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« de ne pas m'enflammer pour elles; ou si je veux <«< m'attacher à quelqu'une, de faire un choix prudent, car si je m'éprends de toutes celles que je <<< rencontre, bientôt j'aurai trouvé ma perte.

<< FOLIE m'impose une autre loi; elle veut que je « me livre aux caresses, aux embrassements, aux << ébats, comme la passion me le conseille; car si je « ne me procure les plaisirs qui dépendent de moi, «< autant vaut-il que je m'enferme dans un monastère.

« RAISON me dit: Ne sois point avare; ne te tour<< mente point à amasser de grandes richesses; ne prodigue pas, en dons indiscrets, celles que tu pos« sèdes; en effet, si je donnais tout ce qu'il me plairait, à quoi me serviraient enfin mes largesses?

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<< FOLIE vient à côté de moi, et me dit, en me tirant « par le nez Ami, peut-être demain tu mourras, et quand tu seras étendu dans le tombeau, de quoi << te serviront tes richesses?

<< RAISON me dit tout bas et avec douceur, que je jouisse lentement et modérément; et FOLIE me dit: << A quoi bon? hâte-toi, jouis autant que tu le

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pourras,

GARINS LE BRUN, t. 4: Nueg e jorn.

Quand le troubadour avait à consacrer, par de justes et honorables regrets, la mémoire des princes, des grands qui avaient mérité son attachement et l'estime publique, sa lyre plaintive et éloquente s'élevait au ton de l'ode; on en jugera par cette pièce

que Gaucelm Faidit composa sur la mort du roi Richard, arrivée en 1199.

«< O qu'il est dur, qu'il est pénible d'avoir à retracer <«< dans mes chants le plus grand malheur, le chagrin <<< le plus sensible que j'aie jamais éprouvé! événe<< ment fatal, dont j'aurai à gémir et à pleurer durant le << reste de mes jours! il est mort celui qui était le chef « et le père de la bravoure, ce roi vaillant, Richard, « roi des Anglais. O dieu! quelle perte! quel dommage! quel mot affreux! qu'il est douloureux à prononcer! ah! celui-là est insensible qui l'entend <<< sans verser des larmes.

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<<< Il est mort, ce roi vaillant! non, depuis mille ans, << personne n'avait vu, moi-même je n'avais vu de << ma vie un prince aussi brave dans les combats, aussi << noble dans les manières. Richard était libéral, hardi, «< courageux, bienfaisant; je ne crois pas que cet << Alexandre, qui vainquit Darius, ait fait admirer une largesse, une générosité aussi magnifiques, ni que Charlemagne ou Artus ait montré une bravoure <«< aussi distinguée. Si l'on veut en dire la vérité, on «< avouera qu'il réussissait à captiver tout le monde, <«< les uns par la terreur de son nom, les autres par « la grace de ses bienfaits.

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« Je m'étonne que, dans ce siècle faux et avaricieux, <«< il se trouve encore quelque homme prudent et cour<< tois, puisque ni les discours sages, ni les actions

« généreuses ne servent plus de rien. Et pourquoi <«< ferait-on beaucoup d'efforts, pourquoi même en <«< ferait-on un peu? la mort ne nous montre-t-elle << pas aujourd'hui tout son pouvoir? par un seul de ses « coups, elle a ravi ce qu'il y avait de meilleur sur << la terre, tous les biens, toutes les joies, toutes les gloires; et quand nous voyons que tant de vertu « et de mérite ne garantissent pas de la mort, pour

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quoi la redouterions-nous pour nous-mêmes?

<«< Hélas! roi brave et généreux! que deviendront << désormais les combats, ces tournois nombreux et <«< brillants, ces cours magnifiques, les libéralités, les « présents riches et multipliés, puisque vous leur « manquez, vous qui en étiez le chef et l'ornement? << et quelle sera sur-tout l'infortune des serviteurs « dévoués qui vous avaient consacré leur fidélité, et qui attendaient de vous leur juste récompense? quel << sera le sort de ceux que vous aviez élevés en puis«<sance et en dignité? il ne leur restera plus qu'à « mourir de douleur.

Oui, ils auront une vie malheureuse et pire que <«< la mort; une douleur éternelle les poursuivra par« tout. Et ces païens, ces Sarrasins, ces Turcs, ces <«< Persans qui vous redoutaient plus qu'homme qui «< eût jamais paru sur la terre, accroîtront à-la-fois << leur insolence et leur pouvoir. La délivrance du << Saint-Sépulcre devient désormais plus difficile : << Dieu le veut donc ainsi! car si ce n'était sa vo

<«< lonté, vous vivriez, ô grand roi, et certainement vos « succès les eussent chassés de la Syrie.

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Ah! je n'espère plus qu'il se trouve des rois et des princes capables et dignes de conquérir les saints << lieux; et s'il s'en trouve encore, ceux qui vous succé<< deront dans cette illustre et pénible expédition, au<< ront à connaître quel fut votre amour pour la gloire; << quelle renommée acquirent vos deux vaillants frères, << Henri le roi JEUNE et l'aimable comte Geoffroi. Qui«< conque agira en place de vous trois, doit posséder <«< une bravoure inébranlable et une sagesse habile qui << sache entreprendre et achever les exploits les plus << éclatants. »

GAUCELM FAIDIT, t. 4: Fortz chausa est.

Ce chant funèbre n'a-t-il pas tous les caractères de l'ode? ferai-je remarquer avec quel art heureux, le troubadour, lorsqu'il consacre ses regrets de la perte de Richard, tâche de rendre ces regrets utiles; et comment, en s'adressant à ceux qui doivent partager ses sentiments, il ramène leurs idées et leurs desirs vers le devoir pressant de concourir à la délivrance du Saint-Tombeau ?

C'est surtout dans les sirventes que les troubadours manifestèrent leurs sentiments les plus intimes, leurs opinions les plus hardies. Quelques passages que je traduirai feront connaître le ton sévère et injurieux de leurs censures. On croira aisément que, si elles ne furent pas toujours injustes, du moins elles furent souvent exagérées. Les sirventes donnent une

idée plus particulière des mœurs, des opinions, des préjugés du temps; un historien judicieux et habile discernerait sans doute, dans ces peintures plus ou moins chargées, les couleurs qui appartiennent à la vérité.

Par-fois, l'éloge consacré à un illustre personnage, n'était qu'un prétexte pour insulter les princes et les grands. Quand Sordel fait une complainte sur la mort de Blacas, son bienfaiteur et son ami, également célèbre comme guerrier et comme troubadour, il débute ainsi :

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« Je consacre à la gloire de Blacas cette complainte << non étudiée, telle que me l'inspirent la tristesse et << la douleur. Certes, j'ai raison d'être affligé en lui j'ai perdu à-la-fois un digne seigneur et un bon et «< véritable ami; avec lui ont péri tous les avantages <«< brillants de la valeur. Cette perte est immense; je n'espère pas qu'elle puisse jamais être réparée, à << moins qu'on ne fasse de son cœur un utile partage; oui, qu'on le divise entre ces princes et ces barons qui vivent comme des lâches; et, par ce moyen, ils <«<< auront tous du cœur à suffisance. »

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SORDEL, t. 4: Planher vuelh.

Sordel fait ensuite la censure la plus amère des divers rois et princes, auxquels il croit nécessaire d'assigner une part du cœur de Blacas; c'étaient Frédéric II, empereur; Louis IX, roi de France; Henri III, roi d'Angleterre; Ferdinand III, roi de Castille; Jacques Ier,

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