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et la science militaire contre le grand nombre, et l'on ne peut nier que le courage d'Alexandre n'y ait eu plus de part que la fortune. Sa victoire étoit dans une incertitude surprenante dans les différens endroits du combat; sans s'embarrasser des bagages, il se trouve par-tout, affronte impunément les plus grands dangers, frappe sans cesse et aucun coup ne sauroit l'atteindre, Au milieu du trouble et du carnage, il conserve sa présence er d'esprit. Ardent à la poursuite de son ennemi, il tien presque sa proie; il la quitte, et vole au secours des siens opprimés d'un autre côté, et remporte par là une victoire qui n'eût point été complette s'il eût eu le. malheur de perdre Parménion.

Cette bataille fut donnée le premier d'octobre, environ dix-huit mois après celle d'Issus. Comme Gaugamèle, en Assyrie, où elle s'étoit donnée, étoit un lieu trop petit et peu connu, on l'appella la bataille d'Arbelles, parce qu'Arbelles étoit la ville la plus proche du champ de bataille.

Il est difficile de marquer le nombre des morts de part et d'autre, les historiens anciens faisant la perte des Perses trop considérable, et celle des Macédoniens an-dessous de vraisemblance.

Après sa défaite, Darius avoit pris le chemin de la rivière de Lycus; l'ayant passée, plusieurs lui conseillèrent de rompre le pont pour arrêter l'ennemi; mais il répondit généreusement qu'il n'estimoit pas assez sa vie pour la vouloir conserver au prix de celle de tant de milliers de sujets et d'alliés fidèles, qui demeureroient à la merci des ennemis; qu'ils avoient le même droit que le prince à ce passage, qui devoit leur être ouvert comme à lui. Il arriva sur le minuit à Arbelles, où il trouva grand nombre d'officiers et de soldats qui s'y étoient aussi rendus. De-là il prit sa route vers la Mé

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die, à travers les montagnes d'Arménie, suivi de sa noblesse et d'un petit nombre de gardes, deux mille Grecs le joignirent aussi dans le chemin. Il prit cette route, parce qu'il crut qu'Alexandre prendroit celle de Babylone et de Suze, pour y jouir du fruit de sa victoire; d'ailleurs c'étoit un chemin où l'on ne pouvoit le suivre avec une grande armée, au lieu que l'autre étoit aisé pour les chevaux et les chariots, et dans un pays fertile. Ses idées se trouvèrent justes, Alexandre arriva à Arbelles, mais il ne trouva plus Darius ; il s'empara de tout son équipage, de son arc et de son bouclier, de 4000 talens (12,000,000) et de toutes les richesses que l'armée ennemie avoit laissées à Arbelles avant le combat. Satisfait de ce riche butin, il revint à son camp, où son premier soin fut de rendre graces aux dieux par des sacrifices magnifiques. Ensuite il récompensa ceux qui s'étoient le plus distingués dans le combat; il les combla de richesses, leur donna des maisons, des charges et des gouvernemens; mais se piquant sur-tout de générosité envers les Grecs qui l'avoient nommé généralissime contre les Perses, il or donna que toutes les tyrannies qui s'étoient élevées en Grèce, seroient abolies, les villes remises en liberté, et rétablies dans tous leurs droits et priviléges. Il écrivit en particulier aux Platéens, qu'il vouloit rebâtir leur ville, én considération du zèle que leurs ancêtres avoient témoigné pour la liberté commune. Il envoya jusqu'en Italie aux habitans de Crotone, une partie de dépouilles, pour honorer encore après tant d'années, la bonne volonté et le courage d'un de leurs concitoyens, qui, du tems des guerres des Médes, vint avec un vaisseau au secours des Grecs abandonnés de tout le monde, et partagea avec eux le péril et la gloire de la bataille de Salamine. Tant Alexandre aimoit à récompenser les

vertus héroïques, et à conserver la mémoire de toutes les grandes actions, pour en faire revivre le mérite et animer l'émulation de la postérité !

La multitude des corps morts dont toute la campagne étoit couverte, commençoit à infecter l'air et à menacer son armée de la peste. Il en sortit incessamment, et prit la foute de Babylone par la Mésopotamie; en quatre jours de marche il arriva à Mennis, où l'on voit dans une caverne une fontaine d'où coule le naphte en si grande quantité, que l'on croit que les murs de Babylone ont été bâtis de ce ciment. La citerne prend feu à la seule présence du flambeau allumé. Comme Alexandre arriva de nuit à la ville, les Mennesiens en bordèrent les rues par où il devoit passer, et lorsqu'il en approcha, ils présentèrent un flambeau à quelque distance de la naphte, qui s'alluma sur-lechamp, porta sa flamme jusqu'au logement du prince, et forma la plus brillante illumination qu'il eût encore vue.

