صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

églises ou dans les rues, et qui, dans ces occasions, ont soin de se détaper, c'est-à-dire de se découvrir le visage (1) ! » On eût sans doute peu goûté chez nous ce grossier mélange de la mortification et de la galanterie.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Traits généraux. Rôle de

ces confréries durant les guerres religieuses et la Ligue.

[ocr errors]

Pénitents et pèlerins. Pénitents Bleus de Bourges. Développement, prospérité et décadence de l'institution. Date d'érection des principales compagnies. Costume. · Les confréries de Pénitents depuis la Révolution.

On ne saurait avoir la prétention d'écrire l'histoire de toutes les confréries de Pénitents qui se sont établies dans les diverses provinces de la France: c'est par centaines qu'aux xvre et XVIIe siècles on compte ces associations. Qui entreprendrait la tâche de raconter les mille détails de l'existence de ces petits groupes, la plupart sans lien entre eux, s'imposerait un énorme et fastidieux travail, avec la perspective d'un bien médiocre résultat. Une fois, en effet, les lignes principales de l'histoire de l'institution tracées, que resterait-il pour remplir ce cadre ? Une multitude de faits locaux, se reproduisant à l'infini de ville à ville, de province à province, avec des différences presque imperceptibles et ne jetant aucune lumière sur les événements contemporains; une interminable série de dates d'érection de confréries, de construction de chapelles, d'ordonnances épiscopales, sans corrélation et sans suite; des milliers de noms obscurs, dont une monographie peut à la rigueur enregistrer quelques-uns, mais dont l'histoire n'a nul intérêt à surcharger ses pages.

Il est cependant un certain nombre de compagnies dont on ne peut passer l'histoire particulière sous silence, soit à cause de l'influence qu'elles ont exercée sur l'organisation ou la conduite des confréries de Pénitents du royaume en général, soit à raison de l'importauce du rôle rempli par elles dans la vie provinciale, de leur action sur les mœurs, sur l'esprit du milieu où elles se sont formées, où elles ont grandi, où beaucoup se sont éteintes, après avoir joui d'une immense popularité. Telles sont les grandes associations de Montpellier, de Toulouse, d'Avignon,

(1) Labat, Voyage en Espagne et en Italie.

de Lyon, de Marseille. Nous parlerons successivement de ces diverses confréries, en nous bornant à insister sur les particularités de leurs statuts ou de leurs annales qui sont de nature à mériter quelque intérêt. Nous traiterons ensuite avec quelques détails des associations limousines, qui ont de tout temps été célèbres, et sur lesquelles nous avons pu réunir une quantité assez considérable de documents.

Constatons, avant de commencer cette revue, qu'en France comme en Italie les compagnies dont nous nous occupons, sous la plus grande variété d'aspect, offrent toutes des traits communs permettant de les reconnaître et les séparant nettement des autres confréries. Si les prières, les formalités de réception, les œuvres de charité adoptées dans chaque association de Pénitents different, on n'en trouve pas moins, derrière ces rites ou ces exercices divers, la même pensée et le même but. Nonseulement l'objet capital, mais les caractères principaux de ces compagnies ne varient pas : c'est toujours la pénitence, l'expiation volontaire qu'elles ont surtout en vue; c'est toujours la miséricorde de Dieu qu'elles sollicitent, sa justice qu'elles cherchent à désarmer, le Christ souffrant qu'elles invoquent comme un frère et qu'elles se proposent pour modèle. Aux fêtes, aux joies, aux scandales dont le monde donne le spectacle, elles opposent à certains jours une manifestation publique et solennelle de foi, d'humilité, d'austérité. Avec leur robe grossière, avec leurs chants lugubres, elles rappellent les prophètes de Dieu parcourant les places des villes maudites, et sommant le peuple de faire pénitence pour arrêter le bras vengeur du Très-Haut. Les membres de ces associations retracent l'image des Pénitents de l'Eglise primitive et des siècles héroïques du moyen âge. Ils sont comme eux revêtus du sac et marchent les pieds nus. Et non-seulement leurs exercices, mais les dates mêmes auxquelles ont lieu les principales manifestations de la confrérie, coïncident avec certaines époques où les Pénitents des anciens jours avaient des cérémonies particulières. C'est ainsi qu'on les voit visiter en corps les églises le Jeudi-Saint, jour où jadis l'évèque et le clergé introduisaient solennellement dans le temple les fidèles soumis à des pénitences publiques.

