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trochanters sont éloigués par un espace plus considérable. Voyez Os,

STALACTITES, HISTOIRE NATURELLE, MINÉRALOGIE. On donne le nom de stalactites aux concrétions allongées, coniques ou cylindriques, qui résultent de l'infiltration d'un liquide chargé de molécules pierreuses ou métalliques à travers les voûtes des cavités souterraines. Ces cônes ou cylindres sont creux ou pleins à l'intérieur; leur surface est tantôt lisse et tantôt hérissée de pointes cristallines; ce sont des formes accidentelles, qui dépendent uniquement du mouvement lent et vertical que possédait le liquide qui a déposé ses particules.

STALAGMITES. MINERALOGIE. Les gouttes qui tombent sur le sol des cavités souterraines y forment d'autres dépôts, ordinairement mamelonnés; ce sont les stalagmites. Quelquefois ces dé pôts, en prenant de l'accroissement, vont joindre les stalactites qui pendent aux voûtes, et forment par la suite d'énormes colonnes. On en voit de semblables dans un grand nombre de grottes calcaires, et particulièrement dans les grottes d'Auxelles et d'Arcy en France; mais de toutes les grottes de ce genre la plus célèbre est celle d'Antiparos dans l'Archipel, qui a été visitée et décrite par Tournefort.

STATION. PHYSIOLOGIE. Action par laquelle les animaux soutiennent fixes les diverses parties de leur corps. Les effets des différentes stations se passent dans les muscles, dans les parties qui transmettent immédiatement le poids du corps au sol, dans les os, dans les viscères abdominaux et autres organes.

L'homme est susceptible de plusieurs stations. Les plus ordinaires sont la station bipède et la station assise. Dans la station bipède, ce sont les pieds qui transmettent le poids du corps au sol. Cette station exige de la part de l'homme de grands efforts musculaires, car les diverses pièces qui composent son corps de la tête aux pieds, non-seulement sont mobiles les unes sur les autres, mais encore sont placées de manière à ne pouvoir pas rester en équilibre, dans une même position verticale, par le seul fait de leur poids. Rien n'est plus fatigant, dans cette station, qu'une constante immobilité; on éprouverait moins de lassitude à marcher six heures, qu'à rester immobile et debout pendant une; aussi doit-on, lorsqu'on est debout, varier à chaque instant la position des pieds, faire porter le poids du corps tantôt sur l'un, tantôt sur l'autre, et confier ainsi

successivement la tâche de la suspension à des muscles différents. La station assise est, de toutes, celle qui cause le moins de fatigue, et conséquemment celle qu'on affectionne le plus ; elle exige cependant seule attitude où le corps jouisse d'un repos entier, plus ou moins d'efforts musculaires. Il n'est qu'une celle du coucher; aussi est-ce celle que nous prenons quand nous voulons nous livrer au sommeil; le corps repose alors de toute sa longueur sur le sol, qui le soutient mécaniquement; nul muscle n'agit.

STATIQUE. MÉCANIQUE. Partie de la mécanique qui a pour objet les lois de l'équilibre des corps ou des puissances qui agissent les unes sur

les autres.

STATISTIQUE. ÉCONOMIE POLITIQUE. La loi, et la raison avant elle, font un devoir à tout homme qui se livre aux affaires de constater tous les ans sa situation financière; les études auxquel les il doit se livrer à cette occasion doivent le guider dans sa marche ultérieure, et diriger ses efforts sur telle partie plus faible, ou concentrer son action sur telle branche de travail plus productive. Sous une multitude de rapports, une nation doit avoir les mêmes études à faire sur son état réel; il faut donc qu'elle le connaisse, et qu'elle se livre à toutes les recherches utiles sur ce qu'elle est, matériellement parlant. De cette analogie très-facile à saisir dans les deux positions, nous tirerons une définition également claire de la statistique; ce sera pour nous : l'inventaire d'un peuple.

