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Personne n'ignore que, dans toutes les inscriptions des anciennes médailles latines, aucun point, aucun caractère particulier quelconque ne dénotent les abréviations : l'interprétation Turoni civitatis, ou Turoni civis consul, n'est donc point extraordinaire. Il n'est point non plus étonnant que, reconnaissant la nécescité de mettre un chef à la tête de son administration, la cité des Turonos, pliée depuis long-temps aux lois romaines, ait adopté le régimé qui la régissait antérieurement à l'epoque de son indépendance et de son union avec les Armoriques. Enfin, le sens que présente le mot trico dans la basse latinité ne peut convenir pour l'explication du revers de notre médaille. Trico et tricco sont deux mots différens; et d'ailleurs le premier, sans avoir égard au retranchement de l's final, signifie, d'après Ducange (30), tracassier, difficile, rechigné : certes, il n'est pas raisonnable de penser qu'un peuple libre se soit donné une semblable dénomination sur ses monnaies.

On ne peut douter que, du moment où les pro

vinces du Tractus armoricanus se déclarèrent indépendantes et chassèrent les officiers romains, elles n'aient frappé une monnaie particulière, et peut-être même, faute de matières, ordonné la refonte de celle au coin des empereurs : cinquante ans après le soulèvement des Armoriques, il circulait dans les Gaules des sols d'or, d'un titre fort bas, appelés sols gaulois Quels étaient ces sols d'or, sinon ceux que firent

(30) Gloss., verbo Trico, éd. de 1733.

frapper les provinces confédérées; car les anciennes monnaies gauloises étaient d'or pur sans alliage, suivant le témoignage de Diodore de Sicile (31). Majorien, qui fut proclamé empereur à Ravenne le premier avril 457, défend, dans la loi qu'il porta pour remédier aux abus qui s'étaient introduits dans la perception des impôts, de rebuter aucun sol d'or, pourvu qu'il fût de poids, si ce n'est le sol gaulois (32). Cette monnaie était donc cómmune, puisqu'on la décriait; elle n'était commune que parce que les Armoriques en avaient beaucoup frappé et en frappaient journellement dans les cités non soumises; or, s'ils fabriquaient des monnaies d'or, ils devaient également en fabriquer de cuivre pour les besoins journaliers de la vie, comme l'atteste notre médaille. Il paraît même que ces sols d'or circulaient encore au commencement du sixième siècle. Gondebaud, roi des Bourguignons, dans une loi particulière que l'on présume avoir été portée vers 507, dit: De monetis solidorum præcipimus custodire, ut omne aurum quodcumque pensaverit accipiatur, præter quatuor tantùm monetas, Valentiniani, Genavensis, et Gothium qui, tempore Alarici regis, adhærati sunt, et Ardaricanos (33). Voilà quatre espèces de monnaie décriées : celle à l'effigie de Valentinien III, et ceci explique pourquoi les sols gaulois se trouvaient d'un titre si bas; la mon

(31) L. 5, § 27, p. 350.

(32) Novel. major, loc. cit.
(35) Cod. Burg. add. 2, leg. 6.

naie frappée à Genève par Gondesigèle, trère de Gondebaud; celle de Toulouse au coin d'Alaric II, et les sols d'or ardéricains. Quels peuvent être ces derniers? Les auteurs ne parlent que d'un Ardéric, roi des Gépides, qui régna entre le Danube et le Pont-Euxin(34): certes, ce ne peut être que de lui dont il est question dans la loi Gombette. Aussi Ducange dit-il qu'il faut peut-être fire Alaricanus (35); mais nous rejeterons cette version avec Valois, parce qu'il n'est pas croyable que Gondebaud eût répété deux fois dans la même phrase la monnaie d'Alaric, et qu'alors il n'y eût eu que trois monnaies décriées, au lieu des quatre désignées dans la loi. Nous pensons donc que, puisqu'une partie des Armoriques se maintint dans un état d'indépendance jusqu'en 497, il convient de se ranger de l'avis de ceux qui ont soupçonné qu'il y avait eu altération de la part des copistes de la loi Gombette. Notre médaille prouve, et par le genre de gravure et par l'inscription de son revers, que la confédération armorique a battu monnaie; et c'est, suivant les apparences, cette monnaie que l'on a voulu désigner par ardaricanos, mot altéré par les copistes, au lieu d'armoricanos. Enfin, l'endroit où notre médaille a été trouvée justifie encore l'époque que nous assignons à sa fabrication; car le tombeau de SaintMartin de Tours était déjà célèbre dans les Gaules, sous la confédération des Armoriques.

(34) Sigeb. Chron. ad ann. 457. (35) Gloss., verbo Alricanus.

MÉMOIRE

Sur quelques mots de la langue phoenico-punique qui se sont conservés dans l'idiome provençal.

L'étude des langues n'est plus aujourd'hui une vaine et stérile connaissance de mots. Depuis Leibnitz, ceux qui s'y livrent ont un but plus noble et plus utile: il s'agit de connaître, par leur filiation et leur mélange, la filiation et le mélange des peuples. Des savans de tous les pays ont répandu de vives lumières sur cette branche féconde des connaissances humaines. Ils ont découvert, en rapprochant les langages des diverses nations séparées par une immense étendue de terre ou de mer, que d'anciennes relations avaient existé parmi elles. Qui croirait, si ce fait n'était attesté par les rapports des érudits et des voyageurs les plus éclairés et les plus véridiques; qui croirait, dis-je, que les peuples d'Europe et d'Amérique offrent entre eux des ressemblances de ce genre?

Je n'ai pas le dessein d'entrer dans une carrière aussi vaste; les forces me manqueraient; mais qu'il me soit permis de présenter quelques rapprochemens entre des mots usités dans deux contrées éloignées l'une de l'autre, rapprochemens qui viennent à l'appui des monumens anciens et des recherches d'un célèbre antiquaire du siècle dernier.

L'abbé Barthélemy a prouvé que les Phéniciens,

dans les temps les plus reculés, avaient établi des colonies dans la Gaule. Ce peuple navigateur a dû surtout fréquenter les côtes méridionales, et ne sommes-nous pas fondés à croire qu'il y a laissé des traces de son séjour?

En parcourant le vocabulaire maltais d'AntoineVassalli (1), je fus frappé de la ressemblance de plusieurs mots de cette langue avec d'autres mots entièrement ou à peu près équivalens dans le provençal (2). Il est reconnu aujourd'hui que le maltais est formé du phoenico-punique. Les Provençaux auraient donc reçu dans leur idiome plusieurs termes phéniciens et carthaginois: qu'on me permette d'examiner ce fait important avec quelque étendue.

L'auteur d'un ouvrage sur les langues (3) rapporte qu'un certain Quintinus - Heduus qui écrivait de Malte à un ami, en 1533, dit que, de son temps, on y parlait la langue des Africains, et qu'il y avait encore sur des pierres des inscriptions en caractères phéniciens.

Quand on a étudié avec soin et qu'on a mieux

(1) Mich. Ant. Vassalli Lexicon melitense-latino-italum, in-4°. Romæ, Fulgonius, 1796.

pro

(2) Considérée sous le rapport de langue vivante, le vençal ne mérite guère d'être cultivé, la langue française présentant un bien plus grand nombre d'avantages; mais, sous celui de l'histoire, les hommes studieux iront encore puiser des lumières dans cet ancien langage, et leurs recherches présenteront quelquefois des résultats intéressans. (5) Sablier, Essai sur les langues, pag, 2 et 3.

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