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lit, et leur subtituèrent son habit d'homme. En vain Jeanne leur demanda ses vêtemens; en vain elle leur rappela que les juges lui avoient expressément défendu de s'habiller en homme. Ils lui répondirent brutalement qu'elle n'en auroit point d'autres. Pressée par des besoins naturels, l'infortunée fut contrainte de se couvrir des seuls vêtemens qui lui étoient offerts. A l'instant, plusieurs témoins entrèrent pour constater cette prétendue transgression. Les juges survinrent, et dressèrent un procès-verbal. Le lendemain ils s'assemblèrent, et Jeanne fut condamnée comme relapse, excommuniée, rejetée du sein de l'Eglise, et jugée digne, par ses forfaits, d'être abandonnée à la justice séculière. On vint lire cettesentence à l'innocente prisonnière. Elle pleura; elle se plaignit, mais sans emportement, mais sans injures. On lui permit de recevoir l'Eucharistie. Ensuite elle sortit de prison le 30 Mai, escortée d'une garde de six-vingts hommes d'armes. Elle étoit revêtue d'un habit de femme. Satête étoit chargée d'une mitre sur laquelle étoitécrit: Hérétique,relapse, apostate, idolatre. Deux religieux dominicains la soutenoient. Elle s'écrioit sur la route: «Ah! Rouen, Rouen, seras-tu ma dernière « demeure? » Arrivée au bûcher qui devoit la consumer, elle se mit à genoux, pria Dieu dévotement, etse disposa saintement à son sacrifice. «Menez-la, dirent aux bourreaux les juges séculiers. Ils obéirent. En face du bûcher étoit un tableau sur lequel on lisoit cette inscription: « Jeanne, quis'est fait nommer la Pucelle, << menteresse, pernicieuse, abuseresse des peuples, <<< devineresse, superstitieuse., blasphémeresse de « Dieu, présomptueuse, malcréante de la foi de Jésus« Christ, meurderesse, idolâtre, cruelle, dissolue <«< invocatrice du diable, apostate, schismatique et héré<tique.» Elle demanda une croix. On lui présenta celle de l'église voisine. Elle l'approcha pieusement de sa bouche, la mit contre son sein, monta sur le bûcher, et rendit son ame en prononçant le nom de Jésus.

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Incontinent après l'exécution, le bourreau dit auxjuges, en pleurant, « qu'il ne croyoit pas que Dieu lui << pardonnât jamais le tourment qu'il avoit fait souffrir « à cette sainte fille ; que jamais il n'avoit tant craint

<< de faire une exécution; que les Anglais avoient fait <«< construire un échafaud de plâtre si élevé, qu'il ne « pouvoit atteindre à elle, ce qui avoit rendu ses dou<«<lcurs plus longues et plus cruelles. »

La fin tragique de Jeanne d Arc fut pleurée dans Londres même. Un milord dit publiquement que la Pucelle étoit une brave femme; et qu'elle auroit mérité les plus grands éloges, si elle étoit née Anglaise. Un secrétaire du roid'Angleterre, nommé Jean Trassard, s'écria tout haut: «Nous sommes tous perdus, damnés et déshono« rés, d'avoir fait cruellement mourir cette fidelle et in<<nocente chrétienne, dont l'ame estès mains de Dieu.>

Le courroux du Ciel sembla tomber, dès cette vie, sur la plupart de ceux qui s'étoient prêtés à la vengeance des Anglais, en condamnant cette héroïne. Pierre Cauchon mourut subitement en se faisant raser; Nicolas Midi, un autre des principaux juges, docteur en théologie, fut frappé de la lèpre; Jean Benédicité expira dans les plus cruelles douleurs ; et Guillaume Espinet, chassé de Rouen par les Anglais, alla finir misérablement ses jours dans un colombier, hors de la ville. Voyez BRAVOURE, COURAge, Intrépidité.

VÉRACITÉ.