En considérant la statistique de ce point de vue, il n'est personne qui n'en comprenne la haute utilité; mais il n'est personne non plus qui ne conçoive l'extrême difficulté, dans l'état actuel des lumières, d'arriver à une connaissance complète des faits de la civilisation, et de les traduire en chiffres. Non-seulement l'égoïsme et l'ignorance sont là pour s'envelopper de ridicules mystères, mais les méthodes manquent encore à la science pour la guider dans sa marche; et par-dessus tout, les hommes à folle imagination sont là aussi pour tout brouiller, tout exagérer, pour faire fléchir les faits au gré de leurs rêves, ou mieux encore, pour les arranger systématiquement dans l'intérêt non de la vérité, mais d'opinions préconçues. Il faut bien l'avouer, les insolents mensonges de quelques statisticiens qui se sont arrogé le monopole de la statistique, ont attiré sur elle une bonne partie du mépris dont la totalité leur est cependant bien acquise; mais ce n'est pas aux économistes de bonne foi qu'il siérait de repousser des études qui, bien

faites, peuvent servir à la démonstration des prin- permanentes et les modes accidentels. Les qualités cipes et des vérités utiles.

La difficulté est, nous l'avouons, d'arriver à la vérité et à quelque chose de complet en matière de statistique. Mais jamais, pour les hommes courageux et éclairés du moins, le mot difficulté n'a été pris pour le mot impossibilité. Il s'agit de vouloir, avant tout, et d'arriver progressivement, si ce n'est à la certitude mathématique, au moins à ce qui en approche. Les gouvernements ont à leur disposition des moyens d'une force immense, et quand ils voudront invoquer le secours des hommes éclairés et de bonne volonté, ils en trouveront partout dans notre patrie, dévoués, ardents, pleins de verve et de patriotisme véritable, toujours prêts à payer de leur personne quand de fàcheux soupçons ne viennent pas glacer le zèle.

C'est par une habile division dans ce travail même, par des contrôles multipliés, qu'on peut obtenir de bons renseignements statistiques. Notre cadre ne nous permet pas d'exposer ici en détail les travaux au moyen desquels ce grand inventaire pourrait être dressé; l'un des écrivains qui ont le plus utilement coopéré à la rédaction de cette Encyclopédie, a depuis long-temps conçu un plan de statistique qu'il ne nous appartient pas de louer, mais que nous croyons digne d'attirer l'attention du pouvoir, qui connaît cet important travail. Nous appelons de toutes nos forces le concours des bons citoyens sur cette grave question; l'économie politique ne craint pas que l'exacte connaissance des faits vienne jamais renverser ses principes; la lumière est ce qu'elle cherche et ce qu'elle aime.

STYLE. BELLES-LETTRES. Manière d'exprimer les pensées de vive voix ou par écrit; la manière, le ton, la couleur qui règne dans un ouvrage d'esprit ou dans quelques-unes de ses parties.

Il y a trois sortes de style, le simple, le moyen et le sublime, ou plutôt le style élevé. Le style simple s'emploie dans les entretiens familiers, dans les lettres, dans les fables. Il doit être pur, clair, sans ornement apparent. Le style moyen tient le milieu entre le style simple et le style élevé; il a toute la netteté du premier, et reçoit tous les ornements, tout le coloris de l'élocution. Le style élevé est celui qui fait régner la noblesse, la dignité, la majesté dans un ouvrage. Toutes les pensées y sont nobles et élevées; toutes les expressions, graves, sonores, harmonieuses.

Ou distingue, dans le style poétique, les qualités

*M. A. Girault de Saint-Fargeau.

permanentes sont la clarté, la précision, la justesse, la correction, la facilité, l'abondance, la richesse, l'élégance, le naturel, la décence, le coloris et l'harmonie. Les modes accidentels du style sont ce qui le varie et le distingue de lui-même, comme ses tours, ses mouvements, etc. Telles sont l'énergie, la véhémence, la naïveté, la délicatesse, l'élévation, la simplicité, la légèreté, la finesse, la gravité, la douceur,

etc.

