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Les jours suivans, nouvelles demandes du public, nouvelle réponse des Comédiens.

« Messieurs, nous attendons la réponse de MM. les auteurs inscrits sur le tableau des pièces reçues au Théâtre Français avant la tragédie de Louis XII. Le respect dû aux propriétés rend leur consentement indispensable. Dès que nous l'aurons, l'on mettra, Messieurs, cet ouvrage à l'étude, et dans le cas contraire on vous instruira des oppositions qui n'existeraient jamais si ce que vous désirez était absolument en notre pouvoir. »

Jusqu'à ce que la réponse des auteurs fut connue, la Comédie Française reçut une énorme quantité de lettres de citoyens, gardes nationaux, etc., qui s'étonnent que les auteurs ne donnent pas plus vite leur consentement à la représentation d'un ouvrage que le vœu du public exige. Quel homme de lettres, écrit un des impatiens, pourrait ne pas applaudir à une exception faite en faveur d'une tragédie qui a pour titre Louis XII, PÈRE DU PEUPLE, c'est-a-dire le seul roi qui ait mérité d'être comparé à LOUIS XVI? Quelques uns proposent des moyens pacifiques aux Comédiens; quelques autres disent que, quand le peuple veut une chose, les auteurs doivent se taire et obéir et ne point écouter la voix d'un cupide intérêt! Enfin les réponses des gens de lettres arrivent.

« Messieurs, j'ai deux ouvrages inscrits sur le tableau depuis quatre ou cinq ans, et vous me demandez si je consens que la tragédie de Louis XII que vous venez de recevoir soit jouée avant les miennes; je ne sais pas si j'aurai le pouvoir de l'empêcher, mais je crois en avoir le droit.

« J'apprends par votre lettre que, samedi dernier on a semblé exiger de vous la représentation prochaine de Louis XII. Est-ce bien là le vœu du public? Vous me permettrez d'en douter. S'il suffisait, aussitôt qu'un ouvrage est reçu,

voir l'art de placer dans le parterre quelques particuliers pour demander au nom du public cet ouvrage que le public ne peut pas connaître, les auteurs ne sauraient sur quoi compter, et l'on pourrait éloigner de la carrière dramatique tous ceux qui quelquefois ont d'autant plus de talent qu'ils ont de modestie et qu'ils ne s'abaissent jamais à des manœuvres peu délicates. Je crois qu'attenter au tour d'un auteur, c'est en quelque façon attenter à sa propriété.

« Instruisez avec respect le public de la règle que vous avez toujours suivie. Le parterre de la Comédie Française est éclairé; il sentira qu'elle est nécessaire et que c'est le seul moyen de mettre quelque frein à l'intrigue. Il vous ordonnera de suivre cette règle, et, même dans une bagatelle, le premier cri des hommes rassemblés est toujours en faveur des lois et de la justice. J'ai l'honneur, etc.

MAISONNEUVE.>>

« 30 décembre 1789.

« Messieurs, je suis tout aussi bon citoyen que qui que ce soit, et la mémoire de Louis XII ne m'est pas moins chère qu'à tous les Français. Mais je vous prie d'observer que la tragédie d'Isemberge est tirée également de l'his toire de France, et que le principal personnage, PhilippeAuguste, n'est pas de nos rois le moins digne de vivre dans la mémoire des Français. Si le suffrage unanime dont vous avez accueilli la réception de cet ouvrage doit faire présager l'intérêt qu'il peut inspirer au public, vous devez être aussi empressés que moi à en accélérer la représentation. Cependant voilà près de quatre ans que cette tragédie est reçue. J'ai encore au moins dix ou douze tragédies, sans compter les comédies, à passer avant moi. Il me paraît de plus que vous vous disposez à représenter toutes les pièces anciennement reçues et que la police avait arrêtées; puisque vous en avez le droit, je n'ai rien à dire et j'attendrai en silence. Mais si à ces longs retards forcés, vous ajoutez la résolution où vous êtes, dit-on, de donner succes.

sivement l'Honnête criminel, que vous avez déjà annoncé, le Comte de Comminges, Mélanie, etc., pièces qui ne peu vent avoir été reçues que depuis peu, alors, Messieurs, je vous représenterai que vous avez des réglemens qui doivent faire la règle de votre conduite. C'est sur la foi de ces réglemens que j'ai composé mon ouvrage et que je vous l'ai confié, et autant qu'il sera en moi, je ne souffrirai jamais qu'on y porte atteinte.

