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tous ceux qui, avec des talens médiocres, osent approcher de cette fonction sacrée, et mettent la main à l'arche pour la soutenir.

Qu'il ait un jugement solide et profond de la logique, du goût, de la sagacité, une grande habitude de la critique.

Son art n'est pas celui de faire rire, mais d'analyser et d'instruire. Un journaliste plaisant est un plaisant jour

naliste.

Qu'il ait de l'enjouement, si la matière le comporte; mais qu'il laisse là le ton satyrique, qui décèle toujours la partialité.

S'il examine un ouvrage médiocre, qu'il indique les questions difficiles dont l'auteur auroit dû s'occuper; qu'il les approfondisse lui-même; qu'il jette des vues, et que l'on dise qu'il a fait un bon extrait d'un mauvais livre.

Que son intérêt soit entièrement séparé de celui du libraire et de l'écrivain.

Qu'il n'arrache point à un auteur les morceaux saillans de son ouvrage pour se les approprier, et qu'il se garde bien d'ajouter à cette injustice celle d'exagérer les défauts des endroits foibles qu'il aura l'attention de souligner.

Qu'il ne s'écarte point des égards qu'il doit aux talens supérieurs et aux hommes de génie ; il n'y a qu'un sot qui puisse être l'ennemi d'un Voltaire, d'un Montesquieu, d'un Buffon, et de quelques auteurs de la même trempe.

Qu'il sache remarquer leurs fautes, mais qu'il ne dissimule point les belles choses qui les rachètent.

Qu'il se garantisse sur-tout de la fureur d'arracher à son concitoyen et à son contemporain le mérite d'une invention, pour en transporter l'honneur à un homme d'une autre contrée, ou d'un autre siècle.

Qu'il ne prenne point la chicane de l'art pour le fond de l'art; qu'il cite avec exactitude, et qu'il ne déguise et n'altère rien.

S'il se livre quelquefois à l'enthousiasme, qu'il choisisse bien son moment.

Qu'il rappelle les choses aux principes et non à son goût particulier, aux circonstances passagères des temps, à l'esprit de sa nation ou de son corps, aux préjugés

courans.

Qu'il soit simple, pur, clair, facile, et qu'il évite toute affectation d'éloquence et d'érudition.

Qu'il loue sans fadeur, et qu'il reprenne sans offense. (M. DIDEROT.)

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UELQUE ridicule que soit l'idée qu'il y ait dans la nature des jours plus heureux ou plus malheureux les uns que les autres, il n'en est pas moins vrai que, de temps immémorial, les plus célèbres nations du monde les Chaldéens, les Egyptiens, les Grecs et les Romains, ont également donné dans cette opinion superstitieuse, dont tout l'orient est encore convaincu.

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Les rois d'Egypte, selon Plutarque, n'expédioient aucune affaire le troisième jour de la semaine, et s'abstenoient ce jour-là de manger jusqu'à la nuit, parce que c'étoit le jour funeste de la naissance de Typhon. Ils tenoient aussi le dix-septième jour pour infortuné, parce qu'Osiris étoit mort ce jour-là. Les juifs poussèrent si loin leur extravagance à cet égard, que Moïse mit leurs recherches sur cette opinion au rang des divinations dont Dieu leur défendoit la pratique.

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Si je passe aux Grecs, je trouve chez eux la liste de leurs jours apophrades ou malheureux; ce qui a fait dire plaisamment à Lucien, en parlant d'un fâcheux de mauvaise rencontre, qu'il ressembloit à un apophrade. Le jeudi passoit tellement pour malheureux chez les Athéniens que cette superstition seule fit long-temps différer les assemblées du peuple qui tomboient ce jour-là. Le poème d'Hésiode sur les travaux rustiques, écrit dans le onzième siècle avant J. C., fait une espèce de calendrier des jours heureux où il importe de former certaines entreprises, et de ceux où il convient de s'en abstenir; il met sur tout dans ce nombre le cinquième jour de chaque mois, parce que, ajoute-t-il, ce jour-là, les furies infernales se promènent sur la terre. Virgile a saisi cette fiction d'Hésiode pour en parer ses Géorgiques. » N'en»treprenez rien, dit-il, le cinquième jour du mois, c'est » celui de la naissance de Pluton et des Euménides; » en ce jour, la terre enfanta Japet, le géant Cée, le » cruel Thiphée, en un mot toute la race impie de »ces mortels qui conspirèrent contre les dieux. »> Mais Hésiode, pour consoler son pays, mit au nombre des

jours heureux le septième, le huitième, le neuvième, le onzième et le douzième de chaque mois.