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1.U saint anachorète, nommé Jean-l'Egytien, reçut la visite de Rufin et de six de ses amis; et, comme les solitaires d'Egypte, aussitôt que quelques frères arrivoient, avoient coutume de s'unir à eux par le moyen de la prière, toute la compagnie le supplia de la faire, et de lui donner sa bénédiction. Le pieux solitaire leur demanda si personne d'entre eux n'étoit ecclésiastique? On lui répondit que non. Alors il les considéra les uns après les autres, et connut qu'il y en avoit un qui étoit diacre; ce que tous ignoroient, à la réserve d'un seul à qui ce diacre se confioit, parce qu'il ne vouloit pas qu'on le sût, par humilité. Mais, quoiqu'il fût le plus jeune de la troupe, le saint anachorète ne l'eut pas plutôt aperçu, qu'il dit en le montrant du doigt: « Celui-ci est « diacre. » Ce jeune homme ne vouloit pas l'avouer, et

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même il continuoit à le nier; Jean lui prit la main, et la lui ayant baisée : «Mon fils, lui dit-il, gardez-vous bien de désavouer la grace que vous avez reçue de Dieu, << de peur qu'un bien ne vous fasse tomber dans un mal, « et l'humilité dans le mensonge; car il ne faut jamais << mentir, même sous prétexte d'un bien, puisqu'aucun << mensonge ne procède de Dieu, mais d'une mauvaise << cause. » Ce diacre ne lui répondit rien, et reçut avec respect cette charitable et solide correction.

2. L'historien Aristobule avoit écrit les belles actions d'Alexandre; et, par un excès de flatterie, il les avoit chargées d'une foule de brillans mensonges,tristes fruits d'une imagination intéressée. Le conquérant, écoutant la lecture de cet ouvrage pendant sa navigation sur l'Hydaspe, arracha des mains de l'auteur ces fades impertinences, et les jeta dans le fleuve, en disant : « Tu méri«<terois encore mieux que je t'y précipitasse, toi, vil << imposteur, qui, contre toute vraisemblance, me fais << combattre seul et tuer un éléphant d'un seul trait. » 3.Il existe à la Chine un tribunal historique, chargé par une loi fondamentale, de consigner dans les fastes de l'empire les vertus et les vices du monarque régnant. L'empereur Tai-Tsong, ou Tai-çu, ordonna un jour à ce tribunal de lui montrer l'histoire de son règne. «Tu << sais, lui dit le président, que nous donnons un récit << exact des vertus et des vices de nos souverains; et << nous ne serions plus libres de dire la vérité, si tu jetois << les yeux surce dépôtsacré.-Quoi! reprit l'empereur, << tu veux transmettre à la postérité l'histoire de ma vie, << et tu prétends aussi l'informer de mes défauts, l'ins«truire de mes fautes?- Mon caractère, lui répondit « le président, et la dignité de ma place, ne me per<< mettent pas d'altérer la vérité. Je dirai tout. Si tu fais << quelqu'injustice, j'en serai pénétré de douleur: si tu « déshonore ton rang par quelque foiblesse honteuse, << je te plaindrai; mais je ne tairai rien. La conversation << que nous avons ensemble ne sera pas même passée << sous silence: telle est mon exactitude et ma sévérité.>> Tai-Tsong avoit l'ame noble et grande : « Continue, << dit-il au président; écris, et dis sans crainte la vérité. << Puissent mes vertus, ou mes vices, contribuer à

<«< l'utilité publique, et à l'instruction de mes succes<< seurs! Ton tribunal est libre; je le protège, et lui « permets d'écrire mon histoire avec la plus grande <«< impartialité. » Voyez VÉRITÉ.

1.

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VÉRITÉ.

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EPAMINONDAS, l'un des plus grands personnages de la Grèce, avoit tant d'amour pour la vérité, qu'il se faisoit un scrupule de mentir, même par jeu et par divertissement.

