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posés à recevoir cette influence. Et puis, comment voulez-vous qu'il n'y eût pas complaisance, imitation empressée pour le génie des vainqueurs si brillans qui remplirent l'Espagne de la pompe de leurs monumens? Certainement, dès le xir, et peut-être dès le x11° siècle, les arts chrétiens et occidentaux firent de grandes choses, surtout dans l'architecture. Ceux qui s'y connaissent sont frappés de cette puissance de génie qui, à une époque où la pensée était encore enveloppée et trouvait à peine des formes de langage, bâtissait des idées avec des pierres, et faisait, si l'on peut parler ainsi, des poèmes épiques avec des cathédrales.

Mais, bien avant ce glorieux essor du génie chrétien, se manifestant par l'architecture, le génie arabe avait élevé de nombreux monumens. Je n'examine pas quelles objections peuvent s'adresser, sous le rapport de l'art, à cette architecture arabe; mais sa variété, ses coupes hardies et capricieuses, toutes ses pompes devaient puissamment saisir l'imagination des peuples vainet les Arabes, à certains égards, leur apparaissaient comme des maîtres protégés par ces génies heureux de l'Orient, qui les aidaient à construire tant de magnifiques édifices brillans de marbre et d'or. La richesse prodigieuse 4. T. I. LITT. DU MOY. AGE. I 1830.

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que les Arabes apportèrent ou firent naître en Espagne est attestée par toutes les vieilles chroniques espagnoles : « Ils nous ont pris notre terre, disaient-elles; mais ils l'ont couverte d'or. » Cette pauvre Espagne, à laquelle ses vainqueurs même ont apporté tant d'or, qui est allée chercher tant d'or en Amérique, et qui est le pays du monde où il y en a le moins!

Figurez-vous, Messieurs, qu'au îx* et au x* siècles, c'est-à-dire à une époque où nous ne pouvons placer avec certitude aucun monument des arts, parmi les chrétiens, et même au commencement du XIe siècle, où la vie des temps féodaux était encore si rude, si barbare, où un riche baron habitait une tourelle fortifiée de murs épais et mal éclairée par quelques lucarnes, Séville, Tolède, Grenade étaient remplies de somptueux palais. Si ces édifices offraient dans leur construction quelque défaut ou quelque irrégularité, ils étaient embellis par tous les artifices d'un art ingénieux, et plus voisin de l'affectation que de la négligence. La magnificence orientale les animait d'un éclat dont les petites cours de l'Europe chrétienne, et même la cour de Charlemagne, ne pouvaient donner l'idée. La vie féodale était étrangère aux Arabes; mais le plus grand luxe

du moyen âge, ce cortége de nombreux vassaux, se retrouvait dans la vie arabe. C'était la pompe du patriarche, au lieu de celle du seigneur; c'était l'union de la famille puissante, de la tribu, substituée à la domination du maître et au servage des vassaux. Ces opulentes tribus des Abencerrages et des Zégris. ajoutaient à la magnificence des trônes de Grenade et de Cordoue, et brillaient d'un éclat extraordinaire dans les fêtes. Le pays tout entier était enrichi par le commerce et l'industrie de ses vainqueurs.

Que restait-il à faire, au milieu de cette prospérité pompeuse, qui était interrompue seulement par des guerres contre d'anciens Espagnols cantonnés dans leurs pauvres petites forteresses, du fond desquelles cependant ils devaient sortir pour vaincre ? Le commerce, et la culture des arts.

Il existe un catalogue fait par le savant Yriarté. En le parcourant, on est étonné du nombre prodigieux d'auteurs arabes nés en Espagne, et de la foule d'ouvrages sur la philosophie, la poésie, l'éloquence, les arts industriels, l'agriculture, qui dorment ensevelis dans la bibliothèque de l'Escurial, et qui furent autrefois présentés aux rois de Grenade et de Cordoue.

Il n'est pas douteux que de cette source il ne se soit répandu sur l'Europe plusieurs de ces inventions ingénieuses, qui, vers les xi, xir et XIIe siècles, se montrent tout-à-coup, sans date certaine, et sans nom d'auteurs. Cette incertitude même atteste leur origine; et cette origine explique comment elles parurent sur divers points en même temps, et furent importées par plusieurs personnes à la fois, Ainsi, l'usage du papier, la boussole, l'invention de la poudre, semblent être venus de l'Orient par les Arabes, dont le vaste empire, par ses -extrémités opposées, touchait à la Chine et à la France.

Mais ce qui nous occupe en ce moment, ce n'est pas cette influence, cette transmission de découvertes, si difficile à constater; c'est surtout le mouvement donné à l'imagination, l'action sur la pensée poétique, sur le développement des lettres en Occident. A cet égard, les faits abondent. A défaut de l'étude, impossible pour nous, des originaux, nous pouvons recueillir des anecdotes répandues dans le moyen âge, et qui attestent cette influence. Au xe siècle, Gerbert, ce savant homme, après avoir étudié dans le monastère d'Aurillac, voulant étendre ses connaissances et s'enfoncer dans les arts profonds de l'Orient, se

rend à Tolède. Là, pendant trois ans, il étudia les mathématiques, l'astrologie judiciaire et la magie, sous des docteurs arabes. Revenu de ce docte pélerinage, il fut supérieur de Bobio, celui des couvens du moyen âge qui avait conservé le plus de manuscrits antiques; de là, il devinț précepteur du fils de Hugues Capet; puis évêque de Rheims, d'où il passa au service de l'empereur d'Allemagne, qui le fit nommer évêque de Ravenne, et ensuite pape, sous le nom de Sylvestre II. Un pape sorti de l'école des Arabes!

Ce n'est pas tout; lisez les chroniques du temps et les récits des plus graves auteurs, le Speculum historiale de Vincent de Beauvais, du précepteur de saint Louis, vous y trouverez à ce sujet une histoire où se reconnaît toute l'influence arabe, et qui entoure d'une espèce de voile magique la personne mystérieuse de Gerbert. Il est dit que Gerbert, devenu pape', et tenant à Rome les clefs de saint Pierre, possédait encore ces secrets merveilleux, qu'il avait appris en Espagne des sages d'Orient. Un jour, il découvrit dans les ruines de Rome une statue d'airain, d'un travail précieux, qui avait un doigt indicateur tourné vers l'Orient; il s'approcha de cette statue, il la toucha; la statue frappée se fendit, et

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