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dent beaucoup des besoins locaux. Nous dirons seulement que ces cultures peuvent donner de grands produits, et que la tourbe qu'on retire des marais indemnise quelquefois largement des dépenses faites pour arriver à leur assainissement. Il est bon d'ajouter qu'un dessèchement absolu, quoique fort rare, a aussi ses dangers, et qu'il est bon de se réserver, par des vannes et écluses, des moyens d'irrigation, dont l'utilité est reconnue lorsqu'il s'agit de pâturages.

Il ne paraît pas qu'on se soit beaucoup occupé de dessécher les marais, en France, avant le règne de Henri IV. Sully, ce grand et illustre ami de l'agriculture, ayant entendu parler d'un certain Humphrey Bradley, Hollandais d'origine, et d'une habileté reconnue dans ce genre de travaux, auxquels il s'était livré dans son pays, l'appela en France, le nomma grand-maître des digues de France, et lui donna l'entreprise de tous les dessèchements, avec une multitude de priviléges, dont le monopole et la noblesse sont les moindres. Rien n'est curieux comme les édits que rendit à cette occasion le célèbre ministre; leur lecture offre autant de charmes que d'intérêt. Oh! c'est qu'alors on ne dédaignait pas les choses agricoles! on les traitait bien, on les honorait. On exempta d'impôts, pendant vingt-cinq ans, les terres desséchées; et les vues grandioses de Sully se fussent réalisées, saus les tracasseries et les obstacles de tout genre que la noblesse, grande et petite, opposa au grand-maître des digues. Il est vrai que ces édits stipulaient en sa faveur le partage à moitié des marais assainis, et nous verrons plus loin, que cette question de partage doit neutraliser tous les efforts que l'on tentera jamais pour combattre le fléau.

Le pauvre Bradley, tourmenté, contrarié, vexé, ruiné, en mourut à la peine, et ne fit rien de bon. Il eut des successeurs qui n'obtinrent pas de plus heureux résultats, quoique, pendant les règnes suivants, on eût eu la prudente précaution de leur adjoindre des personnes de race noble et considérables qui pussent les appuyer, et surtout qui devaient entrer en partage des bénéfices. La révolution de 1789 trouva les choses en cet état ; cette époque de grandes et utiles réformes n'eut garde d'oublier les marais, et il fut décidé que les dessèchements auraient lieu par concessions, ou aux frais et profit de l'état. C'était une grande faute, car il est bien prouvé que l'état ne peut être entrepreneur, et qu'il ne doit pas l'être, sous peine de compromettre sans cesse ses intérêts; tout au plus, penti encourager et faciliter les grandes entrepri

ses, par des primes et des secours, lorsque les contribuables doivent tirer de grands avantages de ces entreprises. Les événements dont l'Europe fut le théâtre, sauvèrent à la France les inconvénients que devait entraîner cette vicieuse législation, et ce ne fut qu'en 1807 qu'ou songea à la réformer. Sur la proposition du ministre de l'intérieur Montalivet, le corps législatif adopta une loi fort compliquée et absolument impraticable, qui voulait, 1o une estimation préalable des marais à assainir; 2o une estimation postérieure au dessèchement; 3o un partage de la plus value entre le propriétaire et le concessionnaire, avec obligation de la part du premier, de payer sur-le-champ portion de cette plus value, ou d'en faire au concessionnaire la rente à raison de cinq pour cent, rachetable par portions convenues. Comme on voit, et à ne tenir aucun compte d'une multitude de dispositions qui devaient éloigner plus qu'encourager les entreprises, la loi de 1807 retombe, par voie détournée et fort tortueuse, dans le principe du partage. L'estimation de la valeur préalable des marais est presque un non sens; l'estimation immédiatement postérieure au dessèchement en est à peu près un autre, car on ne peut asseoir à cet égard d'opinion raisonnable que quand les travaux sont consolidés. L'obligation pour le propriétaire de racheter son bien blesse les principes, ou, si l'on veut, les préjugés de propriété, préjugés très-vifs et très-irritables comme on sait. On ne dessécha rien, et les marais attendent une législation plus simple, plus praticable.

