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mande, il n'est pas possible qu'il n'ait pas eu l'intention de les y comprendre. Or, quels troubles ne causeroit pas dans une ville, dans une province, dans un diocèse, la liberté d'y vivre sans aucun égard pour les lois qui y sont établies? et quels effets y produiroient souvent les ordonnances les plus sages et les plus nécessaires?

Il y a plus: une preuve sans réplique que les étrangers et les voyageurs sont soumis à la juridiction du législateur, dont l'autorité est reconnue dans les lieux où ils se trouvent, c'est qu'il y a des lois qui n'y sont faites que pour eux. Telles sont les lois faites dans ce royaume, pour régler la manière dont les étrangers doivent s'y conduire. Telle est la défense, faite dans plusieurs diocèses aux prêtres étrangers d'y célébrer la sainte messe, sans la permission de l'évêque diocésain.

On demande si un voyageur qui ne fait que coucher dans un endroit, et qui doit en partir le lendemain matin, est obligé, avant que de partir, d'y entendre la messe, lorsque ce lendemain doit y être un jour de fête?

Nous ne nous arrêterons pas à expliquer ici les raisons qui appuient les différents sentiments des théologiens sur cette question: nous dirons seulement qu'il nous paroît plus sûr de conseiller à ce voyageur d'entendre alors la sainte messe avant que de partir, s'il le peut. Il nous paroît encore à propos d'observer ici que les théologiens mêmes, qui croient que l'on n'est pas en ce cas obligé d'entendre la messe, conviennent qu'il faut à cet égard faire une grande différence entre un habitant du lieu où la fête se célèbre, et le voyageur qui ne fait qu'y passer. Le premier, disent-ils, est absolument obligé d'entendre alors la messe avant que de partir, quoiqu'il doive partir de grand matin, et se trouver avant midi dans un lieu où il n'est pas fête. La raison qu'ils en donnent, c'est que les lois d'un pays obligent plus directement et plus fortement le citoyen que le voyageur, pour qui ce sont des lois en quelque sorte étrangères, auxquelles il n'est obligé que par hasard, d'une manière passagère, et autant qu'il y séjourne assez long-temps pour pouvoir les remplir. Quant au citoyen, les lois de son pays sont ses propres lois. Pour étre exempt de l'obligation qu'elles imposent, il faudroit qu'il en fût absent : or, il ne l'est pas au commencement du jour auquel l'obligation d'entendre la messe est attachée; ainsi, par le séjour qu'il y a fait le matin, il a contracté l'obligation d'y assister.

Lorsque dans ces circonstances on est obligé d'assister au saint sacrifice de la messe, il n'est pas nécessaire, disent plusieurs célèbres théologiens, de le faire dans la paroisse où la fête se célèbre; et si l'on avoit le pouvoir de le faire plus commodément dans le lieu où l'on doit arriver avant midi, on peut remettre à y satisfaire à ce devoir. On satisfait, disent-ils, certainement au précepte, en y entendant la messe, quoique la même fête n'y soit pas chômée; puisque l'on y fait l'action de piété qui est l'objet de la loi de l'Eglise, qui ordonne d'entendre la messe. Le lieu où on doit y assister n'est point fixé par celte loi; et la preuve qu'ils en donnent, c'est ce qui se pratique, dans les villes où il y a plusieurs paroisses, lorsqu'on célèbre la fête du patron d'une de ces paroisses: on ne dira pas que celui des paroissiens, qui entendroit la messe dans une autre paroisse que la sienne, ne satisfait pas au précepte.

Les préceptes, dont l'objet est de défendre quelque chose, pouvant toujours être observés, les voyageurs sont toujours obligés de les garder, en ne faisant rien de contraire aux lois qui ont fait ces défenses. Ne fissent-ils, par exemple, que passer dans un lieu un jour de fête, sans presque s'arrêter, ils ne peuvent faire aucune œuvre servile tandis qu'ils y sont, ni y manger de la viande un jour d'abstinence; et même, si c'est un jour de jeûne, ils ne peuvent y prendre de nourriture que comme il est permis de le faire en pareils jours, quoique d'ailleurs ils comptent arriver sur le soir dans un lieu où le jeûne n'est pas ordonné.

