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L'USAGE

IMPERTINENCE.

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'USAGE a changé le sens de ce mot; il exprimoit autrefois une action ou un discours opposé au sens commun aux bienséances, aux petites règles qui composent le savoir-vivre. On ne s'en sert guère aujourd'hui que pour caractériser une vanité dédaigneuse, conçue sans fondement, et montrée sans pudeur: cette sorte de vanité est assez commune. Heureux qui peut en rire! L'homme sage et sensé en est plus le martyr que le frondeur. La vanité, l'impertinence, le sot orgueil des rangs, lui paroissent les inconvéniens nécessaires de la hiérarchie qui * maintient l'ordre et l'amour de la gloire qui vivifie la nation.

L'impertinence se dit du caractère de l'homme, et d'une action qu'il aura faite. On dit de l'homme, c'est un impertinent; de l'action, c'est une impertinence. Il faut cependant observer qu'il en est de l'impertinence comme du mensonge, de l'injustice et de la plupart des autres qualités, bonnes ou mauvaises. Celui qui a dit un mensonge, ou qui a commis une injustice, n'est pas pour cela un homme injuste ni un menteur; et celui qui a dit ou fait une impertinence, un homme impertinent. L'impertinent ne distingue ni les lieux, ni les circonstances, ni les choses, ni les personnes. Il parle, et il offense; il parle encore, et il offense encore. Il n'est pas toujours sans esprit, mais il est sans jugement, sans délicatesse ; il rebute, il aigrit, on le hait, on le fuit; c'est un fat outré. Je ne sais si l'impertinent est fort sensible à son propre caractère quand il le rencontre dans un autre ; je ne le crois pas. C'est le bon esprit et un grand usage du monde qui corrigent de l'impertinence qu'on tient de la mauvaise éducation. S'il y a des hommes impertinens, il ne manque pas de femmes impertinentes. Une petitemaîtresse ou une impertinente, c'est presque la même chose il y en a d'autres encore.

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Qu'est-ce que l'impertinence?.... Plaisante question! c'est ce qu'on voit, ce qu'on entend, ce qu'on dit, ce qu'on fait, ce qu'on lit, ce qu'on écrit, ce qu'on applaudit,

ee qu'on admire, ce qui entre pour les dix-neuf vingtièmes dans la valeur intrinsèque de nos agréables.

L'impertinent de Théophraste n'étoit qu'un diseur de riens; l'impertinent moderne est si perfectionné, que celui des Grecs ne seroit qu'un pauvre débutant au milieu des nôtres. L'impertinent confond l'honnête liberté de l'homme aimable avec cette familiarité que nos grand'mères trouvoient excessive ou excédante. Il parle et agit avec une hardiesse qui va jusqu'à l'insolence. L'homme du jour dissipe gaiement ce qui appartient à ses créanciers, dépouille ses parens, frustre ses enfans de leur patrimoine, voudroit ruiner ses amis au jeu; brigue leurs places, convoite et séduit leurs femmes, abandonne la sienne à qui la veut; aussi a-t-il tous les droits possibles de se croire essentiellement impertinent, c'est-à-dire sectateur de la non appartenance; car il proteste, par le fait, contre quiconque dit: Ceci m'appartient. Quant aux convenances, il est du bel air de ne faire aucun état des obligations qu'imposoient anciennement le rang, les formes antiques, les usages établis, le bon sens, une certaine uniformité de conduite. Aujourd'hui, chaque individu tend à secouer toute espèce de joug, à briser ou relâcher tous ses liens, pour se procurer sa propre satisfaction par tous les moyens, non pas justes, non pas raisonnables, mais possibles, ou même illusoires. Dans ce déchaîne ment des passions excitées, le cœur est une démocratie tumultueuse qui change à tout instant de magistrats. II nous manque des forces inextinguibles, des attraits toujours nouveaux des moyens proportionnés aux desirs; mais nous nous servons tous si bien de ce que nous avons, qu'on ajoute à notre gloire en songeant à ce qui nous manque. Depuis qu'il est ignoble de posséder une santé robuste, si nous avions le malheur de naître trop vigoureux, les mœurs corrigeroient bien vîte la nature.

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(ANONYME.)

IM PÉTU È U X.

T ERME relatif à la violence du mouvement. Le vent est impétueux; les flots de la mer sont impétueux; le Rhône est impétueux. Il se dit, au figuré, de la jeunesse, de la colère, du caractère, du zèle, du style, du discours, et de presque toutes les qualités qui peuvent pécher par excès. C'est une affaire d'organisation, à laquelle ni l'éducation, ni la réflexion, ni le malheur, ni l'âge, ne remédient pas toujours. Il est dangereux de s'opposer à l'impétuosité, soit au simple, soit au figuré. Un orateur impétueux nous entraîne; un orateur grave nous accable. L'impétuosité est ordinairement de courte durée; il faut la laisser passer.

