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maison terrestre de Tobie, à la maison céleste du Père éternel? ne vous figurez-vous pas le festin perpétuel qui s'y célébrera lorsque l'Eglise militante, figurée par Sara, y sera entrée, et avec elle toutes ses richesses? ne croyez-vous pas entendre les cris de joie, de louanges et d'actions de grâces dont le temple du Seigneur ne cessera de retentir? Et vous, enfants! en voyant ici le jeune Tobie soulager son père, et lui rendre la vue par reconnaissance; en voyant comment son sentiment s'est communiqué de proche en proche, n'y ouvrirez-vous pas votre cœur ? serat-il longtemps sans se manifester au dehors par tous les bons offices dont vos parents auront besoin et que vous pourrez leur procurer, soit dans l'ordre de la nature, soit dans l'ordre de la grâce, en leur obtenant l'usage des yeux de l'âme, lorsque vous ne pourrez leur rendre la vue corporelle?

Et ceux qui ont été vos pères selon l'esprit, et ceux qui vous ont instruits, et ceux qui vous ont donné l'éducation, et ceux qui vous ont conduits et aidés de leurs conseils, les oublierez-vous? Laisserez-vous sans récompense les bons offices que vous en aurez reçus? Ingrats! vous dirais-je en ce cas, ingrats que vous êtes envers vos guides et vos instituteurs! au moins confondez-vous, si vous n'avez pas le courage d'imiter ceux qui vous sont ici donnés pour modèles. Ce que les deux Tobie craignent quand il s'agit de reconnaître les services de Raphaël, ce n'est pas de donner trop, c'est ne n'avoir pas de quoi donner assez: Que pensez-vous donner à ce saint homme, dit le père à son fils: mon père! répond le fils (et sa réponse vous apprendra à repasser en détail, les unes après les autres, les grâces que vous avez reçues d'un Dieu créateur, d'un Dieu rédempteur, d'un Dieu sanctificateur, et pour en être plus touchés et plus reconnaissants), mon père! répond le jeune Tobie, quelle récompense pouvons-nous lui donner qui ait quelque proportion avec les biens dont il nous a comblés? il m'a mené et ramené dans une parfaite santé; il a été lui-même recevoir l'argent de Gabelus; il m'a fait avoir la femme que j'ai épousée; il a éloigné d'elle le démon; il a rempli de joie son père et sa mère; il m'a délivré du poisson qui allait me dévorer; il vous a fait voir à vous-même la lumière du ciel, et c'est par lui que nous nous trouvons pourvus de toutes sortes de biens. Que pouvons-nous donc lui donner qui égale tout ce qu'il a fait pour nous? mais, je vous prie, mon père! de le supplier de vouloir bien accepter la moitié de tous les biens que nous avons apportés.

Vous communiquer cette réponse de Tobie à son père, n'est-ce, pas mes frères, vous peindre admirablement la vertu de la reconnaissance envers des conducteurs et des maîtres? Le jeune Tobie ne croit pas offrir trop, en offrant à son bienfaiteur la moitié de toutes les richesses qu'il a apportées, il ne la lui offre même qu'en tremblant, persuadé que tout ce qu'il peut donner, n'est rien en conparaison de ce qu'il a reçu; il craint que ce partage ne soit injurieux à celui à qui il re

connaît devoir tout; il prie son père d'en faire l'offre en suppliant, afin que la manière respectueuse dont elle sera faite, puisse dédommager le bienfaiteur, de ce que Tobie croit de trop modique dans l'offrande. Vit-on jamais un modèle plus parfait de reconnaissance? Je pressens assez ce que répondrait ici un père à son fils, qui porterait sa générosité où le jeune Tobie porta la sienne; il lui répondrait qu'il doit être plus réservé dans ses dons, qu'il doit mieux ménager sa fortune, qu'il faut être reconnaissant, mais non prodigue, qu'un mercenaire à gages doit se contenter de beaucoup moins. Est-ce donc là ce que Tobie répond à son fils? Aussi humbles, aussi généreux l'un que l'autre, ils passent du projet à l'exécution, ils prennent l'ange à part, ils le conjurent de vouloir bien recevoir la moitié de tout ce qu'ils avaient apporté. Ne sont-ce pas là des sentiments de reconnaissance vraiment grands, vraiment instructifs, vraiment admirables ? mais on se contente de les admirer; on s'inquiète neu de

les imiter.

