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buts de la nature humaine làchement désertés par l'épicuréisme, et se feraient de nouveau les soutiens du démon de l'humanité. Zénon, de Cittium, continua la carrière de Socrate, et revendiqua les droits de la conscience en attendant le christianisme.

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Raphaël, dans son tableau de l'École d'Athènes, a mis sur le premier plan, et se donnant la main, Platon et Aristote. Il a jeté sur les marches de l'escalier un homme qui sort de la toile; figure pleine de réalité, sans noblesse, mais originale c'est Diogène. Le Cynique se trouve ainsi à la place où l'on renvoie d'ordinaire l'animal qui lui a donné son nom. Diogène fut animé d'un sentiment vrai; il voulait dégager l'indépendance individuelle des formes sociales, et la saisir aussi bien sous la robe du sénateur que sous la cuirasse du soldat. Quand il cherchait un homme, il avait raison; car c'était l'homme qu'avait cherché Socrate mais Diogène le chercha mal en foulant aux pieds les sentiments sévères et pudiques de la nature humaine (1). Zénon, qui fonda son école vers la cent vingtième olympiade, avait quelquefois écouté le Cynique avant d'enseigner lui-même.

Le stoïcisme a trois parties: la morale est sa raison et son but; la logique et la physique ne sont que secondaires eu égard à la vertu pratique. La Logique de Zénon, où, sur les traces d'Aristote, il essaye une théorie de la perception, nous inquiète pen. Dans sa Physique, il reconnaissait la ma

(1) Un savant du dix-septième siècle, du Rondel, correspondant et ami intime de Bayle, qui l'a cité plusieurs fois dans son Dictionnaire, a parlé en ces termes du philosophe cynique: «Comme Diogène avait coutume de dire qu'il fallait opposer la raison aux passions, le courage à la fortune, et la nature aux coutumes, il entra enfin dans les desseins de la nature, et s'imagina que, pour être un véritable enfant de cette bonne mère, il fallait ressembler aux bêtes, qui en sont une image si naïve et si fidèle dans les lieux de leur naissance. Diogène donna donc dans cette opinion, et s'y maintint par la pauvreté, par le jeûne, et par les ascétiques qu'il a eu l'honneur d'inventer.» (Bayle, verb. Péréira.) (Note de la 3e édition.)

tière et Dieu. La matière n'a pas été créée; elle existe de toute éternité; Dieu l'a travaillée et façonnée, et il vit au milieu de ce monde qui est son ouvrage et son temple. Comme la matière est entièrement inerte, passive, et ne reçoit son animation que de Dieu, la dualité primitive, posée par Zénon, se résout en unité de substance, en un panthéisme incontestable.

Αυτὸν (κόσμον) τε τὸν θεὸν, τὸν ἐκ τῆς ἁπάσης οὐσίας ἰδίως ποιὸν ἐς δὲ ἄφθαρτός ἐστι καὶ ἀγέννητος, δημιουργὸς ὢν τῆς διακοσμήσεως, κατά χρονῶν ποιάς περιόδους, ἀναλίσκων εἰς ἑαυτὸν τὴν ἁπασὰν οὐσίαν καὶ πάλιν ἐξ ἑαυτοῦ γεννῶν (1).

Ainsi Dieu, incorruptible et incréé, ouvrier de ce monde, absorbe lui-même toute la substance et la répand harmoniquement en dehors de lui-même. En même temps il est intelligent et parfait, prévoit tout, gouverne le monde par cette prévoyance, et cette prévoyance constitue le destin v Si, εἶναι ζῶον ἀθάνατον, λογικὸν, τέλειον, ἢ νερὸν ἐν ἐυδαιμονίᾳ κακοῦ παν τῆς ἀνεπίδεκτον, προνοητικὸν κόσμου τε καὶ τῶν ἐν κόσμῳ.

ἔστι δὲ εἰμαρμένη αἰτία τῶν ὄντων εἰρεμένη,

ἢ λόγος καθ' ἂν ὁ κόσμος διεξάγεται (1).

Si Dieu est le monde lui-même, les développements du monde sont les lois de Dieu. Tout ce qui se développera sera donc à la fois prévu, arrêté par Dieu et nécessaire comme lui. Le destin et la providence seront donc même chose, et se confondront dans l'unité du panthéisme stoïque. Alors l'homme sera libre en se mettant en rapport avec la nature, et il trouvera la vertu dans la ressemblance avec Dieu. Pour se rapprocher de ce type immortel, il supprimera les passions et les affections de l'humanité, il fera son âme inseusible à tout, au plaisir comme à la douleur, ne permettra à rien des créatures et des choses humaines de lui ètre nécessaire; et, s'appuyant sur sa raison solitaire, il contemplera Dieu. Tel est le sage dont Sénèque célèbre la constance :

(1) Diog. Laërt., liv. VIII, chap. 1, parag. 70. (2) Ibid., parag. 73 et 74.

