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Au déclin de tes ans, brigua l'honneur sublime
De léguer sur le marbre à la postérité

Les traits d'un écrivain cher à l'humanité?
O généreux concours des amis de l'étude!
Non, ce n'est pas ainsi que l'humble servitude,
Offrant comme un tribut son hommage imposteur,
Consacre à la puissance un marbre adulateur!
Tairons-nous ce beau jour où Paris, dans l'ivresse,
D'un triomphe paisible honorait ta vieillesse?
Qu'on étale avec pompe aux yeux des conquérans
Des gardes, des vaincus, des étendards sanglans,
Le glaive humide encor et fumant de carnage,
Et le profane encens vendu par l'esclavage!
Ta garde était un peuple accouru sur tes pas;
Il bénissait ton nom, te portait dans ses bras;
Des pleurs de sa tendresse il ranimait ta vie;
A vanter un grand homme il condamnait l'envie;
Admirait les éclairs qui brillaient dans tes yeux;
Contemplait de ton front les sillons radieux,
Creusés par soixante ans de travaux et de gloire,
Et qui d'un siècle entier semblaient tracer l'histoire.

Ces temps là ne sont plus; les nôtres sont moins beaux:
Les Français sont tombés sous des Velches nouveaux.
Malheur aux partisans d'un âge téméraire
Trop long-tems égaré sur les pas de Voltaire!
Nous conservons le droit de penser en secret;
Mais la sottise prêche; et la raison se tait.

Aux accens prolongés de l'airain monotone,
S'éveillant en sursaut, le pesante Sorbonne
Redemande ses bancs, à l'ennui consacrés,
Et les argumens faux de ses docteurs fourrés.
Ainsi qu'un écolier honteux devant son maître,
La Harpe aux sombres bords t'aura conté peut-être
Des préjugés bannis le burlesque retour,

Et comment il advint que lui-même un beau jour
De convertir le monde eut la sainte manie;
Tu lui pardonneras : il a fait Mélanie.

Mais qu'a fait ce pédant qui broche au nom du ciel
Son feuilleton, noirci d'imposture et de fiel?
Qu'ont fait ces nains lettrés qui, sans littérature,
Au-dessous du néant soutiennent le Mercure?
Oh! si, dans le fracas des sottises du tems,
Tu pouvais reparaître au milieu des vivans,
Les mains de traits vengeurs et de lauriers armées,
Comme on verrait bientôt ce peuple de Pygmées
Dans son bourbier natal replongé tout entier,
Avec Martin Fréron, Nonote et Sabatier!

Tu livras les méchans au fouet de la Satire.
Et qu'importe en effet qu'un rimeur en délire
Publie incognito quelque innocent écrit?
Qu'Armande et Philaminte, en leurs bureaux d'esprit,
Vantent nos Trissotins, parés de fleurs postiches?
A quoi bon faire encor la guerre aux hémistiches?
Il faut la déclarer au vil adulateur

Qui répand dans les cours son venin délateur;
Au Zoïle impudent que blesse un vrai mérite;
A l'esclave oppresseur, à l'infâme hypocrite;
Sans cesse il faut armer contre leur souvenir
Un inflexible vers, que lira l'avenir.

Voilà donc le parti qui veut par des outrages
A la publique estime arracher tes ouvrages!
Qui prétend sans appel condamner à l'oubli
Un siècle où la raison vit son règne établi!
Vain espoir! tout s'éteint les conquérans périssent;
Sur le front des héros les lauriers se flétrissent;
Des antiques cités les débris sont épars;
Sur des remparts détruits s'élèvent des remparts;
L'un par l'autre abattus, les empires s'écroulent;
Les peuples entraînés, tels que des flots qui roulent,
Disparaissent du monde; et les peuples nouveaux
Iront presser les rangs dans l'ombre des tombeaux;
Mais la pensée humaine est l'âme toute entière:
La mort ne détruit pas ce qui n'est point matière;
Le pouvoir absolu s'efforcerait en vain

D'anéantir l'écrit né d'un souffle divin:
Du front de Jupiter c'est Minerve élancée.
Survivant au pouvoir, l'immortelle pensée,
Reine de tous les lieux et de tous les instans,
Traverse l'avenir sur les ailes du tems.
Brisant des potentats la couronne éphémère,
Trois mille ans ont passé sur la cendre d'Homère;

Et, depuis trois mille ans, Homère respecté
Est jeune encor de gloire et d'immortalité;
Nos Verrès, que du peuple enrichit l'indigence,
Entendent Cicéron provoquer leur sentence;
Tacite, en traits de flamme, accuse nos Séjans;
Et son nom prononcé fait pâlir les tyrans;
Le tien des imposteurs restera l'épouvante.
Tu servis la raison; la raison triomphante
D'une ligue envieuse étouffera les cris,
Et dans les cœurs bien nés gravera tes écrits.
Lus, admirés sans cesse, et toujours plus célèbres,
Du sombre Fanatisme écartant les ténèbres,
Ils luiront d'âge en âge à la postérité;

Comme on voit ces fanaux dont l'heureuse clarté,
Dominant sur les mers durant les nuits d'orage,
Aux yeux des voyageurs fait briller le rivage,
Et, signalant de loin les bancs et les rochers,
Dirige au sein du port les habiles nochers.

ÉPITRE

A EUGÉNIE.

BELLE et séduisante Eugénie,
L'essaim des Amours suit tes pas;
Des Jeux la troupe réunie
Sourit à tes jeunes appas;
Mais décrier ce qu'on envie,
Ménager ce qu'on ne craint pas :
Telle est l'histoire de la vie.
Les sots craignent les gens d'esprit ;
Les laides redoutent les belles;
Des bégueules sempiternelles
Contre toi le courroux s'aigrit.
Aimer est le soin de ton âge;
Haïr est leur triste partage;
Tu nous plais; c'est les outrager;

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