صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

peut recevoir de la frivolité, de l'ignorance, ou des vaines prétentions, dans les societés où ils vivent.

Le plus grand service que la langue puisse attendre de l'académie française, c'est la perfection d'un dictionnaire où les définitions de chaque mot, ses acceptions diverses, les nuances accessoires qui le séparent de ses synonymes, enfin le degré de noblesse ou de familiarité que l'usage y a attaché, soient déterminés avec précision, et rendus sensibles par des exemples choisis avec goût.

C'est dans ce travail dont l'académie s'occupe, que l'on sent combien les lumières et le goût des gens du monde sont non seulement utiles, mais indispensables. Les gens de lettres ont une connoissance plus approfondie des principes de la langue écrite: les premiers ont, sur la langue parlée, un tact que les connoissances ne peuvent suppléer C'est à eux qu'il appartient de distinguer, dans l'emploi de certaines expressions, ce qui est de l'usage d'avec ce qui est de mode; ce qui est de la langue de la cour d'avec ce qui n'est qu'un jargon de coterie: de fixer les limites de ce bon ton, si recommandé et si peu défini, qui n'appartient point à l'esprit, et sans lequel un homme d'esprit court quelquefois le risque d'être ridicule; qui n'est pas le bon goût, dont les principes sont plus fixes et l'influence plus étendue; qui n'est en un mot qu'un sentiment fin des convenances établies; qui embellit l'esprit et le goût dans le monde, mais qui borneroit l'essor des talens, si l'on vouloit soumettre à ses règles fugitives et variables les ouvrages de l'imagination et du génie.

(M. PANCKOUKE.)

Les ouvrages français, faits sous le siècle de Louis XIV, tant en prose qu'en vers, ont contribué, autant qu'aucun autre événement, à donner à la langue, dans laquelle ils sont écrits, un si grand cours, qu'elle partage avec la langue latine la gloire d'être cette langue que les nations apprennent par une convention tacite pour se pouvoir entendre les jeunes gers auxquels on donne en Furope de l'éducation, connoissent autant Despréaux, Lafontaine et Molière, qu'Horace, Phèdre et Térence.

La clarté, l'ordre, la justesse, la pureté des termes, distinguent le français des autres langues, et y répandent un agrément qui plaît à tous les peuples: son ordre dans l'expression des pensées, le rend facile; la justesse en bannit les métaphores outrées; et sa modestie interdit tout emploi des termes grossiers ou obscènes.

Le latin dans les mots brave l'honnêteté;
Mais le lecteur français veut être respecté.

On doit chérir la clarté, puisqu'on ne parle que pour être entendu, et que tout discours est destiné, par sa nature, à communiquer les pensées et les sentimens des hommes; ainsi la langue française mérite de grandes louanges en cette partie : mais, quelque précieuse que soit la clarté, il n'est pas toujours nécessaire de la porter au dernier degré de la servitude. Dans l'origine d'une langue, tout le mérite du discours a dû sans doute se borner là. La difficulté qu'on trouve à s'énoncer clairement fait qu'on ne cherche, dans ces premiers commencemens, qu'à se faire bien entendre, en suivant un ordre sévère dans la construction de ses phrases. On s'en tient donc alors aux façons de parler les plus communes et les plus naïves, parce que l'indigence des expressions ne laisse point de choix à faire entre elles, et que la simplicité du langage ne connoît point encore les tours, les délicatesses, les variétés et les ornemens du discours.

Lorsqu'une langue a fait des progrès considérables, qu'elle s'est enrichie, qu'elle a acquis de la dignité, de la finesse et de l'abondance, il faut savoir ajouter à la clarté du style plusieurs autres perfections qui entrent en concurrence avec elle, la pureté, la vivacité, la noblesse, l'harmonie, la force, l'élégance: mais comme ces qualités sont d'un genre différent, et quelquefois opposé, il faudroit les sacrifier les unes aux autres, suivant le sujet et les occasions. Tantôt il conviendroit de préférer la clarté à la pureté du style; et tantôt l'harmonie, la force ou l'élégance, donneroient quelque atteinte à la régularité de la construction; témoin ce vers de Racine:

Je t'aimois inconstant, qu'eussé-je fait, fidèle!

Dans notre prose néanmoins ce sont les règles de la construction, et non pas les principes de l'harmonie, qui décident de l'arrangement des mots : le génie timide de notre langue ose rarement entreprendre de rien faire contre les règles pour atteindre à des beautés, où il arriveroit s'il étoit moins scrupuleux.