Nouvel objet d'instruction pour nous, et d'admiration, c'est la réponse de l'ange aux deux Tobie, réponse qui fait un des plus précieux morceaux de l'histoire sainte, réponse que je crois devoir vous cominuniquer dans sa totalité, de peur que vous ne m'accusiez de retenir dans l'injustice les vérités les plus intéressantes sur les points suivante: sur la louange publique du Seigneur, sur le mérite des bonnes œuvres, sur les effets funestes des mauvaises, sur la nécessité des épreuves, sur le ministère des saints. anges, sur la reconnaissance envers Dieu, troisième et principal objet de cette vertu relativement à mon plan; quelle est done cette réponse? La voici, mes frères, retenezla bien jusqu'à ma mort, et après qu'elle sera arrivée, après que j'aurai cessé d'être votre ange conducteur, s'il vous arrive d'oublier mes paroles, recourez à celle de l'ange invisible, dont le dessein a été d'instruire toutes les nations sur ces articles que je viens de nommer.

Sur le premier il nous dit: Bénissez le Dieu du ciel, et rendez-lui gloire devant tous les hommes, parce qu'il a fait éclater sur vous sa miséricorde, car il est bon de tenir caché le secret du roi, de peur qu'en découvrant ses desseins, on n'en risque le succès. Mais il ya de l'honneur à publier les œuvres de Dieu; c'est montrer qu'on a l'avantage de les connaître, et qu'on est fidèle à lui en rendre gloire. C'est ce qu'il nous dit sur la louange publique du Seigneur. Et le fruit de cette instruction, quel doit-il être? Une répétition fréquente de cet acte: Soyez béni, ó mon Dieu! partout et à jamais: que toutes vos œuvres vous bénissent et vous glorifient.

Sur le second, sur le mérite des bonnes œuvres, il dit: La prière accompagnée du jeûne et de l'aumône, vaut mieux que tous les trésors et tout l'or qu'on peut amasser. Par la prière vous faites à Dieu le sacrifice de votre cœur, par le jeune celui de votre corps, par l'aumône celui de vos biens; en réunissant

ces trois bonnes œuvres, vous vous assurez un trésor plus précieux que celui où serait tout l'or du monde; en vous abaissant devant Dieu par la prière, vous devenez grands; en vous mortifiant par le jeûne, vous devenez impassibles, immortels; en vous dépouillant pour Dieu, par l'aumône, vous devenez riches; car voici quels sont les deux effets principaux de l'aumône. Un premier est, qu'elle délivre et de la mort du péché qu'elle efface, et de la mort éternelle à laquelle le péché conduit, non en ce sens que l'aumône seule remette le péché, mais en ce sens qu'elle obtient et soutient la pénitence dont elle fait même partie. Un second qui surpasse de beaucoup le premier, est qu'elle fait trouver la miséricorde et la vie éternelle.

C'est, riches des biens du monde! ce qu'un ange vous dit des effets de l'aumône; après l'avoir entendu sur ces avantages, quelle sera votre réflexion? pourrez-vous vous défendre d'acquiescer à celle-ci? On compte pour peu de chose ce qu'il en coûte pour se délivrer d'un grand mal, ou se procurer un grand bien. Quel mal plus grand que le péché, qui rend Dieu même notre ennemi? quel mal plus grand que l'enfer, où les maux sont infinis et sans ressource? quel bien plus grand que la vie, que la vie éternelle, que la possession du souverain bien dans cette vie éternelle? Ah! que ne devonsnous donc pas faire pour nous délivrer de la mort du péché, et pour nous procurer la jouissance de la vie éternelle? avec quelle joie et quelle générosité ne devons-nous pas exercer l'aumône dont l'ange nous dit tant de merveilles, en parlant de ses effets?

