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comédiens, obtint du roi un ordre pour qu'aucune personne de sa maison n'entrât au spectacle sans payer.Ces messieurs indignés forcèrent la porte, tuèrent les portiers, et cherchoient la troupe entière, pour lui faire éprouver le même traitement. Un jeune acteur, nommé Béjart, qui étoit habillé en vieillard pour la pièce qu'on alloit jouer, se présenta sur le théâtre: «Eh! messieurs, « leur dit-il, épargnez un vieillard de soixante-quinze << ans,qui n'a plus que quelques jours à vivre.» Cette plaisanterie fit rire les mutins, et, ce que n'auroient peutêtre pas fait les meilleures raisons, calma leur fureur.

37.Un Gascon, voulant aller chercher fortune en Angleterre, se rendit au port de la Brille en Hollande; et, ayant déposé sa malle, qui étoit fort légère, dans le paquebot qui alloit cingler vers la Tamise, il se retire dans un cabaret, en attendant le départ. Il conte à tous ceux qui veulent l'entendre, ses admirables projets. Mais ce récit, copieusement arrosé de bon vin, lui fait oublier que le moment du départ est arrivé depuis une bonne demi-heure. Il s'en aperçoit enfin. Le vent et la mer emportoientses espérances. Il se désespère. Enfin ilintéresse un patron qui lui promet, à force de voiles, d'atteindre le paquebot,avec une barque plate et découverte. A peine sont-ils en pleine mer, qu'une violente pluie pénètre jusqu'à la moëlle l'infortunéGascon. Il essuie cet orage avec constance, et vient à bout d'atteindre le quebot, sur lequel il grimpe à la faveur de l'obscurité. «Dieu vous garde! » dit-il à tous ceux qui l'aperçoivent avec étonnement. « Cadédis, messieurs, il faut être bon << nageur pour vous atteindre; mais, quand vous auriez « << été à quatre lieues d'ici, vous ne m'auriez pas échappé; <«<et je nageois, dans cette confiance, avec un esprit fort « tranquille. » La hardiesse du Gascon tout trempé d'eau en imposa à tout le monde. On admira l'habileté d'un tel nageur. Un milord, qui étoit présent, résolut de faire l'acquisition de ce personnage, pour le mettre aux prises avec le Maure d'un autre milord, qui passoit pour le premier nageur du monde, et qui avoit vaincu tous ceux qui avoient voulu lui disputer cette gloire.LeGascon accepte la proposition du milord; et, quand ils furent arrivés à

pa

Londres

Londres, ce seigneur alla proposer à son ami un pari de mille guinées en faveur de son Gascon, qui n'avoit jamais mis le pied dans l'eau, pas même pour se baigner. Le jour est pris.Le Gascon est le trompette de la victoire qu'il se flatte de remporter.Le voilà avec le Maure sur le bord de la Tamise, tous deux dans un équipage leste prêts à se jeter dans l'eau. Le Gascon avoit à côté de lui une petite caisse de liége. Il la prit sous le bras. LeMaure lui demanda l'usage qu'il en vouloit faire ?» Sandis, dit<«<il, je suis homme de précaution.» Il ouvre la caisse où il y avoit plusieurs bouteilles de vin et force petit-salé. « Vous voyez cela, poursuivit-il; si vous ne faites pas <«<de provisions comme moi, vous courez risque de mourir de faim. Savez-vous bien que je vous mène « droit à Gibraltar ? » Le Maure le regarda alors; et, comme le Gascon parloit d'un ton résolu, qui sembloit promettre qu'il tiendroit plus qu'il ne disoit, il fut tellement épouvanté, qu'il dit à son maître : « Milord, <«< je ne veux point me commettre avec cet homme là; << je me perdrois je lui cède la victoire. » En vain on voulut lui ôter cette idée; les prières, les menaces furent inutiles; et le Gascon gagna les mille guinées.

