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d'Archidame, ayant remporté dans un combat contre les Argiens un très-grand avantage, les vaincus fe rallierent & revinrent à la charge. Ön étoit fur le point de s'attaquer de part & d'autre, lorsque le Monarque vit quelques-uns des Alliés fe troubler: cette crainte pouvoit fe communiquer, & devenir dangereufe : « Ca

marades, leur dit-il, ayez bon courage; fi nous trem. » blons, nous qui fommes vainqueurs, que feront donc » ceux que nous avons vaincus? » Ces paroles adroites affurerent les efprits; & les Spartiates acheverent de moiffonner les lauriers qu'ils avoient commencé de

cueillir.

10. Le magafin à poudre des Espagnols, comman dés par Gonfalve, leur capitaine, fauta, dès les premieres charges, à la bataille de Cérignoles. Le Général, qui fentit que ce hazard malheureux pouvoit avoir des fuites funeftes, eut affez de présence d'efprit pour en tirer un augure favorable. « Enfans, dit-il à fes fol» dats, la victoire eft à nous: le Ciel nous annonce, » par ce figne éclatant, que nous n'aurons plus befoin » d'artillerie. » La noble affurance dont il accompagna ce difcours perfuada tous les efprits, & lui fit rempor ter la victoire.

11. Alexandre le Grand avoit résolu de détruire Lampfaque, dont les habitans avoient ofé fe mefurer avec lui. Mais, quand il fut près de cette ville, il vit venir à lui le philofophe Anaximène, qu'il eftimoit beaucoup, parce qu'il l'avoit eu pour maître dans fes études. Ne pouvant douter qu'il ne vînt oppofer fes prieres à la colere qui le transportoit, il jura qu'il ne feroit point ce que lui demanderoit le philofophe. » Seigneur, lui dit auffi-tôt Anaximène ; je demande » que vous détruifiez Lampfaque. » La présence d'ef prit de ce fçavant homme fauva cette illuftre cité de la ruine à laquelle elle avoit paru condamnée.

12. Un officier des Moufquetaires, à la tête d'une brigade de fa compagnie, étoit à Paris dans une grande place, chargé d'appaifer le foulevement que la cherté du pain caufoit parmi le peuple, en 1709. Il vouloit nettoyer la place des mutins qui la rempliffoient; il

dit à fa troupe : « Tirez fur la canaille; mais épargnez les honnêtes gens. »Ces mots furent entendus de tout le monde. Perfonne ne voulut être compris dans la canaille; & la fédition s'appaifa dans le moment.

13. François I jouoit, un jour, à la paume avec un moine très-adroit à ce jeu. Il arriva que le moine fit un coup de raquette qui décida la partie. « Voilà, dit >> le Roi, un vrai coup de moine. Sire, répondit le » bon pere, il ne tient qu'à Votre Majefté que ce ne » foit un coup d'abbé. » Le Monarque ne tarda pas à récompenser cette réponse.

14. Le cardinal de Richelieu s'amufoit volontiers à de petits jeux d'exercice, pour se délaffer des pénibles travaux de fon cabinet. M. de Grammont le furprit, un jour que, tout feul en vefte, il s'exerçoit à fauter contre un mur. Un courtisan, moins délié que lui, eût été, fans doute, embarraffé de se trouver avec un miniftre du caractère de Richelieu, témoin d'une occupation fi contraire au férieux de fa dignité. Mais il s'en tira en homme d'efprit : « Je parie, dit-il au cardinal, » que je faute auffi-bien que Votre Eminence. » Auffitôt, quittant fon habit, il fe mit à fauter avec le Miniftre. Ce trait d'adreffe fit fa fortune, & contribua beau coup à fon avancement.

15. Louis XIV, au retour de la chaffe, étoit venu dans une espece d'incognitò, voir la comédie Italienne, qui fe donnoit au château. Dominique, fameux arlequin de ce théatre, y jouoit. Mais, malgré les talens fupérieurs de ce comédien célèbre, la piéce parut infipide. Le Roi lui dit en fortant: « Dominique, voilà une mauvaise piéce. Dites cela tout bas, je vous » prie, interrompit l'acteur; car, si le Roi le fçavoit, il » me congédieroit avec ma troupe. » Cette réponse, faite fur le champ, fit admirer la présence d'esprit de Dominique.

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16. Un payfan eut le malheur que fa vache fut tuée par le taureau du feigneur de fon village. Il jugea bien qu'il n'en auroit pas aifément fatisfaction. Il vint trouver ce feigneur, qui étoit dans une maifon de fes amis, & lui dit que fa vaches avoit tué fon taureau. « La loi

» veut, s'écria le feigneur, que la vache appartienne » au maître du taureau qui a été tué. » Le villageois difputa fur cette peine; mais le feigneur n'en voulur pas démordre. Alors le payfan lui dit : « Monfeigneur, » il faut tourner la médaille : c'est votre taureau qui a » tué ma vache; palfangué! vous vous êtes jugé, vous » n'en rappellerez pas. » Le feigneur fut obligé de fe conformer à la fentence qu'il avoit prononcée lui

même.

17. Le roi Dagobert se disposoit à monter fur fon char ou chariot, quand il apperçut un de ces poëtes qui faifoient confifter le mérite de la poëfie à faire des vers fur le champ. Le Monarque lui promit les deux boeufs attelés à fa voiture, fi, avant qu'il n'y fût monté, il avoit peint en vers l'action qu'il lui voyoit faire. Le poëte dit auffi-tôt:

Afcendat Dagobert; veniat bos unus & alter.

C'eft-à-dire : « Que Dagobert monte, & que les deux » bœufs me viennent.» Le Prince, charmé de cette faillie, tint fur le champ fa promeffe.