En s'expliquant sur un troisième point, sur les suites funestes des œuvres de ténébres, il dit: Ceux qui commettent le péché et l'iniquité sont ennemis, doublement ennemis de leurs ames; ennemis, à raison des biens dont ils se privent; ennemis, à raison des maux où ils se précipitent; ennemis d'eux-mêmes, à raison des biens dont ils se privent, et qui sont l'innocence, la paix du cœur, la protection du Seigneur, le droit à sa possession. Y a-t-i! perte comparable à celle de ces biens? ennemis d'eux-mêmes, à raison des maux où ils se précipitent, et qui sont la malédiction de Dieu qu'ils attirent, sa haine qu'ils méritent, son enfer où il leur fera sentir pour jamais tout le poids de sa colère. Y-a-t-il malheur qui approche de ces maux?

Oh! qu'ils sont donc ennemis d'eux-mêmes, ceux qui commettent le péché ! ils le sont au point qu'ils n'en ont et ne peuvent en avoir de plus grands: pas même les démons qui peuvent bien les tenter, mais non les faire succomber; s'ils l'étaient d'eux-mêmes, quant à leurs corps criminels qu'il faut pu

(721) Je ne voudrais pas conclure de là, que Raphaël est un archange du même ordre que Michel et Gabriel; les objets de la mission de ceux-ci sont d'une tout autre importance, ces trois nois de bons anges sont les seuls que nous ayons dans l'Ecriture.

(722) L'ange mangeait donc et ne mangeait pas; il mangeait en ce sens qu'il avalait; il ne mangeait

nir, quant à leurs passions qu il faut dompter, quant au vieil homme qu'il faut détruire, en cela ils ne seraient que louables, ils ne feraient que ce qui leur est commandé; mais ils sont ennemis d'eux-mêmes, de leur âme qui est la partie essentielle d'eux-mêmes, de leur âme dont la perte est telle que celle du monde entier ne nous en donnerait pas une idée, de leur âme qui étant perdue, ne peut se racheter par aucun prix, fût-ce celui de l'univers entier. Peuvent-ils donc être plus ennemis d'eux-mêmes, plus cruels envers eux-mêmes? Non? ces questions ne seront plus un problème pour qui aura entendu cette réponse de l'ange: Ceux qui commettent le péché sont ennemis de leur ame: « hostes sunt animæ suæ. »

Instruisant Tobie, le père, sur un quatrième point, sur les desseins de Dieu qui semblait lui avoir rendu le mal pour le bien, en permettant qu'il devint aveugle dans le moment où il venait d'ensevelir les morts, il dit: Je vais vous découvrir la vérité; parce que vous étiez agréable à Dieu, il a été nécessaire que la tentation vous éprouvát. C'est ce que l'ange vous découvre sur la nécessité des épreuves, sur un point si pen connu et si rarement avoué, et le fruit de cette instruction, que! doit-il être de votre part? une répétition fréquente de cet acte! O Dieu! puisque l'épreuve est nécessaire à ceux qui vous sont agréables, ne m'en dispensez pas, mais plutôt faites-moi passer par son fleuve; afin que j'en sorte sain et sauf, tenez-moi par la main, ne me quittez pas que je ne sois arrivé à son bord, hors de tout danger; du moins envoyez-moi votre ange qui écarte de moi tous les périls, et qui soit mon interprète et mon intercesseur près de vous, dans tous mes besoins.

