صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

lecture de Sédécias, et je ne vous en ferais pas ressouvenir, s'il n'était pour moi de la plus grande importance que cet ouvrage soit lu avant la clôture.

Je vous prie, Monsieur, de communiquer ma lettre à MM. les Comédiens et de leur rappeler la promesse qu'ils m'ont faite vendredi dernier de ne point laisser passer cette semaine sans entendre la lecture de mon ouvrage.

J'ose croire que MM. les Comédiens pardonneront cette impatience d'un jeune homme qui s'efforce de mériter toute leur indulgence et qui craindrait d'en abuser, si des personnes d'un goût sévère ne lui avaient donné une idée avantageuse de sa tragédie, dont le sujet leur a paru réunir à des situations touchantes une des plus terribles catastrophes qui soient au théâtre.

J'ai l'honneur d'être, Monsieur, avec tout le respect et toute la considération que je vous dois, votre très humble et très obéissant serviteur,

RONSIN.

[Ronsin revint à la charge pour une autre tragédie : il ne fut pas plus heureux. ]

[blocks in formation]

[ Ronsin ne pouvant arriver à se faire jouer, prit le parti de publier les pièces qu'il avait composées. En 1786, il fit paraître Théâtre de M. Ronsin, imprimé au profit de sa belle-mère; Paris, Cailleau, 1786, in-12.

Ce volume contient : Sédécias, tragédie en trois actes, tirée de l'Écriture sainte ;

Isabelle de Valois, tragédie en cinq actes et en vers; Hécube et Polixène, tragédie en cinq actes et en vers; Le Fils cru ingrat, comédie en un acte et en vers.]

A MM. LES COMÉDIENS FRANÇAIS.

Ce 14 janvier 1788.

Messieurs,

Si vous avez eu de fortes raisons pour ne pas m'accorder la somme que je vous ai priés de m'avancer sur la représentation de ma tragédie de Jeanne d'Arc, j'espère que vous n'en aurez pas aujourd'hui pour rejeter la demande que j'ose vous faire. Vous n'avez peut-être pas oublié l'intérêt que vous avez daigné prendre aux souffrances de ma belle-mère à qui la ma ladie la plus cruelle ne laissait d'autre appui que moi. La mort a terminé ses douleurs ; mais par, une fatalité qui ne semble être réservée qu'à mon sort, le mal qui a consumé les jours de cette infortunée vient d'attaquer sa malheureuse fille, mon épouse. Je n'entrerai dans aucun détail sur tout ce qu'une pareille situation a de désespérant; je me contenterai de vous dire, Messieurs, que, privé de tous les moyens d'arrêter les ravages d'un mal si terrible, j'ai cru devoir prendre la résolution de faire faire une lecture publique d'un de mes ouvrages dramatiques. Parmi les différentes pièces que j'ai dans

mon portefeuille, j'ai choisi Jeanne d'Arc, persuadé que le public, prévenu en faveur d'une tragédie déjà honorée de vos suffrages, saisirait avec beaucoup plus d'empressement cette occasion d'être utile aux arts et à l'humanité. J'ose me flatter, Messieurs, que vous ne me saurez pas mauvais gré de l'usage que je me propose de faire d'une pièce qui est sur votre répertoire; et si cet usage est contraire à vos réglemens, j'espère que, mesurant vos bontés à des infortunes qui n'ont peut-être pas d'exemple, vous vous déterminerez à franchir les bornes que des raisons particulières vous ont souvent forcés de prescrire à votre sensibilité naturelle. Je vous supplie aussi, Messieurs, de croire que je n'aurais jamais osé recourir à des moyens si extraordinaires, si j'avais eu quelque espérance de voir Jeanne d'Arc prendre sur votre répertoire la place d'Isabelle de Valois, que vous avez bien voulu inscrire au nombre des pièces reçues le 9 octobre 1783; j'avais pourtant fait tous mes efforts pour mériter cette faveur, puisque, me conformant à l'opinion de plusieurs d'entre vous, Messieurs, j'ai réduit ma pièce en trois actes et n'ai rien négligé pour la rendre plus intéressante et plus

théâtrale.

J'ai l'honneur d'être, avec un profond respect, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur,

RONSIN.

[ll paraît que Ronsin ne tenait compte des froideurs que le comité de réception lui faisait éprouver, et qu'il allait sollicitant, auprès des autres auteurs, des cessions de tour pour sa Jeanne d'Arc. Voici une lettre de Chénier en réponse à cette demande :]

A M. RONSIN.

Paris, 6 juillet 1788.

J'ai toujours pensé, Monsieur, que, dans un homme de lettres, le caractère devait surpasser les talens. D'après ces principes, qui seront les miens tant que je vivrai, vous devez prévoir ma réponse à la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, et que j'ai reçue hier au soir en rentrant chez moi. Je désirerais, il est vrai, faire représenter promptement un de mes ouvrages; mais ce désir, quelque vif qu'il soit, cède à des considérations plus fortes. Votre situation, que vous avez bien voulu m'exposer dans votre lettre, et le plaisir de vous obliger m'ont déterminé à l'instant. Vous pouvez donc, Monsieur, user pour votre tragédie du tour d'Henriette d'Aquitaine, à condition que celle-ci prendra le tour de Marguerite d'Anjou (1) comme vous voulez bien me l'offrir. Il me reste à vous remercier de m'avoir fourni cette occasion de vous rendre un léger service, et je finis; vous me le permettrez, non par la formule gothique du très humble serviteur, mais par vous souhaiter sincèrement tout le succès que vous pouvez désirer vous-même et que vous me semblez mériter.

M.-J. DE CHÉNIER.

(1) Pièce d'un autre auteur qui avait consenti à cet arrangement, fatigué, comme il l'apprend à la Comédie dans une lettre non signée, des obsessions et des visites de M. Ronsin. (Note communiquée par M. Régnier.)

A MM. LES COMÉDIENS FRANÇAIS.

Paris, ce 15 mai 1789.

Messieurs,

Si le comité avait eu la moindre part à l'engagement que j'ai fait avec mademoiselle Raucourt, relativement à ma tragédie de Jeanne d'Arc, si j'avais eu la faiblesse de consentir à des délibérations, dont le résultat aurait été de me faire renoncer à mon droit de représentation, je garderais le silence. Mais, vous ne l'ignorez pas, Messieurs, je n'ai traité qu'avec mademoiselle Raucourt. Des craintes qu'on lui a suggérées tout à coup, et dont je pourrai par la suite expliquer la cause, l'ont empéchée de se charger du rôle de Jeanne d'Arc, et elle a tout employé pour m'engager à retirer ma pièce dont on n'avait fait qu'une répétition, les rôles à la main, et dont les principaux acteurs m'avaient témoigné leur satisfaction sur chacun de leurs rôles. Je n'ai pas cru devoir consentir à ce que mademoiselle Raucourt exigeait de moi; et mademoiselle Raucourt, qui savait mieux que personne tout ce que ma situation avait de pénible, eut la bonté de m'offrir six cents livres, persuadée qu'une pareille offre, faite à un homme qui était dans la gêne, ne serait point rejetée. Je persistai pourtant dans le refus de retirer ma pièce, et bien convaincu qu'un travail de quelques mois suffirait pour perfectionner le rôle de mademoiselle Raucourt, encouragé d'ailleurs par les conseils de plusieurs acteurs qui étaient d'avis que ma tragédie conservât son droit de représentation, je m'engageai avec mademoiselle Raucourt à ne solliciter ce droit qu'après avoir fait à

« السابقةمتابعة »