18. Un officier Gafcon, étant à l'armée, parloit affez haut à un de fes camarades. Comme il le quittoit, il lui dit d'un ton important: « Je vais dîner chez Vil»lars. » Le maréchal de Villars, fe trouvant derriere 'cet officier, lui dit avec bonté : « A cause de mon rang » de Général, & non à caufe de moi, dites Monfieur » de Villars. » Le Gafcon, qui ne croyoit pas être fi près du Général, lui répondit, fans être étonné: « Ca

dédis! on ne dit point Monfieur de Céfar, j'ai cru » qu'on ne devoit pas dire, Monfieur de Villars. » (Voyez ADRESSE D'ESPRIT.)

CE

PRÉVOYANCE.

E fut à la fage prévoyance de Thémistocle, que la Grèce dut fon falut, lorfque Xerxès, fuivi de toutes les forces de l'Afie, vint menacer d'un joug

odieux

dieux cette contrée célèbre. C'en étoit fait de fa li berté, fi les Athéniens & les Lacédémoniens n'avoient eu que leurs troupes de terre à oppofer au Monarque Perlan. On fentit alors tout le prix des prudentes mefures de Thémiftocle, qui, fous un autre prétexte, avoit fait bâtir cent galeres. Tout le monde avoit regardé la célèbre journée de Marathon, comme la fin de la guerre. Thémistocle, au contraire, la regarda comme le fignal des plus grands combats, auxquels il devoit préparer fon peuple; & dès-lors il fongea à rendre fa patrie fupérieure à Lacédémone, qui, depuis long-tems, dominoit fur toute la Grèce. Dans cette vue, il crut devoir tourner toutes les forces d'Athènes du côté de la mer, voyant bien que, foible par terre, comme elle étoit, elle n'avoit que ce feul moyen de fe rendre néceffaire aux Alliés, & formidable aux ennemis. Son avis paffa, malgré les efforts de Miltiade, arrêté fans doute par le peu d'apparence qu'il y avoit qu'un peuple tout neuf aux combats de mer, & qui n'étoit en état d'armer que de petits vaiffeaux, pût résister à une puissance auffi redoutable que celle desPerfes, qui, avec une flotte de plus de mille vaiffeaux, avoient encore une nombreuse armée de terre.

Les Athéniens avoient coutume de diftribuer entr'eux tous les revenus qu'ils tiroient des mines d'argent. Thémistocle eut le courage de propofer au peuple d'abolir ces diftributions, & d'employer cet argent à conftruire des vaisseaux à trois rangs de rames, pour faire la guerre aux Eginètes, contre lefquels il réveilla leur ancienne jaloufie. Le peuple ne facrifie pas volontiers fes intérêts particuliers à l'utilité publique, & n'aime pas à acheter le bien de l'Etat par fes propres pertes. Il le fit pourtant en cette occafion; &, touché par les vives remontrances de Thémistocle, il consentit que l'argent, qui revenoit des mines, fût employé à bâtir cent galères. On doubla ce nombre à l'arrivée de Xerxès; & ce fut cette flotte qui fauva la Grèce.

2. Arlotto, curé Italien, s'embarquant pour un voyage, fut prié par plufieurs de fes amis de leur faire diverfes emplettes au pays où il alloit : ils lui en don D. d'Educ. T. II. T

nerent des mémoires; mais il n'y en eut qu'un qui s'a vifa d'y joindre l'argent néceffaire pour payer ce qu'il demandoit. Le cure employa cet argent de fon ami conformément à fon mémoire, & n'acheta rien pour les autres. Lorfqu'il fut de retour, ils vinrent tous chez lui pour y recevoir leurs emplettes, & Arlotto lear dit: "Meffieurs, lorfque je fus embarqué, je mis tous vos » mémoires fur le pont de la galere, à deffein de les

ranger par ordre; mais il s'éleva un vent qui les » emporta tous dans la mer, ainfi je n'ai pu me fouve"nir de ce qu'ils contenoient. » Cependant, lui dit un d'entr'eux, vous avez apporté des étoffes à un tel. » Il est vrai, repliqua le curé; mais c'eft qu'il avoit » enveloppé dans fon mémoire un bon nombre de du» cats dont le poids empêcha le vent de l'emporter avec >>> les autres.

3. Jean V, duc Bretagne, étoit ennemi mortel d'Olivier de Cliffon; &, voyant qu'il ne pouvoit nuire à ce guerrier par la force, il eut recours à la trahison & à l'artifice. Il feignit de fe réconcilier avec lui; il l'invita à venir à fa cour, & le reçut avec les démonftrations de la plus fincere amitié. Un jour, à la fin d'un repas magnifique qu'il lui avoit donné, il le pria de venir voir un château qu'il faifoit bâtir. Cliffon, trompé par les politeffes du Duc, & ne fe défiant de rien, y confentit volontiers. Lorfqu'ils eurent vifité les appartemens, le Prince propofa à Cliffon de monter dans la maîtreffe-tour du château, lui difant qu'il vouloit fçavoir ce que penfoit de fa force le plus habile homme du royaume en matiere de fortifications. Cliffon y monta; mais des gens armés, qui fe tenoient en embufcade dans une chambre, fe jettent tout-à-coup fur lui, & l'arrêtent. Cliffon fe défendit comme un lion; mais fes efforts furent inutiles. On le traîna dans une chambre, où les gens du Duc lui mirent trois paires de fers aux pieds. Le Duc, voyant fon ennemi en fa puiffance, fe hâta de fatisfaire fon reffentiment. Il appella un de fes plus fidèles officiers, homme fage & prudent, nommé Jean de Bazvalen, & lui ordonna de faire mourir Cliffon, fur le minuit, le plus fecrettement qu'il feroit poffible. Bazvalen promit d'exécuter

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