Ce que nous venons de dire des voyageurs doit à plus forte raison s'entendre des citoyens qui partent de leur pays un jour de jeûne et d'abstinence, et qui doivent arriver le même jour dans un lieu où le jeûne et l'abstinence ne sont point d'obligation. Ceux qui, se trouvant sur les confins d'un diocèse où la loi qui les oblige au jeûne dans le diocèse qu'ils habitent n'est point reçue, vont s'y promener dans le cours de la journée pour revenir le soir chez eux, sont encore plus étroitement obligés au jeûne que les voyageurs et les citoyens dont nous venons de parler. Une absence de quelques heures ne peut point être regardée comme une véritable absence qui puisse les affranchir de la loi de leur diocèse.

Il n'en faut pas conclure que, s'ils se trouvent de la même manière dans ce diocèse voisin, un jour de fête ou de jeûne qui

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ne s'observe point dans le lieu de leur demeure, ils puissent, sous ce prétexte, y travailler ou y manger de la viande. Ils doivent respecter la loi du lieu où ils sont, en ne faisant rien qui y

soit contraire.

Il s'ensuit, de tout ce que nous venons de dire, qu'on ne peut sans péché sortir du lieu de son domicile un jour de fête, ou d'abstinence et de jeûne, pour aller passer le jour dans un endroit voisin et qui n'est pas du même diocèse, afin d'y travailler et d'avoir un prétexte de ne point entendre la messe, et de n'être obligé ni à l'abstinence ni au jeûne.

Les vagabonds sont encore plus obligés que les voyageurs d'observer les lois des lieux où ils se trouvent, n'ayant point d'autre domicile que les endroits où ils se trouvent actuellement : dès qu'ils y sont, ils sont tenus aux lois qui y sont établies.

EN COMBIEN DE MANIERES LA LOI PERD-ELLE LA FORCE D'OBLIGER?

IL ne s'agit, dans cette question, que de la loi divine positive et de la loi humaine. Car la loi naturelle étant, ainsi que nous l'avons déjà remarqué, une participation de la loi éternelle, est aussi invariable qu'elle, et ne peut jamais cesser d'obliger.

Les différentes manières qui font perdre à la loi la force d'obliger se réduisent à cinq : l'interprétation, la cessation de la loi, la dispense, l'abrogation et la coutume. Chacune de ces manières a été traitée à fond par différents auteurs, auxquels on pourra avoir recours; nous ne mettrons ici que les principes nécessaires et suffisants pour ceux qui ne seront pas à portée d'aller puiser dans les grandes sources.

DE L'INTERPRÉTATION DE LA LOI.

TOUTES les lois étant faites pour le bien général de la société, il n'est pas possible qu'elles parent à tous les inconvénients qui peuvent en résulter dans les cas particuliers: c'est par l'interprétation qu'on juge si la loi oblige ou non dans ces cas. Il arrive aussi ordinairement que les termes de la loi présentent de l'obscurité par leur précision; précision néanmoins nécessaire:

c'est par l'interprétation qu'on fixe le sens de ces termes; et qu'on en fait une juste application dans les différentes circon

stances.

ou

On distingue trois sortes d'interprétations : l'authentique, l'usuelle et la doctrinale. L'interprétation authentique est celle que donne le législateur lui-même, ou son successeur, son supérieur, ou ses ministres; on l'appelle authentique, parce qu'elle a la même force, et émane de la même source que la loi dont elle est l'interprète. Il y auroit de la folie à disputer au législateur le droit d'expliquer le sens de sa loi ; la loi tirant toute sa force de la volonté du législateur, personne ne peut mieux connoître sa volonté que lui-même; cette interprétation se fait quelquefois par une simple explication, et quelquefois par un changement à la loi précédente. Au reste, l'interprétation authentique doit plutôt être regardée comme une nouvelle loi que comme une interprétation de la précédente.