Dans les ouvrages en prose, on distingue le style périodique et le style coupé. Le style périodique est celui où les propositions ou les phrases sont liées les unes aux autres, soit par le sens même, soit par des conjonctions. Le style coupé est celui dont toutes les parties sont indépendantes et sans liaison réciproque. Le style périodique a deux avantages sur le style coupé le premier, d'ètre plus harmonieux; le second, de tenir l'esprit en suspens. Le style coupé a plus de vivacité et plus d'éclat on les emploie tous les deux tour à tour, suivant que la matière l'exige. Mais cela ne suffit pas à beaucoup près pour la perfection du style, car chaque genre d'ouvrage prosaïque demande le style qui lui est propre. Le style oratoire, le style historique, le style épistolaire, ont chacun leurs règles, leur ton et leurs lois particulières.

La clarté et l'arrangement des paroles et des pensées est la première qualité du style; un style obscur, et qui n'a point de clarté, est le plus grand vice de l'élocution. A la clarté il faut joindre, s'il se peut, l'éclat et la noblesse, qui font naître l'admiration. La beauté du style dépend aussi des ornements dont on se sert pour l'embellir; mais il faut les ménager avec adresse, car un style trop orné devient insipide. Enfin il est une autre qualité du style qui enchante tout le monde, c'est la naïveté.

La bassesse du style consiste principalement dans une diction vulgaire, grossière, sèche, qui rebute et dégoûte le lecteur. Le style ampoulé n'est qu'une élévation vicieuse; il ressemble à la bouffissure des malades. Le style froid est celui qui n'échauffe point, et qui ne sait point s'élever par la vigueur des idées et des expressions. Le style trop uniforme assoupit et endort; la variété, nécessaire en tout, l'est dans le discours plus qu'ailleurs.

Le style prend, en chaque siècle, le caractère des études dominantes. On le voit timide et presque servile lorsqu'après de longues ténèbres, et aux premiers jours où se renouvelle une instruction saine et classique, l'imitation des anciens modèles semble être encore l'unique talent et la seule per

fection possible. Il se hérisse de citations et de science, aux époques où l'érudition récemment éclose, d'autant plus fastueuse qu'elle est moins riche, obtient de l'ignorance, qu'elle étonne, de superstitieux hommages. Il se montre au contraire léger, précieux, maniéré, si c'est à la subtilité des •pensées et aux expressions équivoques ou ambitieuses que les noms de talent et d'esprit s'attachent. Il devient figuré, passionné, emphatique, quand la poésie et les arts d'imagination, par la hardiesse de leurs premiers élans, séduisent et entraînent le plus grand nombre des lecteurs et des auteurs. Dans un âge plus heureux ou plus mûr, la politesse des mœurs publiques et le génie des grands écrivains lui rendent ses grâces naturelles, son énergique simplicité, ses couleurs antiques. Bientôt les progrès de la raison et des connaissances exactes lui imposent des lois de plus en plus rigoureuses; et s'il est vrai que ces lois trop inflexibles puissent quelquefois comprimer ou circonscrire ses mouvements, il est encore plus certain qu'elles lui donnent une direction sûre, et qu'elles augmentent sa force et son élégance par la précision même et la justesse qu'elles exigent.

SUBLIMATION. CHIMIE. Opération au moyen de laquelle des substances volatiles sont élevées par la chaleur, et reprennent de nouveau, en se condensant, la forme solide.

La sublimation ne diffère de la distillation que par la disposition des vaisseaux, qui ne laissent aucune issue aux substances des corps qu'on analyse.

SUBORNATION. PHILOSOPHIE, MORALE. ACtion de corrompre quelqu'un, soit par flatterie, soit par caresses, soit par promesses et par menaces. Il y a deux sortes de subornation: l'une, par laquelle on entraîne une personne dans la débauche; l'autre, par laquelle on engage une personne à faire ou dire quelque chose contre la justice ou la vérité.

SUC. CHIMIE. Les sucs sont des liqueurs élaborées dans les organes des animaux et des végétaux, et qui servent à l'accroissement des uns et des autres. Ces substances sont très-composées : elles contiennent en même temps des sels, des huiles, des extraits ou savons naturels, des résines, etc. On peut les diviser en trois classes principales : les sucs aqueux, les sucs huileux et les sucs laiteux.