(ANONYME.)

L'IMPIE

IMPIE.

IMPIE est celui qui médit d'un dieu qu'il adore au fond de son cœur. L'impie, ou n'a point de religion, ou parle avec mépris de toutes les choses de la religion. Il ne faut pas confondre l'incrédule et l'impie. L'incrédule est un homme à plaindre; l'impie est un méchant à inépriser. Les chrétiens qui savent que la foi est le plus grand de tous les dons, doivent être plus circonspects que les autres hommes dans l'application de cette injurieuse épithète. Ils n'ignorent pas qu'elle devient une espèce de dénonciation, et qu'on compromet la fortune, le repos, la liberté et même la vie de celui qu'on se plaît à traduire comme un impie. Il y a beaucoup de livres hétérodoxes, il y a peu de livres impies. On ne doit regarder comme impies que les ouvrages où l'auteur inconséquent et hérétique blasphème contre la religion qu'il avoue. Un homme a ses doutes; il les propose au public. Il me semble qu'au lieu de brûler son livre, il vaudroit beaucoup mieux l'envoyer en Sorbonne, pour qu'on en préparât une édition où l'on verroit d'un côté les objections, de l'autre les réponses des docteurs. Que nous apprennent une censure qui proscrit, un arrêt qui condamne au feu? Rien. On ne peut pas douter que nos habiles théologiens ne réfutassent solidement toutes les misérables subtilités de l'impie. Ce seroit peut-être le moyen de le ramener dans le sein de l'église, et tous les fidèles édifiés s'en fortifieroient encore dans leur foi.

D'impie on a fait impiété.

Ceux qui ont lu Platon ont dû voir qu'il n'aime pas les athées il est même, dans sa législation, très-sévère à leur égard, et d'autant plus que la justice divine est la première base de toutes ses lois criminelles et civiles, et que le sacerdoce et le culte sont chez lui au premier rang dans l'ordre politique; en quoi Platon ne diffère d'aucun législateur ni d'aucun gouvernement connu depuis l'origine des sociétés. Quant aux athées, voici ses paroles

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à l'article des lois contre l'impiété. « Parmi ceux qui »> nient la divinité il en est qui, par une suite de leur bon »> naturel, s'abstiennent de mal faire, et vivent bien : il » en est qui ne cherchent dans cette opinion qu'une sauve» garde à leurs passions et à leurs vices. Les uns et les » autres sont plus ou moins nuisibles à l'ordre public. » Les premiers seront punis de cinq ans de détention » et, pendant ce temps, ils ne verront que les magis>>trats chargés de l'inspection des prisons, et qui les >> exhorteront à rentrer en eux-mêmes, et à revenir au » bon sens. Ils seront ensuite mis en liberté; mais, s'ils » se rendent de nouveau coupables du même crime, ils >> seront mis à mort. Les autres seront condamnés à une » prison perpétuelle; et, après leur mort, ils seront pri» vés de sépulture, et jetés hors du territoire de la ré» publique. » L'on ne sera pas surpris de cette rigueur si l'on se rappelle combien tous les gouvernemens de la Grèce étoient ennemis de l'irréligion, et que les deux ou trois sophistes qui manifestèrent une opinion contraire à l'existence des dieux n'évitèrent le supplice que par un exil volontaire. Les Romains, encore fort étrangers à toute espèce de philosophie lorsqu'ils firent leurs lois, ne supposèrent pas apparemment que l'on pût nier l'existence de la divinité, puisque, en ordonnant des peines capitales contre le sacrilége et l'impiété, ils ne firent aucune mention de l'athéisme qui, pourtant, vers les derniers temps de la république, et à l'époque de l'extrême dépravation des mœurs, devint commun chez eux comme chez les Grecs, mais de la même manière que parmi nous, c'est-à-dire que la divinité étoit plutôt oubliée et méconnue par inconsidération que niée par conviction. Il y eut pourtant cette différence, que Rome n'eut point de professeur d'athéisme proprement dit, et que la France et l'Europe en ont eu, dont plusieurs même, dans les deux derniers siècles, périrent du dernier supplice. Malgré ces exemples et l'autorité de Platon qui en toute autre chose, est fort loin d'une rigueur outrée, mon avis, si j'étois obligé d'en avoir un, ne seroit jamais pour une peine capitale; mais il me semble que

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