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HISTOIRE

D'ALEXANDRE LE GRAND.

LIVRE PREMIER.

LA monarchie des Perses a été établie par Cyrus sur les ruines de l'Assyrie. Presqu'aussitôt après son établissement, on pouvoit déjà voir les causes de son affoiblissement futur, et de sa dernière chûte.

Elle avoit été formée par la réunion de deux peuples bien différens d'inclinations et de mœurs; les Perses étoit sobres, laborieux, modestes; et les Medes ne respiroient que le faste, le luxe et la mollesse. L'exemple de la frugalité et de la simplicité de Cyrus ; avec la nécessité de vivre continuellement sous les armes pour faire tant de conquêtes, et pour se maintenir contre tant d'ennemis, suspendirent pendant quelque tems la contagion de ces vices; mais après que tout fut dompté et soumis, le penchant naturel des Medes pour la magnificence et les délices, affoiblirent. bientôt la tempérance des Perses, et devint en peu de tems le goût dominant des deux nations.

La vertu des Perses ne succomba point par des déclins imperceptibles, long-tems prévus et souvent combattus; à peine Cyrus fut-il disparu, que l'on vit paroître comme une autre nation, et des rois d'un caractère différent; on n'entendoit plus parler de cette éducation forte et sévère de la jeunesse Persanne, de ces écoles publiques de sobriété, de patience et d'ému

lation pour la vertų, de ces exercices laborieux et guerriers, il n'en resta point la moindre trace; Cyrus qui avoit été si bien élevé, ne prit pas assez de soin pour donner une éducation semblable à la sienne à Cambyse son fils, successeur d'un si vaste empire.

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Darius, fils d'Hystaspe qui d'une vie privée fut élevé sur le trône, apporta de meilleures dispositions à la souveraine puissance, et fit quelques efforts pour réparer les désordres; mais la corruption étoit déjà trop universelle, l'abondance avoit introduit trop de déréglemens dans les mœurs; Darius n'avoit pas luimême conservé assez de forces pour être capable de redresser tout-à-fait les autres ; tout dégénéra sous ses successeurs, et le luxe des Perses n'eut plus de mesure.

Mais encore que ces peuples devenus puissans eussent beaucoup, perdu de leur ancienne vertu, en s'abandonnant aux plaisirs, ils avoient toujours conservé quelque chose de grand et de noble.

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Que peut-on admirer davantage que l'horreur qu'ils avoient pour le mensonge, qui passa toujours parmi eux pour un vice honteux ! après le mensonge, qu'ils trouvoient de plus lâche étoit de vivre d'emprunt, une telle vie leur paroissoit honteuse, fainéante, servile et d'autant plus méprisable, qu'elle portoit à mentir l'ingratitude étoit regardée comme un vice indigne d'une belle ame; la générosité leur étoit naturelle; ils traitoient honnêtement les rois qu'ils avoient vaincus, et pour peu que les enfans de ces princes fussent capables de s'accommoder avec les vainqueurs, ils les laissoient commander dans leurs états avec toutes les marques de leur ancienne grandeur; les Perses étoient honnêtes, civils envers les étrangers; les gens de mérite étoient connus parmi eux et ils n'épargnoient rien pour se les attirer.

- Il est vrai qu'ils ne sont pas arrivés à la connoissance parfaite de cette sagesse qui apprend à bien gouverner; leur grand empire fut toujours régi avec quelque confusion; ils ne surent jamais trouver ce bel art d'unir toutes les parties d'un grand état, et d'en faire un tout parfait, aussi n'étoient-ils presque jamais sans quelques révoltes considérables; ils n'étoient cependant point sans politique.

Les règles de la justice étoient connues parmi eux ; ils ont eu de grands rois qui les faisoient observer avec une exactitude admirable; les crimes étoient sévèrement punis; ils avoient grand nombre de belles loix, venues presque toutes de Cyrus et de Darius Histaspe, ils avoient des maximes de gouvernement, des conseils réglés pour les maintenir, et une grande subordination dans tous les emplois. Les ministres devoient être instruits des anciennes maximes de la monarchie; le registre que l'on tenoit des choses passées servoit de règle à la postérité; on y marquoit les services que chacun avoit rendus, de peur qu'à la honte du prince et au grand malheur de l'Etat, ils ne demeurassent sans récompense.

Un des premiers soins du prince étoit de faire fleurir l'agriculture, et les satrapes ou gouverneurs dont le pays étoit le mieux cultivé, avoient la plus grande part aux graces; comme il y avoit des charges établies pour la conduite des armes, il y en avoit aussi pour veiller aux travaux domestiques; c'étoient deux charges semblables dont l'une prenoit soin de garder l'Etat, l'autre de le cultiver et de le nourrir,

Après ceux qui avoient remporté des avantages à la guerre, les plus honorés étoient ceux qui avoient élevé beaucoup d'enfans; le respect que l'on inspiroit aux Perses dès leur enfance pour l'autorité royale, alloit

jusqu'à l'excès, puisqu'ils y mêloient de l'adoration; et ils paroissoient plutôt des esclaves que des sujets soumis par raison à un empire légitime; c'étoit l'esprit des orientaux, et peut-être que le naturel vif et violent de ces peuples, demandoit ce gouvernement ferme et absolu.

La manière dont on élevoit les enfans des rois est admirée par Platon, et proposée aux Grecs comme le modèle d'une éducation parfaite; dès l'âge de sept ans on les tiroit des mains des eunuques pour les faire mon→ ter à cheval, et les exercer aux fatigues de la chasse; ǎ l'âge de quatorze ans, lorsque l'esprit commence à se former, on mettoit auprès d'eux quatre hommes des plus vertueux et des plus sages de l'Etat; le premier leur apprenoit le culte des dieux; le second les accoutumoit à dire la vérité et à rendre la justice; lé troisième leur apprenoit à ne se pas laisser vaincre par la volupté, afin d'être toujours libres et vraiment rois, maîtres d'eux-mêmes et de leurs desirs; le quatrième fortifioit leur courage contre la crainte qui en eût fait des esclaves, et leur eût ôté, la confiance si nécessaire dans le commandement. Les jeunes seigneurs étoient élevés avec les enfans du roi; on prenoit un soin particulier qu'ils ne vissent ni n'entendissent rien de malhonnête; on rendoit compte au roi de leur conduite, qui ordonnoit en conséquence les punitions ou les récompenses. La jeunesse qui les voyoit apprenoit de bonne-heure, avec la vertu, la science d'obéir et de commander. Avec une si belle institution que ne devoiton point espérer des rois de Perse et de leur noblesse, si l'on eût eu autant de soin de les bien conduire dans les progrès de leur âge qu'on en avoit de les bien instruire dans leur enfance? Mais les mœurs corrompues de la nation, les entraînoient bientôt dans les plaisirs,

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