Si vous doutiez, mes frères, que ces objets intéressants fussent ceux du ministère de nos anges gardiens, celui de Tobie vous l'apprendrait en cet endroit où il lui dit: Lorsque vous priiez Dieu avec larmes, et que vous ensevelissiez les morts, que vous quitliez pour cela votre dîner, et que vous cachiez les morts dans votre maison pendant le jour pour les ensevelir pendant la nuit, j'ai présenté vos prières au Seigneur ; maintenant donc, il m'a envoyé pour vous guérir et pour délivrer du démon, Sara, la femme de votre fils, car je suis l'ange Raphaël, l'un des sept qui sommes toujours présents devant le Seigneur (721); lorsque j'étais avec vous, j'y étais par la volonté de Dieu, il vous a paru que je buvais et que je mangeais avec vous, mais pour moi je me nourris d'une viande invisible et d'un breuvage qui ne peut être vu des hommes (722). Il est temps que je retourne vers Celui qui m'a envoyé : « Tempus est ut

pas en ce sens qu'il ne digérait pas; il ne changeait pas en sa substance celle qu'il paraissait prendre. Son corps était-il un vrai corps? On peut faire la même question sur ceux de tous les anges qui ont paru, et il semble qu'on doit préférer l'affirmative. Abraham en lavant les pieds des trois anges, ne lavait-il pas de vrais pieds?

revertar ad eum qui me misit. » Arrêtonsnous, mes frères à ces paroles de l'ange, pour observer quelles impressions elles firent sur les deux Tobie, et quelles impressions elles doivent faire aussi sur nous.

Les deux Tobie en furent troublés; étant saisis de frayeur ils tombèrent le visage contre terre. D'où leur vient ce trouble et cette frayeur? de la secrète comparaison qu'ils firent en eux-mêmes de leurs défauts, de la sainteté d'un ange, de son élévation et de l'abaissement où il s'était réduit pour eux. Ainsi en usa saint Pierre après eux, quand tout effrayé à la vue d'un miracle de Jésus-Christ, il lui dit : Retirez-vous de moi, Seigneur ! parce que je suis un pécheur. (Luc. v, 8.) Et nous, mes frères, quel sentiment concevrons-nous à ces mêmes paroles? pour en distinguer un parmi plusieurs autres, ne serait-ce pas celui de la confiance? Comment nous en défendrions-nous quand nous apprenons que nous avons tous un ange gardien comme Tobie; que cet ange prie avec nous, qu'il monte vers Dieu pour lui offrir nos bonnes œuvres; qu'il revient à nous comblé de biens reçus pour nous; qu'il est chargé de nous préserver de toute blessure, et même de nous guérir de celle que nous nous sommes faites; et quand nous réfléchissons que cet ange s'acquitte de sa commission avec tout le soin et tout le zèle possible? Zélé pour notre salut, voyez combien il l'est aussi pour la gloire de Dieu : pour une fois qu'il nous dit: Que la paix soit avec vous, ne craignez point: trois fois il nous répète: Bénissez Dieu, racontez ces merveilles (723), témoignez-lui votre reconnaissance pour celles qui sont communes au reste des hommes, et pour celles qui vous sont propres : «Benedicite Deum, et narrate omnia mirabilia ejus.» Devons-nous en être surpris? mes frères! A quoi un ange du ciel peut-il plus convenablement exhorter celui qui lui est donné en garde sur la terre, sinon à louer et à remercier son bienfaiteur perpétuel? Je vous le demande encore, quelie autre impression plus vive que celle de la gratitude, un fidèle peutil recevoir de la croyance qu'il y a un ange qui le conduit et le gouverne?

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Aussi lisons-nous que Raphaël ayant disparu, les deux Tobie s'étant prosternés le visage contre terre pendant trois heures, ils bénirent Dieu; qui nous dira comment? Pendant tout ce temps et dans cette posture, que d'actions de grâces! que de bénédictions! que de sacrifices d'un cœur pieux et reconnaissant! que ces trois heures furent bien employées! que Dieu était

(723) Le grec porte: écrivez dans un livre. C'est de là qu'on conclut que les deux Tobie sont auteurs de ce livre, excepté les derniers versets du dernier chapitre qui sont du rédacteur également inspiré.