A ces pénitences primitives, à ces longs mois d'humiliation, d'amende honorable, d'austérités, de séparation d'avec le reste des fidèles, l'esprit plus actif, la dévotion plus militante du moyen âge avaient substitué les lointains pèlerinages, et surtout le pèlerinage par excellence, la visite des saints lieux, plus tard

le combat pour leur délivrance : la croisade (1). Les confréries de Pénitents conservèrent aussi cette tradition. Il n'en est aucune que nous ne voyions s'imposer de longues fatigues pour aller porter ses supplications au pied de quelque autel vénéré. Henri III lui-même visita avec les membres de la compagnie qu'il avait fondée, plusieurs sanctuaires célèbres, notamment Notre-Dame de Chartres. Chez les membres de toutes ces sociétés on retrouve la même foi, la même confiance dans l'intercession de la Vierge, la même dévotion particulière au Saint-Sacrement, la même charité inépuisable et ingénieuse, et au début les mêmes austérités.

L'esprit d'indépendance, commun à toutes les anciennes confréries, est poussé à l'excès par les Pénitents: ils ne supportent qu'avec peine le contrôle de l'autorité diocésaine; quant aux droits du clergé de second ordre, ils refusent de les reconnaître, et leurs luttes avec les curés des paroisses où ils sont établis forment presque partout les principaux incidents de leur histoire. On les voit ouvrir largement leurs rangs aux ecclésiastiques pour n'avoir pas besoin du ministère du curé et de ses vicaires. Presque partout, ils s'installent dans une chapelle particulière ou dans une église abandonnée qu'ils font restaurer, afin d'échapper à l'ingérence de l'autorité paroissiale. S'ils sont obligés, dans quelques localités, d'accepter un aumônier pris hors de la compagnie, ils lui refusent le droit de prendre part à leurs délibérations (2). A ces traits il faut en ajouter d'autres : d'abord la recherche jalouse d'une complète égalité. Les membres de la confrérie des Pénitents Blancs de Montpellier (3) et de plusieurs autres associations du même genre doivent se donner entre eux le nom de frères, sous peine d'amende à chaque contravention; ceux des compagnies de Lyon, de Limoges et de la plupart des villes du midi ne gardent, pendant les exercices et les processions, ni bijou, ni ornement ou signe quelconque qui puisse les faire reconnaître. Les livres mêmes dont ils se servent ont une reliure absolument sem

(1) L'obligation de guerroyer contre les Sarrasins d'Espagne fut aussi imposée à beaucoup de pénitents.

(2) Statuts de la confrérie des Pénitents Bleus de Figeac.

(3) Delalain, Les Pénitents Blancs et les Pénitents Bleus de la ville de Montpellier. Montpellier, J. Martel, 1874, p. 71.

blable (1). A Marseille, à Aix et dans d'autres villes, ils portent des gants pour que le peuple ne voie même pas leurs mains (2). Ce sont là de petits côtés : ce qu'il faut admirer sans réserve c'est l'étroite union dans laquelle vivent les associés, la paix qui règne entre eux, la déférence qu'ils manifestent pour leurs supérieurs, que la règle constitue arbitres de leurs différends; enfin et surtout l'empressement et la charité qu'ils apportent dans l'assistance des confrères malades. Cette union, cette solidarité, ne se manifestent pas seulement chez les membres d'une même compagnie ou des diverses sociétés d'une ville: elles ne sont pas limitées au groupe local. Un Pénitent entreprend-il un voyage ou quitte-t-il la localité pour aller en habiter une autre, grâce à une lettre de recommandation des supérieurs de sa confrérie, il est reçu et trouve aide et secours dans toutes les compagnies affiliées à celle-ci (3). Beaucoup de ces associations se rattachent à la même archiconfrérie, et constituent une espèce de franc-maçonnerie dont les membres s'engagent quelquefois à ne pas révéler le nom de leurs confrères (4).

