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Il commit une seconde faute, en ne courant pas dans l'instant à Paris avec ses troupes. Les ligueurs, ameulés par son absence, et irrités de la mort du duc et du cardinal de Guise, continuèrent leurs excès. La Sorbonne s'enhardit à donner un décret qui délioit les sujets du serment de fidélité qu'ils doivent au roi, et le pape l'excommunia. A tous ces attentats, ce prince n'opposa que de la cire et du parchemin.

Cependant le duc de Mayenne en particulier se voyoit chargé à regret de venger la mort de son frère qu'il n'aimoit pas, et qu'il avoit autrefois appelé en duel. Il sentoit d'ailleurs que tôt ou tard le parti des ligueurs seroit accablé; mais sa position et son honneur emportèrent la balance. Il vint à Paris et s'y fit déclarer lieutenant général de la couronne de France, par le conseil de l'union: ce conseil de l'union se trouvoit alors composé de soixante-dix personnes.

L'exemple de la capitale entraîna le reste du royaume; Henri III, réduit à l'extrémité, prit le parti, par l'avis de M. de Schomberg, d'appeler à son aide le roi de Navarre qu'il avoit tant persécuté. Celui-ci, dont l'ame étoit si belle et si grande, vole à son secours, l'embrasse, et décide qu'il falloit se rendre à force ouverte dans la capitale.

Déja les deux rois s'avançoient vers Paris, avec leurs armées réunies, fortes de plus de trente mille hommes; déja le siége de cette ville étoit ordonné, et sa prise immanquable, quand Henri III fut assassiné, le premier août 1589, par le frère Jacques Clément, dominicain: Ce prêtre fanatique fut encouragé à ce parricide par son prieur Bourgoin et par l'esprit de la ligue.

Quelques historiens ajoutent que madame de Montpensier eut grande part à cette horrible action, moins peut-être par vengeance du sang de son frère, que par un ancien ressentiment que cette princesse conservoit dans le cœur, de certains discours libres tenus autrefois par le roi sur son compte, et qui découvroient quelques défauts secrets qu'elle avoit outrage, dit Mézerai, bien plus

impardonnable à l'égard des femmes que celui qu'on fait à leur honneur.

Personne n'ignore qu'on mit sur les autels dans toutes les églises de Paris le portrait du parricide; qu'on tira le canon à Rome, à la nouvelle du succès de son crime; enfin qu'on prononça, dans cette capitale du monde catholique, l'éloge du moine assassin.

Henri IV (car il faut maintenant l'appeler ainsi avec M. de Voltaire, puisque ce nom si célèbre et si cher est devenu un nom propre ), Henri IV, dis-je, changea la face de la ligue. Tout le monde sait comment ce prince, le père et le vainqueur de son peuple, vint à bout de la détruire. Je me contenterai seulement de remarquer que le cardinal de Bourbon, dit Charles X, oncle de Henri IV, mourut dans sa prison le 9 mai 1590; que le cardinal Cajétan légat à Latère, et Mendoze ambassadeur d'Espagne, s'accordèrent pour faire tomber la couronne à l'infante d'Espagne, tandis que le duc de Lorraine la voulut pour lui-même, et que le duc de Mayenne ne songeoit qu'à prolonger son autorité. Sixte V mourut dégoûté de la ligue. Grégoire XIV publia sans succès des lettres monitoriales contre Henri IV; en vain le jeune cardinal de Bourbon, neveu du dernier mort, tenta de former quelque faction en sa faveur; en vain le duc de Parme voulut soutenir celle d'Espagne, les armes à la main; Henri IV fut par-tout victorieux; par-tout il battit les troupes des ligueurs, à Argues, à Ivry, à Fontaine-Française, comme à Coutras. Enfin, reconnu roi, il soumit, par ses bienfaits, le royaume à son obéissance : son abjuration porta le dernier coup à cette ligue monstrueuse, qui faisoit l'évènement le plus étrange de toute l'histoire de France, avant la révolution bien plus étrange encore, qni a détruit à jamais la royauté, et renversé un trône affermi par quatorze siècles de monarchie, pour y substituer le gouvernement républicain.

Aucun règne n'a fourni tant d'anecdotes, tant de pièces fugitives, tant de mémoires, tant de livres, tant de chansons satyriques, tant d'estampes, en un mot tant de choses singulières, que les règnes de Henri III et de Henri IV.