Il y a un très-grand nombre de choses essentielles que la langue française n'ose exprimer par une fausse délicatesse, tandis qu'elle nomme, sans s'avilir, une chèvre, un mouton, une brebis; elle ne sauroit, sans se diffamer dans un style un peu noble, nommer un veau, une truie, un cochon. Les termes qui répondent à gardeur de cochons et à gardeur de bœufs, sont très-élégans dans la langue grecque, et nous ne pouvons employer ces mots que dans le langage très-familier.

Les richesses que la langue française a acquises sous le règne de Louis XIV, sont semblables à celles que recut la langue latine sous le siècle d'Auguste. Corneille, Descartes, Pascal, Racine, Despréaux, Bossuet, Fénélon, etc., fournissent autant d'époques de nouvelles perfections. Le dix-septième et une partie du dix-huitième siècles ont produit dans notre langue tant d'ouvrages admirables en tout genre, qu'elle est devenue nécessairement la langue des nations et des cours de l'Europe. Mais sa richesse seroit beaucoup plus grande, si les connoissances spéculatives ou d'expérience s'étendoient à ces personnes qui peuvent donner le ton par leur rang et leur naissance: si de tels hommes étoient plus éclairés, notre langue s'enrichiroit de mille expressions propres ou figurées qui lui manquent, et dont les savans qui écrivent sentent seuls le besoin. (Voyez Inscriptions.)

(M. de JAU COURT.)

La révolution de 1789 a forgé en France des mots barbares que le bon goût et la pureté de la langue française réprouvent également.

Démoraliser est un de ces mots, et telle est la contagion de l'exemple, qu'aujourd'hui même des écrivains, des journalistes pleins de talent, se servent aussi de ce mot. C'est pour eux que je crois devoir rappeler ici les principes

de la langue, et non pas pour apprendre le français à ceux qui ont renoncé à être Français dans leur langage comme dans leurs actions. Moraliser est un verbe neutre qui n'a jamais signifié rendre moral, mais parler de morale, prêcher la morale. Par conséquent, si demoraliser pouvoit être français, il signifieroit cesser de parler de morale, comme D. Japhet dit en style burlesque démétaphorisons, pour dire ne parlons plus par metaphores. Le mot fanaliser n'est pas moins barbare: il est contraire à toutes les règles de la formation des mots, comme le seroit authentiser pour rendre authentique, énergiser pour rendre énergique, héroïser pour rendre héroïque, etc. Aucun adjectif en ique ne peut produire un verbe en iser: notre langue le prouve par le fait.

Depuis qu'on a tant de fois demandé en style révolutionnaire la fermeture des barrières, la fermeture des églises, la fermeture d'un club, etc., il est bon de rappeler à ceux qui veulent parler français, que clôture signifie l'action de clôre, de fermer; et fermeture, les instrumen's matériels qui servent à fermer, comme les portes, les serrures, les verroux, les barrières, etc.

(M. de LA HARPE.)

LASCIVE TÉ.

F SPÈCE de mollesse, fille de l'oisiveté, de l'aisance et

du luxe; de là vient que l'auteur de l'Andrienne appelle les plaisirs des grands, lascivia nobilium. La lasciveté est, à parler proprement, un vice qui blesse la pureté des mœurs. Le brame inspiré va vous tracer d'une main légère son caractère et ses effets.

« Couchée mollement sous un berceau de fleurs, elle >> mendie les regards des enfans [des hommes, elle leur >> tend des piéges et des amorces dangereuses. Son air est >>. délicat, sa complexion foible, sa parure est un négligé >> touchant, la volupté est dans ses yeux, et la séduction >> dans son ame. Fuis ses charmes, ferme l'oreille à l'en» chantement de ses discours : si tes yeux rencontrent la » langueur des siens; si sa voix douce passe jusqu'à ton » cœur; si, dans ce moment, elle jette ses bras autour de » ton col, te voilà son esclave; elle t'enchaîne à jamais. >> La honte, la maladie, la misère et le repentir, marchent » à sa suite. Affoibli par la débauche, endormi par la » mollesse, énervé par l'inaction, tu tomberas dans la >> langueur; le cercle de tes jours sera étroit, celui de »tes peines étendu; le premier sera sans gloire, l'autre » n'excitera ni larmes ni pitié. »

[merged small][ocr errors]
« السابقةمتابعة »