A la plupart de ces traits on reconnaît sans peine quel élément a dominé dans les confréries dont nous nous occupons. Les Pénitents sont bien les représentants de cette bourgeoisie ombrageuse, parfois passionnée et turbulente, mais toujours fortement unie, au sein de laquelle l'institution s'est développée et a pris la physionomie sous laquelle elle apparaît à nos regards.

Si les organisateurs de toutes les compagnies de Pénitents se sont inspirés de la même idée fondamentale; si toutes ces associations révèlent un esprit et des tendances identiques, il ne s'ensuit pas que toutes les confréries de cette nature appartiennent à une seule observance, et que leur filiation puisse être aisément établie. On retrouve partout l'écho des préceptes donnés par saint François d'Assise aux Tierçaires; on constate sans peine les emprunts faits par les dernières venues des compagnies aux statuts et aux usages des sociétés plus anciennes ; mais on

[blocks in formation]

(3) Statuts de plusieurs confréries de Lyon et de Toulouse.

(4) Statuts des Pénitents du Très-Saint-et-Très-Auguste-Nom-deDieu, à Marseille. — A Limoges et ailleurs, les confrères devaient seulement garder le secret sur ce qui se passait dans les réunions.

ne saurait affirmer que celles-ci procèdent l'une de l'autre. Loin de là, il est visible qu'elles n'ont pas eu une origine commune. Chacune est née dans des circonstances particulières, et s'est formée sur place, recourant quelquefois aux réglements et à l'expérience de ses voisines, mais n'en conservant pas moins son indépendance, ses libres allures, sa physionomie propre. Toutes n'ont pas un seul et même centre, ne se sont pas développées simultanément on les voit au contraire partir de dix points. différents. Elles doivent leur naissance aux évènements les plus divers l'une est éclose d'un élan de ferveur pendant la croisade albigeoise; une autre, d'un sentiment de charité; une troisième est due à l'inspiration italienne; une quatrième perpétue le souvenir d'un pèlerinage ou d'une épidémie miraculeusement arrêtée. Celle-ci se rattache au tiers-ordre de Saint-François; celle-là, au tiers-ordre de Saint-Dominique. A dire vrai, sauf certaines familles de Pénitents Blancs sur lesquelles les grandes compagnies de Lyon, de Marseille, de Montpellier, exerçaient un patronage et une direction; sauf les associations de Pénitents Bleus de Saint-Jérôme, qui ont vraiment, en France, constitué une famille à part, et dont les membres, unis par une affiliation commune, suivaient la même règle, les diverses confréries de cette espèce ne formaient pas de catégories déterminées. Nous ne chercherons pas à établir entre elles un classement impossible à justifier on l'a tenté, et on n'est arrivé, après beaucoup d'erreurs, qu'au chaos. Il faut les prendre, comme elles se sont produites, l'une après l'autre, les étudier isolément, sans prétendre introduire dans cette étude un ordre tout d'apparence, des catégories tout à fait artificielles, dont l'adoption amènerait infailliblement l'écrivain à fausser le caractère de l'institution, et le lecteur à se méprendre sur sa véritable nature.

Il est donc, on le voit par l'exposé qui précède, non-seulement difficile, mais pour ainsi dire impossible d'écrire une histoire générale et méthodique des compagnies de Pénitents; car il ne s'agit pas ici du développement successif d'une œuvre, mais de l'éclosion plus ou moins spontanée, de l'efflorescence à diverses époques, sous des influences et dans des milieux différents, de sociétés offrant beaucoup d'analogie entre elles, mais que ne relie aucun système d'organisation. Tous ces éléments sont isolés, épars, réfractaires à un classement, et n'ont leur entière valeur que sur la scène locale. Pour traiter un sujet qui se présente ainsi, il n'y a qu'une seule marche à adopter recueillir et dégager du fatras des recherches monographiques quelques indications générales,

« السابقةمتابعة »