En 1832, au mois de mai, un honorable député* lut à la chambre un projet qui revenait au fond, aux édits de Sully, si ce n'est que les marais y sont divisés en un certain nombre de classes qui donnent aux entrepreneurs une part plus on moins forte dans la propriété, suivant l'importance des terres et la difficulté des travaux. C'est rentrer dans le même cercle d'inconvénients, et retomber dans le même genre de violation de propriété qui a toujours paralysé les intentions, certes, les plus pures, Le projet de loi fut, suivant l'usage, renvoyé à une commission qui, pressée par la fin prochaine de la session et par l'encombrement des travaux législa tifs, fit, par l'organe d'un rapporteur, une sorte de communication à la chambre, sans portée, et sans conclusions, ajournant l'étude de cette importante matière.

Maintenant, s'il nous est permis d'indiquer les moyens qui seuls nous paraissent pouvoir résoudre la question, en respectant ce terrible droit de pro

priété, pierre fondamentale de l'édifice social, qui s'ébranle au moindre choc qu'elle paraît avoir à craindre, nous indiquerons le fermage, comme devant tout concilier, et comme s'ajustant bien aux mœurs et aux habitudes agricoles. Nous supposons qu'une enquête générale est ordonnée sur les lieux mêmes, et sous les yeux d'un jury, pour arriver à une connaissance aussi complète que possible, de l'état actuel des marais, de leurs inconvénients généraux, des avantages ou des pertes (car il peut y avoir des riverains dont la propriété perde au dessèchement) qui résulteraient des travaux, de la possibilité de dessécher, des dépenses supposées, etc. Ce jury déciderait, dans une seconde session, les indemnités à allouer, et formerait un cahier de charges; dans une troisième, il recevrait les soumissions cachetées des compagnies qui auraient pu se former dans l'intervalle, soit parmi les propriétaires, soit par des concessionnaires étrangers. Ces soumissions demanderaient l'entreprise moyennant un fermage à payer aux propriétaires pour telle somme et pour tant d'années, et on l'accorderait à la compagnie qui offrirait une rente plus forte, pour un bail moins long. Ce système, jeté ici rapidement et sans les développements dont il serait susceptible, peut être modifié et amélioré dans ses dispositions de détail; mais nous ne pensons pas qu'il puisse être impraticable; il ne blesse ni les intérêts du propriétaire, ni ceux des entrepreneurs également intéressants dans la question; et, en dernier résultat, il arriverait presque toujours, que le propriétaire finirait par s'entendre à l'amiable avec son fermier, pour le rachat du bail et la jouissance directe des terrains desséchés.

MARCHAND. ÉCONOMIE POLITIQUE, LÉGISLA TION. Le marchand est une particularisation de l'espèce commerçant; l'acception légale du mot s'applique à tout individu qui achète des denrées ou des produits fabriqués pour les revendre par parties et en nature aux consommateurs. La faculté d'être marchand est soumise aux mêmes restrictions, exceptions et obligations, imposées aux commerçants en général; c'est donc sous ce point de vue général que nous donnerons ici un aperçu rapide de la législation qui les régit; trop de personnes se placent dans cette classe, pour qu'il ne soit pas d'un haut intérêt pour elles de comprendre tout ce que la société lui impose.

Les lois françaises interdisent le commerce à peu près à tous ceux qui exercent des fonctions publiques; ainsi les magistrats judiciaires, les avocats, les agents de change et courtiers, les officiers et

administrateurs de la marine militaire, les agents diplomatiques et les consuls ne doivent point commercer. Les actes qui ont lieu en contravention de cette défense n'en sont pas moins valables pour les parties contractantes, mais ils entraînent l'application de certaines peines. Les convenances sociales et l'intérêt même du commerce ont dicté ces prohibitions; mais on sait que, comme toutes les prohibitions possibles, elles sont fréquemment violées, et quoiqu'en général, la raison les sanctionne, il faut convenir aussi qu'elles pourraient, sans inconvénient, être levées pour certaines classes. (Voyez EFFETS PUBLICS.) Quel danger, par exemple, y aurait-il que les consuls fissent le commerce? Tandis que nous les gènons sur ce point, ils voient les agents consulaires de toutes les nations rivales faire le négoce, se mêler facilement ainsi, à la classe marchande, puiser dans ces relations intimes les moyens d'éclairer leur propre pays sur une foule de points importants, et se faire, par des actes honorables en eux-mêmes, un état de fortune qui leur donne au dehors une considération dont le reflet s'étend sur leur patrie.

