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DES POÉSIES ORIGINALES

DES

TROUBADOURS.

PAR M. RAYNOUARD,

MEMBRE DE L'INSTITUT ROYAL DE FRANCE (ACAD. FRANÇAISE, ET ACAD. DES
INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES), SECRÉTAIRE PERPETUEL DE L'ACA-
DÉMIE FRANÇAISE, OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR.

TOME DEUXIÈME

CONTENANT

Des dissertations sur les troubadours, sur les cours d'amour, etc.-Les
monuments de la langue romane jusqu'à ces poëtes. Et des recherches
sur les divers genres de leurs ouvrages.

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DE L'IMPRIMERIE DE FIRMIN DIDOT,
IMPRIMEUR DU ROI ET DE L'INSTITUT, RUE JACOB, N° 24.

DES TROUBADOURS.

DANS le volume précédent j'ai expliqué l'origine et la formation de la langue romane : j'ai indiqué comment les succès militaires et la domination de divers peuples qui avaient envahi une partie du midi de l'Europe, leurs rapports de religion, de politique et de famille avec les anciens habitants, jusqu'alors soumis à l'empire romain, nécessitèrent et favorisèrent la création de l'idiome roman.

Cet idiôme, né de la corruption de la langue latine, eut des formes caractéristiques et essentielles, absolument différentes : assujetti à de nouvelles combinaisons de poésie et de versification, il fut consacré par les troubadours à exprimer la délicatesse et la vivacité de l'amour, la sévère franchise de leurs opinions morales et politiques, leur enthousiasme pour les exploits honorables et pour les illustres personnages qui les exécutaient, leur juste et courageuse indignation contre les erreurs et les fautes de leurs contemporains; et alors commença une nouvelle lit

térature.

Quoique, dans les écrits de ces poëtes, on ren

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contre plusieurs allusions, plusieurs imitations, qui prouvent d'une manière incontestable que les chefsd'oeuvre de la littérature latine, et même ceux de la littérature grecque, ne leur ont pas été tout-à-fait inconnus, il n'en est pas moins évident qu'ils n'avaient pas le goût assez formé, assez exercé, pour admirer avec utilité et reproduire avec talent les beautés des classiques grecs et des classiques latins.

La littérature nouvelle n'emprunta donc rien aux leçons et aux exemples des anciens. Elle eut ses moyens indépendants et distincts, ses formes natives, ses couleurs étrangères et locales, son esprit particulier; l'ignorance presque générale, le défaut d'études, abandonnaient ces poëtes du moyen âge à l'influence entière des idées religieuses, des mœurs chevaleresques, des habitudes politiques, des préjugés contemporains, du caractère national, et surtout de leur propre caractère; il fut moins difficile sans doute aux troubadours d'inventer un genre particulier que d'imiter le genre classique.

Ainsi tout concourait à ce que la littérature des troubadours se distinguât par ce caractère d'originalité qui n'avait pas été encore assez remarqué; c'est sous ce rapport principal que l'on doit examiner et apprécier le fond et la forme de leurs compositions, afin de ne pas contester à ces poëtes le talent et la gloire d'avoir créé un genre indépendant, devenu pour une partie de l'Europe le type caractéristique et fécond de beautés de sentiment,

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