(724) Ce verset 12 (cap. x), ou plutôt depuis le verset 11, jusqu'au verset 23, ce sont des proinesses magnifiques faites à Jérusalem, lesquelles ont trois objets principaux et trois accomplissements qui se succèdent. Elles ont reçu un premier accomplissement très-imparfait dans le rétablisse

attentif à écouter les prières qui lui furent présentées pendant ce long intervalle.

Grâces à Dieu, mes frères ! il n'en est pas de la prière que Tobie le père fit après s'être levé, comme de celle qu'il fit prosterné en terre; nous ne sommes pas réduits à n'en faire qu'un éloge vague et général, mais nous en avons une copie exacte, et dans cette copie que lisons-nous? que le saint vieillard, plein de reconnaissance, eût voulu communiquer son sentiment à la race présente, aux races futures, à tout l'univers, dans tous les temps. La belle formule d'actions de grâces! qui, en la lisant ne serait enchanté de ces paroles: Vous êtes grand, Seigneur, votre règne s'étend dans tous les siècles; vous l'exercez dans le temps et dans l'éternité par votre miséricorde et votre justice. en sauvant et en châtiant...Enfants d'Israël, rendez grâces au Seigneur, et louez-le devant les nations, parce qu'il vous a ainsi dispersés parmi les peuples...afin que vous leur appreniez qu'il n'y a point d'autre Dieu que lui... bénis le Seigneur: Jérusalem, rends grâces lem, rends grâces au Seigneur pour le bien qu'il t'a fait : vous tous qui êtes les élus ! réjouissez-vous en lui tous les jours, et rendez-lui des actions de grâce (724).. Benedicite Dominum, omnes electi ejus, agite dies lætitiæ

Pour me borner à cette partie de l'action de grâces de Tobie, ne vous en paraît-elle pas une formule excellente? ne l'adoptezvous pas pour votre usage? ne désirez-vous pas produire souvent des actes semblables? Mais au nom de qui parlé-je ici? est-ce au vôtre? est-il bien vrai que vous désiriez de pouvoir imiter les deux Tobie dans leur acte de remerciment? ne désirez-vous pas, an contraire, de finir vos actions de grâces presqu'au moment où vous les commencez ? au lieu de prendre l'humble posture de nos deux Israélites, ne dirait-on pas, à vous voir, que vous prenez celle de la mollesse même et de la nonchalance? Quelle distance immense de vous aux deux modèles que je vous ai proposés ! Vous l'avoir montrée, mes frères, vous l'avoir reprochée, vous avoir inspiré la volonté de rapprocher des objets si éloignés, c'est bien avoir fait quelque chose: mais ce n'est avoir fait ni le tout ni même le principal: vous obtenir la persévérance en cette volonté, et le parfait accomplissement de cette volonté naissante à ce moment, voilà l'essentiel, et voilà, mes frères, ce que je vais demander pour vous à l'autel, par le sang de notre victime eucharistique: souvenez-vous de joindre votre attention à la inienne, et de la renouveler au moment où je vous crierai à voix haute : Sursum corda:

ment de Jérusalem, au temps de Cyrus. Elles ont reçu un second accomplissement plús étendu, dans l'établissement de l'Eglise; elles n'auront leur parfait accomplissement que dans la gloire éternelle de la Jérusalem céleste, c'est-à-dire l'Eglise triomphante, telle que saint Jean la décrit dans l'Apocalypse chapitre XXI, se servant d'expressions semblables à celle-ci de Tobie: Les portes de Jérusalem seront alors bâties de saphir. L'on chantera le long des rues: alleluia, etc.

élevez vos cœurs élevez-les vers Dieu par vos désirs; tenez-les élevés vers le ciel où il

habite, jusqu'à ce que vous y habitiez vousmêmes en réalité. Amen.

