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Je ne viens point t'offrir des armes
Pour me défendre & me venger.
Je viens te demander des larmes :
Me plaindre, c'eft me foulager.
Et ne dis pas que trop fenfible,
Tu viens, dans un oubli paisible,
T'épargner de vaines douleurs.
Le fils fur la tombe d'un père
Pleure encor, quoiqu'il défefpère
De le ranimer par fes pleurs.

Mais pourquoi des larmes stériles,
Quand j'ai besoin de tes fecours?
Où font les mortels inutiles?

Leurs droits naiffent de leur concours.
Le bras qui défriche la terre,

Le bras qui repouffe la guerre,

Le Pasteur, le Juge & le Roi,

Tout me fert, tout me rend hommage;

Et c'est un monftre que le fage

S'il veut s'affranchir de ma loi ».

VERS

Au fils de Mme la Comteffe de C.... le jour de fa naissance. 1758.

AMOUR, foyez le bien venu.
Sans bandeau, fans flèches cruelles,
Encor foible, timide & nu,

Vous n'avez pas même des ailes.
Mais fur votre front ingénu
Paroît certain air de famille,
Qui ne nous eft pas inconnu.
Je vois qu'un charme continu
Paffant de la mère à la fille,
Au petit-fils eft parvenu.
Vous ferez fin fans artifice,
Vif & fage, tendre & décent,
Et toujours un fel innocent
Aiguifera votre malice:

On tient de ceux dont on descend.
Votre efprit avec la fageffe

Unira la légèreté:

Droit au but de la vérité

Vons frapperez avec justeffe:
De la plus aimable Comteffe
Ainfi vous aurez hérité.

Mais comme vous avez un père,
Et que vous lui ressemblerez,
Je préfage que vous ferez

De ceux que l'on n'étonne guère.
Qu'on aura beau vous dire non,

Et

que d'une beauté févère Vous affronterez la colère,

Comme il affronte le canon.
Peut-être ferez-vous volage;
Mais malgré le goût de notre âge
Et l'attrait de la nouveauté,
Vous ferez bientôt arrêté

Dans un éternel esclavage:
Votre père l'a bien été.

Jufqu'au bout fuivez fon exemple.
Si vous trouvez jamais un cœur
Où la Décence & la Candeur
Habitent comme dans leur temple;
Un caractère fans humeur,
Un efprit formé par les Graces,
Une ame où l'aimable Pudeur
Dès l'enfance ait gravé fes traces;
Croyez-moi, tenez-vous en là :
Votre fort eft digne d'envie.
C'eft beaucoup, fi ce bonheur-là
Se trouve une fois en la vie.

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VERS

A Madame.... à qui l'on envoyoit une toilette.

1758.

QUE je regrette l'âge d'or !
L'homme étoit fimple, il étoit fage.
La beauté n'avoit point encor

Appris à fe cacher fous un brillant nuage:
De fes graces, de ses attraits

La Nature faifoit les frais.
Que ne revient-il ce bel âge!
Affife fur un gazon frais,
D'un ruiffeau la glace argentine
Vous retraceroit tous vos traits:
Là, Flore, de fa main divine,

Dans vos cheveux femés de fleurs,

Mêleroit fes parfums aux plus vives couleurs :
Des Amours la troupe enfantine

Draperoit un voile léger,

Que des zéphyrs l'aile badine

Feroit doucement voltiger.

Cette toilette naturelle

Ne déguiferoit rien; vous en feriez plus belle,

Mais l'âge d'or eft loin de nous.

Un art capricieux a réduit en méthode

Ce don fi flatteur & fi doux,

Ce don de tout charmer, qui n'eft qu'un jeu pour vous. Contre une parure incommode

En vain la Nature s'infcrit;

La laideur inventa la mode,

Et la beauté même y foufcrit.
Il faut bien que je me foumette
A ce pouvoir frivole, & pourtant abfolu.
Recevez donc une toilette,

Comme un meuble très-fuperflu.

Vénus en avoit une, au moins on nous l'affure :
On dit que de s'orner elle prenoit grand foin.

Je ne fais fi Vénus eut befoin de

parure;

Mais vous n'en avez pas befoin.

Dans l'art de cacher la Nature

Gardez-vous bien de l'imiter.

Lisbette, de Vénus euffiez-vous la ceinture,
On feroit trop heureux de vous la voir quitter.

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