Les Romains nous font assez voir par leur calendrier la ferme croyance qu'ils avoient de la distinction des jours. Ils marquèrent de blanc les jours heureux, et de noir ceux qu'ils réputoient malheureux tous les lendemains des kalendes, des nones et des ides, étoient de cette dernière classe. L'histoire nous en a conservé l'époque et la raison.

L'an de Rome 363, les tribuns militaires, voyant que la république recevoit toujours quelqu'échec, requirent qu'on en recherchât la cause. Le sénat ayant mandé le devin L. Aquinius, il répondit que, lorsque les Romains avoient combattu contre les Gaulois, près du fleuve Allia, avec un succès si funeste, on avoit fait aux dieux des sacrifices le lendemain des ides de juillet ; et qu'à Cremère, les Fabiens furent tous tués pour avoir combattu le même jour. Sur cette réponse, le sénat, de l'avis du collège des pontifes, défendit de rien entreprendre à l'avenir contre les ennemis le lendemain des kalendes, des nones et des ides chacun de ces jours fut nommé funeste.

Vitellius ayant pris possession du souverain pontificat le quinzième des kalendes d'août, et ayant, ce même jour, fait publier de nouvelles ordonnances, elles furent mal reçues du peuple, disent Suétone et Tacite, parce que tel jour étoient arrivés les désastres de Cremère et d'Allia.

Il y avoit quelques autres jours estimés malheureux par les Romains; tels étoient le jour du sacrifice aux mânes, celui des lémuries, des féries latines et des saturnales, le lendemain des volcanales, le quatrième avant les nones d'octobre, le sixième des ides de novembre, les nones de juillet, appelées caprotines, le quatrième avant les nones d'août, à cause de la défaite de Cannes, et les ides de mars, par les créatures de Jules-César.

On juge bien qu'outre ces jours-là il y en avoit d'autres que chacun estimoit malheureux par rapport à soi-même. Auguste n'entreprenoit rien d'important le jour des nones; et quantité de particuliers avoient une folie pareille sur le quatrième des kalendes, des nones et des ides.

Plusieurs observations historiques, superstitieusement

recueillies, ont contribué à favoriser, avec tant d'autres erreurs, celle des jours heureux et malheureux. Joseph remarque que le temple de Salomon avoit été brûlé par les Babyloniens, le 8 septembre, et qu'il le fut une seconde fois, au même jour et au même mois, par Titus. Émilius Probus débite que Timoléon-le-Corinthien gagna toutes ses victoires le jour de sa naissance.

Aux exemples tirés de l'antiquité, on en joint d'autres puisés dans l'histoire moderne. On prétend que CharlesQuint fut comblé de toutes ses prospérités le jour de S. Mathias. Henri III, nous dit-on, fut élu roi de Pologne, et ensuite roi de France, le jour de la Pentecôte, qui étoit aussi celui de sa naissance. Le pape Sixte-Quint aimoit le mercredi sur tous les jours de la semaine, parce qu'il prétendoit que c'étoit le jour de sa naissance, de sa promotion au cardinalat, de son élection à la papauté, et de son couronnement. Louis XII assuroit que tout lui réussissoit le vendredi. Henri VII, roi d'Angleterre, étoit attaché au samedi, comme au jour de tous les bonheurs qu'il avoit éprouvés.

Mais rien ne seroit si facile que d'apporter encore un plus grand nombre de faits qui prouveroient l'indifférence des jours pour la bonne ou mauvaise fortune, s'il s'agissoit de combattre par des exemples des préventions superstitieuses, contraires au bon sens et à la raison. On remarque, dit Dion-Cassius, que Pompée fut assassiné en Égypte le même jour qu'il avoit autrefois triomphé des Pirates et de Mithridate; et l'on ajoutoit encore que c'étoit celui de sa naissance. Le même jour, dit Guichardin, que Léon X fut sacré, avec une pompe merveilleuse, il avoit été fait misérablement prisonnier un an auparavant. Reconnoissons donc, avec un ancien, qu'une même journée nous peut être également heureuse ou malheureuse, et que ceux conséquemment qui se sont moqués du choix superstitieux de certains jours ont eu par là un grand avantage pour le succès de leurs entreprises sur ceux qui ont été assez crédules pour s'y assujétir.

Alexandre-le-Grand, bien instruit sur ce point par Aristote, son précepteur, se moqua spirituellement de

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