Alexandre ne fit pas un long séjour à Mennis, l'empressement qu'il avoit de prendre possession de Babylone, le fit partir presqu'aussi-tôt pour s'y rendre. fl avoit déjà donné des ordres pour en former le siège; quand il fut près de la ville, Mazée qui en étoit gouverneur, et qui s'y étoit retiré après la bataille, alla audevant de lui avec sa famille le reconnoître pour son roi, et lui remettre les clefs de la ville. Il lui présenta ses enfans tous en état de servir. Cette démarche ne pouvoit être plus favorable pour Alexandre, qui se voyoit, sans coup férir, le maître d'une ville si bien pourvu d'habitans et de vivres, que le siège eût eu bien des difficultés. Outre que Mazée étoit un homme de condition et vaillant, qui s'étoit acquis beaucoup de gloire dans la dernière journée, son exemple pouvoit en entraîner d'autres à faire le même pas.

Les Babyloniens sortirent en foule au-devant de lui. 'Alexandre fit son entrée dans cette grande ville avec un éclat qui surpassoit tout ce que l'univers avoit jamais vu; il monta le char qu'occupoit Darius à la tête de son armée. Bagophane, gouverneur de la citadelle et gardien du trésor, pour ne pas témoigner moins de zèle que Mazée, fit joncher le chemin de fleurs, et dressa par-tout des autels où l'on brûloit des parfums. L'étonnement étoit égal de part et d'autre ; les Babyloniens ne pouvoient se lasser de voir des hommes devant qui tout l'univers trembloit, et les Macédoniens étoient surpris de voir tant de richesses et de magnificence. Alexandre logea dans le palais des anciens rois de Babylone.

Le lendemain, il se fit apporter l'argent des impôts qu'on avoit levés pour Darius; il fit donner pour récompense extraordinaire à chaque cavalier Macédonien, 300 livres, à chaque cavalier étranger 100; à chaque fantassin Macédonien autant, et à chacun des autres, deux mois de leur paie ordinaire. Il laissa le gouvernement de la ville à Mazée, et mir dans la citadelle 700 Macédoniens et 300 étrangers sous Agaton, à qui il laissa la liberté de les renfermer quand il voudroit. Il donna le gouvernement de la Babylonie à Menetes et à Apollodore. L'Arménie fut donnée à Mitrène et il ordonna à Bagophane de suivre son armée.

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Au milieu du tumulte des guerres, Alexandre conservoit toujours du goût et de la curiosité pour les sciences; il avoit emmené dans son expédition, les plus beaux esprits et les plus habiles de son tems; et néanmoins dans les villes où il s'arrêtoit, il recherchoit ceux qui y étoient en réputation. Après avoir visité les précieux monumens de Babylone, et admiré

la grandeur de cette ville, bâtie par la reine Sémiramis, il s'entretint avec les Chaldéens, adonnés de tout tems à l'étude de l'astronomie, et eut de fréquentes conférences avec eux. Il demeura trente-quatre jours à Babylone. Ce long séjour dans une ville de délices, causoit un tort considérable à la discipline militaire; le peuple, par principe de religion, se livroit aux plaisirs et aux voluptés les plus infâmes; les dames mêmes les plus qualifiées, loin de cacher leurs déréglemens, en faisoient gloire, et ne gardoient aucune

mesure.

Babylone conquise alloit enivrer ses vainqueurs de sa coupe empoisonnée, et les enchantoit déjà par les charmes de la volupté. Ce changement qu'elle produisoit en eux, donnoît lieu de craindre pour leur valeur, si elle eût eu alors un ennemi en tête. Alexandre s'apperçut bientôt du danger, et sortit au plutôt d'un lieu si pernicieux,

Amyntas lui avoit amené de nouvelles recrues; elles consistoient en 6000 hommes de pied et 500 chevaux Macédoniens, 3500 soldats et 600 chevaux Thraces, 4000 hommes du Peloponèse, et près de soo chevaux. Le même officier avoit encore amené au roi so jeunes gens, enfans des plus grands seigneurs. Ce furent eux qui furent occupés depuis à le servir à table, à lui donner ses chevaux dans les combats qui l'accompagnoient à la chasse, et qui faisoient garde tour-à-tour à la porte de sa chambre. C'étoient-là comme les premiers dégrés pour monter aux plus hautes charges

de la milice et de l'Etat.

Après qu'Alexandre eut quitté Babylone, il entra dans la province de Sitacène, pays fertile et abondant, où il s'arrêta quelque tems pour rétablir dans ses troupes la discipline er ranimer leur première vigueur. Il y fit

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