«Non potest ergo quisquam aut nocere sapienti aut pro« desse. Quemadmodum divina nec juvari desiderant nec « lædi possunt, sapiens autem vicinus proximusque diis con«< sistit, excepta mortalitate similis Deo. Ad illa nitens, per«gensque excelsa, ordinata, intrepida, æquali et concordi <«< cursu fluentia, secura, benigna, bono publico natus, et << sibi et aliis salutaris, nihil humile concupiscet, nihil flebit, <«< qui rationi innixus, per humanos casus divino incedet << animo (1). »

Le souverain bien pour le stoïcien sera donc l'honnête et le juste en soi; il pratiquera la justice sans songer à aucune récompense. Voici encore Sénèque qui crie à l'homme : « Te « justum esse gratis oportet, et nullum justæ actionis præ«mium majus est quam justum esse (2). » Ainsi vivre conformément à la nature, qui est Dieu; être juste gratis, défendre sa liberté morale de l'atteinte des passions et des disgrâces humaines, rester inébranlablement libre, et demander, quand il le faut, à la mort, au poison ou à son épée, un refuge contre les accidents extérieurs, tel est le catéchisme. du stoïque, telle est la vie qu'il est admirable pour lui de clore à propos par un suicide nécessaire. S'il se hâte, s'il meurt avant le temps, s'il se frappe en écolier, on ne l'estimera pas; mais, si une mort majestueuse et volontaire le dérobe à l'heure convenable aux opprobres de la tyrannie et de l'adversité, c'est aux applaudissements du Portique qu'il ira se confondre dans le sein de cette divine nature dont il s'est constamment proposé la ressemblance laborieuse.

La conception du stoïcisme fut grecque, et la pratique romaine. Passons sur Cléanthe, Chrysippe, Antipater et Posidonius, pour chercher cette philosophie dans les mœurs de la république et de l'empire. On peut se peindre l'étonnement, le plaisir et l'enthousiasme de la jeunesse de Rome,

(1) A. Senecæ, de Constantia Sap. cap. vIII.

(2) Epist. cxm,

quand, sur la fin de la troisième guerre punique, des philosophes grecs, dans de beaux propos et de magnifiques harangues, développèrent les doctrines et les idées de l'Académie, du Lycée et du Portique. Caton l'Ancien protesta ; mais les importations de pensées et de doctrines sont aussi nécessaires à la sociabilité humaine que l'originalité indigène. La philosophie grecque fit école, malgré le mécontentement chagrin du vieillard; soixante ans plus tard la jeunesse romaine prenait le chemin d'Athènes. Un siècle après, Lucrèce traduisait le système d'Épicure dans une langue que Quintilien estimait difficile, mais qui est attrayante par ses aspérités mêmes, et Cicéron, réfléchissant en lui toutes les écoles de la philosophie grecque, n'était pas un truchement sans éloquence entre Rome et Athènes. Sans doute, comme athlète de tribune, je le crois, avec Fénélon, inférieur à Démosthènes. Il n'a pas, comme lui, cette invincible vigueur qui vous fait joindre un adversaire, le presse, le saisit, l'étouffe et le précipite, lui, son éloquence et ses arguments, dans une irrévocable chute. Mais, esprit général, sociable, humain, transmettant la Grèce à Rome, sachant amollir l'apreté de la nationalité romaine, il se recommande surtout à la postérité pour avoir civilisé ses concitoyens. Orateur, il a des rivaux ; homme d'État, il se laisse jouer par le neveu de César, et paye sa méprise de sa tête; mais, génie de tous les temps, après avoir instruit son pays par la Grèce, il a instruit l'Europe moderne par l'antiquité tout entière.

Dans le De Legibus et le De Republica, Cicéron imite les procédés de Platon; il veut aussi tracer le plan d'une république et faire la théorie des lois; mais il est loin de posséder comme lui tous les secrets du dialogue; il ne sait pas le distribuer et le façonner à l'image des conversations réelles ; il a de longues tirades, et la gêne pompeuse de sa fiction dramatique ne vous laisse pas les mêmes illusions que la lecture de l'Athénien. Quant au fond, qui, au surplus, nous importe seul, sa République nous le montre surtout préoccupé de

l'esprit d'Aristote et des institutions de la république romaine. I adopte la division péripatéticienne des gouvernements en royal, aristocratique et démocratique. « Quare <«< quum penes unum est omnium summa rerum, regem illum <«< unum vocamus, et regnum ejus reipublicæ statum. Quum <«< autem est penes delectos, tum illa civitas optimatium arbi« trio regi dicitur illa autem est civitas popularis, sic enim << appellant, in qua in populo sunt omnia (1). » Mais de plus il voudrait abstraire de ces trois formes de gouvernement, le royal, l'aristocratique et le populaire, une quatrième qui en rassemblat tous les avantages. « Quartum quoddam genus « reipublicæ maxime probandum esse sentio, quod ex his, « quæ prima dixi, moderatum et permixtum tribus (2). » Cette vue, qui n'appartient pas à Cicéron, et qu'il avait trouvée chez quelques philosophes grecs, est trop vague, a trop peu de consistance et de précision pour qu'on puisse y reconnaître comme une prévision anticipée du gouvernement représentatif des modernes. Le philosophe romain combine seulement des formules et non pas des réalités. Mais il a reconnu avec une grande sagacité les développements successifs de la constitution romaine, comment elle fut l'ouvrage du temps et des révolutions, et non pas d'un seul législateur, différente des sociétés grecques, de Lacédémone constituée par Lycurgue, de la Crète qui se personnifie dans Minos : « Is dicere solebat, ob hanc causam præstare nostræ civi«tatis statum cæteris civitatibus, quod in illis singulis fuis«sent fere, qui suam quisque rempublicam constituissent «legibus atque institutis suis, ut Cretum Minos, Lacedemo«niorum Lycurgus, Atheniensium, quæ persæpe commutata « esset, tum Theseus, tum Draco, tum Solo, tum Clisthenes, << tum multi alii: postremo exsanguem jam jacentem doctus «vir Phalereus sustentasset Demetrius : nostra autem respu

(1) De Republica, lib. I, cap. xxvi.

(2) Ibidem, lib. I, cap. xxix.

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