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«Que ces sociétés, spontanées dans le principe, avaient fini par prendre une existence politique; que dans cette position, elles faisaient courir des dangers à la chose publique, et naître des contraventions à la loi; qu'il était essentiel d'écarter du corps législatif toute influence étrangère; que, dès que les sociétés populaires sortaient de leur situation privée, elles s'élevaient contre la constitution au lieu de la défendre, et qu'alors le nom sociétaire d'amis de la constitution devenait un mot de ralliement, un cri d'agitation, qui ne servait qu'à troubler l'exercice de l'autorité légitime; que la révoluion avait pu permettre ce que la constitution devait proscrire; que ces sociétés ne pouvaient avoir d'affiliations à une espèce de métropole ou société-mère, sans que cette correspondance opérât de fâcheux effets; qu'il en résultait des haines et des moyens de persécution; que des débats, des arrêtés, des publicités de séances de ces sociétés, des ordres, des usurpations de pouvoir étaient autant d'actes contraires à la constitution; qu'aucun caractère public, aucune démarche, ne devaient les signaler; qu'enfin leur existence politique, leurs affiliations, leurs journaux, leurs pétitions en nom collectif, leur influence illégale, étaient propres à alarmer tous les citoyens paisibles, et à éloigner tous ceux qui voulaient vivre tranquillement sous la protection des lois; qu'ainsi, sous l'aspect de la morale et des mœurs, comme sous celui de la constitution, il ne fallait ni affiliations de sociétés, ni journaux de leurs débats. »

Sur ce rapport, l'Assemblée rendit un décret par lequel, considérant que nulles sociétés ni associations de citoyens ne peuvent avoir, sous aucune forme, d'existence politique, ni exercer aucune action sur les actes

des pouvoirs constitués et des autorités légales, ni paraître en nom collectif pour former des pétitions, ou députations, ou assister à des cérémonies publiques, elle prononça des peines relatives en cas de contravention à son décret, et chargea les procureursgénéraux-syndics des départemens et les commissaires du roi, de faire les dénonciations et poursuites nécessaires contre les contrevenans.

Malheureusement, ce décret sage, mais tardif, n'a servi que de palliatif momentané; la destruction absolue était le seul remède à tous les maux, et l'expérience ne le démontre que trop aujourd'hui; en effet, lors de ce décret, les députés à la législature étaient déjà nommés; tous avaient été pris parmi les coryphées des sociétés populaires, et tous les citoyens qui, par leur mérite ou leurs talens personnels, auraient pu avoir droit aux élections, s'en étaient vus écartés par la faction des soi-disant amis de la constitution; de là tous les évènemens désastreux qui ont caractérisé l'é poque suivante de mon règne. Enfin, le dernier jour de la session, a été créée la garde militaire qui devait être de service auprès de ma personne, et choisie dans les quatre-vingt-trois départemens.

QUATRIÈME ÉPOQUE.

Me voici enfin arrivé à l'époque la plus malheureuse de mon règne, époque sous laquelle on va voir le plan combiné, suivi, exécuté de la destruction du monarque, du trône et de la constitution.

L'Assemblée nouvelle, bien endoctrinée, bien in

struite, bien imbue de tous les principes jacobites, ouvrit sa session le 1er octobre, et le lendemain prêtą le serment, qu'elle a si cruellement violé, de maintenir la constitution, tandis qu'elle n'arrivait qu'avec le projet de la détruire; le 4, le même serment fut individuellement répété avec l'addition d'être fidèle à la nation, à la loi et au Roi, tandis que le plan était de ne l'être pas plus à l'un qu'à l'autre, et de tout renverser du même coup; et en effet, dès le 5, fut rendu le décret le plus injurieux à la nation et au Roi, lequel fut rapporté le lendemain sur le sentiment de l'indignation publique.

A cette séance, l'un des membres s'était permis de dire : « J'ai été révolté de voir le président de l'assemblée Nationale s'incliner devant le Roi, comme si le premier représentant d'un grand peuple ne pouvait être l'égal d'un premier fonctionnaire. » Mais cet opinant, plus endoctriné que bien instruit, feignait, sans doute, d'ignorer que le Roi, d'après la constitution et le vœu des cahiers, était le seul représentant de la nation; que, partout où il se montre avec les caractères de la royauté, c'est la nation qui paraît; que le président d'une assemblée nationale n'est, au contraire, que le chef temporaire des mandataires de la nation, et qu'il existait toujours une différence réelle et nécessaire entre la nation et ses mandataires.

