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de cette taxe; les uns comme ayant perdu plutôt qué gagné, les autres pour avoir déjà souffert des réductions par la liquidation et ayant déjà été jugés, d'autres pour avoir gagné par des voies licites. La désolation est partout, et on a ajouté dans le rôle la contrainte comme pour les propres deniers et affaires de Sa Majesté, qui n'est pas dans l'arrêt. Le sieur Fénelon, ancien directeur de la banque, a été taxé à 1,400,000 livres, et demande par un placet très touchant que le Roi lui donne une place à l'hôpital pour y pouvoir finir ses jours. On dit que le Régent, en signant ce rôle, dit : « Je suis fâché de signer cela, car il n'y a << que les p...... qui en profiteront. »>

21. Arrêt célèbre qui règle la manière en laquelle il sera procédé au recolement et au brûlement de tous les registres et papiers qui ont servi pour les diverses opérations du visa. Il y aura vingt-sept commissaires du conseil qui travailleront à ce recolement et feront tout brûler, les registres, les journaux, les états fournis par les notaires, les extraits, les dépouillemens de ces états, les tomes des dictionnaires, les grands livres, les listes, les registres et feuilles des décisions tant de la commission générale que des conseillers d'État, et toutes les déclarations des particuliers avec les bordereaux, mémoires et états. Ce brûlement, car on s'est servi de ce mot, se fera après une vérification exacte, article par article, sur tous les livres et journaux de la déclaration de chaque particulier et sur sa liquidation. Après, on fera huit paquets qui seront brûlés l'un après l'autre, et ainsi après le jugement universel du royaume, viendra la conflagration générale. Le bon de tout ce travail c'est que, s'il y a des erreurs contre le public, elles ne seront point réformées, et

que tout aboutira à brûler, à peu près comme les champignons qu'il faut bien choisir, laver, peler, fricasser, puis jeter par les fenêtres. Polyphême, dans sa caverne, disait à Ulysse: «Vous me paraissez bon «< homme, je vous mangerai le dernier; » de même il y aura de l'ordre dans le brûlement, mais tout sera toujours brûlé, et les commissaires pourront s'appeler contrôleurs des papiers brûlés. Pour cette belle opération, on a fait construire une grande cage de fer, afin que les curieux ne tirent point des papiers du feu et que l'air même ne puisse en détourner aucun.On ne veut pas qu'il reste rien de tout cet ouvrage, et l'on a bien raisou de détruire par le feu un travail si injurieux et si ruineux à la nation, afin qu'il n'en reste point de mémoire. On brûle même jusqu'aux décisions du conseil; mais ces décisions sont imprimées et entre les mains de bien des gens qui les feront passer à la postérité. Il est permis, par l'arrêt, à chaque particulier de retirer sa déclaration dans quinzaine, sinon elles entreront dans le brûlement général.

17. On a mis dans la Gazette de Hollande du 22 septembre la harangue de l'évêque de Soissons au cardinal Dubois, premier ministre, au nom de l'Académie Française. Il lui dit en parlant de l'Académie : << Formée sous les auspices d'un cardinal premier mi«< nistre, elle en voit avec plaisir reparaître l'image, et << elle se flatte de voir bientôt dans la même dignité les « mêmes prodiges. Elle se flatte de trouver en vous un <«< second Richelieu, et dans les actions et dans les bien<«< faits, etc. » Enfin cette harangue est pleine de Richelieu; mais le ministre n'est pas la dupe de ces flatteries: il sent bien qu'il n'a plus rien à faire pour humilier les grands qui s'humilient assez d'eux-mêmes, et

B.

VIII.

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qu'il n'a point de digue à construire à La Rochelle

J'ai su que le poète Arouet, prenant congé du cardinal Dubois (pour aller à Bruxelles où il est allé voir Rousseau et tenir avec lui une conférence pacifique sur les coups de bâton des poètes), dit au ministre : « Je vous prie, Monseigneur, de vous souvenir « que les Voiture étaient autrefois protégés par les « Richelieu;» se mettant ainsi hardiment au niveau de Voiture dont il est bien loin. Le cardinal lui répondit: << Il est plus facile de trouver des Voiture que des Ri« chelieu. >>

--On a appris que le cardinal a eu un demêlé avec l'abbé Bignon qui, pour la survivance de garde de la Bibliothèque, n'a pas été à lui, mais au Régent. Il pourrait bien y entrer aussi quelque chose des estampes détournées dont j'ai parlé. Enfin l'abbé a eu ordre de ne point aller à la cour, et comme il est conseiller d'État, cet ordre est d'une grande conséquence.