LIVRE DE JUDITH (725)

INSTRUCTION PREMIÈRE.

DÉFENSE DES JUSTES COMBATTUS PAR LES MÉCHANTS.

(Judith. 1-v11.)

Tunc cor ejus (Nabuchodonosor) elevatum est. Alors le cœur de Nabuchodonosor s'éleva. (Judith 1, 7.)

Alors, tunc, c'est-à-dire, à la suite des victoires qu'il avait constamment remportées sur Arphaxad (726), roi des Mèdes ; à la suite de la conquête de cette vaste monarchie, et de la réduction d'Ecbatane sa capitale (727); à la suite de la mort d'Arphaxad et de la réunion de son empire avec celui des Assyriens, Nabuchodonosor (728) s'éleva, il s'enorgueillit, il s'enfla; voilà quel fut le pernicieux effet de ses succès; ce fut la vanité. Et cette passion à son tour, que produisit-elle? il envoya des ambassadeurs à tous ceux qui habitaient dans la Ciicie, à Damas, sur le mont Liban, et depuis là jusqu'aux confins de l'Egypte, pour les inviter à se soumettre à sa puissance. Il ne s'en tint pas à une simple invitation; tous ces peuples d'un commun accord ayant refusé ce qu'il demandait, et ayant traité ses ambassadeurs avec mépris, il entra dans une grande colère; il jura par son trône et par son royaume, qu'il se vengerait du refus et du mépris de ces nations, el passant des meFaces aux moyens de les exécuter, il assembla son conseil, ses généraux et ses officiers

(725) Ce livre est-il canonique? renferme-t-il we fiction, ou une histoire? en quel temps seraitil possible d'en placer les faits? quand a-t-il été écrit ?

A la première question je réponds que le concile de Trente l'a placé au rang des livres canoniques, comme avant ce concile, l'avait fait le troisième concile de Carthage, Innocent III, le Pape Gélase, saint Augustin, saint Fulgence, tous les Pères latins de siècles en siècles, jusqu'au concile de Trente.

A la seconde question, je réponds que ce livre reuferme, non une fiction, mais une histoire véritable; les circonstances des lieux, des temps et des personnages y sont cités comme dans l'histoire de Josèphe et toutes les autres. C'est le sentiment de saint Clément Pape, de Clément d'Alexandrie, de Tertullien, d'Origène, de saint Augustin, de tous les Catholiques qui prouvent la vérité de cette histoire, par la fête que les Juifs en ont autrefois célébrée.

A la troisième question, je réponds avec le plus grand nombre des modernes, que la vraie place de cette histoire est plus probablement le temps où Manassès était revenu de Babylone, Phraortès régnant en Médie et Saosduchin en Ninive. Je lèverai, autant qu'il est possible, les difficultés que souffre cette opinion à mesure qu'elles s'offriront. A la quatrième question, je réponds qu'il paraît OEUVRES COMPL. DE THIÉBAUT. IV.

de guerre; il leur déclara que sa 'pensée était d'assujettir toute la terre; il chargea Holopherne, général de ses troupes, de réa¡ liser sa pensée, comme si elle eût été celle d'une divinité toute-puissante, comme s'il eût été le Dieu des armées. Quelle orgueilleuse présomption!

Cependant, lâcheté des courtisans, et de la plupart de ceux qui environnent les grands cependant le dessein de Nabuchodonosor est approuvé, et bientôt son général couvre la campagne de ses troupes, comme des nuées de sauterelles, et avec la rapidité moins d'un conquérant, chargé de faire la guerre, que d'un plénipotentiaire, chargé de recevoir les hommages d'anciens sujets, il soumet tous les peuples qui sont entre Ninive et Damas; il n'est même plus nécessaire, lorsqu'il est arrivé près de cette capitale, qu'il tire l'épée. Alors les rois et les princes de toutes les villes lui envoient leurs ambassadeurs pour accepter, en leurs noms, les chaînes qu'il leur apporte, et ensuite ils vont au-devant de lui avec tous les peuples, ils le reçoivent avec des couronnes et des lampes, en dansant au son des tambours et des flûtes, comme pour se réjouir de ses victoires. Mais, dit l'Ecriture, quoiqu'ils fissent, il ne purent adoucir la fierté de son cœur : Non tamen ista facientes, ferocitatem ejus pectoris mitigare potuerunt. Pourquoi cette remarque de l'Ecriture? pour élever notre esprit au sens spirituel.de l'histoire que nous