2. Firmus, évêque de Tagaste en Afrique, montra par sa généreuse fermeté,qu'il étoit véritablement digne de son nom. On persécutoit les chrétiens par ordre de l'empereur; et les inquisiteurs du prince ayant appris qu'un homme qui professoit la religion proscrite, avoit cherché un asile chez le saint prélat, vinrent le presser de le leurlivrer. Il leur répondit : « Je ne puis ni mentir, << ni découvrir celui que vous cherchez : je l'ai caché; << mais vous ne saurez jamais le lieu de sa retraite. » Ces officiers, pleins d'indignation le saisirent lui-même, et lui firent souffrir les tourmens les plus cruels, afin de l'obliger à découvrir le chrétien qu'il récéloit. Firmus, au milieu des plus affreuses tortures, se contentoit de leur répondre : « Je sais mourir; mais je ne sais point parler.»> L'empereur fut instruit de cette héroïque constance.Il fit venir le pontife, qui lui parut si digne d'admiration, qu'il lui accorda sa grace et celle de celui qu'il avoit caché. «Que de courage!que de vertu!s'écrie S. Augustin. Quels éloges ne mérite pas ce saint évêque, qui aima <«< la vérité jusqu'au point de tout souffrir, plutôt que de <«< trahir par un mensonge, et qui porta la charité jus<< qu'à s'exposer aux plus horribles supplices,plutôt que << de découvrir un malheureux dont on vouloitla mort!

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5. Mon palais et mes oreilles, disoit Hiéron I, << roi de Syracuse, seront toujours ouverts à quicon<< que voudra me dire la vérité, sans ménagement et << avec franchise. »

4. Antiochus-le-Grand, roi de Syrie, étant à la chasse,

et poursuivant une bête fauve, s'écarta de ses amis et de sasuite,et se retira dans la demeure de quelques pauvres ouvriers qui ne le connoissoient pas. En soupant, il fit tomber la conversation sur le roi. Ses hôtes dirent que le monarque actuel étoit unhonnête homme, un bonprince; mais qu'il se reposoit de presque tous les soins du gouvernement sur ses amis qui ne lui ressembloient pas, et qui lui faisoient agréer tout ce qu'ils vouloient; que d'ailleurs sa passion excessive pour la chasse, lui prenant presque tout son temps, il négligeoit les affaires les plus importantes. Antiochus écoute, sans rien dire, la leçon qu'on ne croyoit pas lui donner. Le lendemain, quand sa suite l'eut rejoint, il dit, en prenant son diadême et ses habits royaux qu'on lui présentoit : « Depuis «que je vous porte, ornemens plus dangereux qu'bonorables, j'ai, pour la première fois, hier, entendu « dire la vérité sur ce qui me touche. »

5. Philippe, roi de Macédoine, aimoit qu'on lui dît la vérité. Il souffroit que le philosophe Aristote lui fit des leçons sur l'art de régner. Il disoit qu'il avoit obligation aux orateurs d'Athènes de l'avoir corrigé de ses défauts, à force de les lui reprocher. Il gageoit un homme pour lui dire tous les jours, avant qu'il donnát audience, cette grande et terrible vérité, peu agréable aux monarques : « Philippe, souviens - toi << que tu es mortel ! >

6. Ce célèbre Thespis, le père du théâtre d'Athènes, ayant réformé la tragédie, attiroit tout le monde à son spectacle. Le sage Solon y alla comme les autres, pour juger si le mérite du comédien répondoit à sa grande réputation. Quand la pièce fut finie, il appela Thespis et lui demanda s'il n'avoit pas de honte de mentir ainsi devant tant de gens? Thespis lui répondit qu'il n'y avoit point de mal dans ces mensonges et dans ces fictions poétiques, qu'on ne faisoit que par jeu. « Oui, » répondit le législateur d'Athènes, en donnant un grand coup de son bâton contre terre, « oui, mais si nous << souffrons, si nous approuvons ce beau jeu-là, il << passera bientôt dans nos contrats et dans toutes nos << affaires,» Voyez VERACITÉ.

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