-La marquise de Charost, qui n'était pas bien avec le ministre, ayant obtenu une pension, il lui a dit: « Voilà comment je me venge; »-et elle lui a répondu: << Il ne vous manquait plus qu'un cœur dans le royaume, << et vous venez de le gagner.

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- Le Roi et toute la cour ont été occupés pendant les dix derniers jours de septembre à l'attaque d'un fort construit entre Montreuil et Versailles. Le régiment du Roi, dont M. de Pezé, favori du Roi, est colonel, a fait l'attaque et la défense. On y a pratiqué tout ce qui se fait dans un véritable siége: tranchées, bombes, canons, attaques et prises des pièces différentes, le chemin couvert, les convois surpris, les mines, les secours, et enfin la capitulation. Le sieur Desclavelles, officier du régiment du Roi, qui a rendu le fort, et qui

y a

a dit au Roi qu'il voulait servir dans ses troupes, a été fait grand cordon rouge. Ce jeu militaire, fait pour instruire le Roi, a fini le 30 septembre. Tout Paris été quelques gens du conseil ont eu leurs cheveux brûlés des hombes de carton. Dans la grande foule il y a eu quelques blessés. On en fera des relations dans le Mercure et ailleurs; mon Journal ne se charge point de ce détail. Je ne sais si on y dira qu'un espion ayant été pris, on lui fit son procès, et qu'aucun soldat du régiment du Roi n'ayant voulu pendre l'homme de paille habillé de leur habit, on prit un artisan de Paris qui fut forcé d'être bourreau et à qui on donna un louis d'or pour sa peine et l'habit du pendu, de quoi l'artisan n'était point content du tout. J'ai ouï dire à un grand prince qu'on eût pu se passer de cet espion, ou que le Roi lui devait faire grâce, parce qu'il ne convenait pas de faire un bourgeois de Paris bourreau malgré lui. Cela est plus fort que jeu.

-Le grand-maître de Malte a fait une belle réponse au commandant de la flotte ottomane, qui lui demandait les esclaves turcs: il a dit que cette proposition lui était tout-à-fait agréable, que le dessein en était pieux, louable et plein de charité, et qu'elle excitait en lui le même désir pour les esclaves chrétiens, et il lui a proposé le rachat et l'échange usité entre les princes de sa communion, parce que l'institut de Malte n'est pas de faire des esclaves, mais quand ils prennent des pirates par la voie militaire, ils deviennent prisonniers, et c'est une grande charité de les rendre de part et d'autre, comme étant la voie la plus usitée et la plus commode. Sur cette réponse le Turc s'est retiré. Elle a été écrite le 2 août 1722 et est dans le supplément de la Gazette du 22 sep

tembre. Elle est polie, fine et ne peut être trop admirée. Il serait beau que les Turcs l'acceptassent; mais ils reviendront l'année qui vient et seront toujours Turcs avec Malte qui les battra.

-Le marquis de Courtanveaux a été blessé à Versailles de quatre coups d'épée, on ne sait par qui; c'est quelque duel.

On parle aussi d'un autre duel entre M. le due de Coigny et M. de Mortemart, qui s'est fait à Rambouillet, chez M. le comte de Toulouse. M. de Coigny affectait toujours de passer devant le duc, jusque là qu'il monta dans une calèche où étaient les dames, et où le duc devait avoir place. Le lendemain, à la chasse, ils se sont battus avec des couteaux de chasse et ont été légèrement blessés. M. le procureur-général a commencé d'en informer.

-Je viens d'apprendre que le marquis de Courtanveaux s'est battu avec un M. de La Baume, capitaine de cavalerie réformé. Celui-ci était au souper du Roi devant madame de Maillebois; elle se plaignit qu'elle ne voyait rien; M. de Courtanveaux, arrivant, poussa rudement le capitaine et lui dit que c'était șa place. Le capitaine lui dit : « Je crois, Monsieur, que vous n'avez << pas plus ici de place que moi, et si vous en avez quel

qu'une, c'est dans la salle des Suisses. » Après souper, le capitaine, qui avait été poussé, suivit M. de Courtanveaux, le fit sortir de sa chaise, lui fit mettre l'épée à la main et lui donna les quatre coups d'épée dont on dit qu'il ne mourra point. Cela est arrivé le 29 septembre. Il fait toujours bon ne point pousser ou frapper.

-M. Dacier, de l'Académie Française, est mort le 18. Il a beaucoup travaillé, était grand grec, plein de litté

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