«Vous me dites que le public demande la pièce de Louis XII. Mais, Messieurs, vous n'êtes pas, je l'espère, plus que moi dupes de ces sortes de manéges. Autrefois, pour éluder les réglemens on obtenait des ordres par le moyen desquels, au mépris de tous les droits, les dernières pièces reçues étaient jouées les premières. Aujourd'hui on fait demander la pièce par le public, et ce public se borne à quelques jeunes gens apostés exprès. On m'objectera sans doute les circonstances; mais ne suis-je pas tout aussi intéressé qu'un autre à en profiter?

« Enfin la pièce de Louis XII, représentée dans trois ou quatre ans ne perdra rien de son mérite, et tant qu'il y aura des Français, la mémoire toujours chérie de ce bon prince fera ressouvenir dans tous les temps qu'il n'est plus le seul de nos rois qui ait mérité le beau nom de Père du Peuple et peut assurer les suffrages à l'auteur de cette nouveauté. Je ne vois donc aucune raison plausible d'intervertir aujourd'hui l'ordre en sa faveur.

« Cependant, Messieurs, comme vous me faites l'honneur de me demander mon vœu pour régler votre conduite, je suis sensible, comme je le dois, à cette attention de votre part, et c'est pour y répondre que je vous laisse les maîtres de faire à cet égard tout ce qui vous paraîtra le plus convenable; siles auteurs des pièces reçues avant la mienne consentent à la représentation de Louis XII, je n'y formerai aucune opposition. J'ai l'honneur, etc.

« BLIN DE SAINMORE. »

30 décembre 1789.

« Messieurs, il ne m'appartient pas sans doute de m'opposer au vœu du public; mais ce public est juste, et si vous daigniez lui représenter, avec le respect qui lui est dû, que la tragédie de Marseille rendue, dont je réclame le tour, est un panégyrique continuel de Henri IV, dont le nom est aussi cher à la France que celui de Louis XII; que, reçue depuis bien des années, elle était affichée, au moment d'être jouée, lorsque des ordres, long-temps appelés supérieurs et dont on sait aujourd'hui le vrai nom, l'ont arrêtée; qu'enfin l'auteur n'a pas fait un pas dans la carrière dramatique sans éprouver les mêmes contretemps de la part d'une autorité dont les abus ont amené la plus heureuse des révolutions, parce que l'injustice à la fin produit l'indépendance, j'ose croire qu'il ne voudrait pas exercer lui-même cette autorité sur moi.

« Souffrez donc que je vous prie, Messieurs, de vouloir bien lui lire ma lettre, en l'assurant que je m'abandonne tout entier à son équité.

« J'ai l'honneur, etc.

LE BLANC. »

3 janvier 1790.

« Je ne prends pas, Messieurs, pour l'opinion publique la voix de quelques orateurs sans mission qui apportent au parterre de votre théâtre l'éloquence patriotique du PalaisRoyal. Dans ce temps d'anarchie, la licence des motions est égale à celle de la presse. Si vous étiez forcés de vous soumettre à ce tribunal éphémère, quelques zélés citoyens vous proposeraient pour le bien de la patrie de représenter les pièces de Nicolet, et d'établir une confraternité entre le Théâtre de la Nation et celui des Boulevards. Cette idée lumineuse pourrait éclore quelque jour comme un fruit de la liberté. Je crois cependant que la nation, qui vient de détruire les priviléges oppresseurs, se fera un devoir de respecter les droits. Ceux des auteurs dramatiques sont écrits sur

votre répertoire. Voilà le code qu'on doit consulter, et qui devrait être affiché dans vos foyers. Je m'oppose donc formellement à la représentation de Louis XII. Cet ouvrage est vraisemblablement un chef-d'oeuvre; mais il aura la complaisance d'attendre sa gloire avec patience, et de permettre que ses devanciers, qui ont moins de talens, jouissent avant lui des encouragemens du public.

་ J'ai l'honneur, etc.

« DE LA FAUCHERIE.»

Cette lettre ne paraîtra pas sans courage, quand nous aurons dit que les Comédiens Français s'étaient engagés à faire connaître au public les oppositions des auteurs. Maisonneuve dont nous avons précédemment donné la première lettre, envoya ensuite son adhésion; d'autres désertèrent de même la partie.

Pendant que quelques auteurs tenaient bon contre la cabale de Ronsin, il gagnait du terrain auprès des autorités.

A M. DAZINCOURT.

Monsieur,

2 janvier 1790.

Je m'empresse de vous faire savoir que M. Bailly désire vous parler au sujet de ma tragédie de Louis XII. L'intérêt que vous avez daigné prendre à cet ouvrage me donne lieu d'espérer que vous voudrez bien engager M. le maire à lever les obstacles que quelques auteurs pourraient opposer à sa représentation.

J'ai l'honneur d'être, avec toute la considération et toute la reconnaissance que je vous dois, votre très humble et très obéissant serviteur.

RONSIN.

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