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fon fabre, jufqu'à ce que le commandant soit sauvé : » Il vaut mieux, dit-il, qu'un cavalier périffe ou foit » fait prifonnier, que celui qui peut rétablir le com» bat. » Il fut, en effet, prisonnier lui-même.

19. Un chevalier Anglois propofa le duel à Caftelmorant, chevalier François. L'Anglois parut dans la lice, armé de toutes pièces, à la réserve des cuiffes & des jambes qu'il avoit découvertes, fous prétexte d'une incommodité au genou. Il invita le François à l'imiter, lui jurant qu'il ne frapperoit point fur ces endroits. Caftelmorant le crut; mais, au troifieme coup, il eut la cuiffe percée. Le comte de Buckingham fit conduire l'Anglois en prison, & propofa au François de le lui remettre, afin d'en tirer une forte rançon: « Je n'ai » point combattu, répondit Castelmorant, pour ga"gner de l'argent, mais pour acquérir de l'honneur. "Tout ce que je demande, c'est la liberté du prison»nier." A cette magnanime réponse, le Prince, pénétré d'admiration, envoya au généreux chevalier une coupe d'or & une fomme confidérable: Caftelmorant n'accepta que la coupe.

20.

François I l'emportoit fur Charles-Quint du côté de l'intrépidité; mais Charles-Quint étoit plus heureux que lui. François ne faifoit pas difficulté de l'avouer lui-même. Un parti François, s'étant déguifé fous des habits de payfans, pour paffer plus aifément en Piémont, au commencement de la guerre de 1535, fut découvert, & enlevé par les troupes de l'Emperear; & fous prétexte que ce parti n'avoit point été pris en habit militaire, ceux qui le compofoient, au lieu d'être traités en prifonniers de guerre, furent condamnés à fervir fur les galeres d'Efpagne. C'étoit donner au Roi un exemple dangereux; & la loi du Talion pouvoit paroître raifonnable à un Prince moins généreux que lui. Trois cens Allemands furent furpris pref qu'en même tems aux ifles d'Hières, où la tempête avoit jetté leur vaiffeau. Ils avoient fait voile de Gènes, pour rejoindre l'armée de Catalogne, que l'Empereur affembloit pour le fecours de Perpignan, affiégé par le Dauphin, Ces foldats furent traités en prifon

niers

niers de guerre ; & le Roi, à qui l'on remontroit qu'il ne tenoit qu'à lui de s'en venger, répondit: «Je n'ai » garde de le faire; je perdrois une occafion de vain. » cre en vertu Charles, qui je fuis obligé de céder

>> en fortune.»

21. Les ames les plus flétries par l'ignominie font quelquefois capables de nobles fentimens. Les galériens font enchaînés deux à deux Un de ces miférables, fort & vigoureux, reçut un coup de canne d'un officier pour quelque faute confidérable qu'il avoit commife. « Ah! s'écria le galérien furieux, je ne fur» vivrai pas à cet affront fanglant, puifque je ne puis » m'en venger." Auffi-tôt il s'élance dans la mer, entraîne fon camarade, & fe noie avec lui dans les flots.

22. Des huit généraux Athéniens qui avoient gagné la bataille d'Arginufes fur les Lacédémoniens, fix furent arrêtés fur des accufations injuftes, & condamnés à mort. Comme on les conduifoit au fupplice, l'un d'eux, appellé Diomédon, personnage d'une grande réputation pour fon courage & fa probité, demanda qu'on lui permit de parler. Quand on eût fait filence: »Athéniens, dit-il, je fouhaite que le jugement que >> vous venez de prononcer contre nous, ne tourne "point à la perte de la République. Mais j'ai une » grace à vous demander pour mes collégues & pour "moi, c'est de nous acquiter envers les Dieux des >> vœux que nous leur avons faits pour vous & pour >> nous & que nous fommes hors d'état d'accomplir; » car c'est à leur protection invoquée avant le com»bat, que nous reconnoiffons être redevables de la » victoire remportée fur les ennemis. » Il n'y eut point de bon citoyen qui ne fût attendri jufqu'aux larmes, par un difcours fi plein de douceur & de religion, & qui n'admirât avec surprise la modération magnanime de ces infortunées victimes de la calomnie.

23. Les Spartiates, commandés par Alcibiade, ayant vaincu les Athéniens, ce Général fut maudit par tous les prêtres & toutes les prêtreffes d'Athènes, à l'exception de la feule Théano, qui, méprifant les menaces de fes collégues, refufa conftamment de le faire, en D. d'Educ. T. II. G

difant qu'elle étoit obligée par état à prier les Dieux pour tout le monde, & non pas à donner des malédictions à qui que ce fût.

l'on

24. Un officier du régiment de Champagne demandoit, pour un coup de main, douze hommes de bonne volonté. Tout le corps refte immobile, & perfonne ne répond. Trois fois la même demande, & trois fois le même filence. « Eh! quoi, dit l'officier, » ne m'entend point? L'on vous entend, s'écrie une voix, mais qu'appellez-vous douze hommes de » bonne volonté ? Nous le fommes tous, vous n'avez » qu'à choisir. »