Les restrictions ont été inspirées par l'intérêt de la morale et de l'ordre public, en soumettant à une surveillance particulière les différents genres de commerce qui se trouvent naturellement en contact avec la santé et la sûreté des citoyens. (Voyez RÉGLEMENTS.)

Les obligations sont communes aux commerçants et marchands, ou particulières aux mineurs et aux femmes mariées.

Tous doivent prendre une patente dont l'acquit annuel forme une branche importante du revenu public. L'absence de la patente ne frappe d'aucune incapacité, mais elle infirme plusieurs actes de commerce, mais le négociant ne peut ni former une demande, ni se défendre en justice, ni faire aucune signification extra-judiciaire pour tout ce qui serait relatif à son commerce, sans l'indication précise de cette pièce, sous peine d'une amende de cinq cents francs. Beaucoup de petits marchands, pour éviter cet impôt, s'exposent à ne pouvoir poursuivre leurs débiteurs ; il est équitable, cependant, cet impôt : le commerçant doit à son pays une légère portion de ses bénéfices. La seconde des plus importantes obligations, consiste dans celle de tenir des livres réguliers; la loi exige impérieusement un livre-journal, et un registre d'inventaires, timbrés, cotés et paraphés par un magistrat judiciaire ou municipal. Excepté dans les maisons importantes, dont les chefs ont assez de lumières pour sentir la nécessité d'écritures bien tenues, la

loi est peu obéie en général, et c'est un très-grand malheur. (Voyez LIVRES (TENUE DE). Pour le timbre et le paraphe, personne ne s'y soumet, et l'inconvénient est sans gravité. Le législateur a voulu ensuite que les conventions matrimoniales et les changements qu'elles peuvent subir, fussent rendus publics, sous des peines trop sévères, puisque les tribunaux ont refusé plusieurs fois de les appliquer. Mais on sent combien il importe aux tiers, de connaitre la position de famille des commerçants en général; il est donc à désirer que cette intéressante partie de la législation commerciale soit utilement révisée.

Les marchands sont une classe d'industriels extrêmement utiles à la société, en ce qu'ils évitent des frais considérables aux consommateurs, mettant à leur portée les produits de toutes les industries. Ils concourent en ce sens à la richesse publique par leurs soins, leurs travaux, leurs avances; presque tout ce qui se consomme, passe par leurs mains; et puisqu'ils permettent aux petites fortunes, aux ouvriers, de s'approvisionner par faibles quantités, et sans mises considérables de fonds, ils deviennent, entre le producteur et le consommateur, un intermédiaire indispensable. La multiplicité des marchands a été quelquefois considérée comme un mal pour eux, oui, et cela les regarde; c'est à eux de calculer les effets d'une concurrence qui peut diminuer leurs bénéfices; mais le consommateur y gague, puisque cette concurrence a pour premier avantage d'établir des prix courants plus uniformes, et ensuite de limiter les bénéfices du marchand, ce qui baisse toujours le prix des denrées et le met au niveau le plus convenable pour tous chacun est libre, s'il est mécontent de son marchand, de traiter avec un autre. Le seul inconvénient, très-grave du reste, qui puisse résulter d'une excessive concurrence, résiderait dans l'altération de certains produits alimentaires à laquelle se livrent beaucoup de détaillants qui sans cela vendraient peu ou point du tout. Le sens grossier et les goûts stupides de certains consommateurs facilitent ces désordres (voyez FRAUDE), et il est notoire, par exemple, qu'un marchand de vin au détail ne pourrait tenir six mois, s'il introduisait dans l'abominable liqueur qu'il distribue à ses clients, plus d'une très faible portion de jus authentique de raisin. Ce serait le cas, de la part des tribunaux, d'user d'une impitoyable sévérité, si une police plus éclairée sur les moyens de constater la fraude, plus vigilante, leur déférait plus fréquemment les coupables. Mais quoi? Les agents de police sont-ils eux-mêmes à l'abri des séductions; et une coupe de cette mixture empoi

sonnée n'a-t-elle point aussi pour eux d'irrésistibles charmes ? C'est donc ailleurs qu'il faudrait chercher les instruments de surveillance; peut-être, avec quelque talent gouvernemental, serait-il possible de former des espèces de constables dans les classes aisées et éclairées, qui se chargeraient de ce soin. Nous devons ajouter que l'exagération des taxes a plus de part encore dans les abus que nous signalons, que l'excessive concurrence elle-même.

