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aqui m'ont frappé dans le procès, je foupçonne forte»ment la perfonne qui a vu le revenant, d'être le meur»trier; auquel cas, il n'eft pas difficile de concevoir

qu'il ait pu défigner la place des blessures, la mar»niere, & le refte, fans aucun secours naturel. En con» féquence de ces foupçons, je me crois en droit de le » faire arrêter, jufqu'à ce qu'on faffe de plus amples » informations. » Cet homme fut effectivement arrêté: on donna un ordre pour faire des perquifitions dans fa maison. On trouva des preuves de fon crime, qu'il avoua lui-même à la fin; & il fut exécuté aux assises fuivantes.

4. Un voyageur Espagnol avoit rencontré un Indien au milieu d'un défert. Ils étoient tous deux à cheval. L'Efpagnol, qui craignoit que le fien ne fût faire sa route, parce qu'il étoit très-mauvais, demanda à l'Indien, qui en avoit un jeune & vigoureux, de faire un échange celui-ci le réfufa. L'Espagnol lui cherche une mauvaise querelle : ils en viennent aux mains; & l'aggreffeur, bien armé, fe faifit facilement du cheval qu'il defiroit, & continue fa route. L'Indien le suit jusques dans la ville la plus prochaine, & va porter les plaintes au juge. L'Espagnol eft obligé de comparoitre & d'amener le cheval. Il traite, l'Indien de fourbe, assurant que le cheval lui appartient, & qu'il l'a élevé tout jeune. Il n'y avoit point de preuves du contraire; & le juge indécis alloit renvoyer les plaideurs hors de cour & de procès, lorsque l'Indien s'écria : « Le cheval eft à moi! » & je le prouve ! » Il ôte auffi-tôt fon manteau, & en couvre fubitement la tête de l'animal; &, s'adreffant au juge: « Puifque cet homme, dit-il, affure avoir élevé »ce cheval, commandez-lui de dire duquel des deux "yeux il eft borgne. » L'Espagnol ne veut point pa» roître hésiter, & répond à l'inftant: «De l'œil droit.» Alors l'Indien découvrant la tête du cheval: « Il n'est borgne, dit-il, ni de l'œil droit, ni de l'oeil gauche. » Le juge, convaincu par une preuve fi ingénieuse & fi forte, lui adjugea le cheval, & l'affaire fut terminée.

5. Un feigneur très-riche donna tout fon bien, par reftament, à des religieux Bénédictins. Il avoit marqué

expreffément qu'ils ne donneroient à fes enfans que ce qu'il leur plairoit. Dès qu'il fut mort, le Couvent s'em para de tout le bien. Les pauvres enfans du défunt s'adrefferent au duc d'Offone, viceroi de Naples, & le prierent de leur faire accorder quelque chofe. Ce Seigneur, touché de leur infortune, fit venir les Bénédictins, & leur demanda ce qu'ils vouloient donner à ces enfans? Les bons peres lui répondirent : « Huit mille » livres. --- }) Et que vaut le bien que vous retenez ? » répliqua le Duc. Les Bénédictins répondirent qu'il pouvoit valoir environ cent mille francs. «Mes peres,dit alors le Duc,» il faut fuivre l'intention du reftateur, qui a été, » que fes enfans auroient ce qu'il vous plairoit; &, par » conféquent, il faut leur remettre ces cent mille francs; » car je vois qu'ils vous plaifent beaucoup. » Les moines voulurent répliquer; mais le Duc, fans les écouter, fit exécuter fur le champ fa fentence.

6. Une mere refufoit de reconnoître fon fils qui revenoit, fort changé, d'un long voyage. Toutes les informations faites, la chose reftoit encore douteuse. Enfin l'affaire fut portée devant le tribunal de l'empereur Claude, qui, ne pouvant appercevoir la vérité au travers des nuages dont la paffion l'avoit envelopée, eut recours à cet expédient pour la découvrir : il ordonna à cette femme de prendre pour époux celui qu'elle ne vouloit pas reconnoître pour fon fils. Cet arrêt fut un coup de foudre, & la mere, jufques-là fi opiniâtre, avouant tout-à-coup la vérité, céda à l'horreur d'un tel inceste.