avoir été écrit pendant ou après la captivité de Babylone. Ce qui le fait conjecturer, c'est 1° qu'il a été écrit en chaldéen et non en hébreu, puisque c'est du chaldéen et non de l'hébreu, que saint Jérôme l'a traduit ; ce sont 2o ces façons de parler de l'écrivain, que la famille d'Achior était encore unie à la nation juive, au temps où cette histoire s'écrivait, que jusque-là on célébrait la fête de ce grand événement. Cela étant, on ne doit plus être surpris que l'auteur ait appelé Saosduchin Nabuchodonosor, puisqu'au temps où il écrivait, ce nom était devenu le surnom des rois de Babylone, comme Pharaon le surnom des rois d'Egypte.

(726) Cet Arphazad de l'histoire sainte est le Déjocès, ou, comme on le croit encore plus communément le Phraortès de l'histoire profane.

(727) Déjocès la commença, Phraortès la perfectionna, et c'est en ce sens qu'on peut dire qu'il l'a bâtie. Comme il est contre les règles d'architecture, que des mars aient plus de largeur que de hauteur, quelques-uns croient que(verset 2 chapitre premier), il faudrait lire soixante-dix coudées de haut et trente de large, plutôt que soixante-dix de large et trente.de haut.

(728) Petit-fils de Sennachérib, à ce qu'on croil, connu dans l'histoire profane, sous le nom de Saosduchin.

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entreprenons d'expliquer, pour nous marquer que, quoi qu'on fasse pour les ennemis du salut et de la paix, jamais ils ne sont contents; pour nous convaincre que le parti le plus sage est de leur opposer une résistance généreuse et constante. Convainquonsnous-en donc, et dans ce dessein, voyons à ce moment la défense des justes combattus par les méchants. C'est le sujet de cet entretien.

Selon ce principe si connu et si souvent répété par les saints Pères, que les personnes illustres, et les événements mémorables du premier Testament, figuraient pour le second, je vous dirai d'abord, mes frères, que Nabuchodonosor, qu'Holopherne son général, que les troupes que celui-ci commandait, que les peuples qui venaient en foule lui offrir leur hommage et leur liberté, étaient autant de figures propres à nous instruire dans l'art de cette guerre spirituelle et terrible, que nous avons à soutenir de la part du démon et du monde, deux ennemis formidables de notre salut. Nabuchodonosor, roi d'Assyrie, assis sur son trône, communiquant à son conseil le dessein qu'il a de se soumettre, comme Dieu, toute la terre, et applaudi des lâches conseillers à qui il a révélé le secret de son ambition criminelle, nous représente le prince de ténèbres assis sur son trône de feu, environné des anges rebelles, complices de son crime et compagnons de son malheur, les envoyant du fond de l'enfer sur la terre, pour l'y faire adorer comme le seul vrai Dieu, par toutes les nations.

Holopherne, général des troupes du roi de Ninive, nous représente tous les ministres de la fureur et de l'orgueil du démon, appliqués à accroître son empire. Les rois, les princes, les hommes innombrables qui succombent après avoir combattu, ou qui se soumettent sans combattre, les Phrygiens, les Lydiens, les Tharsiens, les Ciliciens, les peuples depuis Ninive jusqu'en Palestine, nous représentent le grand nombre des réprouvés, comme au contraire, les seuls Juifs résistant à Holopherne, nous représentent le petit, le très-petit nombre des prédestinés, car qu'était la nation juive, comparée à celles qui habitaient la Mésopotamie, la Cificie et les autres provinces intermédiaires, entre l'Assyrie et la Terre-Sainte?