38. Un prélat limousin ayant été placé sur le siége de S. Pierre, recut une députation de ses compatriotes. Ces ambassadeurs lui témoignèrent d'abord la joie que son élévation avoit causée à son pays; puis l'un d'eux lui tint ce discours : « Nous venons vous supplier, très<< saint père, au nom de tous vos compatriotes, d'user, << en leur faveur, du pouvoir absolu qu'on leur a dit « que vous avez sur la terre. Vous savez, saint père, la « stérilité de votre pauvre patrie, dont les habitans re<<< cueillent à peine assez de blé pour les nourrir la moitié << de l'année, et le besoin qu'ils ont de recourir aux «< châtaignes. Donnez-lui la fertilité qui lui manque, « et faites, en considération de l'honneur qu'elle a de << vous avoir vu naître, qu'on puisse à l'avenir faire deux << récoltes par an. » Le pontife ne crut pas devoir leur refuser une pareille grace. » Mes enfans, leur dit-il, je << vous accorde volontiers ce que vous me demandez; « et, pour vous prouver davantage mon affection, j'y Tome III.

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<< joins un autre bienfait ; c'est qu'au lieu que dans les <«< autres pays on ue compte que douze mois pour une « année, je veux que, par un privilége spécial, vous << en ayez vingt-quatre à chacune des vôtres. >>

59. Un Gascon disoit: «Je suis si délicat sur le point << d'honneur, que je ne me rendrois point traitable « là-dessus, quand on m'offriroit un million de revenu << chaque minute. »

« Je suis venu si vîte, disoit un ecclésiastique de « Gascogne, qui avoit couru à une œuvre de charité; <« je suis venu si vite, que mon bon ange gardien << avoit bien de la peine à me suivre. »

40. Un prédicateur gascon demeura court en chaire. Il eut beau frotter sa tête; il n'en sortit rien. Il fallut descendre. << Messieurs, dit-il en prenant congé de l'audi<< toire, je vous plains ; vous perdez une belle pièce. »

41.Un capucin à pied faisoit ses missions avec autant de succès que de désintéressement. Il se trouva un jour vis-à-vis d'un ruissean, sur le bord duquel il rencontra un paysan qui eut l'effronterie de lui demander qu'il le portât sur son dos à l'autre bord. Le capucin le chargea aussitôt sur ses épaules, et commença à traverser le ruisseau, ayant de l'eau jusqu'aux genoux. Lorsqu'il eut fait quelques pas, il demanda au paysan s'il avoit de l'argent Celui-ci, croyant qu'il parloit par intérêt, touché d'ailleurs de l'excès de sa complaisance, lui répondit qu'oui, et qu'il le paieroit bien. Aussitôt le capucin, le jetant dans l'eau : « Ah! mon ami, lui dit«il, il ne m'est pas permis de porter de l'argent; » et il continua tranquillement sa route.

42. Un jeune prédicateur, homme de bonne mine, qui avoit une voix de tonnerre, le geste beau, et tous les autres agrémens d'une déclamation qui charme les auditeurs et les tient attentifs, étant monté en chaire', perdit tout d'un coup la mémoire, et oublia tout-à-fait son sermon. Que faire ? Quitter la partie, et se couvrir de honte?Parler et n'avoir rien à dire? Cette alternative étoit embarrassante. Il se détermine à rester, et à faire usage de sa voix et de son geste, sans rien prononcer que des paroles imparfaites et décousues; des car, enfin, des