Les marchands en détail se plaignent amèrement du commerce que font, sans patente et sans frais de loyer, les étalagistes de la rue et les colporteurs. A part les embarras que la vente des rues occasionne sur la voie publique, et qui sont du ressort de la police, les marchands ont tort de se plaindre: il faut que tout le monde vive; il faut que le pauvre petit peuple trouve certains produits au meilleur marché possible, et il est évident que la clientelle des étalagistes ne serait point encore celle des boutiques, lors même qu'on se déciderait à prohiber les étalagistes; et nous pensons qu'il est fort rare de voir les consommateurs jouissant d'une certaine aisance, devenir les chalauds de l'éventaire. Nous n'adopterons point à ce sujet les vues de J.-B. Say, notre maître; et un seutiment que nous placerions toujours au-dessus des froides déductions de l'économie politique, si elles pouvaient être un instant en opposition avec la philanthropie, nous portera toujours à défendre la cause des petits marchands ambulants et des colporteurs dûment surveillés. Cette dernière classe de marchands, la plus infime sans doute, sera long-temps encore utile dans les campagnes, où les dépôts de machandises ne peuvent se former, parce que les consommateurs ne sont ni assez aisés, ni assez nombreux. Pour bien entendre cette matière, il faut avoir vécu loin des brillants magasins des grandes villes.

On parle souvent avec mépris de l'esprit étroit et des passions peu généreuses des geus tenant boutique. Loin de les défendre sur ce grand chef d'accusation, nous ferions volontiers remonter son effet jusqu'aux sommités les plus prétentieuses du commerce: ce penchaut, du reste, s'explique par la répétition constante, continuelle, d'actes dont le but unique est le gain, la supputation du gain. Le marchand ne pense qu'à son bénéfice, ne voit rien que son bénéfice; cela ne peut pas ne pas être, puisque sa seule occupation de tous les instants l'attache exclusivement à cette pensée. Plus de moralité dans l'éducation parviendrait seule à lutter avantageusement contre un travers qui nuit beaucoup à la douceur des relations sociales, et qui

ravale la dignité de l'espèce humaine. Nous hasarderons à ce sujet une observation qui a échappé à un grand nombre d'historiens et de publicistes, et qui explique et la répugnance des nobles pour le commerce, et les singulières réhabilitations qu'ils sollicitaient de l'autorité royale quand ils s'étaient livrés au négoce. Le mot noblesse n'a pas toujours été un vain synonyme d'élévation de sentiments et de générosité; et les marchands sont une variété de l'espèce humaine qui de tout temps s'est flétrie elle-même, comme à plaisir, par des habitudes incontestables d'égoïsme et de passion pour le plus misérable gain, sacrifiant tout à l'intérêt, sacrifiant (osons le dire) jusqu'au patriotisme!

MARCHÉS. ÉCONOMIE POLITIQUE. Ce mot offre deux sens différents, quoiqu'ayant une base commune. C'est d'abord un échange mutuel entre deux parties contractantes, ou, par extension, une affaire heureuse et profitable; c'est ensuite le lieu où se font les transactions commerciales. Cette dernière acception nous occupera seule dans cet article. Nous l'examinerons sous divers points de vue : le lieu où se vendent les objets de consommation, apportés à heures et à jours fixes du dehors; les marchés périodiques, à intervalles plus ou moins éloignés, c'est-à-dire les foires; les marchés où se vendent les effets publics, où se font les hautes transactions commerciales, en d'autres termes, les bourses; enfin, les débouchés extérieurs où se rendent les produits nationaux pour s'échanger contre des produits exotiques.