SUCRE. CHIMIE. Principe immédiat des végétaux; substance solide, blanche, douce, agréable

au goût, dont le nom seul rappelle la saveur, qui a la propriété de se convertir en alcool, et en acide carbonique par la fermentation. Le sucre se rencontre dans beaucoup de parties très-différentes des végétaux, telles que les fleurs, les fruits, les racines, les tiges; mais on le retire le plus ordinairement de la canne à sucre. Il se trouve dans la tige de toutes les plantes du genre arundo, dans l'érable, la betterave, le navet, l'ognon, et en général dans toutes les racines dont la saveur est douce. C'est de l'arundo saccharifera ou canne à succre, de l'acer montanum, de la betterave qu'on l'extrait le plus ordinairement.

Les autres variétés de sucre sont le sucre de raisin, le sucre d'érable, le sucre liquide des fruits, le sucre de figues, le sucre d'amidon, le sucre de champignons, le sucre de gélatine, le sucre de miel, la manne et le sucre de diabètes lorsqu'il est bien pur, il cristallise régulièrement : c'est ce qu'on nomme le sucre candi.

Le sucre mêlé à l'eau offre une boisson rafraichissante, saine, agréable, et quelquefois salutaire comme remède. Mêlé à l'eau en plus forte dose, et concentré par le feu, il donne les sirops, qui se chargent de tous les parfums et donnent à toute heure un rafraichissement qui plaît par sa variété. Mêlé à l'eau, dont l'art vient ensuite soustraire le calorique, il donne les glaces, qui sont d'origine ita lienne. Mêlé au vin, il donne un cordial, un restaurant tellement reconnu que, dans quelques pays, on en mouille les rôties qu'on porte aux nouveaux mariés, au commencement du jour qui succède à la première nuit de leurs noces. Mêlé à la farine, aux œufs, il donne les biscuits, les macarons, etc. Mêlé avec le lait, il donne les erèmes, etc. Mêlé au café, il en fait ressortir l'arôme. Mèlé au café et au lait, il donne un aliment léger, agréable, facile à se procurer, et qui convient parfaitement à ceux pour qui le travail du cabinet suit immédiatement le déjeuner. Mêlé aux fruits, aux fleurs, il donne les confitures, les marmelades, etc. Enfin le sucre mêlé à l'alcool donne les liqueurs spiritueuses.

SUCRE. INDUSTRIE, ÉCONOMIE POLITIQUE. Le sucre est une substance économique, d'un goût agréable et qui lui est propre; que la nature a placée dans la plupart des végétaux avec une riche profusion, et que l'industrie humaine est parvenue à isoler de toutes les autres substances capables d'altérer sa douce saveur. Le sucre n'est pas seulement un aliment de luxe, une espèce de superfluité gastronomique; c'est encore un véritable médicament qui agit utilement sur l'appareil digestif, dont

il contribue à calmer les irritations; mélangé avec les produits pharmaceutiques, il en déguise l'horrible saveur, et en facilite l'action. La question d'intérêt matériel n'est donc pas la seule qui se rattache à la production et au commerce des sucres, il faut y voir aussi la question d'humanité, et songer que le sucre est aussi utile au malade pauvre qu'au malade opulent ou du moins aisé.

On dit, et cela est très-vrai, que notre siècle est un siècle industriel; cependant en dehors de la classe des industriels, on est étonné de l'ignorance qui règne partout des procédés de l'industrie. Celle du sucre nous paraît assez importante pour mériter que nous l'exposions très-succinctement. Il y a bien en France trente millions d'individus qui ne savent pas plus comment on fait le sucre, qu'ils ne savent comment se fait la toile.

Les végétaux qui contiennent du sucre contiennent tous le même sucre, comme toutes les mines de fer contiennent le méme fer. Les différences de qualité proviennent toutes du travail d'extraction et de raffinage; isolé, réduit à l'état de pureté parfaite, c'est, nous le redisons avec intention, le même sucre. Au moment où nous écrivons ceci, le peuple anglais croit encore que les Français sont des charlatans, et que le sucre de betterave est un mensonge; il est vrai que le peuple français croit que le sucre de betterave ne vaut pas celui de cannes, et qu'il sucre moins. De part et d'autre le préjugé est absurde.