mais, des si, des donc, des chers auditeurs, etc. etc.... Jamais prédicateur ne parut avoir plus de feu. Il crioit de toutes ses forces; il faisoit des exclamations, frappoit des pieds et des mains: tout trembloit sous lui; et les voûtes de l'église, qui étoit très-vaste, lui rendoient au double les éclats de sa voix. Tout l'auditoire étoit dans un silence profond: chacun avançoit sa tête, et redoubloit son attention, pour entendre ce qui ne pouvoit être entendu. Ceux qui étoient près de la chaire disoient : « Nous sommes trop près, il n'y a « pas moyen d'entendre. » Ceux qui étoient éloignés se plaignoient de ce que, par leur éloignement, ils perdoient les plus belles choses du monde. Enfin l'adroit prédicateur tint son auditoire trois quarts d'heure en haleine, et se retira avec l'applaudissement de toute l'assemblée, qui se promettoit bien, à la première occasion, de mieux choisir ses places, et de ne pas se priver du fruit d'un sermon aussi pathétique. 43. Un gentilhomme gascon sans argent, apprit qu'un aubergiste venoit d'être condamné à dix écus d'amende pour avoir donné un soufflet à un autre gentilhomme. Assuré du fait, il alla chez le même aubergiste,et passa trois ou quatre jours chez lui, de façon que son compte monta à six écus. Comme il prenoit congé de l'hôte et que celui-ci demandoit le payement du temps qu'il avoit passé chez lui, le Gascon lui dit : « Cadédis ! « monsieur, je n'ai pas un sou; mais je vous prie de « me donner un soufflet, et me rendre mon reste; «< car un soufflet, comme vous savez, vaut dix écus, << et je n'en dois que six. »

44.Un officier traversoit une rivière dans une barque avec un cordelier qni avoit un âne à côté de lui.Le pauvre animal trembloit de toutson corps. Le capitaine, qui étoit tenté de se moquer du révérend père, commencala conversation, en luidemandant la cause de ce tremblement: << Si vous aviez, lui dit le religieux, comine mon « àne, la corde au cou, les fers aux pieds, et un cor« delier à vos côtés, vous trembleriez bien davantage.»> 45. Un cordelier en voyage, se trouva pris par la Auit; et, ayant rencontré la maison d'un seigneur, il se

persuada qu'il y seroit bien reçu. On lui fit en effet un assez bon accueil. Le seigneur cependant, voyant son hôte embarrassé, résolut de se divertir à ses dépens. Il le pria donc de passer le lendemain chez lui, et lui proposa une partie de chasse. Il avoit dessein de lui faire monter un cheval extrêmement fougueux, et qui ne pouvoit être domté que par un autre seigneur du voisinage ; on lui avoit donné le nom de Diable. Le cordelier soupçonna le tour qu'on lui préparoit; mais, comme il savoit fort bien se rendre maître d'un cheval, il dissimula tout, et ne monta dessus qu'après bien des grimaces, affectant beaucoup de crainte; puis, s'étant bien assuré, il commença à piquer le cheval, et à courir au grand galop. Le seigneur ne pouvant le suivre, et voyant qu'il s'écartoit toujours de plus en plus, lui cria de s'arrêter. Mais le cordelier lui répondit d'un ton railleur : « Le diable m'emporte, le diable « m'emporte. » Il courut tant, qu'en peu d'heures le diable le porta dans son couvent, d'où il ne sortit point pour retourner vers son premier maître.

46.Le cocher d'une remise ayant conduit deux dames et deux cavaliers dans un village à quelques lieues de Paris, les arrêta devant l'église de la paroisse, parce qu'ils voulurent assister aux offices divins. L'on disoit la grand❜messe, il manquoit un chapier; le cocher s'offrit d'en faire la fonction: il s'affubla d'une chape. On vint l'avertir dans ce moment qu'il avoit pris envie à ses chevaux de s'en aller : il sort de l'église avec sa chape, vole après ses coursiers vagabonds, les atteint, et remonte sur son siége pour les ramener devant l'église. Un des premiers citoyens du village, voyant le phaéton couvert d'une chape, s'imagina que ce pouvoit être le carrosse du pape. Il communiqua cette burlesque idée à tous ses compagnons qu'il rencontra; elle fut contagieuse, et bientôt une foule de ces bonnes gens allèrent å l'envi au devant de l'équipage, se jetèrent à genoux; et, prosternés contre terre, ils demandoient humblement la bénédiction du prétendu vicaire de Jésus-Christ.

47. Un curé de campagne fort enjoué, étoit en habit court dans la ville cathédrale de son diocèse. Un grandvicaire l'ayant aperçu, l'appela, et lui demanda pour

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