Les marchés d'une ville sont des places où, le matin ordinairement, tous les jours pour le grand centre de population, un jour fixe dans la semaine pour les petites localités, les gens du voisinage apportent, d'un certain rayon, les denrées alimentaires qui se produisent ordinairement dans les campagnes, et qu'il serait onéreux aux citadins d'aller acheter au loin; tandis que les villageois, ayant à faire des acquisitions en ville, ou du moins pouvant se déplacer pour servir un grand nombre de personnes, peuvent, sans beaucoup de frais, se transporter, eux et leurs produits, sur le lieu de la vente. Ces convenances réciproques, qui ne sont pas de création administrative, quoiqu'une administration habile puisse les faire naître quelquefois très-utilement, sout en général soumises à des réglements que nécessitent la propreté et le bon ordre des localités; mais parmi ces réglements il en est d'absurdes, dont nous observerons bientôt les graves inconvénients.

Le lieu où sont établis ces sortes de marchés, que nous nommerons périodiques, n'est pas indiffé

reut. Le centre d'une ville, tant que les rayons n'atteignent pas une grande étendue, est ordinairement préférable; mais, lorsque la circonférence s'élargit démesurément, il y a nécessité de diviser le marché principal. On a senti très-tard à Paris cette nécessité, et encore n'y a-t-on pourvu que d'une manière fort incomplète. Il en est résulté pour certains quartiers, un horrible encombrement de population, qui ne profite qu'aux propriétaires de maisons, parce que les plus petits locaux sont hors de prix.

Les foires sont de grands marchés tenus à des époques éloignées, assez ordinairement au commencement de chaque saison. Ce sont d'immenses rendez-vous donnés pour la conclusion d'une multitude d'affaires, pour des paiements, pour l'achat et la vente des bestiaux, des produits de l'industrie agricole et manufacturière. On sait au loin, qu'à tel jour, en tel lieu, doit se réunir une grande quautité d'individus; chacun alors s'arrange pour y transporter des objets de vente, ou pour y faire des acquisitions, louer des domestiques, se voir enfin et se livrer au plaisir. Il est des foires célèbres en France, telle que celle de Beaucaire dans le midi, pour leur durée et l'énorme masse d'affaires; en Allemagne les foires de Leipsick et de Francfortsur-le-Mein sont un rendez-vous pour des marchands de toute l'Europe et mème d'Asie. Mais pourquoi ces grands marchés perdent-ils sensiblement de leur importance? Pourquoi les foires sont-elles généralement moins belles qu'autrefois? Ce phénomène s'explique par la facilité de communications qui devient de jour en jour plus grande, et par l'introduction, dans beaucoup de contrées, d'industries qui y étaient autrefois inconnues. On sent mieux le prix du temps, et on calcule qu'il en faut beaucoup perdre pour se rendre aux foires où l'on ne trouvera pas peut-être à se défaire de certaines marchandises dont il faudra opérer à grands frais le retour; s'il est possible de trouver près de soi, ou de faire venir à bon compte les objets de consommation, on ne se sent plus disposé à courir à leur recherche. Pourquoi se déplacer ainsi, quand le service des postes se fait si bien et si rapidement, quand des commis voyageurs se chargent des commandes, les commissionnaires de placer les produits, les banquiers d'opérer les paiements? Les frais qu'occasionnent ces divers intermédiaires sont infiniment moindres que ceux des voyages isolés, en conséquence du grand principe de la division du travail. (Voy. ce mot.) Partout les routes et le roulage se perfectionnent; les canaux se creusent; la marine marchande s'anime, s'étend, parcourt les

mers avec une rapidité inquïe et avec peu de dépense. Que deviendront donc les foires? Elles s'éteindront insensiblement chez les nations très-civilisées; elles disparaîtront devant les chemins de fer sur lesquels on voiture même les bœufs et les pour ceaux. Jusque là, les foires continueront à jouer un grand rôle dans la distribution des richesses. Il est hors de doute que si elles sont éminemment utiles au producteur et au consommateur, leur effet sur la prospérité des lieux où elles s'établissent, beaucoup plus par la nature même des choses que par les volontés administratives, leur effet sur la prospérité locale est immense; on y consomme d'autant plus que l'assemblée est plus nombreuse, et toute l'attention des autorités municipales doit être d'y attirer le plus de monde possible. Si ce principe est incontestable, on sentira de suite la folie des entraves que ces autorités y apportent avec une bonne foi qui trahit la plus profonde et la plus déplorable ignorance. Voici maintenant un étrange spectacle! Voici la sublime conception des douanes, mais en miniature! Ne faut-il pas en effet tirer bon parti de cette foule de visiteurs? Si nous pouvions arracher quelques francs à chacun d'eux, cela grossirait nos ressources, aiderait à la réparation de notre église, au nettoyage de nos rues, etc. Taxons donc les arrivants pour la petite place qu'ils vont occuper dans le champ de foire; taxons les marchandises, tant pour un cheval, tant pour un mouton. Mais si je ne vends pas mon mouton, ou mon cheval? Arrangez-vous, mais payez d'abord!»-Pauvres gens! qui devraient au contraire couvier leurs voisins par tous les moyens imaginables, par des fêtes et de joyeux passe-temps, dussent s'ensuivre quelques sacrifices, et qui s'ingénient à les éloigner par leurs taxes insensées! Voyez OCTROIS, TAXE DES PAUvres.

