN. Cette captive que tu m'as amenée t'eft-elle connue ou non?

LICHAS. Je vous ai répondu ce que j'en fçavois. Que voulés-vous de plus?

Déjanire lui nomme Iole, & lui infinuë qu'elle eft inftruite d'ailleurs. Lichas nie tout & fe defend du même air dont je viens. de donner un effai. La Reine en lui découvrant peu à peu ce qu'il a dit dans la ville, le preffe vainement. L'Officier foutient fon rôle & veut fe retirer. Mais incontinent Déjanire use d'un artifice trèsféduifant. Elle feint d'être peu fenfible aux amours d'Hercule. Elle fe pique de connoître le génie des hommes, & de fe mettre au-deffus des foibleffes & des jaloufies de fon fexe. A l'en croire, elle a

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foulé

RACINE a donné à fa Roxane tout le génie, & toute la jaloufe foupleffe de Déjanire. Mais il l'a ren due beaucoup plus coupable. Toutefois on ne prétend pas dans cet expofe, approuver le Poëte Grec plus que le François, quoique Déjanire foit beaucoup plus excufable que Roxane.

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foulé aux pieds une vaine délicateffe, elle fçait quelle indulgence une femme ,, doit à fon époux. Hercule, dit-elle, l'a accoûtumée depuis long-tems à devenir traitable fur cet article. La compaffion d'ailleurs qu'elle s'eft fentie pour Iole ,, montre affés, à l'entendre, combien peu elle eft jaloufe d'une rivale". Par cette pernicieufe adreffe, & par ce défintéreffe ment affecté Déjanire délivre Lichas de fes frayeurs. Puis lui montrant combien le menfonge eft odieux, chés les Grands fur tout, où l'on peut aifément le confondre, elle le détermine à tout confeffer: ce qu'il fait, en difant que ce n'eft point par l'ordre d'Hercule qu'il a celé cette galanterie, puifqu'Hercule lui-même n'en fait pas myftere: mais par zele pour la Reine qu'il craignoit d'affliger. Car enfin, continue-t'il, ce

Héros dont la valeur n'a rien trouvéd'in,, furmontable, eft devenu l'esclave de l'A»mour". C'eft ce qu'Ovide a rendu ainsi,

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Fregerit, huic Iolen impofuiffe jugum.

La Reine n'en veut pas fçavoir davanta ge: mais diffimulant toujours malgré la jaloufe fureur, elle promet de bien traiter fa captive, & ordonne à Lichas de rentrer pour attendre le préfent qu'elle deftine à fon époux en revanche de celui qu'elle en vient

❤ OVID. Heroid. ep. 9of

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