Les anciens connaissaient le sucre, mais seulement à l'état liquide ou de sirop; ce fut dans le XVe siècle que les Arabes de la contrée d'Alger le firent cristalliser et parvinrent à le durcir pour le transporter plus facilement. Ils l'extrayaient déjà de la canne, graminée originaire de l'Inde, qui s'est répandue successivement dans toutes les contrées intertropicales. Cette plante si précieuse à beaucoup de ressemblance avec le maïs, mais elle est plus élevée, et après dix à douze mois de végé tation, elle est remplie d'un jus sucré qu'on extrait en la faisant passer dans des laminoirs de bois dur ou de fer, très-rapprochés. La pression fait sortir le vin de canne qui coule par des rigoles dans un réservoir. La tige, appelée bagasse, sert de combustible. La fermentation alcoolique s'opérerait rapidement dans le jus, si on ne s'empressait de le faire cuire en le mélangeant avec de la craie qui absorbe les acides. Après une forte ébullition qui rejette sous forme d'écume les matières hétérogènes, la liqueur prend le nom de vesou; on la filtre, on la refroidit, et elle se graine alors, c'est-àdire qu'elle prend en masse de cristaux confus,

séparés d'une substance inférieure et incristallisable nommée mélasse qui sert à la fabrication de certaines liqueurs. Le sucre ainsi obtenu à ce premier degré porte le nom de cassonnade, et moscouade lorsqu'il est grossièrement aggloméré en masses.

L'opération du raffinage consiste à blanchir et à durcir le sucre, en chassant toutes les parties de mélasse qu'il contient encore. On se sert, dans ce but, d'une multitude de procédés que nous ne décrirons pas, parce qu'il est facile de les comprendre et de les juger dans les établissements multipliés qui se livrent en France à ce genre d'industrie. Nous dirons seulement que quelques-unes de ces opérations sont fort délicates; une partie du sucre pouvant, par une trop grande intensité de chaleur, et en pure perte, se convertir en mélasse et en caramel, commencement de carbonisation. L'anglais Howard a déconvert assez récemment un ingénieux procédé pour pratiquer l'ébullition dans le vide, conséquemment à une température si basse, qu'elle exclut toute possibilité d'altération par excès de chaleur, et avec énorme économie de combustible.

On sait que pendant la durée du blocus continental, événement unique dans l'histoire! le sucre devint si cher, que le génie industriel chercha à en extraire de quelques végétaux indigènes. Après beaucoup d'efforts et de sacrifices, on parvint à fabriquer de superbe et excellent sucre avec le jus extrait de la betterave, cinq pour cent environ du poids total du légume. Cette industrie qui se pratique à peu près comme celle que nous venons de décrire, a pu, grâce à la protection exorbitante accordée à nos misérables colonies, prendre de l'extension, et donner des bénéfices dont nous parlerons bientôt. On fait aussi du sucre avec du lait, du raisin, du miel, etc.; mais ces industries sont bornées, parce qu'elles offrent des difficultés très-onéreuses, et que la matière première a toujours un emploi avantageux.

Pendant les longues guerres de la république et de l'empire, nos colonies souffrirent beaucoup de l'occupation anglaise. Un grand nombre de planteurs furent ruinés, les habitations se dépeuplerent, les campagnes furent laissées en friche, et le peu de sucreries qui continuèrent à marcher ne purent suivre le mouvement industriel et les perfectionnements nombreux que le temps apportait à cette fabrication. C'était un malheur, et trèsgrand; la cupidité et l'ignorance se chargèrent de l'empirer; mais posons d'abord quelques faits et quelques principes.

On crut, à la restauration, que les méchantes petites îles à sucre que les Anglais nous rendirent avec tant de générosité, étaient indispensables au bonheur, à la prospérité de la France; nous avons démontré, dans notre article Esclavage, l'erreur de cette opinion. Si elles n'existaient pas, si nous avions le malheur de les perdre, la France n'en serait ni moins belle, ni moins puissante, elle en deviendrait beaucoup plus riche. Voyez DOUANES, ESCLAVAGE, MONOPOLE.