Les bourses sont de véritables marchés. Les commerçants, les étrangers inconnus les uns aux autres, s'y cherchent et s'y trouvent facilement, y vendent leurs marchandises, ou font leurs achats, soit directement, soit par l'intermédiaire d'agents de change et de courtiers; c'est enfin le marché spécial et légal des effets publics. Voyez ce mot, RENTES.

Reste enfin la question des débouchés extérieurs. Les consommations locales ne suffisent point pour alimenter l'activité industrieuse d'une nation, et la production d'un pays ne saurait satisfaire les besoins qui s'y font sentir, puisque les différences de climat, de mœurs et d'aptitude ne permettent de créer qu'un nombre limité d'espèces de produits. Force est donc de s'approvisionner ailleurs,

et de s'ouvrir des marchés ou des débouchés pour les échanges. Il faut se faire des amis : c'est facile on sait le moyen. Il faut offrir des échanges avan tageux, et c'est par les perfectionnements dans le travail, par les procédés peu coûteux de fabrication que l'on y parvient. Par exemple, les personnes qui proscrivent bravement les machines, out-elle: jamais étudié la question des débouchés? Est-i possible, au siecle où nous sommes, de soutenir la concurrence étrangère, sur les marchés étrangers et d'alimenter l'activité prodigieuse qui dévore le sociétés modernes, sans machines, c'est-à-dire san produire à bas prix ? Oh! que les hommes ont don besoin d'acquérir des idées justes sur ces solennelle questions! Répétons-le encore pour ceux qui nou reprocheraient de moraliser dans ces courts articles, bien plus que d'enseigner dogmatiquement : la mission que nous nous sommes donnée dans ce livre, qui s'adresse moins aux hommes faits et se croyant savants, qu'à la jeunesse, amour et espérance de notre pays, est de lui faire comprendre l'importance de l'économie politique, et de l'initier simplemen aux grands intérêts dont s'occupe cette noble sci ence. Nous voudrions lui ouvrir les yeux, lui inspirer le goût des études graves et sérieuses; nou cherchons à éveiller chez elle, non les passions po litiques désordonnées qui brûlent, détruisent et n'édifient rien, mais cette passion de bien public qui porte à s'éclairer pour servir dignement la patrie dans quelque position qu'on se trouve placé. Eh bien! Adam Smith, Say, Ricardo, Droz, Storch, Flores Estrada, ont jeté une vive lumière sur l'économie sociale; que la jeunesse s'empare de leurs immortels ouvrages pour y étudier profondément la science, l'avancer ensuite, et s'illustrer dans les applications qu'on lui fera subir, les progrès qu'on lui fera faire!

MARÉES. PHYSIQUE, ASTRONOMIE. Les marées sont des oscillations régulières et périodiques, que les mers subissent par l'attraction des corps célestes, principalement par celle de la lune et du soleil. Dans les parties de l'océan sujettes aux marées, il offre chaque jour deux oscillations plus ou moins fortes, d'une durée généralement inégale. Sur les côtes de France, la première de ces oscillations fait monter la mer pendant environ six heures. Parvenue à sa plus haute élévation, elle reste stationnaire à peu près pendant un quart d'heure. C'est le moment de la haute mer ou de la pleine mer: on nomme flux ou flot le mouvement qui l'a produite; bientôt la mer commence à baisser; elle met environ six heures pour se retirer, et demeure

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