7. Un Espagnol, étant en procès pour une jeune efclave qu'il avoit à son service, demanda que fon affaire fut décidée par l'autorité d'Alphonse V, roi d'Arragon, qui ne faifoit que de commencer de régner. Voici ce dont il s'agiffoit. Les loix en Espagne accordent la liberté aux femmes esclaves qui auront eu des enfans de leurs maîtres. En vertu de cette loi, l'esclave de l'Espagnol demandoit à être déclarée libre, prétendant avoir eu un enfant de fon maître; mais, comme le maître craignoit beaucoup de perdre fon efclave, il affuroit toujours qu'il n'avoit jamais eu avec elle aucun commerce,

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& que l'enfant n'étoit point à lui. Celle-ci, cependant, affirmoit le contraire. Dans cet embarras, Alphonfe décida, comme Salomon, que l'enfant feroit vendu publiquement fur la place, & adjugé au plus offrant, Le jugement étoit fur le point de s'exécuter, lorfque le pere, fentant tout-à-coup réveiller fa tendreffe, ne put retenir les larmes, & réclama l'enfant. Alphonse, fur le champ, le lui fit rendre, &, en même tems, déclara que T'efclave étoit libre.

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8. Deux dames de qualité étant en difpute pour le pas dans une églife, l'empereur Charles-Quint évoqua cette affaire à fon tribunal. Après s'être fait expliquer les raifons, de part & d'autre : « Que la plus folle des » deux paffe la premierè, dit-il. » Ce jugement termina les ridicules prétentions des deux rivales, qui ne s'aviferent plus de difputer fur le pas.

9. Une jeune fille de Boulogne en Italie ayant demandé, en justice, la réparation des violences qu'un jeune homme avoit exercées contre elle, & celui-ci traitant l'accufation d'impofture, on ne laiffa point de le condamner à une amende confidérable, parce que la plainte devoit prévaloir sur la juftification de l'accufé, qui fe contentoit de nier le fait. La fomme fut comptée en pleine audience, & mife entre les mains de la fille, qui la ferra fort foigneufement, & même avec joie. Un moment après, le magiftrat permit au garçon de la lui enlever de force, s'il le pouvoit. Ses efforts furent inu❤ tiles; & la fille fut amenée devant le juge, auquel elle alloit fe plaindre de ce que le condamné vouloit lui ravir fon argent: « Vous l'a-t-il pris, demanda le juge? » Non vraiment, répondit-elle ; &, tant que je refpi"rerai, il ne le prendra jamais. --- Ma fille, reprit le » juge, je vous condamne maintenant à le rendre : fi » vous euffiez gardé votre honneur avec autant de foin, » jamais on ne vous l'eût ravi. Allez, & que cette le»çon vous rende fage à l'avenir. »

10. Un riche marchand de Nuremberg vint, un jours fe plaindre à l'empereur Rodolphe I, qu'ayant donné à garder à fon hôte fasbourfe, où il y avoit environ cent florins, &, l'ayant voulu retirer, l'hôte avoit nie D. d'Educ. T. II. C

le dépôt, parce qu'il n'y avoit pas de témoins. Cet hôte étoit riche, un des premiers de la ville, & ne pou voit être aifément convaincu. L'occafion feule étoit capable de le confondre. Un jour que les députés de Nuremberg fe préfenterent à l'audience de l'Empereur, Rodolphe reconnut l'hôte parmi eux. Il s'approche de lui; &, examinant fa parure: « Vous avez, lui dit-il, » un affez beau chapeau; troquons. » L'hôte, avec joie, préfente auffi-tôt fon chapeau, & reçoit celui de l'Empereur. Rodolphe fort de la falle, fous quelque prétexte, & ordonne à un bourgeois qu'il rencontre d'aller, de la part de l'hôte, demander à fa femme la bourse où étoit le dépôt que le marchand avoit défigné, & de lui montrer le chapeau, pour preuve de sa mission. L'hôteffe, à ce figne, remet la bourfe au bourgeois, qui la rapporte à l'Empereur. Il rentre dans la falle avec le marchand qu'il avoit fait appeller, & fait de nouveau plaider la cause à fon tribunal. L'hôte infidèle affirme encore, avec ferment, qu'il n'a point la bourse. Rodolphe indigné la lui préfente; la remet au marchand, & condamne l'hôte à une groffe amende.