L'on concevra facilement que, d'après un début de cette espèce, je devais m'attendre à des désagrémens ultérieurs bien plus amers; et c'est ce qu'en effet je n'ai cessé d'éprouver. Bientôt on commença par tâcher de désorganiser le ministère, en dégoûtant les ministres, afin de parvenir à me faire adopter tous ceux dont la

faction, plus dominante que jamais, voudrait m'entourer par la suite.

Bientôt après, l'Assemblée s'occupa des émigrés et des prêtres insermentés; quant aux premiers, il était d'une politique sage de les laisser insensiblement rentrer dans leur patrie; et le moyen de les y rappeler était d'assurer de plus en plus la tranquillité intérieure du royaume; l'intérêt du l'intérêt du commerce, essentiellement attaché à la fortune des grands propriétaires, exigeait cette mesure de prudence, et le succès en était d'autant plus assuré qu'il est dans le cœur de tous les hommes de soupirer après la patrie qui les a vus naître; par là même, on les eût attachés au nouvel ordre de choses, et bientôt on eût vu la France reprendre son premier éclat. Quant aux prêtres, ils n'étaient point à craindre, aucune force n'était à leurs ordres, et si quelques-uns d'entre eux se rendirent coupables de quelques méfaits, il existait des lois pour les réprimer, des tribunaux pour en connaître, des juges pour prononcer les peines; mais la faction avait un autre but : bannir à jamais les émigrés pour isoler le trône, éloigner les prêtres pour écarter toute morale, pour anéantir toute religion; tel était le plan des factieux.

L'Assemblée, partant de ces principes, lança contre les émigrés un décret, j'ose dire, non moins in politique qu'injuste, auquel je crus devoir refuser ma sanction, et je ne fis en cela qu'user du droit que m'accordait la constitution; mais en même temps je crus devoir faire une proclamation à la fois persuasive et menaçante, pour faire rentrer chacun dans le devoir et l'obéissance à la loi. J'écrivis dans le même temps, et dans les mêmes principes, aux princes mes frères; mais toutes ces démarches de paix, qui contrariaient les vues particulières

de la faction, furent de nouveaux sujets de troubles. La suspension que j'avais opposée à l'exécution du décret sur les émigrés, fit mouvoir tous les ressorts de la malveillance, et, de ce moment, on mit tout en usage pour m'enlever cette seule prérogative que m'avait garantie la constitution.

L'hiver entier n'offrit que des dénonciations, des emprisonnemens, des déclamations, des persécutions de tout genre, des projets de révolution, de conjuration; le tout, pour impliquer ceux à qui on avait le projet de nuire, et pour multiplier le nombre des émigrés, sur la fortune desquels on avait déjà jeté d'avance un œil de convoitise.

Bientôt un autre épisode vint remplir la scène; on se rappelle parfaitement l'affaire de Nancy, la révolte du régiment de Château-Vieux, coupable d'indiscipline, et dont une partie avait été condamnée par le conseil de guerre à la peine des galères; on peut se rappeler aussi que, lors de l'amnistie générale du mois de septembre 1791, on avait voulu y faire comprendre les soldats de ce régiment, mais que par son décret du 30 du même mois l'Assemblée n'avait entendu comprendre dans l'amnistie que les citoyens détenus pour faits d'émeutes relatifs à la révolution, et non pour toute autre cause. Or, les soldats du régiment de ChâteauVieux n'étaient point condamnés pour faits de révolulion, mais pour faits d'indiscipline et de révolte à main armée; d'ailleurs, ils avaient été jugés par leur propre nation, et ils ne se trouvaient sur les galères de France qu'à titre d'emprunt de territoire et de prison.

D'après ces circonstances, les soldats de ChâteauVieux ne pouvaient être graciables aux yeux de la nation sous aucun aspect, et la nation suisse pouvait

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