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25. Le maréchal d. Luxembourg, n'étant encore que comte de Bonttville, fervoit dans l'armée de Flandres, en 1675, fous le commandement du Prince de Condé. Il apperçoit, dans une marche, quelques foldats qui s'étoient écartés du gros de l'armée. Il envoya un de fes aides-de-camp pour les ramener au drapeau. Tous obéirent, excepté un feul, qui continua fon chemin. Le Comte, vivement offenfé d'une telle défobéiffance, court à lui, la canne à la main, & menace de l'en frapper. Le foldat lui répond avec fang froid, que, s'il exécutoit fa menace, il fçauroit bien l'en faire repentir. Outré de la réponse, Boutteville lui décharge quelques coups & le force de rejoindre fon corps. Quinze jours après, l'armée affiégea Furnes. Boutteville chargea le colonel de tranchée de lui trouver dans le régiment un homme ferme & intré pide, pour un coup de main dont il avoit befoin, avec cent piftoles de récompenfe. Le foldat en question, qui paffoit pour le plus brave du régiment, fe préfente; & menant avec lui trente de fes camarades, dont on lui avoit laiffé le choix, il s'acquitte de fa commiffion, qui étoit des plus hazardeufes, avec un courage & un bonheur incroyables. A fon retour, Boutreville, après l'avoir beaucoup loué, lui fit compter les cent piftoles qu'il lui avoit promifes. Le foldat, fur le champ les diftribua à fes camarades, difant qu'il ne fervoit point pour de l'argent, & demanda feulement, que, fi l'action qu'il venoit de faire méritoit quelque

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récompenfe, on le fit officier. Adreffant enfuite la parole au Comte, il lui demanda s'il le reconnoiffoit ? Sur la réponse de Boutteville, qui ne fe rappelloit pas de l'avoir jamais vu : « Eh bien! lui dit-il, je fuis le 99 foldat que vous maltraitâtes fi fort, il y a quinze jours; »je vous avois bien dit que je vous en ferois repentir.» Le comte de Boutteville, plein d'admiration, & attendri jufqu'aux larmes, l'embraffa, lui fit des excufes, & le nomma officier le même jour. Il fe l'attacha bientôt après, en qualité d'un de fes aides-de-camp. Le prince de Condé, grand eftimateur des belles actions, prenoit un plaifir fingulier à raconter ce trait de bravoure & de magnanimité. Voyez GÉNÉROSITÉ. GRANDEUR D'AME. HÉROÏSME.

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MAGNIFICENCE.

A naiffance de Ptolémée Philométor avoit répandu l'allégreffe dans toute l'Egypte. La Syrie fe diftingua entre toutes les provinces ; & les plus confidérables du pays allerent pour ce fujet en grand équipage à Alexandrie. Jofeph, qui étoit receveur général de ces provinces, trop âgé pour faire ce voyage, y envoya en fa place le plus jeune de fes fils, nommé Hyrcan, qui avoit beaucoup d'efprit & beaucoup d'agrément dans les manieres. Le Roi & la Reine le reçurent avec bienveillance, & le firent même manger à leur table. Dans un de ces repas, les convives, qui le méprifoient comme un jeune homme fans efprit & fans expérience, mirent devant lui les os des viandes qu'il avoient mangées. Un bouffon, qui faifoit rire le Roi fes bons mots, lui dit : « Vous voyez, Sire, » la quantité d'os qu'il y a devant Hyrcan, & vous "pouvez juger par-là de quelle maniere fon pere »ronge toute la Syrie. » Ces paroles firent rire le Roi, & il demanda à Hyrcan d'où venoit donc qu'il y avoit devant lui une fi grande quantité d'os?« Sire, lui ré»pondit-il, faut-il s'en étonner? Les chiens mangent » les os avec la chair, comme vous voyez qu'ont fait

par

» ceux qui font à la table de Votre Majesté; mais les » hommes fe contentent de manger la chair, & laif» fent les os, comme j'ai fait. » Les moqueurs pour lors furent moqués, & demeurerent muets & confus. Quand le jour où l'on devoit faire les préfens fut arrivé, comme Hyrcan avoit répandu le bruit qu'il n'avoit que cinq talens à offrir, on s'attendoit qu'il feroit fort mal reçu du Roi, & l'on s'en faifoit un plaisir par avance. Les plus grands préfens que firent tous les autres ne monterent pas à plus de vingt talens. Mais Hyrcan offrit au Prince cent jeunes garçons, bien faits & fuperbement vêtus, qui lui présenterent chacun un talent; & à la Reine cent jeunes filles très-bien-parées, dont chacune fit auffi un pareil préfent à cette Princeffe. Toute la cour fut extraordinairement étonnée d'une fi grande magnificence. Le Roi & la Reine renvoyerent Hyrcan, comblé de marques de bonté & d'amitié. Il les méritoit bien par fes riches offrandes.

2. Amrou, prince d'Orient, étoit fi magnifique, qu'il falloit trois cens chameaux pour porter feulement l'attirail de fa cuifine, lorfqu'il alloit en campagne. Ayant été arrêté prifonnier par Ifmaël, il vit près de lui le chef de fa cuifine, qui ne l'avoit pas abandonné, & lui demanda s'il n'avoit rien à lui donner pour manger. Le cuifinier, qui avoit un peu de viande, la mit auffi-tôt dans une marmite, & alla chercher quelqu'autre chose pour régaler fon maître dans fa difgrace le mieux qu'il pourroit; mais il ne fut pas plutôt parti, qu'un chien vint là par hazard, & mit la tête dans la marmite pour prendre la viande. En relevant la tête, l'anfe lui tomba fur le cou; & ne pouvant fe dégager, il prit la fuite & emporta la marmite. A ce fpectacle, Amrou ne put s'empêcher de rire de tout fon coeur, malgré fon infortune, & dit à un officier, furpris de cette joie déplacée : « Ce matin trois cens chameaux » ne fuffifoient pas pour le tranfport de ma cuifine, & » maintenant un chien n'a pas de peine à l'emporter. »

3. Un marchand d'Anvers, nommé Jean Déans, ayant prêté quelques millions d'or à l'empereur Char

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