11. Un marchand avoit perdu une bourfe remplie d'une fomme confidérable, & d'un bon nombre de pierreries; &, pour la retrouver plus facilement, il fit publier qu'il en donneroit la moitié à celui qui la lui гарporteroit. Un Mahometan, qui l'avoit trouvée, la lui porta; mais il ne voulut lui rien donner, difant que le tout n'y étoit pas. L'affaire alla jufqu'à Octaï-Khan empereur des Tartares, qui voulut en prendre connoiffance. Le Mahométan jura que la bourfe étoit en fon entier, & qu'il n'en avoit rien pris ; & le marchand foutint, par ferment, qu'il y avoit plus d'argent & plus de pierreries. Octaï-Khan prononça, & dit au Mahométan: « Emportez la bourse, & gardez-la jufqu'à ce que » celui à qui elle appartient vienne vous la demander. » Pour le marchand, qu'il aille chercher ailleurs ce qu'il » a perdu, car, de fon propre aveu, la bourse n'est pas » à lui. »ave

12. Un marchand Chrétien ayant confié àunchamelier Turc un certain nombre de balles de foie, pour les voi

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turer d'Alep à Conftantinople, fe mit en chemin avec lui; mais, au milieu de la route, il tomba malade, & ne put fuivre la caravanne, qui arriva long-tems avant lui. Le chamelier, ne voyant point venir fon homme, au bout de quelques femaines, s'imagina qu'il étoit mort; vendit les foies, & changea de profeffion. Le marchand Chrétien arriva enfin, le trouva, après avoir perdu bien du tems à le chercher, & lui demanda fes marchandifes. Le fourbe feignit de ne le pas connoître, & nia d'avoir jamais été chamelier. Le Cadi, devant lequel cette affaire fut portée, dit au Chrétien: « Que » demandes-tu ? --- Vingt balles de foie, répondit-il, » que j'ai remises à cet homme. Que réponds-tu à » cela', dit le Cadi au chamelier? Je ne fçais ce qu'il » veut dire avec ses balles de foie & fes chameaux; je » ne l'ai jamais ni vu ni connu. » Alors le Cadi, fe tournant vers le Chrétien, lui demanda quelle preuve il pourroit donner de ce qu'il avançoit. Le marchand n'en put donner d'autre, finon que la maladie l'avoit empêché de fuivre le chamelier. Le Cadi leur dit à tous deux qu'ils étoient des bêtes, & qu'ils fe retiraffent de fa préfence. Il leur tourna le dos; &, pendant qu'ils fortoient ensemble, il fe mit à une fenêtre & cria affez haut: «Chamelier, un mot. » Le Turc auffitôt tourna la tête, fans fonger qu'il venoit d'abjurer cette profeffion. Alors le Cadi, l'obligeant de revenir fur fes pas, lui fit donner la bastonnade, & avouer fa fripponnerie. It le condamna à payer au Chrétien fa foie, &, de plus, une amende confidérable, pour le faux-ferment qu'il avoit fait.

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13. Un Turc prêta cent écus à un Chrétien, à condition que, s'il ne lui rendoit cette fomme dans un tems qu'il fixa, il lui pourroit couper deux onces de chair. Le Chrétien, au terme expiré, ne put pas payer. Le Turc, plein de colère, vouloit exécuter la peine convenue; & le Chrétien s'efforçoit de s'en affranchir. Ils furent traduits tous deux devant Amurat I, qui effaya d'abord de concilier le débiteur avec le créancier ; mais l'inflexible Turc ne voulut rien accorder. Alors le Grand-Seigneur, pour le punir de fan inhumaine obfti

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