L'interprétation usuelle n'est autre chose que l'usage commun d'exécuter la loi d'une telle façon plutôt que d'une autre; nous en traiterons en parlant de la coutume. L'interprétation doctrinale, de laquelle seule il s'agit ici, n'est autre chose que l'explication qu'en donnent les personnes éclairées; tels que les canonistes et les théologiens, par rapport aux lois divines et ecclésiastiques, et les jurisconsultes, par rapport aux lois humaines. Quoique cette interprétation n'ait pas force de loi, il y auroit néanmoins de la témérité d'expliquer une loi autrement. que tout ce qu'il y a d'habiles gens l'expliquent communément.

Il y a deux sortes d'interprétations doctrinales, l'une qu'on appelle impropre ou rigoureuse, et c'est celle qui est faite selon les règles du droit canonique ou du droit civil; et alors ce n'est qu'une pure explication de la loi dont les termes ne sont pas clairs et en rendent le sens ambigu, ou qui donnent lieu de douter si telles et telles circonstances sont comprises dans la loi. L'autre, qu'on appelle proprement dite ou bénigne, et que les théologiens appellent per epikeiam; et cette interprétation est une espèce de correction de la loi dans les cas où elle semble manquer. On l'appelle bénigne, parce qu'elle est favorable; puisqu'elle décide toujours en faveur des cas particuliers, en jugeant qu'ils ne sont pas compris dans la loi, quoiqu'elle soit, conçue en termes généraux.

Il est aisé de sentir la différence qui est entre ces deux manières d'interpréter la rigoureuse n'a d'autre objet que l'éclaircisse: ment des termes de la loi qui sont obscurs; la bénigne, au contraire, en supposant les termes assez clairs, corrige la loi qui manque dans les cas particuliers que le législateur n'a pas pu comprendre ou prévoir en portant sa loi; ou pour lesquels, s'il l'a pu, il ne l'a pas dû, afin d'éviter la prolixité et la confusion dans sa loi.

Toute loi cesse d'obliger dans les cas où, par l'interprétation bénigne, on a lieu de juger qu'ils ne soient pas compris dans la loi, quoique par ses termes généraux ils semblent y être compris. La raison en est sensible: une loi, toute universelle qu'elle est, ne peut obliger à des choses qui passent le pouvoir et la volonté du législateur; cependant il arrive souvent des cas où l'observation de la loi, prise dans sa généralité, iroit au-delà de la puissance et de la volonté du législateur. 1.o Elle iroit au-delà de son pouvoir, si l'on commettoit manifestement une injustice, ou si l'on empêchoit un plus grand bien en l'observant, comme aussi si l'observation en étoit impossible, ou du moins si pénible et si dure qu'elle approchât de l'impossibilité. 2.o Elle iroit audelà de sa volonté, si l'on exécutoit des choses qui certainement sont exceptées par la manière dont le législateur a coutume d'ordonner, ou si l'observation de la loi étoit opposée au sens qu'on a coutume de donner dans de pareilles circonstances. L'interprétation bénigne a donc lieu dans ces cas particuliers, et fait cesser l'obligation de la loi, ou, ce qui est le même, décide que dans ces cas la loi n'oblige pas.

dans

Nous avons dit que l'interprétation bénigne n'a lieu que les cas où l'observation de la loi passe manifestement la puissance et la volonté du législateur; car, si l'intention du législateur est connue, elle ne souffre plus d'explication; et s'il y a y a quelque doute, il n'est plus permis d'interpréter, il faut avoir recours au législateur lui-même pour être assuré de sa volonté; parce qu'il est le seul qui puisse lever le doute. Dans ces cas, si l'on ne veut pas, ou si l'on ne peut pas recourir au législateur, faut observer la loi à la lettre, parce que c'est une maxime de droit, que lorsqu'une loi est conçue en termes généraux, dans le doute, la présomption et la possession sont pour la loi. Si toutefois le recours au législateur étoit difficile, ou même impos

il

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