Jusque dans les moyens que Holopherne emploie pour subjuguer toute la terre, je remarque ceux que le monde et son prince emploient pour se soumettre le genre humain, ceux-ci comme celui-là commencent d'abord par la voie de la séduction, par les caresses et les invitations, ensuite, et ce premier moyen ne leur réussissant pas, ils prennent la voie de la persécution, des menaces, des mauvais traitements et des mé

(729) La Vulgate porte, de l'orient, mais c'est une faute que corrige le grec.

(730) Cette partie renferme sept chapitres. L'histoire de Judith écrite pour les veuves, ne commence qu'au huitième.

pris. Dites-moi, demandait Holopherne aux princes de Moab, et aux chefs des Amnionites, d'un ton railleur et méprisant pour le peuple de Dieu, dites-moi qui est ce peuple présomptueux qui occupe les montagnes, et qui prétend résister à ma puissance? pourquoi il est le seul de ceux de l'Occident (729). qui ne soit pas venu au-devant de nous, récevoir notre joug? C'est encore ce que demandent les ministres de l'orgueil du démon, en parlant de ceux qui leur résistent; ils paraissent étonnés de trouver quelqu'un qui ne plie pas au gré de leurs désirs, qui ose se déclarer pour les lois contre leurs prétentions, qui se distingue par sa fermeté, tandis que tous abandonnent lâchement le parti de la vérité, pour suivre celui d'une erreur accréditée et appuyée de l'autorité; ils demandent quel est ce téméraire, ce rebelle, cet opiniâtre pour se mesurer avec un homme incomparablement supérieur en naissance, en crédit, en puissance. O vous qui êtes dans cette triste épreuve que je vous plains! que ne puis-je vous être de quelque secours contre les ennemis qui vous éprouvent! n'y réussirais-je pas en vous entrenant de la défense des justes combattus par les méchants, en vous montrant ce qu'ils font en ce combat, et ce que Dieu fait pour eux? Ce sont les deux points sur lesquels je me propose de vous instruire par le Livre de Judith. et par les faits rapportés dans sa partie préliminaire (730).

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Que font donc les Israélites apprenant que l'ennemi est prêt de pénétrer dans leur pays? Saisis d'un trouble extrême à l'approche d'Holopherne, et craignant pour Jérusalem et pour le temple du Seigneur leur Dieu, ils recourent à lui par la pratique de la pénitence, mais sans négliger aucun des moyens dont la prudence humaine exige l'usage en pareil cas. D'abord tous.tant hommes que femmes et enfants, se prosternent, la face tournée vers le temple; ils jettent de la cendre sur leurs têtes; ils se revêtent de cilices qu'ils conservent lors même qu'ils offrent des sacritices (731), ils en couvrent jusqu'à l'autel du Seigneur, puis ils crient tous d'un même cœur et d'un même esprit vers le Seigneur, disant: Dieu d'Israël, ne permettez pas que nos enfants soient donnés en proie, que nos femmes soient enlevées, que nos villes soient détruites, que nous devenions l'opprobre des nations, et que votre sanctuaire soit profané: « Clamaverunt ad Dominum Deum Israel unanimiter, ne darentur in prædam infantes eorum. » Pourquoi, mes frères, ceci est-il écrit, sinon pour notre instruction?

Voici donc la première chose que nous devons faire au moment que nous apprenons que l'ennemi de notre salut approche; nous devons réfléchir qu'il s'agit dans les

(731) Le rituel des Juifs leur défendait alors l'u sage des cilices pris pour des habits de deu, mais non l'usage des cilices, cachés sous les habits ordinaires. D'ailleurs ce rituel était censé excepter les cas de calamités.

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