Le malheur des colons était grand, sans doute; mais qui n'a perdu quelque portion de sa fortune pendant la terrible période dont nous venons de parler? On perd de mille manières différentes; et pendant que les colons perdaient une partie de leurs revenus, les habitants de la métropole perdaient également une partie du leur en payant le sucre six fois sa valeur ordinaire; et remarquous que notre perte à nous s'éternise par la protection exagérée accordée aux sucres des colonies françaises, protection qui se réduit à une indemnité indéfinie que les consommateurs français leur paient depuis près de vingt aus. Remarquons encore que tous, ou presque tous les colons étaient fort riches, et qu'il s'en faut qu'ils aient été réduits à la misère; si leur opulence disparut, l'indigence ne prit point sa place pour l'immense majorité * : leur faire l'aumône était une déception analogue à la grande déception du milliard d'indemnité; avec cette différence que l'indemnité était une fois donnée, une affaire finie; tandis que l'aumône aux colons dure toujours, et selon toute apparence, durera encore long-temps; aumône, du reste, qui a le sort de toutes les aumôues, et qui ne sert pas même l'indigent prétendu; elle l'endort dans sa paresse. Nos colons en sont encore, sous beaucoup de rapports, et en particulier sous celui du talent industriel, où ils en étaient en 1814.

La fin de l'empire et le rétablissement des paisibles relations des peuples offrirent à la France des chances immenses de bénéfices commerciaux qui ne se renouvelleront plus, et que le fatal système de nos douanes a anéantis à jamais. Nous étions à portée de fournir les sucres raffinés à une grande partie de l'Europe centrale. Loin de là, l'industrie du raffinage s'est exercée sur la maigre portion de sucre qui formait notre faible consommation; ce travail, et tout l'immense mouvement

Beaucoup de propriétaires faisaient administrer leurs plantations par des régisseurs, et vivaient en France, nonseulement de leurs revenus, mais encore de places, ou de charges lucratives à la cour.

commercial qui en eût été la conséquence, furent paralysés par le monopole attribué aux colonies. Comment ne pas se laisser entraîner à de l'irritation à l'aspect de fautes semblables!

Avant la révolution, le sucre, comme denrée coloniale, supportait un droit du domaine d'occident et un droit de consommation qui équivalaient à 9 pour cent de la valeur, et non du poids. En 1813, lors de la plus grande extension du territoire français, la consommation en sucre, pour 45 millions d'habitants, était réduite à 14 millions de livres, un tiers de livre pour chaque individu, par an.

Le 23 avril 1814, une ordonnance royale fixa à 20 fr. par 50 kilogrammes la taxe à percevoir à l'entrée des sucres bruts de toutes provenances,. étrangères ou nationales. Une loi du 17 décembre suivant conserva cette taxe pour le sucre de nos colonies, et frappa les sucres étrangers d'une surtaxe de 10 francs : première aumône aux colons qui la reçurent jusqu'en 1816, époque à laquelle ils en réclamèrent une plus forte. La consommation allait croissant. La France réduite consommait alors 48 millions de livres, et l'étranger entrait pour 13 millions dans cette fourniture. Les colons n'y tinrent pas.

Ils obtinrent la loi du 28 avril 1816 qui élève las surtaxe de 10 francs à 12,50 pour les sucres étrangers. La consommation s'était accrue de 48 à 72 millions de livres. En 1820, cette consommation s'élevait à 96 millions.

En 1822, les réclamations des colons devinrent de plus en plus véhémentes, la baisse des cours avait fait d'effrayants* progrès; cette dépréciation était universelle; non que la production fut généralement surabondante (comme cela se disait, s'écrivait, s'imprimait officiellement alors' pour le divertissement de nos derniers neveux), mais parce que les progrès de l'industrie permettaient d'obtenir le produit à meilleur marché, et de le mettre à la portée d'un plus grand nombre de consommateurs, qui en demandaient alors 110 millions de livres, qui en demandèrent 120 millions en 1827, et au moins 150 millions en 1833. Voyez comme cela était effrayant! et quel malheur que cette surabondance de production! La surtaxe fut élevée à 25 francs les 50 kilogrammes, ce qui, joint à la taxe

* Ce singulier mot est de M. le comte d'Argout, Rapport sur l'enquête des sucres en 1828, page 228. On le prendrait pour une amère ironie, si ce travail n'était en opposition presque contínuelle avec les principes les plus incontestables de l'économie politique.

** Même document, page 229.

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