Et, en admirant le règne de ce dernier monarque, nous ne sommes pas moins avides d'être instruits des faits arri vés sous son prédécesseur, que si nous avions à vivre dans des temps si malheureux. Hélas! nous en voyons de plus malheureux encore, dont la durée nous accable depuis dix ans, et dont la fin est peut-être plus à redouter que tous les maux que nous souffrons.

(ANONYME.)

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CAPITALE du Portugal, sur le Tage, à quatre lieues

de l'Océan.

Cette ville est le séjour ordinaire du roi et de la cour le siége du premier parlement du royaume, avec un archevêché, dont l'archevêque prend le titre de patriarche; une université, une douane, dont la ferme est un des plus grands revenus du prince, et un port sur le Tage d'environ quatre lieues de long, estimé le meilleur et le plus célèbre de l'Europe, quoiqu'exposé quelquefois à de violens ouragans.

On a vu cette ville briller en amphithéâtre, par sa situation sur sept montagnes, d'où l'on découvre le Tage dans toute son étendue, la campagne et la mer. On vantoit, avant son désastre, la solidité des forts de Lisbonne et de son château, la beauté de ses places et de ses édifices publics, de ses églises, de ses palais, et sur-tout de celui du roi. Enfin on la regardoit, avec raison, comme une des principales villes de l'Europe, et le centre d'un commerce prodigieux. Toutes ces belles choses ont été effacées du livre de vie, par une révolution également prompte et inopinée.

Lisbonne étoit; elle n'est plus, dit une lettre qui nous apprit qu'un tremblement de terre, arrivé le premier novembre 1755, en avoit fait une seconde Héraclée; mais, puisqu'on espère aujourd'hui de la tirer de ses ruines, et même de lui rendre sa première splendeur, nous laisserons un moment le rideau sur l'affreuse perspective qui rappelle sa destruction, pour dire un mot de son ancienneté et des diverses révolutions qu'elle a éprouvées, jusqu'à la dernière catastrophe, dont on vient d'indiquer l'époque trop mémorable.

Quoique vivement touché de ses malheurs, je ne puis porter son ancienneté au siècle d'Ulysse, ni croire que ce héros, après la destruction de Troye, en ait jeté les fondemens, d'autant que, selon toute apparence, Ulysse n'est jamais sorti de la Méditerranée. Il paroît, par une inscription qui y a été trouvée, que Lisbonne, après avoir

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reçu une colonie romaine, prit le nom de Felicitas Julia; et c'est assez pour justifier son ancienneté.

Elle a été plusieurs fois attaquée, conquise et reconquise par divers peuples; mais, dès que le comte de Portugal se trouva possesseur de cette ville, il la peupla de chrétiens, et en fit sa capitale, au lieu de Coïmbre qui l'avoit été jusqu'alors. Un étranger, nommé Gilbert, fut sacré son premier évêque. Henri, roi de Castille, la soumit à sa couronne en 1373. Elle rentra dans la suite sous le pouvoir des Portugais, et y demeura jusqu'à ce que le duc d'Albe la rangea sous la domination espagnole. Enfin, par la révolution de 1640, le duc de Bragance fut proclamé, dans Lisbonne, roi de Portugal, et prit le nom de Jean IV.

Ses successeurs s'y sont maintenus jusqu'à ce jour. Charmés de la douceur de son climat, et, pour ainsi dire, de son printemps continuel, qui produit des fleurs au milieu de l'hiver, ils ont agrandi cette capitale de leurs états, l'ont élevée sur sept collines, et l'ont étendue jusqu'aux bords du Tage. Elle renfermoit dans son enceinte un grand nombre d'édifices superbes, plusieurs places publiques, un château qui la commandoit, un arsenal bien fourni d'artillerie, un vaste édifice pour la douane, quarante églises paroissiales, sans compter celles des monastères, plusieurs hôpitaux magnifiques, et environ trente mille maisons, qui ont cédé à d'affreux tremblemens de terre, dont le récit fait frissonner les nations même qui sont le plus à l'abri de leurs ravages.

Le matin du premier novembre 1755, à neuf heures quarante-cinq minutes, a été l'époque de ce tragique phénomène, qui inspire des raisonnemens aux esprits curieux, et des larmes aux ames sensibles.

Le petit nombre de maisons de cette grande ville, qui échappèrent aux diverses secousses des tremblemens de terre des années 1755 et 1756, ont été dévorées par les flammes, ou pillées par les brigands. Le centre de Lisbonne, en particulier, a été ravagé d'une manière déplorable. Tous les principaux magasins ont été culbutés ou réduits en cendres; le feu y a consumé, en marchandises, dont une grande partie appartenoit anx Anglais, pour

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